Afleveringen

  • 1. Introduction

    Dans cet épisode, Michel Onfray explore la figure de Saint-Évremond sous l’angle de la désinvolture, un trait qui traverse son œuvre et sa pensée. Cette approche baroque, marquée par le détachement et l'ironie, révèle un philosophe qui se tient à distance des dogmes tout en s’engageant dans une critique subtile de ses contemporains.

    2. Saint-Évremond et la désinvolture comme posture philosophique

    Un esprit libre et détaché

    Saint-Évremond cultive la désinvolture dans son rapport à la philosophie et à la vie. Il n’a jamais cherché à constituer une œuvre systématique et rejette l’idée même d’un corpus figé. Sa pensée se construit dans les salons, les lettres, et les conversations, favorisant les échanges légers mais profonds.

    La désinvolture comme critique implicite

    Sa posture désinvolte lui permet de critiquer subtilement les dogmes religieux et philosophiques. Par l’ironie et le jeu, il remet en question les certitudes tout en préservant une forme de légèreté, s’inscrivant dans la tradition des sceptiques comme Montaigne ou Lucien de Samosate.

    3. Les rencontres philosophiques : entre désinvolture et profondeur

    Rencontre avec Spinoza

    Saint-Évremond rencontre Spinoza à La Haye, mais cette rencontre reste superficielle. Bien que Spinoza lui confie des idées clés sur son panthéisme, Saint-Évremond ne semble pas saisir la portée de ces propos. Cette désinvolture l’amène à passer à côté d’un échange philosophique profond.

    Rencontre avec Hobbes

    Lors de sa rencontre avec Thomas Hobbes, auteur du Léviathan, Saint-Évremond loue son génie mais critique ses "excès" sans jamais préciser lesquels. Sa posture ironique et détachée limite la profondeur de leur échange, bien qu’il reconnaisse l’importance des idées de Hobbes sur le contrat social.

    Rencontre avec Gassendi

    Avec Pierre Gassendi, Saint-Évremond trouve un interlocuteur plus proche de sa sensibilité épicurienne. Il admire Gassendi pour sa modestie et son érudition, le décrivant comme "le plus éclairé des philosophes et le moins présomptueux". Cependant, même ici, sa désinvolture empêche un véritable approfondissement des idées.

    4. La critique des systèmes philosophiques

    Rejet des grands systèmes

    Saint-Évremond se méfie des grands systèmes philosophiques, qu’il considère comme trop rigides et déconnectés de la réalité. Il préfère les pensées fragmentaires, les aphorismes, et les réflexions éparses, qui laissent place à la complexité du réel.

    L’ironie face aux dogmes

    Sa critique de Descartes illustre parfaitement cette posture. Plutôt que de s’engager dans une réfutation sérieuse, il tourne en dérision le cogito avec un "j’aime donc je suis", soulignant l’aspect trop abstrait et déconnecté des grandes constructions métaphysiques.

    5. L’épicurisme désinvolte

    Un épicurisme revisité

    Saint-Évremond adopte un épicurisme teinté de scepticisme. Il valorise les plaisirs simples et immédiats tout en restant prudent face aux excès. Son hédonisme désinvolte s’incarne dans l’idée qu'il vaut mieux jouir du monde que de chercher à le comprendre pleinement.

    La mort et la philosophie de l’instant

    Fidèle à l’épicurisme, il considère la mort comme un non-événement. La vie doit être vécue pleinement sans crainte de la fin. Son détachement face à la mort et sa critique du culte stoïcien de la belle mort s’inscrivent dans cette philosophie de l’instant et du plaisir mesuré.

    💡 Conclusion

    Michel Onfray dévoile dans cet épisode la richesse d’une philosophie désinvolte, où la légèreté cache une profonde critique des dogmes et des systèmes rigides. Saint-Évremond incarne un esprit libre, sceptique et épicurien, pour qui la véritable sagesse consiste à jouir du monde plutôt qu’à prétendre le comprendre totalement.

    📚 Philosophes mentionnés

    * Épicure (341 av. J.-C. – 270 av. J.-C.) — Fondateur de l’épicurisme.

    * Lucien de Samosate (env. 125 – env. 180) — Satiriste grec, critique des dogmes philosophiques.

    * Michel de Montaigne (1533 – 1592) — Philosophe humaniste et sceptique.

    * Thomas Hobbes (1588 – 1679) — Philosophe politique matérialiste.

    * Pierre Gassendi (1592 – 1655) — Philosophe épicurien et matérialiste.

    * René Descartes (1596 – 1650) — Philosophe rationaliste.Charles de Saint-Évremond

    * Baruch Spinoza (1632 – 1677) — Philosophe rationaliste et panthéiste.

    * Gilles Deleuze (1925 – 1995) — Philosophe français, auteur du Pli. Leibniz et le baroque.

    * Friedrich Nietzsche (1844 – 1900) — Philosophe allemand, critique des systèmes métaphysiques.

    Crédits : Michel Onfray et la Contre-histoire de la philosophie



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  • 1. Introduction

    Dans cet épisode, Michel Onfray s'intéresse à Charles de Saint-Évremond, une figure singulière du XVIIe siècle souvent méconnue et marginalisée. Il explore sa pensée libertine, son approche épicurienne et sceptique, ainsi que le concept du « pli », emprunté à Deleuze, pour analyser la complexité et les multiples facettes de cet auteur baroque.

    2. Un personnage aux multiples facettes

    Le guerrier-philosophe

    Saint-Évremond incarne un oxymore vivant : il est à la fois militaire et philosophe. Il participe activement aux campagnes militaires tout en cultivant un esprit critique et libertin. Cette dualité révèle un pliage entre l’action et la réflexion, le champ de bataille et le salon littéraire.

    Le moraliste libertin

    Saint-Évremond adopte une posture libertine, à la fois critique des dogmes religieux et des conventions sociales. Il observe le monde avec un regard ironique et sceptique, s’inscrivant dans la lignée des moralistes tout en conservant une certaine légèreté dans son approche.

    3. Le concept du pli : une lecture deleuzienne

    Les plis de l’âme

    Michel Onfray utilise la métaphore du pli, empruntée à Deleuze, pour analyser Saint-Évremond. Le pli représente ici les multiples couches de l’âme humaine, ses contradictions et ses complexités. Saint-Évremond explore ces replis intérieurs, oscillant entre raison et passion, vertu et plaisir.

    Le clair-obscur baroque

    Saint-Évremond est une figure baroque par excellence, évoluant dans un monde de clair-obscur où les certitudes s’effacent au profit des ambiguïtés. Son écriture reflète cette esthétique, jouant sur les contrastes et les nuances, sans jamais s’enfermer dans un système rigide.

    4. Un épicurisme sceptique et modéré

    La quête du plaisir mesuré

    Saint-Évremond reprend l’épicurisme en le réadaptant au XVIIe siècle. Il prône un hédonisme modéré, valorisant les plaisirs simples et la recherche de l’ataraxie, tout en se méfiant des excès et des passions destructrices.

    Le scepticisme bienveillant

    Son scepticisme n’est pas radical mais empreint de bienveillance. Il doute des vérités absolues tout en cultivant la tolérance et la curiosité. Ce scepticisme tempéré lui permet de naviguer entre les dogmes religieux et les idéologies politiques sans jamais s’y soumettre complètement.

    5. La conversation et l’aphorisme

    L’art de la conversation

    Saint-Évremond excelle dans l’art de la conversation, un exercice intellectuel prisé dans les salons mondains du XVIIe siècle. Il privilégie l’échange d’idées, la légèreté du ton et la finesse d’esprit, créant ainsi un espace de liberté et de réflexion critique.

    L’écriture fragmentaire et l’aphorisme

    Son œuvre se caractérise par une écriture fragmentaire, souvent sous forme d’aphorismes et de lettres. Ces formes courtes et percutantes permettent de condenser sa pensée tout en conservant une certaine fluidité et légèreté stylistique.

    💡 Conclusion

    Michel Onfray réhabilite la figure de Saint-Évremond, dévoilant un penseur subtil et complexe, maître dans l’art du pli et du clair-obscur. Par son scepticisme bienveillant, son épicurisme modéré et son goût pour la conversation, Saint-Évremond incarne une philosophie libertine empreinte de légèreté et de profondeur.

    📚 Philosophes mentionnés

    * Platon (env. 428 av. J.-C. – 348 av. J.-C.) — Philosophe idéaliste grec.

    * Aristote (384 av. J.-C. – 322 av. J.-C.) — Philosophe grec scolastique.

    * Épicure (341 av. J.-C. – 270 av. J.-C.) — Fondateur de l’épicurisme.

    * Michel de Montaigne (1533 – 1592) — Philosophe humaniste et sceptique.

    * Pierre Charron (1541 – 1603) — Philosophe sceptique et précurseur de la laïcité.

    * François La Mothe Le Vayer (1588 – 1672) — Philosophe sceptique et libertin érudit.

    * René Descartes (1596 – 1650) — Philosophe rationaliste.

    * Charles de Saint-Évremond (1613 – 1703) — Écrivain, moraliste et critique français, célèbre pour ses satires et son esprit épicurien.

    * Baruch Spinoza (1632 – 1677) — Philosophe rationaliste et panthéiste.

    * Gilles Deleuze (1925 – 1995) — Philosophe français, auteur du Pli. Leibniz et le baroque.

    * Friedrich Nietzsche (1844 – 1900) — Philosophe allemand, auteur de La Naissance de la tragédie.

    Crédits : Michel Onfray et la Contre-histoire de la philosophie



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  • 1. Introduction

    Dans cet épisode, Michel Onfray se penche sur la philosophie de François La Mothe Le Vayer et son approche singulière du scepticisme alliée à une éthique hédoniste. Il explore comment le scepticisme peut mener à une quête du bonheur tout en cultivant la suspension du jugement et en refusant les certitudes absolues.

    2. François La Mothe Le Vayer : portrait d’un sceptique

    Biographie et contexte

    François La Mothe Le Vayer (1588–1672) fut avocat, académicien et précepteur du futur Louis XIV. Son œuvre se caractérise par une approche sceptique inspirée du pyrrhonisme et marquée par l’ironie et la discrétion.

    L'usage du clair-obscur

    La Mothe Le Vayer adopte une méthode de dissimulation intellectuelle. Il pratique un clair-obscur philosophique, dissimulant ses idées les plus subversives derrière des jeux d'ombres et de lumières conceptuels, permettant d'échapper à la censure tout en exprimant ses doutes profonds.

    3. Le scepticisme comme méthode de vie

    Suspension du jugement (épochè)

    Influencé par le pyrrhonisme, La Mothe Le Vayer prône la suspension du jugement pour atteindre la tranquillité de l'âme (ataraxie). En doutant de tout, il refuse les dogmes et privilégie le vraisemblable plutôt que le vrai absolu.

    Le vraisemblable contre le dogmatisme

    La Mothe Le Vayer critique l'idée d'une vérité universelle et éternelle. Il propose de s'en tenir au vraisemblable, une notion relative et soumise aux contextes historiques et culturels.

    4. L’hédonisme sceptique : une quête de la tranquillité

    La recherche de l’ataraxie

    Malgré son scepticisme, La Mothe Le Vayer ne prône pas l'inaction. Il cherche à atteindre l'ataraxie, un état de sérénité et d'absence de trouble, similaire à celui recherché par les épicuriens.

    Jouir sans s’attacher

    Son hédonisme sceptique repose sur l'idée de jouir des plaisirs simples sans s'attacher à eux, évitant ainsi les souffrances liées aux passions excessives. C’est un plaisir mesuré et prudent.

    5. Une critique subtile des dogmes religieux et sociaux

    Un chrétien sceptique ?

    La Mothe Le Vayer adopte une posture ambivalente envers la religion. Bien qu'il se présente comme chrétien, son scepticisme l'amène à douter des dogmes religieux tout en respectant les formes extérieures de la foi pour des raisons sociales et politiques.

    Relativisme culturel et tolérance

    Il défend une vision relativiste des mœurs et des croyances humaines, affirmant que les coutumes dépendent des contextes culturels. Cette approche préfigure les idées des Lumières sur la tolérance et la critique des préjugés.

    6. Une philosophie pratique et discrète

    L'art de vivre caché

    La Mothe Le Vayer prône la discrétion dans la vie quotidienne. Il défend l'idée qu'il faut cacher ses pensées profondes pour vivre en paix, suivant la maxime épicurienne « Vivre caché pour être heureux ».

    Un scepticisme pragmatique

    Son scepticisme n'est pas un obstacle à l'action mais un guide pour une existence paisible. Il conseille d’accepter les lois et les coutumes tout en gardant une distance intérieure critique.

    💡 Conclusion

    Michel Onfray révèle dans cet épisode la subtilité de l’hédonisme sceptique de La Mothe Le Vayer. Ce dernier parvient à concilier doute méthodique et recherche du plaisir, tout en adoptant une posture discrète et tolérante face aux dogmes religieux et sociaux.

    📚 Philosophes mentionnés

    * Platon (env. 428 av. J.-C. – 348 av. J.-C.) — Philosophe idéaliste grec.

    * Aristote (384 av. J.-C. – 322 av. J.-C.) — Philosophe grec scolastique.

    * Piron (env. 360 av. J.-C. – env. 270 av. J.-C.) — Fondateur du scepticisme pyrrhonien.

    * Épicure (341 av. J.-C. – 270 av. J.-C.) — Fondateur de l’épicurisme.

    * Sextus Empiricus (env. 160 – env. 210) — Philosophe sceptique et médecin grec.

    * Michel de Montaigne (1533 – 1592) — Philosophe humaniste et sceptique.

    * Pierre Charron (1541 – 1603) — Philosophe sceptique et précurseur de la laïcité.

    * François La Mothe Le Vayer (1588 – 1672) — Philosophe sceptique et libertin érudit.

    * Pierre Gassendi (1592 – 1655) — Philosophe épicurien et matérialiste.

    * Blaise Pascal (1623 – 1662) — Philosophe et mathématicien français.

    * Friedrich Nietzsche (1844 – 1900) — Philosophe allemand, auteur de La Naissance de la tragédie.

    Crédits : Michel Onfray et la Contre-histoire de la philosophie



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  • 1. Introduction

    Dans cet épisode, Michel Onfray explore le concept du cabinet de curiosité et son rôle dans la pensée baroque du XVIIe siècle. Il met en lumière la manière dont ces collections d'objets rares et insolites témoignent d’un changement de paradigme intellectuel et culturel, marquant la transition d’une vision close et chrétienne du monde vers un univers infini et multiple.

    2. Le cabinet de curiosité : une invention baroque

    Origine et définition

    Onfray explique que le cabinet de curiosité est un précurseur du musée privé, où l’on collectionne des objets rares, exotiques et étranges. Il s'agit de rassembler des éléments issus de la nature, de l’art et de la science afin de donner une vision encyclopédique et fragmentée du monde.

    Une représentation du baroque

    Le cabinet de curiosité incarne parfaitement l’esthétique baroque : profusion, exubérance, diversité et mélange des genres. Il est à l’image de la pensée baroque qui rejette l’unicité et la fixité pour embrasser le mouvement, le foisonnement et la contradiction.

    3. Une révolution dans la perception du monde

    L’impact de la révolution copernicienne

    Onfray évoque l’œuvre d’Alexandre Koyré, Du monde clos à l’univers infini, pour montrer comment la révolution copernicienne (1543) a bouleversé la perception du cosmos. En passant du géocentrisme à l’héliocentrisme, le monde médiéval stable et hiérarchisé s’effondre pour laisser place à une vision dynamique et incertaine de l’univers.

