Afleveringen

  • Claude LĂ©vi-Strauss dans l’un de ses ouvrages, “La PensĂ©e sauvage”, avait consacrĂ© un chapitre Ă  ce qu’il appelait l’art du bricolage. Je trouve que la façon dont Lacan utilise ces bouts de ficelle relĂšve en effet de cet art. C’est en 1972 que Lacan a empruntĂ© Ă  Guilbaud ce nƓud borromĂ©en. Il a trouvĂ© qu’il lui allait « comme bague au doigt » pour y dĂ©montrer ce qu’il avait dĂ©jĂ  mis en Ă©vidence depuis fort longtemps, les trois registres du symbolique, de l’imaginaire et du rĂ©el. ThĂ©odule Guilbaud Ă©tait un mathĂ©maticien qui s’était lui aussi intĂ©ressĂ© Ă  l’application des mathĂ©matiques aux sciences sociales.

    C’est d’’une façon trĂšs tardive, de 1973 Ă  1976, au cours des trois sĂ©minaires « Les non-dupes errent », « RSI » et « le Sinthome », qu’il Ă©labore alors un nouveau mode d’approche de la psychanalyse avec sa thĂ©orie des nƓuds, avec ce qu’il appelle ses ronds de ficelle.

    Chemin faisant, il nous livre les secrets de leur maniement dans la mesure oĂč ils sont faits, fabriquĂ©s, pour rendre compte de « sa pratique», les trois registres du symbolique, de l’imaginaire et du rĂ©el, nouĂ©s ensemble dans le nƓud, structurant le champ de l’expĂ©rience analytique.

    J’ai donc regroupĂ© pour en constituer un petit Vademecum, les conseils que Lacan nous donne, et se donne Ă  lui-mĂȘme, dans une certaine mesure, puisque cette nouvelle logique de « sacs et de cordes » est en cours d’élaboration.

    J’en ai dĂ©gagĂ© ces trois rĂšgles

    Ce noeud borromĂ©en, il faut l’utiliser “ BĂȘtement” Il ne faut pas non plus mettre la charrue avant les bƓufs et s’intĂ©resser Ă  ce nƓud avant d’avoir lu et travaillĂ© l’ensemble des sĂ©minaires de Lacan. C’est en effet eux qui permettent son usage effectif. Son maniement implique de mĂȘme une rĂ©fĂ©rence constante au texte freudien.

    Je me pose cette question : quels seront les auditeurs de ce podcast qui arriveront jusqu”au bout ? En guise de rĂ©compense, Pour le prochain j’évoquerai l’amusant lapsus calami d’un assassin citĂ© par Freud.


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  • Il n'est pas facile de saisir, dans une approche analytique, l'importance du nom propre. J'ai plusieurs fois essayĂ© de reprendre pas Ă  pas les textes de Lacan oĂč il en parle, notamment celui d' "Un discours qui ne serait pas du semblant", mais je n'ai pas rĂ©ussi Ă  en faire, Ă  mon idĂ©e, un juste repĂ©rage sauf quand mĂȘme quelques points qui sautent aux yeux :

    1 - Le nom propre a ceci de particulier que, bien sĂ»r, vous le portez, mais que ce nom vous a quand mĂȘme Ă©tĂ© donnĂ© par quelqu'un, votre pĂšre, votre mari et quelquefois votre mĂšre quand il n'y a pas eu d'acte de reconnaissance par le pĂšre et qu'il ne vous a pas donnĂ© son nom. Porter volontiers ou non ce nom qui vous a Ă©tĂ© donnĂ©, l'accepter ou le refuser, se trouver des noms de plume, de thĂ©Ăątre ou de psychose, c'est une façon de prendre position par rapport Ă  ce don du nom, poser votre dĂ©sir par rapport au dĂ©sir du pĂšre ou de l'homme qui vous l'a donnĂ© ou pas donnĂ©.

    2 - En mĂȘme temps, c'est aussi un nom qui vous permet de vous repĂ©rer dans votre lignĂ©e, la lignĂ©e de vos ancĂȘtres. Il est frappant de constater comment dans la Bible nous pouvons lire une longue litanie de noms organisĂ©s en fonction d’une filiation paternelle et ce qui m'a toujours frappĂ© dans cette longue Ă©numĂ©ration, c'est que justement le nom des femmes qui ont portĂ© ces fils est le plus souvent Ă©lidĂ©e, comme si c’était une façon symbolique d’instaurer la mĂ©taphore paternelle, littĂ©ralement donc d'effectuer la substitution de ce nom du pĂšre Ă  ce qu’il en Ă©tait du dĂ©sir de la mĂšre.