    L’exploration du monde et la diversité culturelle

    La découverte de l’Amérique en 1492 et les voyages d’exploration contribuent à remettre en question l’européocentrisme. Les cabinets de curiosité deviennent alors des microcosmes du monde, témoignant de la diversité des peuples, des mœurs et des croyances.

    4. Une épistémologie du divers

    Accumulation et fragmentation du savoir

    Contrairement à la pensée classique qui recherche l’ordre et la clarté, les cabinets de curiosité privilégient l’accumulation d’objets hétéroclites. Cette approche illustre un changement profond dans la façon de concevoir la connaissance : plutôt qu’une vérité unique et absolue, on valorise la pluralité des points de vue et la relativité des vérités.

    L’influence sceptique et libertine

    Les libertins érudits du XVIIe siècle, comme La Mothe Le Vayer, trouvent dans le cabinet de curiosité une métaphore de leur pensée. Le scepticisme consiste à suspendre le jugement face à la multitude d’interprétations possibles, à l’image du cabinet où chaque objet raconte une histoire différente et parfois contradictoire.

    5. Héritage et influence des cabinets de curiosité

    Vers la naissance du musée moderne

    Les cabinets de curiosité posent les bases du musée tel qu’on le connaît aujourd’hui. Cependant, alors que le musée moderne cherche à organiser et classifier, le cabinet baroque revendique le désordre et la surprise comme modes de connaissance.

    Une inspiration pour la philosophie moderne

    De Nietzsche à Foucault, l’idée que le savoir est un assemblage de perspectives hétérogènes se retrouve dans la philosophie moderne. Onfray établit un lien entre le cabinet de curiosité et la pensée postmoderne qui rejette les grands récits unificateurs au profit d’une vision fragmentée du monde.

    💡 Conclusion

    Michel Onfray démontre comment le cabinet de curiosité est bien plus qu’une simple collection d’objets exotiques : il est une manifestation tangible d’un bouleversement intellectuel et culturel. Il marque l’entrée dans une ère où la diversité, le doute et la multiplicité des perspectives remplacent les certitudes dogmatiques du monde médiéval.

    📚 Philosophes mentionnés

    * Héraclite (env. 544 av. J.-C. – 480 av. J.-C.) — Philosophe présocratique, penseur du devenir et du mouvement.

    * Platon (env. 428 av. J.-C. – 348 av. J.-C.) — Philosophe idéaliste grec.

    * Aristote (384 av. J.-C. – 322 av. J.-C.) — Philosophe grec, fondateur du savoir encyclopédique.

    * Michel de Montaigne (1533 – 1592) — Philosophe humaniste et sceptique.

    * Pierre Charron (1541 – 1603) — Philosophe sceptique et précurseur de la laïcité.

    * François La Mothe Le Vayer (1588 – 1672) — Philosophe sceptique et libertin érudit.

    * René Descartes (1596 – 1650) — Philosophe rationaliste, défenseur de la méthode cartésienne.

    * Baruch Spinoza (1632 – 1677) — Philosophe rationaliste et panthéiste.

    * Friedrich Nietzsche (1844 – 1900) — Philosophe allemand, penseur du perspectivisme.

    * Alexandre Koyré (1892 – 1964) — Historien des sciences, auteur de Du monde clos à l’univers infini.

    * Michel Foucault (1926 – 1984) — Philosophe français, théoricien de l’archéologie du savoir.

    Crédits : Michel Onfray et la Contre-histoire de la philosophie



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  • 1. Introduction

    Dans cet épisode, Michel Onfray explore la figure de François La Mothe Le Vayer, philosophe sceptique du XVIIe siècle, souvent méconnu ou mal interprété. Onfray met en lumière la richesse et la subtilité de sa pensée, marquée par le scepticisme pyrrhonien, le clair-obscur intellectuel et une approche ironique et critique des dogmes établis.

    2. Biographie et contexte historique

    Un parcours singulier

    François La Mothe Le Vayer naît en 1588 et suit une formation juridique avant de devenir avocat et substitut au procureur général. Son parcours le mène à occuper des fonctions prestigieuses, notamment en tant que précepteur du futur Louis XIV. Il est également membre de l'Académie française.

    Un polygraphe baroque

    La Mothe Le Vayer est un auteur prolifique, écrivant sur une multitude de sujets sous diverses formes : traités sceptiques, dialogues, considérations sur l'éloquence, critiques littéraires et réflexions philosophiques. Cette diversité témoigne de son approche baroque, où l’écriture devient foisonnante et riche en digressions.

    3. Le scepticisme pyrrhonien et le clair-obscur

    Le scepticisme comme méthode

    La Mothe Le Vayer s'inscrit dans la tradition sceptique pyrrhonienne, défendant l'idée que la vérité est inatteignable et que le doute méthodique est la meilleure posture intellectuelle. Il pratique l’épochè (suspension du jugement) pour éviter les dogmatismes et favoriser une pensée plus libre.

    Le clair-obscur philosophique

    Onfray souligne l'importance du clair-obscur dans la pensée de La Mothe Le Vayer, une métaphore empruntée à l'art baroque, notamment à la peinture de Caravage ou Rembrandt. Ce jeu d'ombre et de lumière illustre la complexité du réel et l'ambiguïté des vérités humaines.

    4. Une philosophie de la discrétion et de l'ironie

    Le discret et l'art du silence

    Influencé par Balthazar Gracian et son concept du "discret", La Mothe Le Vayer valorise la prudence, la discrétion et l’art du silence. Il adopte une posture réservée, maîtrisant ses paroles et ses jugements pour naviguer dans les cercles du pouvoir tout en préservant son indépendance d'esprit.

    L'ironie et le double discours

    La Mothe Le Vayer use d'un langage codé et ironique pour critiquer les dogmes religieux et politiques sans s'exposer directement à la censure. Cette subtilité lui permet d'exprimer des idées subversives tout en évitant les persécutions.

    5. Religion, morale et scepticisme

    Un chrétien sceptique

    Bien qu'il se déclare chrétien, La Mothe Le Vayer adopte une posture sceptique vis-à-vis des dogmes religieux. Il explore la possibilité d'un fidéisme sceptique, où la foi repose sur un acte volontaire plutôt que sur des preuves rationnelles.

    La vertu des païens et la critique du dogmatisme

    Dans son œuvre De la vertu des païens, il défend l'idée que la morale n'est pas l'apanage des religions révélées et que les païens peuvent être vertueux sans croire en un dieu unique. Cette thèse remet en question la supériorité morale revendiquée par l'Église catholique.

    6. Héritage et postérité

    Un penseur marginalisé

    Malgré ses contributions majeures à la pensée sceptique, La Mothe Le Vayer reste un philosophe marginalisé dans l'historiographie classique. Voltaire et d'autres l'ont réduit à un auteur mineur, occultant la richesse et la subtilité de sa pensée.

    L’influence sur les Lumières et les libertins érudits

    Michel Onfray souligne l'importance de La Mothe Le Vayer dans la généalogie des Lumières et des libertins érudits. Son scepticisme méthodique et sa critique des dogmes ont inspiré des penseurs comme Bayle et Diderot.

    💡 Conclusion

    Michel Onfray réhabilite la figure de François La Mothe Le Vayer, révélant un philosophe subtil, sceptique et ironique, dont la pensée oscille entre lumière et obscurité. Son approche critique et son usage du clair-obscur en font un précurseur des Lumières et un penseur essentiel du baroque intellectuel.

    📚 Philosophes mentionnés

    * Platon (env. 428 av. J.-C. – 348 av. J.-C.) — Philosophe idéaliste grec.

    * Aristote (384 av. J.-C. – 322 av. J.-C.) — Philosophe grec scolastique.

    * Piron (env. 360 av. J.-C. – env. 270 av. J.-C.) — Fondateur du scepticisme pyrrhonien.

    * Épicure (341 av. J.-C. – 270 av. J.-C.) — Fondateur de l’épicurisme.

    * Sextus Empiricus (env. 160 – env. 210) — Philosophe sceptique et médecin grec.

    * Michel de Montaigne (1533 – 1592) — Philosophe humaniste et sceptique.

    * Pierre Charron (1541 – 1603) — Philosophe sceptique et précurseur de la laïcité.

    * Balthazar Gracian (1601 – 1658) — Philosophe et écrivain baroque espagnol.

    * François La Mothe Le Vayer (1588 – 1672) — Philosophe sceptique et libertin érudit.

    * Pierre Bayle (1647 – 1706) — Philosophe et critique littéraire, auteur du Dictionnaire historique et critique.

    * Denis Diderot (1713 – 1784) — Philosophe des Lumières et co-rédacteur de l’Encyclopédie.

    * Friedrich Nietzsche (1844 – 1900) — Philosophe allemand, auteur de La Naissance de la tragédie.

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  • 1. Introduction

    Dans cet épisode, Michel Onfray explore la notion de "volupté prudente" développée par Pierre Charron dans De la Sagesse. Il analyse comment Charron construit une éthique hédoniste fondée sur l'immanence et la prudence, tout en se démarquant des dogmes chrétiens et des excès libertins.

    2. La volupté prudente : un oxymore philosophique

    Une éthique de la modération

    Michel Onfray souligne que la notion de "volupté prudente" est un oxymore qui illustre la philosophie de Charron. Cette volupté n'est pas un abandon aux désirs mais une construction réfléchie du plaisir, inspirée par l'épicurisme. Le plaisir est recherché, mais de manière mesurée et consciente, afin d'éviter les souffrances.

    L’influence d’Épicure

    Charron s’inscrit dans la tradition épicurienne, valorisant l'ataraxie (absence de trouble) et la modération dans la quête du plaisir. Comme Épicure, il prône une sagesse immanente où le plaisir est le bien suprême, mais subordonné à la raison.

    3. La critique du dolorisme chrétien

    Rejet de la souffrance comme vertu

    Charron critique le dolorisme chrétien qui valorise la souffrance et la mortification. Il refuse l'idée que la douleur ait un pouvoir salvifique et dénonce le masochisme inhérent à certaines pratiques religieuses. Selon lui, la morale ne doit pas être fondée sur la douleur mais sur la quête du plaisir et du bonheur.

    La déconstruction du péché et de la culpabilité

    Charron remet en question la notion de péché originel et les mécanismes de culpabilisation associés. Il défend une vision naturelle et déculpabilisée de la sexualité, considérant que les fonctions naturelles, y compris les désirs corporels, ne sont pas mauvaises en soi.

    4. Une sagesse de l’immanence

    Vivre selon la nature

    Charron conçoit la nature comme une manifestation divine immanente. Vivre selon la nature revient à vivre selon la volonté de Dieu. Cette vision panthéiste dissout la distinction entre le divin et le monde, rendant la quête spirituelle accessible dans l'expérience humaine quotidienne.

    La prud'homie : la vertu des vertus

    La prud'homie est la pierre angulaire de l'éthique charronienne. Elle permet d’accommoder ses désirs et pensées à la nature et à la raison. Par la prud'homie, l’individu règle ses désirs, choisit un mode de vie adapté à son tempérament et cultive la modération dans ses actions.

    5. Les passions tristes et leur dépassement

    Lutte contre les passions négatives

    Charron, comme Spinoza plus tard, dénonce les "passions tristes" telles que la crainte, la tristesse, la colère, la haine, l'envie et la jalousie. Il propose des stratégies pour les dépasser, notamment en cultivant la joie et en se détournant des pensées néfastes.

    Le divertissement comme remède

    Le divertissement est présenté comme un moyen efficace de se détourner des pensées tristes. Cette idée, que l'on retrouvera chez Pascal, est ici orientée vers un but hédoniste : maintenir l'esprit dans un état de sérénité et de contentement.

    6. La morale sexuelle de Charron

    La sexualité déculpabilisée

    Charron développe une morale sexuelle fondée sur la nature et la modération. Il défend l'idée que la sexualité est naturelle et voulue par Dieu, tant qu'elle est pratiquée avec mesure. Il critique à la fois l'abstinence excessive et la débauche, prônant une voie médiane.

    La volupté modérée

    Charron propose des critères pour une sexualité équilibrée, évoquant même des repères chiffrés de manière humoristique. Il s'agit d’une "volupté modérée", où le plaisir est recherché sans excès ni privation.

    💡 Conclusion

    Michel Onfray met en lumière la richesse et la modernité de la pensée de Pierre Charron. Sa philosophie de la "volupté prudente" offre une éthique hédoniste mesurée, opposée au dolorisme chrétien et aux excès libertins. En prônant une sagesse immanente et joyeuse, Charron ouvre la voie à une morale laïque centrée sur le bonheur terrestre.

    📚 Philosophes mentionnés

    * Socrate (env. 470 av. J.-C. – 399 av. J.-C.) — Philosophe grec, figure fondatrice de la philosophie occidentale.

    * Platon (env. 428 av. J.-C. – 348 av. J.-C.) — Philosophe idéaliste grec.

    * Aristote (384 av. J.-C. – 322 av. J.-C.) — Philosophe grec scolastique.

    * Épicure (341 av. J.-C. – 270 av. J.-C.) — Fondateur de l’épicurisme.

    * Marsile de Padoue (1275 – 1342) — Philosophe politique italien.

    * Michel de Montaigne (1533 – 1592) — Philosophe humaniste et sceptique.

    * Pierre Charron (1541 – 1603) — Philosophe sceptique et précurseur de la laïcité.

    * René Descartes (1596 – 1650) — Philosophe rationaliste.

    * Baruch Spinoza (1632 – 1677) — Philosophe rationaliste et panthéiste.

    * Blaise Pascal (1623 – 1662) — Philosophe et mathématicien français.

    * Friedrich Nietzsche (1844 – 1900) — Philosophe allemand, auteur de La Généalogie de la morale.

    Crédits : Michel Onfray et la Contre-histoire de la philosophie



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  • 1. Introduction

    Dans cet épisode, Michel Onfray explore la notion de sagesse laïque à travers l'œuvre de Pierre Charron, en particulier son ouvrage De la Sagesse (première édition en 1601). Il propose une réflexion sur la naissance d'une pensée morale indépendante des dogmes religieux, qui préfigure les concepts modernes de laïcité et d'immanence.

    2. Pierre Charron et l'invention de la sagesse laïque

    Une morale autonome

    Michel Onfray souligne que De la Sagesse se distingue des écrits théologiques antérieurs de Charron par sa volonté d'établir une morale fondée sur la raison humaine, sans recours aux prescriptions divines. Il identifie dans cet ouvrage une tentative pionnière de créer une sagesse laïque, avant même l'apparition du terme.

    La séparation du spirituel et du temporel

    Charon défend l'idée que la morale peut exister indépendamment des dogmes religieux. Il s'inscrit dans la lignée de penseurs comme Marsile de Padoue et Machiavel, qui prônaient déjà la séparation entre les sphères spirituelle et temporelle.

    3. Influences philosophiques et continuité

    Socrate et Montaigne

    Onfray met en lumière l'influence de Socrate et de Montaigne sur Charron. Tandis que Montaigne pratique l'introspection pour se connaître lui-même, Charron élargit cette démarche en cherchant à définir ce qu'est l'homme en général, sans se focaliser sur son propre cas.

    Synthèse des courants antiques

    Charon s'inspire des courants philosophiques antiques comme l'épicurisme, le stoïcisme, le cynisme et le scepticisme pour élaborer sa sagesse laïque. Il propose une vision de l'homme fondée sur l'immanence, en rejetant les conceptions dualistes de l'âme et du corps.

    4. L'homme selon Pierre Charron

    Un être anatomique et matériel

    Pour Charron, l'homme est avant tout un être anatomique et matériel. Il rejette les conceptions dualistes qui séparent l'âme et le corps et adopte une approche matérialiste de la condition humaine.

    Une morale fondée sur la nature

    Charron préconise une morale fondée sur la nature humaine, accessible par la raison. Cette morale immanente valorise la connaissance de soi et la recherche de la sérénité, en s'inspirant de l'ataraxie épicurienne.

    5. Dieu, la nature et la nécessité

    Une vision panthéiste

    Charon adopte une conception panthéiste de la divinité, où Dieu est assimilé à la nature et à la nécessité. Il ne s'agit plus d'un Dieu transcendant et anthropomorphique, mais d'une force immanente qui structure le réel.

    Le fidéisme et la laïcité

    Tout en se déclarant catholique, Charron adhère au fidéisme, une position qui sépare foi et raison. Il défend l'idée que la foi relève du domaine personnel et que la raison doit guider les affaires humaines, anticipant ainsi les principes de la laïcité moderne.

    💡 Conclusion

    Michel Onfray montre comment Pierre Charron, à travers De la Sagesse, jette les bases d'une morale laïque et immanente, affranchie des dogmes religieux. Sa réflexion sur la nature humaine, la morale et la divinité ouvre la voie à des courants philosophiques matérialistes et rationalistes qui marqueront la modernité.

    📚 Philosophes mentionnés

    * Socrate (env. 470 av. J.-C. – 399 av. J.-C.) — Philosophe grec, figure fondatrice de la philosophie occidentale.

    * Platon (env. 428 av. J.-C. – 348 av. J.-C.) — Philosophe idéaliste grec.

    * Diogène de Sinope (env. 412 av. J.-C. – 323 av. J.-C.) — Philosophe cynique.

    * Aristote (384 av. J.-C. – 322 av. J.-C.) — Philosophe grec scolastique.

    * Épicure (341 av. J.-C. – 270 av. J.-C.) — Fondateur de l’épicurisme.

    * Marsile de Padoue (1275 – 1342) — Philosophe politique italien, auteur du Défenseur de la paix.

    * Machiavel (1469 – 1527) — Philosophe et homme politique italien, auteur du Prince.

    * Michel de Montaigne (1533 – 1592) — Philosophe humaniste et sceptique.

    * Pierre Charron (1541 – 1603) — Philosophe sceptique et précurseur de la laïcité.

    * René Descartes (1596 – 1650) — Philosophe rationaliste.

    * Baruch Spinoza (1632 – 1677) — Philosophe rationaliste et panthéiste.

    * Friedrich Nietzsche (1844 – 1900) — Philosophe allemand, auteur de La Naissance de la tragédie.

    Crédits : Michel Onfray et la Contre-histoire de la philosophie



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  • 1. Introduction

    Dans cet épisode, Michel Onfray se consacre à la réhabilitation de Pierre Charron, philosophe souvent éclipsé par Montaigne et victime de nombreuses calomnies. Onfray s'attache à démêler les malentendus qui ont entaché la réputation de Charron et à mettre en lumière la richesse de sa pensée.

    2. La mauvaise réputation de Pierre Charron

    Les calomnies de François Garasse

    Pierre Charron a été la cible d'attaques virulentes, notamment par le jésuite François Garasse qui l'accusa de libertinage et d'athéisme. Ces calomnies ont durablement terni sa réputation, reléguant ses œuvres à l'oubli.

    Un philosophe incompris

    Charron est souvent réduit à un simple disciple de Montaigne, considéré comme un plagiaire ou un penseur secondaire. Onfray s'attache à démontrer que Charron possède une pensée autonome et originale, qui mérite d'être reconnue.

    3. La pensée de Pierre Charron

    De la Sagesse : une œuvre majeure

    Publié en 1601, De la Sagesse est l'ouvrage principal de Charron. Ce texte propose une morale laïque fondée sur la raison, distincte des dogmes religieux. Charron y défend l'idée que la vertu peut exister indépendamment de la foi.

    Le scepticisme méthodique

    Charron développe un scepticisme méthodique qui influencera Descartes dans l'élaboration de son doute cartésien. Ce scepticisme vise à suspendre le jugement pour atteindre une connaissance plus certaine.

    Laïcité et morale indépendante

    Charron propose une séparation entre la morale et la théologie, posant ainsi les bases d'une pensée laïque avant l'heure. Il défend l'idée que l'on peut être vertueux sans croire en Dieu, anticipant les débats sur la laïcité.

    4. Les influences et l'héritage de Charron

    Les liens avec Montaigne

    Bien que souvent perçu comme un disciple de Montaigne, Charron développe ses propres idées. Leur relation fut complexe, oscillant entre admiration et influence mutuelle, sans pour autant qu'il y ait de réelle subordination intellectuelle.

    Impact sur les philosophes postérieurs

    Charron a marqué de nombreux penseurs, de Descartes à Spinoza, en passant par Pascal. Ses idées sur le doute, la morale et la religion ont nourri les débats philosophiques des XVIIe et XVIIIe siècles.

    5. Une philosophie de l'immanence et de la liberté

    La liberté par le consentement

    Inspiré par les stoïciens et les épicuriens, Charron conçoit la liberté comme un consentement à la nécessité. Cette idée influencera des philosophes comme Spinoza, qui développera cette notion dans son éthique.

    La sagesse comme art de vivre

    Pour Charron, la philosophie doit guider l'existence vers la sérénité et l'ataraxie, en se libérant des passions tristes et des illusions religieuses. Sa pensée s'inscrit dans la tradition des morales antiques tout en s'ouvrant à une modernité laïque.

    💡 Conclusion

    Michel Onfray restaure la figure de Pierre Charron en mettant en lumière son apport fondamental à la philosophie moderne. Charron apparaît ainsi comme un précurseur de la laïcité et du scepticisme méthodique, injustement marginalisé par l'histoire officielle.

    📚 Philosophes mentionnés

    * Socrate (env. 470 av. J.-C. – 399 av. J.-C.) — Philosophe grec, figure fondatrice de la philosophie occidentale.

    * Platon (env. 428 av. J.-C. – 348 av. J.-C.) — Philosophe idéaliste grec.

    * Diogène de Sinope (env. 412 av. J.-C. – 323 av. J.-C.) — Philosophe cynique.

    * Aristote (384 av. J.-C. – 322 av. J.-C.) — Philosophe grec scolastique.

    * Épicure (341 av. J.-C. – 270 av. J.-C.) — Fondateur de l’épicurisme.

    * Sextus Empiricus (env. 160 – env. 210) — Philosophe sceptique.

    * Michel de Montaigne (1533 – 1592) — Philosophe humaniste et sceptique.

    * Pierre Charron (1541 – 1603) — Philosophe sceptique et précurseur de la laïcité.

    * René Descartes (1596 – 1650) — Philosophe rationaliste.

    * Blaise Pascal (1623 – 1662) — Philosophe et mathématicien français.

    * Baruch Spinoza (1632 – 1677) — Philosophe rationaliste et panthéiste.

    * Georg Wilhelm Friedrich Hegel (1770 – 1831) — Philosophe allemand, auteur de La Phénoménologie de l'Esprit.

    Crédits : Michel Onfray et la Contre-histoire de la philosophie



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  • 1. Introduction

    Michel Onfray ouvre cette cinquième saison de sa contre histoire de la philosophie en s'attaquant au XVIIe siècle, traditionnellement qualifié de "Grand Siècle". Il propose de déconstruire cette vision académique pour révéler un "autre grand siècle", celui des penseurs marginaux, des libertins baroques et des philosophies oubliées.

    2. La construction idéologique du "Grand Siècle"

    L'historiographie dominante

    Onfray critique la manière dont l'histoire du XVIIe siècle a été façonnée, notamment par Voltaire avec son Siècle de Louis XIV. Ce récit met en avant une image monarchiste et catholique du siècle, valorisant Descartes comme figure emblématique de la philosophie française, tout en occultant des penseurs alternatifs.

    La fiction d'un siècle unifié

    Voltaire aurait ainsi inventé un "grand siècle" autour de figures classiques comme Descartes, Corneille, Racine ou La Fontaine, au détriment de penseurs matérialistes, libertins ou baroques comme Gassendi ou Spinoza. Cette construction aurait servi à magnifier Louis XIV tout en critiquant implicitement Louis XV.

    3. Le baroque et les libertins érudits

    Définir le libertinage baroque

    Onfray se penche sur la notion de "libertin érudit", popularisée par René Pintard. Il distingue ce libertinage intellectuel du simple libertinage des mœurs. Les libertins baroques sont des penseurs qui s'affranchissent des dogmes religieux et prônent une pensée libre, souvent matérialiste et hédoniste.

    Le baroque comme philosophie

    Il propose de voir dans le baroque non seulement un style artistique, mais aussi une philosophie. Le baroque, avec ses excès, ses contrastes et ses jeux d'ombre et de lumière, incarne une pensée dynamique, opposée à l'ordre apollinien classique. Nietzsche, dans La naissance de la tragédie, sert ici de guide pour opposer l'apollinien et le dionysiaque, deux forces présentes dans le XVIIe siècle.

    4. Les penseurs oubliés du XVIIe siècle

    Pierre Charron

    Auteur de De la Sagesse (1601), Charron est souvent réduit à un simple disciple de Montaigne. Onfray réhabilite son œuvre en soulignant son apport à la pensée laïque et son approche sceptique.

    Pierre Gassendi

    Philosophe épicurien et chrétien, Gassendi s'oppose à Descartes et défend un matérialisme atomiste. Onfray le présente comme une figure majeure occultée par l'historiographie classique.

    François La Mothe Le Vayer

    Philosophe sceptique et libertin, La Mothe Le Vayer critique les dogmes religieux et valorise la diversité des cultures, notamment à travers l'étude des mœurs des peuples dits "primitifs".

    Savinien de Cyrano de Bergerac

    Au-delà du personnage littéraire, Cyrano est aussi un philosophe novateur, précurseur de la science-fiction avec ses États et Empires de la Lune. Onfray souligne son usage de l'anamorphose et du jeu entre réel et imaginaire.

    Spinoza et Hobbes

    Deux figures majeures ignorées par Voltaire. Spinoza, avec son matérialisme radical et son éthique géométrique, et Hobbes, penseur du politique comme mécanique immanente, sont réhabilités comme piliers de la philosophie moderne.

    5. Vers une philosophie baroque

    L'épicurisme contre l'aristotélisme

    Onfray met en lumière la résurgence de l'épicurisme à travers des penseurs comme Gassendi, en opposition à l'aristotélisme scolastique dominant.

    La pensée du clair-obscur

    Le baroque, en philosophie comme en art, est marqué par le clair-obscur, cette tension entre ombre et lumière, qui reflète la complexité et la vitalité du réel.

    Une philosophie de l'immanence

    Les libertins baroques s'intéressent davantage à la vie ici-bas qu'aux spéculations célestes. Leur pensée est hédoniste, matérialiste et sceptique, refusant les dogmes imposés.

    💡 Conclusion

    Michel Onfray invite à redécouvrir un XVIIe siècle oublié, où les libertins baroques proposent une philosophie dynamique, libre et subversive. Ce siècle, souvent réduit à Descartes et au classicisme, est en réalité traversé par des courants philosophiques riches et variés, qui méritent d'être réhabilités.

    📚 Philosophes mentionnés

    * Leucippe (5e siècle av. J.-C.) — Philosophe atomiste présocratique.

    * Démocrite (env. 460 av. J.-C. – env. 370 av. J.-C.) — Philosophe atomiste.

    * Platon (env. 428 av. J.-C. – 348 av. J.-C.) — Philosophe idéaliste grec.

    * Diogène de Sinope (env. 412 av. J.-C. – 323 av. J.-C.) — Philosophe cynique.

    * Aristote (384 av. J.-C. – 322 av. J.-C.) — Philosophe grec scolastique.

    * Épicure (341 av. J.-C. – 270 av. J.-C.) — Fondateur de l’épicurisme.

    * Diogène de Smyrne (2e siècle) — Philosophe épicurien.

    * Lorenzo Valla (1407 – 1457) — Humaniste et philosophe italien.

    * Érasme (1466 – 1536) — Humaniste et théologien chrétien.

    * Montaigne (1533 – 1592) — Philosophe humaniste et sceptique.

    * Pierre Charron (1541 – 1603) — Philosophe sceptique.

    * François La Mothe Le Vayer (1588 – 1672) — Philosophe sceptique.

    * Thomas Hobbes (1588 – 1679) — Philosophe politique matérialiste.

    * Pierre Gassendi (1592 – 1655) — Philosophe épicurien et matérialiste.

    * René Descartes (1596 – 1650) — Philosophe rationaliste.

    * Cyrano de Bergerac (1619 – 1655) — Écrivain et philosophe libertin.

    * Baruch Spinoza (1632 – 1677) — Philosophe rationaliste et panthéiste.

    * Voltaire (1694 – 1778) — Ecrivain et philosophe français emblématique du siècle des Lumières.

    * Friedrich Nietzsche (1844 – 1900) — Philosophe allemand, auteur de La Naissance de la tragédie.

    Crédits : Michel Onfray et la Contre-histoire de la philosophie



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  • 1. Introduction

    Dans cette conférence, Michel Onfray explore comment Montaigne, après sa mort, a été réinterprété par les penseurs libertins français. En analysant l’évolution de sa réception et le rôle central de Marie de Gournay dans la transmission des Essais, Onfray démontre comment Montaigne est devenu une figure ambiguë : à la fois chrétien déclaré et inspirateur des courants matérialistes, sceptiques et libertins du XVIIe siècle.

    2. Montaigne : une œuvre ouverte aux interprétations multiples

    La théorie du prélèvementOnfray souligne que les Essais de Montaigne sont une œuvre foisonnante, permettant une grande variété d’interprétations :

    * Un texte « à ciel ouvert » : Les Essais peuvent être "prélèvés", c’est-à-dire que chacun peut y puiser les idées qui l’arrangent, même en les sortant de leur contexte.

    * Montaigne aux multiples visages : Selon les époques et les lecteurs, Montaigne a été interprété comme catholique, athée, matérialiste, idéaliste, conservateur ou progressiste.

    Le rôle de Marie de GournayMarie de Gournay joue un rôle central dans la diffusion et l’interprétation des Essais :

    * Fille d’alliance : Elle fut la protégée et collaboratrice de Montaigne, et certains suggèrent qu’ils ont eu une relation amoureuse.

    * Travail éditorial : Elle a édité et enrichi les Essais après la mort de Montaigne, tout en préservant l’intégrité de l’œuvre.

    * Victime de préjugés : Longtemps dénigrée par les historiens, Marie de Gournay a été réhabilitée par les études féministes modernes, mettant en lumière son rôle de philosophe et éditrice indépendante.

    3. La postérité libertine de Montaigne

    Montaigne mis à l’IndexEn 1626, les Essais de Montaigne sont mis à l’Index par l’Église catholique :

    * Œuvre subversive : Bien que Montaigne affirme sa foi catholique, l’Église craint son scepticisme, son relativisme et ses critiques des dogmes religieux.

    * Un « chrétien épicurien » : Montaigne est vu comme un chrétien hédoniste, prônant la modération et le plaisir tout en contestant les dogmes stricts.

    Le libertinage éruditLes libertins érudits du XVIIe siècle trouvent en Montaigne une figure fondatrice :

    * Scepticisme méthodique : Montaigne inspire les libertins par son doute constant et sa remise en question des certitudes.