    3 - On trouve, dans toute analyse, y compris bien sĂ»r dans la sienne, la façon dont chacun utilise son nom propre en le mettant en scĂšne dans les rĂȘves et les symptĂŽmes - Les nĂ©vrosĂ©s brodent autour des lettres de leur nom propre ou des significations qu’on peut leur donner pour construire ce que Freud appelait le roman familial du nĂ©vrosĂ© et Lacan, la chanson de geste de la nĂ©vrose dont le sujet est le hĂ©ros. Au titre d’exemple, on peut Ă©voquer comment on a pu dĂ©couvrir dans l’aprĂšs coup au moment oĂč on a su son nom le fait que le Petit Hans qui s’appelait en fait Herbert Graff avait ainsi utilisĂ© les lettres de son nom propre pour raconter sa fantaisie de la girafe chiffonnĂ©e, “Giraffe”, celle qui reprĂ©sentait tantĂŽt sa mĂšre, sous la forme de la grande girafe, tantĂŽt sa soeur Anna, comme petite girafe. Cette fantaisie participant Ă  toute l’élaboration signifiante de sa phobie, celle qui le protĂ©geait du dĂ©sir envahissant de sa mĂšre.

    Pour prĂ©ciser dons ce qu’il en est de cette fonction du nom propre dans l’analyse, dans une premiĂšre approche on peut dire que le nom propre, Ă©tant pris dans les symptĂŽmes, participe ainsi Ă  cette fonction de supplĂ©ance du nom du pĂšre qui est attribuĂ© au symptĂŽme mais ça mĂ©riterait d'ĂȘtre un peu plus solidement Ă©tayĂ©, Ă©tayĂ© par la clinique.


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  • Ce sont les circonstances actuelles, en cette pĂ©riode Ă©lectorale animĂ©e, qui m’ont donnĂ© l’idĂ©e de reprendre ce rĂȘve de Freud car nous avons besoin plus que jamais d’un peu d’humour et mĂȘme d’espoir.

    Ce rĂȘve qui se trouve donc dans le grand ouvrage princeps de Freud, L'interprĂ©tation du rĂȘve, est lĂ , avec d'autres, pour dĂ©montrer que les rĂȘves sont toujours Ă©goĂŻstes et sont les cĂ©lĂ©brations du Moi du sujet. C’est toujours ce Moi le hĂ©ros du rĂȘve, quelques soient ses dĂ©guisements.

    Ce rĂȘve rappelle un peu celui de la monographie botanique. LĂ  encore c’est un livre exposĂ© dans la vitrine d’un libraire qui le provoque : Freud Ă©crit « Le nom de la nouvelle collection est : orateurs (ou discours) cĂ©lĂšbres, et le numĂ©ro 1 de la sĂ©rie porte le nom du docteur Lecher. » c’est le texte mĂȘme du rĂȘve. Il est donc trĂšs court. Dans l’analyse de ce rĂȘve, Freud s’étonne de l’intĂ©rĂȘt qu’il porte Ă  ce dĂ©nommĂ© Lecher. Il le dĂ©finit en effet comme « l’orateur perpĂ©tuel de l’obstruction allemande au parlement ». C’est donc un incorrigible parleur ou orateur mais qui ne le fait que pour empĂȘcher les autres de parler. De fait, ce Lecher, c’est lui, Freud, obligĂ© de parler plusieurs heures par jour avec de nouveaux analysants. Cela peut paraĂźtre curieux Ă  une premiĂšre lecture, d’accorder tellement plus d’importance au fait de parler plutĂŽt qu’au fait d’écouter. Mais peut-ĂȘtre qu’aprĂšs tout Freud constate que l’analyse est en effet une expĂ©rience de parole et que ce rĂȘve le met tout particuliĂšrement en Ă©vidence.

    En tout cas Freud le proclame en effet « je suis donc moi-mĂȘme de la sorte un orateur ou un parleur perpĂ©tuel »

    Une note des traducteurs cite la sĂ©rie des signifiants oraux qui sont Ă  l’oeuvre. de ce rĂȘve Je cite cette note parce qu’elle met bien Ă©vidence ce qu’il en est de la voix comme objet petit a Je cite « Le rĂȘve joue avec le paradigme du discours (Rede), de l’orateur ( Redner) et enfin du Dauerredner, du dĂ©putĂ© qui garde la parole pendant des heures au Parlement pour faire obstruction. Mais reden veut dire aussi parler tout simplement. »

    On peut quand mĂȘme remarquer que ce rĂȘve n’est pas interprĂ©tĂ© Ă  proprement parler. Il n’est lĂ  que pour souligner le fait que Freud s’est identifiĂ© dans son rĂȘve Ă  ce dĂ©putĂ© qui ne cesse de faire obstruction Ă  la parole des autres, qui littĂ©ralement les empĂȘche de parler. Alors on peut certes penser que c’est peut-ĂȘtre un avertissement qu’il s’adresse Ă  lui-mĂȘme, un effet de son Surmoi « Tu parles un peu trop, mesure tes paroles » ? En effet en français, j’ajouterai bien Ă  la liste de ces signifiants allemands, celui de « parler Ă  bon escient » ou encore « parler en connaissance de « cause » ».