    * Critique de la religion : Les libertins utilisent des extraits des Essais pour critiquer la foi aveugle et promouvoir une morale laïque et matérialiste.

    * Figures influencées : Des penseurs comme Théophile de Viau et François de La Mothe Le Vayer reprennent les idées montaigniennes pour nourrir leur réflexion critique sur la religion et la société.

    4. Marie de Gournay : une figure féministe et libertine

    Une philosophe oubliéeMarie de Gournay est longtemps restée dans l’ombre de Montaigne, mais Onfray insiste sur son importance :

    * Féministe avant l’heure : Elle défend l’égalité entre les sexes dans ses ouvrages Égalité des hommes et des femmes et Grief des dames.

    * Pensée indépendante : Malgré les critiques misogynes de son époque, elle développe une pensée originale sur l’éducation, la politique et la condition féminine.

    * Vie libre et autonome : Célibataire, hédoniste et indépendante financièrement, elle incarne une figure de femme libre dans une société dominée par les hommes.

    Le lien avec les libertinsMarie de Gournay fréquente des cercles libertins et contribue à la diffusion de leurs idées :

    * Le cénacle libertin : Elle côtoie des penseurs critiques du pouvoir religieux et politique, tout en conservant ses propres convictions chrétiennes.

    * Ambiguïté religieuse : Bien qu’elle défende la foi catholique, ses idées sur l’égalité, la liberté et l’éducation des femmes s’inscrivent dans les débats libertins.

    5. Le double visage de Montaigne : chrétien et libertin

    Un auteur aux interprétations multiplesOnfray insiste sur la richesse des Essais, qui permettent des lectures contradictoires :

    * Sur la religion : Montaigne se proclame catholique mais critique les institutions religieuses et les dogmes.

    * Sur la politique : Il est à la fois conservateur et progressiste selon les extraits choisis.

    * Sur les femmes : Certains passages des Essais sont misogynes, d’autres défendent l’égalité entre hommes et femmes.

    La méthode libertineLes libertins exploitent les ambiguïtés des Essais pour justifier leurs positions :

    * Prélèvements ciblés : Ils sélectionnent des passages critiques envers la religion ou la morale pour défendre leur scepticisme et leur hédonisme.

    * Réinterprétation : Les libertins relisent Montaigne à la lumière de leurs propres convictions, créant un "Montaigne libertin" qui n’existe peut-être pas dans l’œuvre originale.

    💡 Conclusion

    Michel Onfray montre comment Montaigne, tout en se déclarant catholique, a ouvert la voie aux courants sceptiques et libertins du XVIIe siècle. Grâce au travail éditorial de Marie de Gournay, les Essais deviennent un terrain fertile pour les penseurs critiques du pouvoir religieux et politique. Cette ambiguïté fait de Montaigne une figure complexe, capable d’inspirer aussi bien les croyants que les libres-penseurs.

    📚 Philosophes et concepts mentionnés

    * Socrate (470 – 399 av. J.-C.) — Philosophe grec, figure fondatrice de la philosophie occidentale et du doute méthodique.

    * Platon (428/427 – 348/347 av. J.-C.) — Philosophe grec, auteur du Phédon sur l’immortalité de l’âme.

    * Épicure (341 – 270 av. J.-C.) — Philosophe grec, fondateur de l’épicurisme, prônant l’ataraxie et les plaisirs modérés.

    * Lucrèce (98 – 55 av. J.-C.) — Poète et philosophe romain, auteur de De rerum natura, défenseur de l’épicurisme matérialiste.

    * Montaigne (1533 – 1592) — Philosophe humaniste français, auteur des Essais.

    * Marie de Gournay (1565 – 1645) — Philosophe et féministe française, éditrice des Essais et auteure de Égalité des hommes et des femmes.

    * François de La Mothe Le Vayer (1588 – 1672) — Philosophe sceptique et libertin érudit.

    * Théophile de Viau (1590 – 1626) — Poète et dramaturge libertin français.

    * Pierre Hadot (1922 – 2010) — Philosophe français, théoricien des "exercices spirituels" antiques.

    * Michel Foucault (1926 – 1984) — Philosophe français, auteur du Souci de soi et théoricien des pratiques spirituelles.

    Crédits : Michel Onfray et la Contre-histoire de la philosophie



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  • 1. Introduction

    Michel Onfray explore dans cette conférence l'idée des "deux corps" de Montaigne, empruntée à Ernst Kantorowicz et sa théorie des deux corps du roi (le corps physique et le corps politique). Onfray applique ce concept à Montaigne pour illustrer la distinction entre le corps physique du philosophe, soumis aux aléas de la vie et de la mort, et son corps philosophique, incarné par son œuvre, qui survit à la disparition du corps matériel.

    2. La mort de Montaigne : entre réalité et symbolisme

    Une mort inattendue et paisibleMontaigne meurt le 13 septembre 1592 non pas des douleurs chroniques dues à ses coliques néphrétiques, mais d'une "esquinancie", une angine diphtérique qui l'étouffe progressivement.

    * Sérénité face à la mort : Montaigne meurt entouré de ses amis, dans une atmosphère paisible, en demandant l'extrême-onction et en assistant à l'élévation de l'hostie avant de rendre son dernier souffle.

    * Philosopher, c'est apprendre à mourir : La manière dont Montaigne aborde sa mort incarne sa philosophie. Fidèle à sa maxime "Philosopher, c’est apprendre à mourir", il meurt sereinement, sans peur ni agitation.

    Le corps mortel et ses pérégrinations posthumesAprès sa mort, le corps de Montaigne connaît plusieurs péripéties :

    * Le cœur est séparé du corps : Le cœur est placé dans la chapelle Saint-Michel, tandis que le corps repose dans l’église des Feuillants à Bordeaux.

    * Pérégrinations du corps : Le cercueil subit plusieurs déplacements, passant par le musée de l'Académie de Bordeaux, un incendie endommageant le sarcophage, et enfin sa réinstallation au musée d'Aquitaine.

    * Un sarcophage devenu symbole : Le sarcophage devient même une boîte aux lettres pour la Résistance durant la Seconde Guerre mondiale, illustrant l'ironie du destin du "corps réel" de Montaigne.

    3. Le corps philosophique : une œuvre immortelle

    Les Essais : un autoportrait éternelMontaigne laisse derrière lui un "corps philosophique", constitué de ses Essais, qui témoignent de sa pensée et lui confèrent une forme d'immortalité :

    * Un autoportrait en mouvement : Les Essais sont une œuvre vivante et évolutive, constamment enrichie par Montaigne jusqu’à sa mort.

    * La survie de la pensée : Ce "corps philosophique" survit bien au-delà du corps physique, continuant d’influencer des générations de penseurs.

    Marie de Gournay : la gardienne du texteAprès la mort de Montaigne, c’est Marie de Gournay, sa "fille d’alliance", qui prend en charge la préservation et la diffusion des Essais :

    * Édition posthume : Elle veille à l'édition et à la publication des Essais, assurant leur transmission.

    * Travail d’édition : Elle opère des choix éditoriaux, supprime ou ajoute des passages, ce qui suscite des débats sur la fidélité au texte original.

    4. Les deux lectures de Montaigne : officiel et libertin

    Montaigne officiel : le philosophe consensuelOnfray distingue un Montaigne "officiel", celui des institutions, souvent réduit à une image consensuelle :

    * Humaniste tolérant : Ce Montaigne est présenté comme un humaniste équilibré, promoteur de la modération et de la sagesse.

    * Lectures académiques : C’est le Montaigne enseigné dans les écoles, souvent édulcoré et dépolitisé.

    Montaigne libertin : le philosophe subversifMais Onfray met également en lumière un "Montaigne libertin", plus radical et subversif :

    * Scepticisme et relativisme : Ce Montaigne critique les dogmes religieux et philosophiques, prônant un scepticisme méthodique.

    * Épicurisme caché : Il dissimule des idées épicuriennes, notamment sur le plaisir, la nature et la mort, sous un vernis chrétien pour éviter la censure.

    * Influence sur les libertins : Ce Montaigne inspire les libertins érudits du XVIIe siècle, qui s’approprient ses idées les plus audacieuses.

    5. La postérité de Montaigne : entre influences et malentendus

    Les penseurs influencés par MontaigneMontaigne a marqué la philosophie européenne, influençant des figures majeures :

    * Shakespeare : Certains passages de La Tempête semblent directement inspirés des Essais, notamment du chapitre Des cannibales.

    * Philosophes anglais : Locke et Hume sont influencés par l'empirisme et le scepticisme de Montaigne, intégrant ses idées sur la connaissance issue des sens.

    * Kant : Bien que très éloigné du style montanien, Kant admire Montaigne pour sa capacité à observer le "moi" et s’en inspire dans son Anthropologie du point de vue pragmatique.

    Les critiques : Descartes et PascalMontaigne a également été la cible de critiques acerbes :

    * Descartes : Bien qu’influencé par Montaigne, Descartes s’oppose à son scepticisme, en développant le cogito comme fondement indubitable du savoir.

    * Pascal : Il reproche à Montaigne son scepticisme et son relativisme moral, le qualifiant de philosophe frivole qui évite les vérités transcendantes.

    💡 Conclusion

    Michel Onfray propose une lecture nuancée de Montaigne à travers le prisme des "deux corps" :

    * Le corps mortel : Celui qui meurt le 13 septembre 1592, mais dont les restes ont connu des péripéties posthumes dignes d'un roman.

    * Le corps philosophique : Celui des Essais, qui continue d’inspirer et de susciter débats et réflexions des siècles après sa mort.

    Montaigne est ainsi "mort et vivant", à la fois enseveli et perpétué dans son œuvre. Il incarne le philosophe dont le "corps philosophique" transcende la mort biologique, permettant à sa pensée de traverser les siècles.

    📚 Philosophes et concepts mentionnés

    * Socrate (470 av. J.-C. – 399 av. J.-C.) — Philosophe grec, modèle du sage acceptant sereinement la mort.

    * Platon (428/427 av. J.-C. – 348/347 av. J.-C.) — Philosophe grec, auteur du Phédon, dialogue sur l’immortalité de l’âme.

    * Épicure (341 av. J.-C. – 270 av. J.-C.) — Philosophe grec, fondateur de l’épicurisme, prônant l’ataraxie et l'absence de crainte face à la mort.

    * Lucrèce (98 av. J.-C. – 55 av. J.-C.) — Poète et philosophe romain, auteur de De rerum natura, défenseur de l’épicurisme matérialiste.

    * Lucien de Samosate (125 – 192) — Écrivain satirique grec, célèbre pour ses dialogues critiques des dogmes.

    * Giordano Bruno (1548 – 1600) — Philosophe italien, défenseur du panthéisme, brûlé par l’Inquisition.

    * René Descartes (1596 – 1650) — Philosophe rationaliste français, auteur du Discours de la méthode.

    * Blaise Pascal (1623 – 1662) — Mathématicien et philosophe français, auteur des Pensées et du pari sur l’existence de Dieu.

    * John Locke (1632 – 1704) — Philosophe empiriste anglais, auteur de L’Essai sur l’entendement humain.

    * David Hume (1711 – 1776) — Philosophe écossais, figure majeure de l’empirisme et du scepticisme.

    * Emmanuel Kant (1724 – 1804) — Philosophe allemand, auteur de Critique de la raison pure et Anthropologie du point de vue pragmatique.

    * Ernst Kantorowicz (1895 – 1963) — Historien allemand, auteur de Les Deux Corps du roi, concept appliqué ici à Montaigne.

    Crédits : Michel Onfray et la Contre-histoire de la philosophie



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  • 1. Introduction

    Dans cette conférence, Michel Onfray explore les trois exercices spirituels proposés par Montaigne dans les Essais : l’amitié, l’usage des femmes et l’usage des livres. S'inspirant du concept d’"exercices spirituels" développé par Pierre Hadot et repris par Michel Foucault, Onfray souligne que Montaigne ne se limite pas à théoriser la philosophie mais cherche à l'incarner dans sa vie quotidienne. Ces trois pratiques permettent à Montaigne de cultiver une sagesse hédoniste et tragique, où la quête du plaisir est tempérée par une conscience aiguë de la finitude humaine.

    2. L’amitié : un mythe antique revisité

    La relation entre Montaigne et La BoétieL'amitié entre Montaigne et Étienne de La Boétie est l'un des mythes fondateurs des Essais. Montaigne la célèbre comme une amitié idéale et parfaite, comparable aux modèles antiques d’Oreste et Pylade. Cependant, Onfray nuance cette image :

    * Un mythe construit : Montaigne aurait idéalisé cette relation, la sublimant après la mort précoce de La Boétie.

    * Des tensions et des silences : Montaigne passe sous silence certains aspects problématiques, comme son refus d'intégrer le Discours de la servitude volontaire de La Boétie dans les Essais, probablement pour des raisons politiques.

    * La raison d’État contre l’amitié : Montaigne privilégie la prudence politique à la loyauté amicale, refusant de publier un texte jugé subversif dans un contexte de guerres de religion.

    La philosophie antique de l’amitiéMontaigne puise dans la tradition antique pour penser l’amitié :

    * Platon (Lysis) : Idée d’une amitié idéale et spirituelle.

    * Épicure : L’amitié comme un bien suprême procurant la sécurité et le plaisir.

    * Cicéron (Lælius) : L’amitié vertueuse fondée sur la bienveillance réciproque.

    * Sénèque : La véritable amitié ne doit pas être intéressée.

    Montaigne adopte ces perspectives tout en soulignant l’exceptionnalité de son amitié avec La Boétie par la célèbre formule : « Parce que c'était lui, parce que c'était moi ».

    3. L’usage des femmes : entre hédonisme et misogynie

    La complexité du rapport de Montaigne aux femmesOnfray analyse la vision ambivalente de Montaigne sur les femmes :

    * Un regard misogyne : Montaigne reprend des stéréotypes de son époque, décrivant les femmes comme vaniteuses, naïves et insatiables.

    * Un féminisme naissant : Malgré ces préjugés, Montaigne défend l’idée que les inégalités entre les sexes ne sont pas naturelles mais sociales, issues de l’éducation et des conventions. Il écrit : « Les mâles et les femelles sont jetés au même moule, sauf l’institution et l’usage ».

    L’hédonisme sexuel et la liberté des femmesMontaigne adopte une approche épicurienne du plaisir sexuel :

    * Droit au plaisir pour les femmes : Il affirme que les femmes, comme les hommes, ont droit au plaisir et critique les normes morales qui le leur refusent.

    * La critique du mariage d’amour : Montaigne considère que le mariage est un contrat social et non une affaire de passion. L’amour véritable est trop instable pour constituer la base solide d’un mariage.

    * L’éloge du couple ataraxique : Inspiré de Lucrèce, Montaigne prône un couple équilibré, fondé sur la complicité et la modération des passions.

    La relation avec Marie de GournayOnfray évoque également la relation ambigüe entre Montaigne et Marie de Gournay, qu’il désignait comme sa « fille d’alliance ». Bien que certains aient spéculé sur une possible relation amoureuse, Montaigne semble surtout avoir vu en elle une héritière spirituelle, à qui il confia l'édition posthume des Essais.

    4. L’usage des livres : entre lecture et écriture

    Le rapport hédoniste à la lecturePour Montaigne, les livres sont une source essentielle de plaisir et de connaissance :

    * Lecture sélective : Montaigne lit selon ses envies, préférant les auteurs antiques comme Plutarque, Lucrèce et Sénèque. Il avoue qu’après 40 ans, il ne lit plus un livre en entier, mais picore des passages qui l’inspirent.

    * La lecture comme conversation : Il conçoit la lecture comme un dialogue avec les auteurs, une manière de "frotter sa cervelle" à celle des grands hommes.

    L’écriture des Essais comme exercice spirituelL’acte d’écrire est pour Montaigne une pratique introspective et libératrice :

    * Le fagotage des Essais : Il décrit son travail d’écriture comme un « fagotage » de pensées, un assemblage hétéroclite sans plan préétabli.

    * L’écriture pour se connaître : Fidèle au précepte socratique « Connais-toi toi-même », Montaigne utilise les Essais pour se peindre et s’explorer, tout en s’interrogeant sur la nature humaine.

    * Un autoportrait inachevé : Les Essais restent une œuvre ouverte, constamment enrichie et corrigée, jusqu’à la mort de Montaigne.

    5. Les exercices spirituels : entre théorie et pratique

    La philosophie comme mode de vieOnfray rappelle que pour Montaigne, la philosophie n’est pas qu’un discours théorique mais un art de vivre, en continuité avec la tradition antique :

    * Pierre Hadot : Les exercices spirituels sont des pratiques visant à transformer l’individu.

    * Michel Foucault : Le « souci de soi » est central dans la philosophie antique, où il s’agit d’être en accord avec soi-même à travers des exercices de maîtrise et de réflexion.

    Les trois commerces : amitié, femmes et livresCes trois domaines sont les terrains où Montaigne exerce sa philosophie au quotidien :

    * L’amitié : Un espace d’harmonie et d’élévation spirituelle.

    * Les femmes : Un terrain d’expérimentation des plaisirs et des affects.

    * Les livres : Un dialogue constant avec les grandes pensées, permettant la construction de soi.

    💡 Conclusion

    Michel Onfray met en lumière l’approche incarnée de la philosophie chez Montaigne, où la théorie se prolonge dans la pratique quotidienne à travers des exercices spirituels. En explorant l’amitié, l’usage des femmes et l’usage des livres, Montaigne élabore une sagesse hédoniste et tragique, où la quête du plaisir se conjugue avec la conscience de la mort et la recherche de la sérénité. Sa philosophie reste profondément actuelle, invitant à vivre pleinement tout en cultivant la liberté intérieure et la connaissance de soi.

    📚 Philosophes mentionnés

    * Socrate (470 av. J.-C. – 399 av. J.-C.) — Philosophe grec, figure fondatrice de la philosophie occidentale, maître du "Connais-toi toi-même".

    * Platon (428/427 av. J.-C. – 348/347 av. J.-C.) — Philosophe grec, auteur du Lysis, dialogue sur l’amitié.

    * Aristote (384 av. J.-C. – 322 av. J.-C.) — Philosophe grec, auteur de l’Éthique à Nicomaque, abordant les différentes formes d’amitié.

    * Épicure (341 av. J.-C. – 270 av. J.-C.) — Philosophe grec, fondateur de l’épicurisme, prônant l’ataraxie et les plaisirs modérés.

    * Cicéron (106 av. J.-C. – 43 av. J.-C.) — Philosophe et orateur romain, auteur du Lælius, dialogue sur l’amitié.

    * Lucrèce (98 av. J.-C. – 55 av. J.-C.) — Poète et philosophe romain, auteur de De rerum natura, défenseur de l’épicurisme matérialiste.

    * Sénèque (4 av. J.-C. – 65 ap. J.-C.) — Philosophe stoïcien romain, auteur des Lettres à Lucilius, réflexions sur l’éthique et l’amitié.

    * Étienne de La Boétie (1530 – 1563) — Philosophe et ami de Montaigne, auteur du Discours de la servitude volontaire.

    * Friedrich Nietzsche (1844 – 1900) — Philosophe allemand, auteur du concept d’« éternel retour » et défenseur d’une sagesse tragique.

    * Pierre Hadot (1922 – 2010) — Philosophe français, théoricien des "exercices spirituels" dans la philosophie antique.

    * Michel Foucault (1926 – 1984) — Philosophe français, auteur du Souci de soi, étude des pratiques philosophiques antiques.

    Crédits : Michel Onfray et la Contre-histoire de la philosophie



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  • 1. Introduction

    Dans cette conférence, Michel Onfray explore la philosophie de Montaigne sous l'angle de la sagesse tragique. Il met en lumière comment Montaigne, à travers les Essais, développe une réflexion hédoniste marquée par une conscience aiguë de la mort. Loin de tout optimisme naïf ou pessimisme désespéré, Montaigne adopte une posture tragique, acceptant la finitude humaine tout en valorisant le plaisir et la sérénité dans l’existence.

    2. Montaigne et l'hédonisme tragique

    L’accident fondateur et la révélation de la mortUn événement central dans la vie de Montaigne est l'accident de cheval qu'il décrit dans les Essais. Ce moment, où il frôle la mort, agit comme une révélation :

    * Il prend conscience de l’omniprésence de la mort dans la vie.

    * Loin de craindre la mort, il découvre une forme de paix et de plaisir dans cet abandon à l'inéluctable.

    Philosopher, c’est apprendre à mourirMontaigne reprend cette maxime de Cicéron pour souligner que la philosophie doit nous préparer à la mort. Cependant, pour Montaigne :

    * Apprendre à mourir, c’est avant tout apprendre à vivre pleinement.

    * La mort n’est pas un mal à fuir, mais une composante naturelle de la vie.

    3. Une vision tragique et lucide de l’existence

    L’acceptation de la finitudeMontaigne adopte une posture tragique :

    * Il accepte la mort comme une réalité inévitable et omniprésente.

    * Il refuse les illusions religieuses de l’au-delà et se concentre sur la vie présente.

    La mort fait partie de la vieMontaigne perçoit la mort non pas comme une rupture, mais comme une continuité :

    * Vie et mort sont les deux faces d’une même médaille.

    * Cette conscience aiguë de la mort donne plus de valeur et de saveur à la vie.

    Ni optimisme, ni pessimisme : la voie tragiqueMontaigne ne verse ni dans l’optimisme naïf ni dans le pessimisme désespéré :

    * L’optimiste voit toujours le meilleur dans le réel.

    * Le pessimiste anticipe toujours le pire.

    * Le tragique, comme Montaigne, accepte le réel tel qu’il est, avec ses joies et ses souffrances.

    4. La sagesse hédoniste de Montaigne

    Le plaisir comme souverain bienMontaigne s’inscrit dans la tradition épicurienne :

    * Le plaisir est le but de l’existence, mais il s’agit d’un plaisir mesuré et réfléchi.

    * Il prône un hédonisme lucide, qui prend en compte la souffrance et la mort.

    L’ataraxie : la sérénité face à la mortMontaigne cherche à atteindre l’ataraxie, la tranquillité de l’âme :

    * Il faut apprivoiser la mort pour vivre pleinement.

    * La sagesse consiste à vivre « à propos », en harmonie avec soi-même et le monde.

    La critique du dolorisme chrétienMontaigne s’oppose à la valorisation chrétienne de la souffrance :

    * Il rejette l’idée que la douleur ait une valeur rédemptrice.

    * Pour lui, le bonheur et le plaisir sont des buts légitimes et naturels.

    5. Techniques pour apprivoiser la mort

    Changer sa représentation de la mortMontaigne, influencé par le stoïcisme et l’épicurisme, recommande de travailler sur nos représentations :

    * La mort n’est pas un mal en soi, mais c’est la peur de la mort qui est nuisible.

    * Il faut considérer la mort comme un simple retour au néant, identique à l’état avant notre naissance.

    Le moment de la mort comme apogée de la vieMontaigne pense que le dernier instant de la vie donne du sens à toute l’existence :

    * Il faut mourir comme on a vécu, en cohérence avec ses valeurs et sa vision du monde.

    * Une « bonne mort » est celle qui clôt une vie vécue pleinement et sereinement.

    Vivre dans le présentL’une des clés de la sagesse tragique est l’ancrage dans le présent :

    * Il faut cesser de vivre dans l’angoisse du futur ou les regrets du passé.

    * Le moment présent est le seul espace où l’on peut véritablement exister et jouir de la vie.

    6. Une philosophie de la liberté et de la sérénité

    Éviter les souffrances inutilesMontaigne conseille d’éviter tout ce qui nuit à notre sérénité intérieure :

    * Se préserver des passions destructrices, des responsabilités lourdes, et des attachements excessifs.

    * Favoriser la simplicité, l’amitié sincère et les plaisirs modérés.

    L’éloge de la nature et des animauxMontaigne voit dans les animaux et les peuples dits « sauvages » des modèles de sagesse naturelle :

    * Ils vivent en harmonie avec leurs instincts sans les complexités inutiles des hommes civilisés.

    * Il admire leur capacité à vivre l’instant présent sans crainte de la mort.

    La culture comme moyen de retrouver la natureParadoxalement, Montaigne pense que la culture et la philosophie peuvent aider à retrouver une forme de sagesse naturelle :

    * Il faut utiliser la culture non pour s’éloigner de la nature, mais pour mieux y revenir.

    * Son idéal est un retour à une simplicité originelle, débarrassée des artifices sociaux et religieux.

    💡 Conclusion

    Michel Onfray présente Montaigne comme un philosophe de la sagesse tragique, alliant une profonde conscience de la mort à une quête hédoniste du plaisir. Pour Montaigne, la reconnaissance de notre finitude n’est pas un obstacle au bonheur, mais au contraire, ce qui donne toute sa valeur à la vie. En apprenant à mourir, on apprend surtout à vivre pleinement, dans la sérénité et la liberté intérieure. Cette sagesse tragique, loin d’être sombre ou désespérée, est une célébration joyeuse de l’existence humaine dans toute sa complexité.

    📚 Philosophes mentionnés

    * Héraclite (vers 544 av. J.-C. – vers 480 av. J.-C.) — Philosophe grec du changement perpétuel, célèbre pour la maxime « On ne se baigne jamais deux fois dans le même fleuve ».

    * Socrate (470 av. J.-C. – 399 av. J.-C.) — Philosophe grec, maître du dialogue et du doute méthodique.

    * Platon (428/427 – 348/347 av. J.-C.) — Philosophe grec, défenseur du dualisme âme-corps.

    * Diogène de Sinope (vers 412 av. J.-C. – vers 323 av. J.-C.) — Philosophe cynique, adepte de la vie simple et du rejet des conventions sociales.

    * Épicure (341 av. J.-C. – 270 av. J.-C.) — Philosophe grec, fondateur de l’épicurisme, prônant l’ataraxie et les plaisirs modérés.

    * Cicéron (106 av. J.-C. – 43 av. J.-C.) — Philosophe et orateur romain, auteur de Tusculanes, d’où est tirée la maxime « Philosopher, c’est apprendre à mourir ».

    * Lucrèce (98 av. J.-C. – 55 av. J.-C.) — Poète et philosophe romain, auteur de De rerum natura, défenseur de l’épicurisme matérialiste.

    * Épictète (vers 50 – vers 135) — Philosophe stoïcien grec, auteur du Manuel.

    * Marc Aurèle (121 – 180) — Empereur romain et philosophe stoïcien, auteur des Pensées pour moi-même.

    * Saint Augustin (354 – 430) — Philosophe et théologien chrétien, auteur des Confessions.

    * Jean-Jacques Rousseau (1712 – 1778) — Philosophe genevois, auteur du Discours sur l'origine et les fondements de l'inégalité parmi les hommes, défenseur du retour à la nature.

    * Jeremy Bentham (1748 – 1832) — Philosophe anglais, fondateur de l’utilitarisme, théoricien du calcul des plaisirs et des peines.

    * Arthur Schopenhauer (1788 – 1860) — Philosophe allemand, auteur du Monde comme volonté et comme représentation, penseur pessimiste.

    * Friedrich Nietzsche (1844 – 1900) — Philosophe allemand, auteur du Gai Savoir, défenseur de la philosophie tragique et critique du christianisme.

    * Sigmund Freud (1856 – 1939) — Neurologue autrichien, fondateur de la psychanalyse, théoricien des pulsions de vie (Éros) et de mort (Thanatos).

    Crédits : Michel Onfray et la Contre-histoire de la philosophie



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  • 1. Introduction

    Dans cette conférence, Michel Onfray explore comment Montaigne inaugure la conception moderne du corps à travers son approche autobiographique et philosophique dans les Essais. En refusant le dualisme traditionnel entre corps et âme, Montaigne invente une vision unifiée du corps humain, le libérant de l’héritage chrétien et platonicien. Onfray souligne comment cette pensée marque un tournant majeur dans la philosophie occidentale.

    2. Montaigne et l’unité du corps et de l’âme

    Refus du dualisme platonicien et chrétienMontaigne rejette la séparation classique entre un corps matériel, mortel et pécheur, et une âme immatérielle et immortelle. Contrairement à Platon et au christianisme, il conçoit l’homme comme un tout unifié :

    * Un corps unique : Il refuse l’idée d’un corps dévalorisé par la matière et prône une vision où le corps et l’âme ne forment qu’une seule entité.

    * Une âme incarnée : Influencé par Lucrèce et l’épicurisme, Montaigne envisage l’âme comme matérielle et inséparable du corps. Il refuse cependant les atomes épicuriens, adoptant une approche plus intuitive que scientifique.

    Une conception post-chrétienne du corpsMontaigne propose une vision du corps affranchie des concepts de péché et de rédemption. Le corps n’est plus le lieu du vice et de la faute, mais un espace d’expérience et de connaissance. Cette approche ouvre la voie à une conception moderne et séculière du corps humain.

    3. L’accident de cheval : un hapax existentiel

    L’événement fondateurUn moment décisif dans la vie de Montaigne est l’accident de cheval de 1568, qu’il décrit dans les Essais. Cet épisode marque ce que Michel Onfray appelle un hapax existentiel :

    * Montaigne, projeté violemment au sol, croit mourir et expérimente une quasi-mort consciente.

    * Il décrit la douceur inattendue de ce passage vers la mort, une expérience qui le transforme profondément.

    * Cet accident lui révèle l’unité fondamentale du corps et de l’âme et l’existence en lui d’une force inconsciente qui le dépasse.

    Une révélation du fonctionnement inconscientDurant cet accident, Montaigne prend conscience de phénomènes qui lui échappent :

    * Il prononce des mots et accomplit des gestes sans les contrôler.

    * Il réalise que le corps peut fonctionner de manière autonome, indépendamment de la volonté consciente, une intuition préfigurant les concepts freudiens d’inconscient et de refoulement.

    4. Montaigne et la préfiguration de la psychanalyse

    Un inconscient avant FreudOnfray montre comment Montaigne anticipe certains concepts majeurs de la psychanalyse :

    * L’inconscient : Montaigne observe des pensées et des gestes qui échappent à la conscience, pressentant l’existence d’un inconscient psychique.

    * Le refoulement : Il décrit comment des souvenirs ou des sensations peuvent disparaître puis réapparaître plus tard, évoquant un processus de refoulement.

    * La pulsion de mort : Lors de son accident, Montaigne ressent une attirance douce et apaisée vers la mort, préfigurant l’idée freudienne de la pulsion de mort.

    La sublimation et la psychanalyse avant l’heureMontaigne développe également l’idée de la sublimation :

    * Il considère que les souffrances et les pulsions peuvent être détournées vers des activités créatrices, comme l’écriture des Essais.

    * Il valorise la « purgation de l’âme » à travers l’écriture et la réflexion, processus similaire à la catharsis psychanalytique.

    5. Le regard critique de Montaigne sur la médecine

    Médecine scolastique et médecine pratiqueMontaigne adopte une position critique envers la médecine de son époque :

    * Il considère les médecins comme des sophistes, plus habiles à discourir qu’à soigner.

    * Il oppose la médecine théorique et verbeuse aux chirurgiens de guerre, qui pratiquent une médecine concrète et matérielle, ancrée dans le corps.

    Éloge d’une médecine préventive et matérialisteMontaigne défend l’idée d’une médecine préventive :

    * Il valorise la diététique, l’hygiène et le thermalisme pour préserver la santé.

    * Il récuse les explications magiques ou religieuses des maladies et privilégie des causes matérielles et naturelles.

    6. L’invention du corps moderne

    Un corps “déthéologisé” et unifiéAvec Montaigne, le corps devient :

    * Un corps immanent : Il n’est plus perçu comme pécheur ou inférieur à l’âme, mais comme un tout cohérent et autonome.

    * Un corps psychique : Il intègre les pulsions, les désirs et les émotions, abolissant la frontière entre le corps et l’esprit.

    * Un corps subjectif : Montaigne se prend lui-même pour objet d’étude, inaugurant une réflexion sur le moi corporel qui influencera la pensée moderne.

    Une subjectivité construite par l’expérienceMontaigne développe une philosophie du corps ancrée dans l’expérience individuelle :

    * Il explore ses sensations, ses maladies et ses plaisirs pour mieux se connaître.

    * Son projet autobiographique dans les Essais devient un outil d’introspection, où l’examen du corps mène à la connaissance de soi.

    💡 Conclusion

    Michel Onfray démontre que Montaigne est le véritable inventeur du corps moderne. En rompant avec le dualisme platonicien et chrétien, il conçoit un corps unifié, où matière et psychisme coexistent sans hiérarchie. Montaigne anticipe également de nombreuses notions de la psychanalyse freudienne, révélant la complexité du psychisme et l’existence d’un inconscient. Cette vision novatrice inaugure une nouvelle façon de penser l’homme, libérée des carcans religieux et métaphysiques, et ancrée dans l’immanence du vécu corporel.

    📚 Philosophes et concepts mentionnés

    * Socrate (470 av. J.-C. – 399 av. J.-C.) — Philosophe grec, auteur du précepte « Connais-toi toi-même ».

    * Hippocrate (460 av. J.-C – 370 av. J.-C.) — Médecin grec, père de la médecine occidentale.

    * Platon (428/427 av. J.-C – 348/347 av. J.-C.) — Philosophe grec, défenseur du dualisme âme-corps.

    * Épicure (341 av. J.-C – 270 av. J.-C.) — Philosophe grec, fondateur de l’épicurisme, prônant l’ataraxie et le matérialisme atomiste.

    * Lucrèce (98 av. J.-C – 55 av. J.-C.) — Poète et philosophe romain, auteur de De rerum natura, défenseur de l’épicurisme matérialiste.

    * Saint Augustin (354 – 430) — Philosophe et théologien chrétien, auteur des Confessions.

    * Michel de Montaigne (1533 – 1592) — Philosophe humaniste français, auteur des Essais, explorant l’expérience subjective et le corps.

    * Étienne de La Boétie (1530 – 1563) — Ami proche de Montaigne, auteur du Discours de la servitude volontaire.

    * Ludwig Feuerbach (1804 – 1872) — Philosophe matérialiste allemand, auteur de L’Essence du christianisme, célèbre pour la formule « L’homme est ce qu’il mange ».

    * Sigmund Freud (1856 – 1939) — Fondateur de la psychanalyse, théoricien de l’inconscient, du refoulement et des pulsions.

    * Friedrich Nietzsche (1844 – 1900) — Philosophe allemand, critique du dualisme platonicien et du christianisme, auteur du concept de l’« éternel retour ».

    * Jean-Paul Sartre (1905 – 1980) — Philosophe existentialiste français, auteur de L’Être et le Néant et théoricien de la psychanalyse existentielle.

    Crédits : Michel Onfray et la Contre-histoire de la philosophie



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  • 1. Introduction

    Michel Onfray explore la relation complexe de Montaigne à la religion dans ses Essais, soulignant l’originalité de sa pensée et sa posture critique face au christianisme institutionnel. Montaigne développe une vision personnelle de la foi, marquée par un catholicisme modéré, un scepticisme profond et une quête de liberté intérieure. Cette conférence révèle comment Montaigne conçoit une « religion immanente », ancrée dans l’expérience humaine et dégagée des dogmes transcendants.

    2. Montaigne et sa foi : entre catholicisme et scepticisme

    Un catholicisme modéré dans un siècle de violence religieuseMontaigne vit au XVIe siècle, marqué par les guerres de religion entre catholiques et protestants. Bien qu'il se revendique catholique, il adopte une posture modérée :

    * Catholique pratiquant : Il assiste à la messe, effectue des pèlerinages et meurt en recevant l’extrême-onction.

    * Tolérant envers les autres confessions : Il refuse l’intolérance religieuse et critique les violences des guerres de religion, prônant une coexistence pacifique.

    * Sceptique sur les dogmes : Montaigne remet en question les vérités absolues de l’Église tout en maintenant une foi personnelle, refusant de trancher sur l'existence de Dieu.

    Critique du fidéisme et de l’athéismeMontaigne adopte une position originale face à la foi :

    * Rejet du fidéisme strict : Bien qu’il reconnaisse la foi comme une nécessité, il critique l’idée que la croyance en Dieu doive être aveugle et sans raison.

    * Opposition à l’athéisme : Il s’oppose fermement aux athées qu’il qualifie d’« athéistes », tout en admettant que ses doutes pourraient être perçus comme une porte ouverte vers l’athéisme.

    3. La religion immanente : une foi ancrée dans l’humain

    Un Dieu intérieur plutôt que transcendantMontaigne développe une vision immanente de la religion :

    * Dieu comme présence intérieure : Plutôt qu’un Dieu lointain et transcendant, il privilégie l’idée d’un divin présent en chacun, accessible par l’introspection et l’expérience personnelle.

    * Critique de la théologie dogmatique : Montaigne se méfie des discours trop conceptuels sur Dieu, préférant une approche basée sur la simplicité et la modestie.

    Une morale sans dogmeMontaigne promeut une éthique fondée sur la bonté naturelle de l’homme, indépendamment des doctrines religieuses :

    * Justesse et charité : Pour lui, être chrétien, c’est avant tout être juste, charitable et bon, plus que suivre des rituels ou des dogmes.

    * Relativisme religieux : Il souligne que les religions sont des constructions humaines, variables selon les cultures et les époques, et que la vérité spirituelle ne peut être monopolisée par une confession unique.

    4. Montaigne face aux institutions religieuses

    Critique implicite de l’ÉgliseBien qu’il reste catholique, Montaigne critique subtilement l’Église institutionnelle :

    * Anticléricalisme modéré : Il dénonce les abus de l’Église sans toutefois la rejeter frontalement.

    * Refus des dogmes rigides : Il critique la prétention de l’Église à détenir la vérité absolue, prônant une foi plus personnelle et libre.

    La censure ecclésiastique et la diplomatie de MontaigneLors de son voyage à Rome, Montaigne soumet ses Essais au pape Grégoire XIII pour obtenir son approbation :

    * Modifications demandées : L’Église demande à Montaigne de remplacer le mot « fortune » par « Dieu » et de supprimer certains passages jugés problématiques.

    * Refus subtil : Montaigne ne modifie pas son texte, préférant préserver sa liberté d’expression tout en conservant des relations diplomatiques avec l’Église.

    5. L’héritage philosophique de Montaigne : entre épicurisme et christianisme

    Un épicurisme chrétienMontaigne s’inscrit dans la lignée du christianisme épicurien, cherchant à concilier foi et plaisir modéré :

    * Joie de vivre et spiritualité : Il valorise le bonheur simple et naturel tout en conservant une foi sincère.

    * Rejet du dolorisme : Contrairement à la tradition chrétienne doloriste, il refuse de voir la souffrance comme un moyen de se rapprocher de Dieu.

    Précurseur de la pensée laïqueMontaigne ouvre la voie à une vision laïque de la foi :

    * Séparation entre foi et institution : Il affirme la possibilité d’une foi intime, indépendante des dogmes religieux.

    * Tolérance et pluralisme : Il défend la liberté de conscience et la coexistence pacifique entre les différentes confessions religieuses.

    💡 Conclusion

    Michel Onfray présente Montaigne comme un penseur complexe, oscillant entre foi catholique et scepticisme critique. Sa « religion immanente » témoigne d’une quête de liberté spirituelle, déliée des dogmes et ancrée dans l’expérience humaine. En valorisant la bonté naturelle, la tolérance et la liberté intérieure, Montaigne ouvre la voie à une pensée laïque et humaniste, où la religion devient une affaire personnelle et intime, plutôt qu’une institution coercitive.

    📚 Philosophes et concepts mentionnés

    * Protagoras (vers 490 – vers 420 av. J.-C.) — Philosophe sophiste grec, auteur de la maxime « L’homme est la mesure de toute chose ».

    * Platon (428/427 – 348/347 av. J.-C.) — Philosophe grec, auteur du dualisme entre le monde des idées et le monde sensible.

    * Épicure (341 – 270 av. J.-C.) — Philosophe grec, fondateur de l’épicurisme, prônant l’ataraxie et les plaisirs modérés.

    * Lucrèce (vers 98 – vers 55 av. J.-C.) — Philosophe et poète romain, auteur de De rerum natura, défenseur de l’épicurisme.

    * Sénèque (4 av. J.-C. – 65 ap. J.-C.) — Philosophe stoïcien romain, auteur des Lettres à Lucilius.

    * Julien l’Apostat (331 – 363) — Empereur romain ayant tenté de restaurer les cultes païens face au christianisme.

    * Érasme de Rotterdam (1467 – 1536) — Humaniste et théologien chrétien, auteur de L’Éloge de la folie.

    * Martin Luther (1483 – 1546) — Réformateur protestant allemand, initiateur de la Réforme.

    * Jean Calvin (1509 – 1564) — Réformateur protestant français, auteur de L'Institution de la religion chrétienne.

    * Michel de Montaigne (1533–1592) — Philosophe humaniste français, auteur des Essais.

    * Giordano Bruno (1548 – 1600) — Philosophe italien, défenseur de l’héliocentrisme et du panthéisme, brûlé par l’Inquisition.

    * Blaise Pascal (1623 – 1662) — Mathématicien et philosophe français, auteur des Pensées et du pari de Pascal.

    * Voltaire (1694 – 1778) — Philosophe des Lumières, défenseur de la tolérance religieuse et critique de l’intolérance cléricale.

    * Ludwig Feuerbach (1804 – 1872) — Philosophe allemand, auteur de L'Essence du christianisme, critique de la religion.

    * Léo Strauss (1899 – 1973) — Philosophe politique germano-américain, théoricien de la lecture ésotérique des textes philosophiques.

    Crédits : Michel Onfray et la Contre-histoire de la philosophie



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  • 1. Introduction

    Dans cette conférence, Michel Onfray analyse la méthode de Michel de Montaigne pour aborder les philosophes antiques et modernes. En utilisant le terme « pilloter », issu de l’apiculture, Onfray décrit comment Montaigne butine dans les œuvres des Anciens pour en extraire le miel, c’est-à-dire les idées qu’il trouve utiles et stimulantes. Cette approche sélective et libre s’inscrit dans la tradition humaniste et marque l’originalité des Essais.

    2. Le rapport de Montaigne à l’Antiquité

    Un amour précoce pour la culture antiqueMontaigne développe très tôt une fascination pour l’Antiquité. Élevé en latin dès son plus jeune âge, il considère cette langue morte comme sa langue maternelle. Cette immersion influence sa vision du monde et son rapport aux textes antiques, qu’il lit dans leur langue originale ou en traduction.

    La bibliothèque de Montaigne : un trésor antique et contemporainSa bibliothèque, riche d’environ 1000 volumes, comprend :

    * Auteurs antiques : Platon, Aristote, Sénèque, Épicure, Lucrèce, Diogène Laërce, etc.

    * Auteurs contemporains : Machiavel, Luther, Dante, Pétrarque, ainsi que des récits de voyage relatant la découverte des Amériques.

    * Poètes et humanistes : Marot, Du Bellay, et des philosophes comme Érasme.

    Montaigne grave aussi 57 sentences dans sa bibliothèque, dont 56 issues de l’Antiquité gréco-latine et une seule contemporaine, de Michel de L’Hospital.

    3. La méthode du « pillotage »

    Butiner sans suivre un système rigideMontaigne refuse de s’enfermer dans un système philosophique unique. Il puise dans divers courants antiques selon ses besoins :

    * Stoïcisme pour sa sagesse pratique et son éthique du détachement.

    * Épicurisme pour l’éloge du plaisir modéré.

    * Scepticisme pour son doute méthodique et sa méfiance envers les vérités absolues.

    Cette approche souple lui permet de construire une philosophie personnelle, fondée sur l’expérience et la réflexion individuelle.

    Critique des systèmes fermésMontaigne critique les philosophies dogmatiques et les concepts abstraits déconnectés du réel. Il se méfie particulièrement du platonisme et du pythagorisme pour leur dualisme entre le monde sensible et le monde des idées. Il préfère les philosophies centrées sur l’existence concrète, la pratique quotidienne et la recherche du bonheur ici et maintenant.

    4. Montaigne et les courants philosophiques antiques

    Les stoïciens et les épicuriensMontaigne adopte des éléments des deux écoles sans s’y enfermer :

    * Stoïcisme : Il apprécie l’idée de distinguer ce qui dépend de nous et ce qui ne dépend pas de nous (inspiré d’Épictète) et l’importance de la maîtrise de soi.

    * Épicurisme : Il adhère à la quête d’un plaisir simple et naturel, tout en rejetant l’atomisme matérialiste d’Épicure.

    Les sceptiquesMontaigne est souvent associé au scepticisme pyrrhonien, mais Onfray nuance ce point. Montaigne pratique un doute méthodique, inspiré davantage de Socrate que de Pyrrhon. Il cherche la vérité sans jamais l’affirmer de manière dogmatique, adoptant la devise socratique : « Tout ce que je sais, c’est que je ne sais rien. »

    Les cyniques et les cyrénaïquesMontaigne s’inspire aussi des cyniques (comme Diogène) pour leur critique des conventions sociales et leur vie simple et autonome. Des cyrénaïques, il retient la valorisation du plaisir immédiat, tout en prônant la modération.

    5. La critique des Anciens

    Contre Platon et PythagoreMontaigne critique :

    * Le dualisme platonicien : Il rejette la séparation entre le monde des idées et le monde sensible.

    * La métaphysique pythagoricienne : Il refuse l’idée d’une âme immatérielle et immortelle distincte du corps.

    La déplatonisation de SocrateMontaigne tente de libérer Socrate de l’image que Platon en a donnée. Il valorise le Socrate historique, celui du doute et du dialogue, et non le Socrate idéalisé et métaphysicien de Platon.

    L’indifférence envers AristoteMalgré la place centrale d’Aristote dans la scolastique médiévale, Montaigne l’ignore largement. Il critique l’aristotélisme pour son formalisme excessif et sa complexité inutile, préférant des philosophies plus proches de l’expérience humaine.

    6. Montaigne et la modernité de son approche

    Un penseur du concret et de l’immanenceMontaigne privilégie les philosophies orientées vers la vie pratique et l’expérience concrète. Il se méfie des abstractions et valorise les savoirs utiles à la conduite de la vie. Son approche pluraliste et tolérante en fait un précurseur des penseurs modernes.

    Un humanisme tolérant et critiqueMontaigne adopte une posture de tolérance vis-à-vis des différences culturelles et religieuses. Il critique la barbarie coloniale dans son essai Des cannibales, défend la tolérance religieuse en pleine période de guerres de religion, et remet en question les pratiques de torture et les persécutions des sorcières.

    💡 Conclusion

    Michel Onfray présente Montaigne comme un philosophe humaniste qui, en « pillotant » les Anciens, construit une pensée personnelle et originale. Refusant les systèmes rigides, Montaigne adopte une méthode souple et critique, puisant dans divers courants antiques pour élaborer une philosophie du concret et de l’immanence. Cette approche fait de lui un précurseur de la pensée moderne, où le scepticisme méthodique, la quête du bonheur et la tolérance occupent une place centrale.

    📚 Philosophes mentionnés

    * Pythagore (vers 580 – vers 495 av. J.-C.) — Philosophe grec, fondateur du pythagorisme, connu pour son dualisme âme-corps.

    * Héraclite (vers 544 – vers 480 av. J.-C.) — Philosophe grec du changement perpétuel, auteur de la doctrine du « flux ».

    * Parménide (VIe – Ve siècle av. J.-C.) — Philosophe grec, penseur de l’Un et de l’immobilité.

    * Socrate (470 av. J.-C. – 399 av. J.-C.) — Philosophe grec, maître du dialogue et du doute méthodique.

    * Aristippe de Cyrène (vers 435 av. J.-C. – vers 356 av. J.-C.) — Philosophe grec, fondateur de l’école cyrénaïque, prônant la recherche du plaisir immédiat.

    * Platon (428/427 av. J.-C. – 348/347 av. J.-C.) — Philosophe grec, fondateur de l’Académie, auteur du dualisme idées-monde sensible.

    * Diogène de Sinope (vers 412 av. J.-C. – vers 323 av. J.-C.) — Philosophe cynique, adepte de la vie simple et du rejet des conventions sociales.

    * Aristote (384 av. J.-C. – 322 av. J.-C.) — Philosophe grec, élève de Platon, théoricien de la logique et des sciences naturelles.

    * Épicure (341 av. J.-C. – 270 av. J.-C.) — Philosophe grec, fondateur de l’épicurisme, prônant l’ataraxie et les plaisirs simples.

    * Lucrèce (vers 98 av. J.-C. – vers 55 av. J.-C.) — Philosophe et poète romain, auteur de De rerum natura, défenseur de l’épicurisme.

    * Sénèque (4 av. J.-C. – 65 ap. J.-C.) — Philosophe stoïcien romain, auteur des Lettres à Lucilius.

    * Épictète (vers 50 – vers 135) — Philosophe stoïcien grec, auteur du Manuel.

    * Marc Aurèle (121 – 180) — Empereur romain et philosophe stoïcien, auteur des Pensées pour moi-même.

    * Diogène Laërce (IIIe siècle) — Biographe des philosophes grecs, auteur de Vies et doctrines des philosophes illustres.

    * Dante Alighieri (1265 – 1321) — Poète italien, auteur de la Divine Comédie, chef-d'œuvre de la littérature mondiale décrivant un voyage allégorique à travers l'Enfer, le Purgatoire et le Paradis.

    * Guillaume d’Ockham (1285 – 1347) — Philosophe médiéval, défenseur du nominalisme.

    * Pétrarque (1304 – 1374) — Poète et humaniste italien, considéré comme le "père de l'humanisme", célèbre pour son Canzoniere, recueil de poèmes dédiés à Laure.

    * Érasme (1466 – 1536) — Humaniste, théologien et philosophe néerlandais, auteur de L'Éloge de la folie, critique satirique de la société et de l'Église de son temps.

    * Nicolas Machiavel (1469 – 1527) — Homme politique et philosophe italien, auteur du Prince, ouvrage fondateur de la science politique moderne.

    * Martin Luther (1483 – 1546) — Moine et théologien allemand, initiateur de la Réforme protestante en publiant ses 95 thèses contre les indulgences en 1517.

    * Clément Marot (1496 – 1544) — Poète français de la Renaissance, connu pour ses épîtres, élégies et traductions des Psaumes, contribuant au développement de la poésie française.

    * Joachim du Bellay (1522 – 1560) — Poète français, membre de la Pléiade, auteur de Défense et illustration de la langue française, plaidoyer pour l'enrichissement de la langue et de la littérature françaises.

    * Michel de Montaigne (1533–1592) — Philosophe humaniste français, auteur des Essais.

    * Friedrich Nietzsche (1844 – 1900) — Philosophe allemand, auteur de Ecce Homo, critique du platonisme et du christianisme.

    Crédits : Michel Onfray et la Contre-histoire de la philosophie



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  • 1. Introduction

    Michel Onfray explore dans cette conférence la manière unique dont Montaigne a composé ses Essais, qu'il qualifie lui-même de « fagotage ». Loin d'un ouvrage rigide et structuré, les Essais sont le produit d'un processus organique où l'auteur se façonne en même temps qu'il écrit. Ce travail de va-et-vient entre la pensée et l'écriture fait des Essais un ouvrage sans équivalent dans l'histoire de la philosophie.

    2. Les Essais : un autoportrait en construction

    Un livre pour tous et pour personneOnfray compare les Essais au Ecce Homo de Nietzsche : un livre écrit autant pour soi que pour les autres, ou peut-être pour personne. Montaigne affirme que les Essais sont écrits pour ses proches, sans ambition de postérité. Pourtant, le soin apporté à leur composition et leur universalité montrent une volonté plus vaste.

    Un autoportrait évolutifMontaigne ne se contente pas de se peindre tel qu'il est ; il se façonne au fil de l'écriture. Ce processus dynamique fait des Essais un autoportrait mouvant, où l'auteur s'explore, se corrige et se complète. L'écriture devient ainsi un acte d'auto-analyse, préfigurant les méthodes introspectives modernes.

    3. Le processus de création : entre dictée et oralité

    Les Essais dictés, non écritsOnfray révèle un aspect méconnu : Montaigne a dicté ses Essais plutôt que de les écrire. Quatre passages le confirment, où il mentionne qu'il parle ses textes en marchant, pendant qu'un secrétaire les transcrit. Cette oralité confère aux Essais un ton vivant et spontané, proche de la conversation.

    Un style libre et digressifLoin des traités philosophiques structurés, Montaigne privilégie un style fluide et libre, marqué par des digressions fréquentes. Il saute d'un sujet à l'autre, illustre ses pensées par des anecdotes et mélange citations antiques et réflexions personnelles. Cette méthode reflète son scepticisme : la vérité est insaisissable, et l'esprit humain doit vagabonder pour tenter de l'approcher.

    4. Les silences et les non-dits des Essais

    Les absences révélatricesMontaigne, malgré son désir de transparence, laisse des silences troublants dans les Essais. Il omet ainsi des événements majeurs comme la Saint-Barthélemy ou les conflits religieux de son époque. De même, il passe sous silence des aspects de sa vie personnelle :

    * Sa mère et ses filles sont presque absentes.

    * Son épouse est mentionnée à peine.

    * Ses enfants sont évoqués brièvement, sans émotion particulière.

    Le roman familial freudienOnfray analyse ces omissions à la lumière du concept freudien du "roman familial". Montaigne magnifie la figure paternelle tout en effaçant la mère, créant un autoportrait idéalisé. Ce processus révèle un désir inconscient de se réinventer et d’échapper à sa propre réalité familiale.

    5. Montaigne : lecteur paresseux et penseur original

    Un lecteur sélectif et critiqueMontaigne confesse lire peu et mal :

    * Il ne lit jamais un livre en entier après ses 40 ans.

    * Il préfère les récits plaisants aux traités complexes.

    * Il extrait des citations pour nourrir ses propres réflexions, souvent sans lire l'œuvre complète.

    Cette lecture fragmentaire nourrit son approche digressive. Plutôt que de suivre un plan préconçu, il butine d’idée en idée, créant un "fagotage" hétéroclite.

    Un usage singulier des citationsLes nombreuses citations dans les Essais ne servent pas de simples ornements. Elles agissent comme des points de départ pour ses réflexions personnelles. Onfray compare cette méthode à l'association libre de la psychanalyse : une citation éveille une pensée, qui en entraîne une autre, sans plan préétabli.

    6. Les Essais : entre philosophie et littérature

    Philosophie expérimentale et sceptiqueMontaigne refuse les dogmes et préfère une approche sceptique et expérimentale. Il ne cherche pas à établir des vérités absolues, mais à témoigner de sa propre expérience. Son fameux "Que sais-je ?" résume cette posture : la connaissance est toujours relative et sujette à révision.

    Une œuvre baroque et sans planOnfray insiste sur l’absence de structure rigide dans les Essais. Les chapitres varient en longueur et en ton, alternant sujets graves et légers. Ce chaos apparent reflète la complexité de l’esprit humain. Montaigne privilégie le "flux héraclitéen" (tout est mouvement et changement) plutôt qu’une conception statique de la pensée.

    💡 Conclusion

    Le fagotage des Essais illustre l’originalité radicale de Montaigne : un philosophe qui se peint lui-même tout en se construisant. Par sa méthode libre et orale, il invente une forme nouvelle, entre littérature et philosophie, préfigurant les pratiques modernes d’introspection. Michel Onfray dévoile ainsi un Montaigne complexe, marqué par ses silences, ses contradictions et sa quête incessante de soi.

    Les Essais restent un modèle unique d’auto-analyse et de réflexion sceptique, où l’expérience personnelle devient une matière philosophique universelle.

    📚 Philosophes et concepts mentionnés

    * Héraclite (vers 544 – vers 480 av. J.-C.) — Philosophe grec, penseur du changement et du flux perpétuel.

    * Parménide (VIe – Ve siècle av. J.-C.) — Philosophe grec, défenseur de l’immobilité et de l’être.

    * Sénèque (4 av. J.-C. – 65 ap. J.-C.) — Philosophe stoïcien romain, auteur des Lettres à Lucilius.

    * Plutarque (46 – 125) — Philosophe et biographe grec, auteur des Vies parallèles.

    * Marc Aurèle (121 – 180) — Empereur romain et philosophe stoïcien, auteur des Pensées pour moi-même.

    * Saint Augustin (354 – 430) — Philosophe et théologien chrétien, auteur des Confessions.

    * Guillaume d’Ockham (1285 – 1347) — Philosophe médiéval, initiateur du nominalisme.

    * Érasme de Rotterdam (1467 – 1536) — Humaniste et théologien chrétien, auteur de L’Éloge de la folie.

    * Étienne de La Boétie (1530 – 1563) — Philosophe et ami proche de Montaigne, auteur du Discours de la servitude volontaire.

    * Michel de Montaigne (1533–1592) — Philosophe humaniste français, auteur des Essais.

    * Jean-Jacques Rousseau (1712 – 1778) — Philosophe et écrivain genevois, auteur des Confessions.

    * Friedrich Nietzsche (1844 – 1900) — Philosophe allemand, auteur de Ecce Homo et critique de la morale occidentale.

    * Sigmund Freud (1856 – 1939) — Neurologue autrichien, fondateur de la psychanalyse et théoricien du "roman familial".

    * Gilles Deleuze (1925 – 1995) — Philosophe français, auteur de Le Pli, réflexion sur le baroque et l’héraclitéisme.

    Crédits : Michel Onfray et la Contre-histoire de la philosophie



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  • 1. Michel de Montaigne

    Michel Onfray explore dans cette conférence la figure complexe de Michel de Montaigne, marquant un tournant dans l’économie de la pensée occidentale. Après avoir étudié le christianisme épicurien chez Érasme, Onfray s’intéresse à Montaigne comme figure clé d’un « épicurisme chrétien » inversé, où l’accent n’est plus sur la foi mais sur l’hédonisme modéré. Cette conférence inaugure une série consacrée à Montaigne, analysé à travers une approche psycho-biographique, mettant en lumière la relation entre son corps, sa pensée et son œuvre.

    2. Psycho-biographie et méthode généalogique

    L’importance du corps dans la penséeMichel Onfray adopte une méthode psycho-biographique inspirée de Nietzsche et Sartre, considérant que toute philosophie est la confession d’une personne et l’autobiographie d’un corps. Il explore ainsi comment la pensée de Montaigne se construit à partir de son propre vécu corporel, de ses maladies, de ses blessures physiques et morales. Le corps souffrant de Montaigne — marqué par des coliques néphrétiques, des crises de calculs rénaux, et des faiblesses physiques — devient un moteur essentiel dans l’élaboration de sa pensée philosophique.

    La quête du "je" et de la subjectivitéOnfray souligne que Montaigne s’interroge profondément sur la nature du "je". Les Essais sont l’occasion pour lui de se découvrir et de se peindre, non par narcissisme, mais pour mieux comprendre qui il est. Cette quête de soi est difficile, car Montaigne doute constamment de sa propre valeur et cherche à s’aimer malgré ses défauts physiques et psychologiques. Il n’écrit pas pour célébrer son ego, mais pour s’en approcher honnêtement.

    3. Le portrait physique et moral de Montaigne

    Un corps défaillant et souffrantMontaigne dresse lui-même un portrait sans complaisance :

    * Physique : Petit, aux membres disproportions et à la santé fragile, il souffre de nombreuses maladies. Il évoque notamment sa perte de cheveux précoce, son visage peu expressif, et ses crises douloureuses dues aux calculs rénaux.

    * Sexualité : Il parle librement de ses difficultés sexuelles, évoquant son impuissance et ses frustrations. Cette honnêteté est rare pour son époque.

    * Santé mentale : Montaigne confesse des périodes de mélancolie et de profonde anxiété, accentuées par sa conscience aiguë de la mort.

    Un esprit inquiet et paradoxalMontaigne se décrit également comme :

    * Irrésolu et paresseux : Il avoue une certaine nonchalance et un goût pour le loisir plus que pour l’action.

    * Hypersensible : Il est profondément ému par la souffrance des autres, y compris celle des animaux, tout en étant fasciné par la cruauté et les monstres.

    * Modeste et sceptique : Son scepticisme s’exprime par la devise "Que sais-je ?", illustrant son refus des dogmes et sa méfiance envers les certitudes.

    4. L’éducation et l’influence du père

    Un projet éducatif uniqueLe père de Montaigne, inspiré par les idées pédagogiques d’Érasme, mit en place une éducation singulière pour son fils :

    * Une immersion latine : Montaigne est élevé dans un environnement où seul le latin est parlé, ce qui fait de lui un "enfant romain" détaché de sa culture natale.

    * Une éducation douce et musicale : Il est éveillé chaque matin par de la musique douce et grandit dans un cadre qui privilégie la joie et le plaisir d’apprendre.

    Les conséquences psychologiquesCe projet éducatif engendre un décalage profond :

    * Montaigne grandit éloigné des enfants de son âge et du monde réel, créant une forme de solitude précoce.

    * Ce décalage entre sa formation idéalisée et la réalité du monde accentue son sentiment d’étrangeté à soi-même et aux autres.

    5. Montaigne et la quête d’une sagesse hédoniste

    De la douleur au plaisir modéréLes souffrances physiques et morales de Montaigne le poussent à chercher un équilibre. Sa philosophie valorise un hédonisme mesuré, où le plaisir doit être recherché, mais toujours dans la modération. Il rejette les excès, qu’ils soient ascétiques ou hédonistes, et prône un art de vivre simple et serein.

    L’importance du loisir et du retraitMontaigne se retire dans sa tour pour se consacrer à la lecture, à l’écriture et à la méditation. Ce retrait n’est pas une fuite, mais un choix délibéré pour vivre à son propre rythme et selon ses propres lois. Le loisir ("otium" chez les Romains) devient pour lui une valeur fondamentale, permettant l’épanouissement personnel et la réflexion philosophique.

    6. Les Essais : une quête de soi et du monde

    Un projet d’écriture uniqueLes Essais sont un projet littéraire sans précédent :

    * Montaigne y dicte ses pensées, souvent à haute voix, dans un style libre et digressif.

    * Il s’y peint "sans fard ni masque", offrant un autoportrait sincère et complexe.

    * Les Essais mêlent réflexions personnelles, citations antiques et observations du monde, créant un dialogue constant entre l’individu et l’universel.

    Un équilibre entre scepticisme et hédonismeMontaigne développe un scepticisme tempéré : il doute de tout, y compris de ses propres certitudes, mais il trouve dans cette incertitude une source de liberté et de plaisir. Son hédonisme n’est pas celui des excès, mais celui d’un bonheur simple, fait de petits plaisirs quotidiens et de moments de sérénité.

    💡 Conclusion

    Michel Onfray présente Montaigne comme une figure fondatrice de la pensée moderne, à la croisée du scepticisme, de l’hédonisme et de l’humanisme. À travers les Essais, Montaigne explore les complexités de l’âme humaine, en se peignant lui-même pour mieux comprendre les autres. Son œuvre témoigne d’une quête de soi profonde, marquée par la douleur et la fragilité, mais orientée vers une sagesse apaisée et un art de vivre simple.

    Montaigne apparaît ainsi comme un philosophe de la vie quotidienne, prônant la modération, la tolérance et l’amour de la liberté. Son message reste d’une étonnante actualité : "Le grand et glorieux chef-d'œuvre de l'homme est de vivre à propos."

    📚 Philosophes mentionnés

    * Socrate (470 av. J.-C. – 399 av. J.-C.) — Philosophe grec, figure fondatrice de la philosophie occidentale.

    * Platon (428/427 av. J.-C. – 348/347 av. J.-C.) — Philosophe grec, auteur du Banquet et du Mythe de la caverne.

    * Épicure (341 av. J.-C. – 270 av. J.-C.) — Philosophe grec, fondateur de l’épicurisme, prônant l’ataraxie et les plaisirs modérés.

    * Horace (65 av. J.-C. – 8 av. J.-C.) — Poète romain, célèbre pour son Carpe Diem et son éloge du loisir (otium).

    * Sénèque (4 av. J.-C. – 65 ap. J.-C.) — Philosophe stoïcien romain, auteur des Lettres à Lucilius.

    * Plotin (205 – 270) — Philosophe néoplatonicien, auteur des Ennéades.

    * Érasme de Rotterdam (1467 – 1536) — Humaniste et théologien chrétien, auteur de L’Éloge de la folie et des Colloques.

    * Jean Bodin (1530 – 1596) — Juriste et philosophe français, auteur de La Démonomanie des sorciers.

    * Michel de Montaigne (1533–1592) — Philosophe humaniste français, auteur des Essais.

    * Friedrich Nietzsche (1844 – 1900) — Philosophe allemand, auteur du Guet Savoir, critique de la morale occidentale.

    * Jean-Paul Sartre (1905 – 1980) — Philosophe existentialiste français, auteur de L’Être et le Néant.

    Crédits : Michel Onfray et la Contre-histoire de la philosophie



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  • 1. Introduction

    Dans cette conférence, Michel Onfray explore la notion d'« horticulture transcendantale » à travers l’analyse du Banquet religieux d’Érasme. Il examine comment Érasme conçoit le jardin comme un espace philosophique et spirituel, synthétisant les traditions chrétienne et épicurienne. Ce jardin utopique devient un lieu de méditation, d’éducation, et de contemplation, où se conjuguent plaisir et piété.

    2. Le jardin philosophique d’Érasme

    Une utopie chrétienne épicurienneÉrasme imagine un jardin à la fois réel et symbolique, inspiré des jardins antiques (comme celui d’Épicure) et du jardin biblique d’Éden. Ce jardin devient un espace de pratique philosophique où se mêlent hédonisme épicurien et spiritualité chrétienne. Michel Onfray qualifie ce lieu de « transcendantal » car il dépasse les simples expériences sensorielles pour accéder à une dimension spirituelle et méditative.

    Un espace pédagogique et contemplatifLe jardin d’Érasme est conçu pour nourrir à la fois le corps et l’esprit. On y trouve :

    * Un potager : pour une alimentation frugale et saine, symbole d’autonomie et de simplicité.

    * Un jardin médicinal : pour soigner le corps et rappeler l’importance du souci de soi.

    * Une volière et un verger : qui célèbrent la diversité du vivant et invitent à la contemplation.

    * Des fontaines et des canaux : symboles de pureté et de circulation harmonieuse entre les éléments.

    Ce jardin est aussi un espace éducatif où chaque plante, arbre ou animal est accompagné d’adages et de panneaux explicatifs, soulignant l’importance de la pédagogie humaniste d’Érasme.

    3. Le banquet religieux : entre épicurisme et christianisme

    Un repas hédoniste et spirituelLe Banquet religieux décrit par Érasme est une scène emblématique où neuf personnages discutent autour d’un repas simple mais raffiné. Le menu – composé de vins, de légumes du jardin, de fruits et de mets délicats – illustre l’idée d’un plaisir modéré et honnête, fidèle aux principes épicuriens. Ce banquet est aussi un moment de réflexion où les convives débattent de thèmes religieux, philosophiques et éthiques, mêlant allégrement références païennes et chrétiennes.

    Le jardin comme métaphore de la vie philosophiqueLe banquet se déroule dans le jardin, qui devient le symbole d’une vie équilibrée, où plaisir et piété cohabitent. Les discussions portent notamment sur :

    * La vertu de la sobriété et de la modération.

    * L’importance de l’éducation et de la contemplation.

    * La critique des excès du clergé et des dépenses somptuaires de l’Église.

    Ce jardin devient ainsi un microcosme idéal, un espace utopique où l’homme peut s’élever spirituellement tout en jouissant des plaisirs simples de la vie.

    4. Symbolisme et spiritualité du jardin

    Le jardin d’Éden réinterprétéMichel Onfray souligne que le jardin d’Érasme est une relecture du jardin d’Éden. Là où le paradis biblique était un lieu de perfection perdu à cause du péché originel, le jardin d’Érasme est un espace de reconquête spirituelle. Il symbolise l’espoir d’un retour à une relation directe et pure avec Dieu, sans passer par l’intermédiaire de l’Église institutionnelle.

    L’équilibre entre corps et espritContrairement à la tradition chrétienne doloriste qui méprise le corps et ses plaisirs, Érasme célèbre l’union harmonieuse entre le corps et l’âme. Le jardin est un lieu où les sens sont sollicités (vue, odorat, goût, etc.) mais toujours dans une optique de modération et d’élévation spirituelle.

    La maison philosophique : architecture et symbolismeÉrasme imagine également un agencement architectural autour du jardin :

    * Une bibliothèque attenante à une chapelle, symbolisant l’équilibre entre savoir et foi.

    * Une salle des cartes pour rappeler la vocation universelle du christianisme.

    * Un hôpital pour prendre soin des corps et des âmes.

    Chaque bâtiment est pensé pour favoriser la contemplation, la méditation et l’élévation de l’esprit.

    5. Le message philosophique et politique d’Érasme

    Un humanisme pacifisteÉrasme, figure centrale de l’humanisme chrétien, défend une vision pacifiste et tolérante du christianisme. Il s’oppose aux guerres religieuses et prône la paix universelle à travers la pratique évangélique et l’éducation. Son jardin devient ainsi le symbole d’un monde idéal, fondé sur l’amour du prochain, la simplicité et la sérénité.

    Critique de l’Église et retour aux sourcesTout au long du Banquet religieux, Érasme critique les excès et la corruption de l’Église institutionnelle, tout en défendant une foi pure et directe, centrée sur le message du Christ. Il invite à une relecture personnelle des Évangiles et à une pratique du christianisme fondée sur la charité, la tolérance et la modération.

    💡 Conclusion

    Avec Une horticulture transcendantale, Michel Onfray met en lumière la richesse philosophique du Banquet religieux d’Érasme. Le jardin devient un espace utopique, un lieu de réconciliation entre épicurisme et christianisme, entre plaisir et spiritualité. Il symbolise l’espoir d’un monde pacifié, fondé sur l’éducation, la contemplation et la recherche de la sagesse. Ce jardin philosophique incarne ainsi l’idéal humaniste d’Érasme : un monde où l’homme peut s’élever tout en restant fidèle à sa nature terrestre.

    📚 Philosophes mentionnés

    * Socrate (470 av. J.-C. – 399 av. J.-C.) — Philosophe grec, modèle du sage, connu pour sa méthode dialectique.

    * Platon (428/427 av. J.-C. – 348/347 av. J.-C.) — Philosophe grec, auteur du Banquet et du Mythe de la caverne.

    * Épicure (341 av. J.-C. – 270 av. J.-C.) — Philosophe grec, fondateur de l’épicurisme, prônant l’ataraxie et les plaisirs modérés.

    * Lucien de Samosate (125 – 192) — Écrivain satirique grec, maître du dialogue ironique.

    * Diogène Laërce (IIIe siècle) — Biographe des philosophes grecs, auteur de Vies et doctrines des philosophes illustres.

    * Lorenzo Valla (1407 – 1457) — Humaniste italien, précurseur du christianisme épicurien.

    * Marsile Ficin (1433 – 1499) — Philosophe italien, traducteur de Platon, conciliant platonisme et christianisme.

    * Érasme de Rotterdam (1467 – 1536) — Humaniste et théologien chrétien, auteur de L’Éloge de la folie et des Colloques.

    * Thomas More (1478 – 1535) — Philosophe humaniste anglais, auteur de L’Utopie.

    * Michel de Montaigne (1533 – 1592) — Philosophe humaniste français, auteur des Essais.

    * Pierre Gassendi (1592 – 1655) — Philosophe et scientifique, défenseur de l’épicurisme chrétien.

    * Emmanuel Kant (1724 – 1804) — Philosophe allemand, auteur de La Critique de la raison pure, théoricien du transcendantal.

    * Friedrich Nietzsche (1844 – 1900) — Philosophe allemand, critique du christianisme et de la morale occidentale.

    Crédits : Michel Onfray et la Contre-histoire de la philosophie



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  • 1. Érasme de Rotterdam

    Michel Onfray explore la figure d’Érasme de Rotterdam, qu’il qualifie d'« épicure christique », et l’insère dans la lignée des penseurs du christianisme épicurien. Cette conférence met en lumière la tentative d’Érasme d'associer la philosophie d’Épicure à la doctrine chrétienne, en prônant une vision pacifiste, hédoniste et critique de l'Église institutionnelle.

    2. Le Christianisme Épicurien

    Fusion entre Épicure et le ChristMichel Onfray introduit le concept de christianisme épicurien, amorcé par Lorenzo Valla et poursuivi par Érasme, Montaigne et Gassendi. L'idée centrale est que l'hédonisme d’Épicure et la philosophie chrétienne ne sont pas antagonistes, mais peuvent coexister harmonieusement. Érasme défend ainsi la possibilité de trouver la félicité par une vie simple et modérée, tout en suivant les enseignements du Christ.

    L'Éloge de la Folie et l'ironie chrétienneL’Éloge de la Folie est l'œuvre emblématique où Érasme use de l'ironie pour critiquer la société et l'Église. Il y défend l'idée que le véritable christianisme est une forme de folie, non pas déraisonnable mais un acte de foi allant au-delà des limites de la raison. La folie est vue comme une source de liberté intérieure, de joie et d’authenticité spirituelle.

    3. Érasme et sa critique de l’Église

    Un anticléricalisme modéréBien qu’il soit resté fidèle au catholicisme, Érasme critique ouvertement l’institution ecclésiastique :

    * Les excès du clergé : il dénonce la corruption des prêtres, la richesse indécente des papes et la guerre soutenue par l'Église.

    * Les pratiques superstitieuses : il remet en question les pèlerinages, le culte des reliques et le dolorisme chrétien, qui valorise la souffrance au détriment du bonheur terrestre.

    Une invitation au retour aux sourcesÉrasme appelle à un retour à l'esprit originel du christianisme, fondé sur la lecture directe des Évangiles et l’imitation du Christ. Il prône une foi dépouillée des dogmes et bureaucraties ecclésiastiques, orientée vers une relation intime et personnelle avec Dieu.

    4. Philosophie hédoniste et morale chrétienne

    Le plaisir modéré comme voie chrétiennePour Érasme, le plaisir n’est pas incompatible avec la foi chrétienne, tant qu'il reste modéré et naturel. Il adopte la vision épicurienne du bonheur, définie comme l'absence de troubles (ataraxie), et l’adapte au cadre chrétien en valorisant la paix intérieure et la conscience tranquille.

    Critique de la culpabilité et du dolorismeIl s’oppose fermement à la doctrine de la culpabilité issue du péché originel et rejette la mauvaise conscience imposée par l’Église. Selon lui, le message du Christ est un message de joie et de liberté, et non de souffrance et de culpabilisation.

    5. La pédagogie et l’humanisme d’Érasme

    L’éducation comme outil d’émancipationÉrasme fut l’un des premiers intellectuels à vivre de sa plume et à promouvoir l’éducation comme voie vers la liberté individuelle. À travers ses Colloques, il développe une méthode pédagogique basée sur le dialogue, l’apprentissage par la pratique et l’éveil de l’esprit critique.

    Un humanisme chrétienÉrasme incarne l’humanisme de la Renaissance, où l’homme est vu comme un être perfectible par l’éducation et la raison. Il valorise la dignité humaine, plaide pour la paix et la tolérance, et s’oppose aux guerres religieuses qui déchirent l’Europe de son époque.

    💡 Conclusion

    Érasme apparaît comme une figure centrale du christianisme épicurien. Tout en restant fidèle au message du Christ, il critique l’institution ecclésiastique et prône un retour aux valeurs originelles du christianisme : la joie, la simplicité, la paix et l’amour. Son œuvre, notamment l'Éloge de la Folie et ses Colloques, est une tentative audacieuse de réconcilier foi et plaisir, raison et foi, tout en offrant une critique lucide et bienveillante du monde de son époque.

    📚 Philosophes et concepts mentionnés

    * Épicure (341 av. J.-C. – 270 av. J.-C.) — Philosophe grec, fondateur de l'épicurisme prônant l'ataraxie.

    * Paul de Tarse (vers 5 – vers 67) — Apôtre chrétien, principal diffuseur du message chrétien dans l’Empire romain.

    * Lucien de Samosate (125–192) — Écrivain satirique grec, maître de l'ironie et du dialogue philosophique.

    * Diogène Laërce (IIIe siècle) — Biographe des philosophes grecs, auteur de Vies et doctrines des philosophes illustres.

    * Lorenzo Valla (1407–1457) — Philologue italien, précurseur du christianisme épicurien.

    * Érasme de Rotterdam (1467–1536) — Humaniste et théologien chrétien, auteur de L'Éloge de la folie et des Colloques.

    * Thomas More (1478–1535) — Philosophe et humaniste anglais, auteur de L’Utopie.

    * Michel de Montaigne (1533–1592) — Philosophe humaniste français, auteur des Essais.

    * Pierre Gassendi (1592–1655) — Philosophe et scientifique, défenseur de l'épicurisme chrétien.

    * Friedrich Nietzsche (1844–1900) — Philosophe allemand, critique de la morale chrétienne.

    Crédits : Michel Onfray et la Contre-histoire de la philosophie



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