    Mais il est vrai aussi qu’avec cette invention de la psychanalyse et le dĂ©chiffrage du sens de ces rĂȘves, il est devenu un vĂ©ritable homme de parole et pas seulement un parleur.

    De fait, on peut aussi penser que de voir son nom propre exposĂ© dans la vitrine d’une librairie mĂ©rite bien de s’identifier Ă  ce dĂ©nommĂ© Lecher, quelques soient par ailleurs les dĂ©fauts qui l’ont rendu cĂ©lĂšbre. A noter enfin que, comme nous ne savons pas quel Ă©tait pour Freud le sens de ce rĂȘve, nous nous trouvons dans la mĂȘme situation que l’analyste Ă©coutant le rĂȘve d’un analysant. Avant de savoir ce que lui nous en dira, nous pouvons toujours analyser ce qu’il provoque en nous d’effets de transfert.

    A ce propos, je me souviens avoir racontĂ© en cours d’analyse, un rĂȘve oĂč je faisais parler Jacques Alain Miller. il disait en substance : » Je fais toujours ce que je dis ». Lacan m’avait rĂ©torquĂ© sobrement qu’en attendant, c’était quand mĂȘme moi qui avait fait ce rĂȘve ! Il en va de mĂȘme pour Freud, c’était lui qui avait fait ce rĂȘve et qui comptait bien faire de l’obstruction au parlement par la magie de son verbe.

  • Au moment oĂč le structuralisme Ă©tait en vogue et que les philosophes l'opposaient Ă  l'existentialisme, Lacan prĂ©cisait, aux journalistes qui lui posaient souvent la question, ce que, lui, en tant que psychanalyste, mettait sous ce terme de structure et quel usage rigoureux il en faisait dans la champ de la psychanalyse. C'Ă©tait en dĂ©cembre 1966. Il avait accordĂ© un interview au Figaro le 1 er dĂ©cembre 1966, avec ce titre “ Un psychanalyste s’explique”

    Il disait Ă  ce journaliste ceci : " Ce qu'on voit dans Freud, c'est un homme qui est tout le temps en train de dĂ©battre sur chaque morceau de son matĂ©riel linguistique, d'en faire jouer les articulations. VoilĂ  Freud, un linguiste
 toute l'Ɠuvre de Freud est Ă  dĂ©chiffrer en fonction d'une grille linguistique qui n'a Ă©tĂ© inventĂ©e qu'aprĂšs lui ". Freud avait donc devancĂ© Saussure. C’est dans cet interview que nous trouvons la dĂ©finition la plus explicite de ce qu’est cette rĂ©fĂ©rence Ă  la structure en psychanalyse : " La structure n'a pas la mĂȘme signification pour chacun. Ainsi pour moi, le mot structure dĂ©signe exactement l'incidence du langage comme tel dans ce champ phĂ©nomĂ©nal qui peut ĂȘtre groupĂ© sous la rubrique de ce qui est analysable au sens analytique. Je prĂ©cise dans le champ de ma recherche dire " structurĂ© comme un langage " est un plĂ©onasme ". Les deux termes structure et langage sont Ă©quivalents, peuvent ĂȘtre substituĂ©s l’un Ă  l”autre.

    Et maintenant si vous souhaitez trouver des preuves dans le texte freudien de ce que Lacan avance que Freud Ă©tait un linguiste avant mĂȘme l’invention de la linguistique, vous pourrez relire un texte passionnant qui a pour titre "L'intĂ©rĂȘt de la psychanalyse" avec un de ses chapitres a d’ailleurs pour titre "L'intĂ©rĂȘt pour les sciences du langage" Et oui ! Freud n'avait pas attendu Lacan pour s'intĂ©resser Ă  la linguistique !

    J'en extrait ce passage que je trouve magnifique : "La langue du rĂȘve peut-on dire, est le mode d'expression de l'activitĂ© psychique inconsciente. Mais l'inconscient parle plus qu'un simple dialecte. Parmi les conditions psychologiques modifiĂ©es qui caractĂ©risent les formes particuliĂšres de nĂ©vroses et les distinguent les unes des autres, se trouvent aussi de constantes modifications de l'expression concernant les motions psychiques inconscientes. Alors que la langue gestuelle de l'hystĂ©rie coĂŻncide avec la langue pictographique du rĂȘve, des visions, etc... pour la langue de pensĂ©e de la nĂ©vrose obsessionnelle et de la paraphrĂ©nie se prĂ©sentent des formations idiomatiques particuliĂšres .... Ce qu'une hystĂ©rique, par exemple, reprĂ©sente par des vomissements, cela s'exprimera chez un malade obsessionnel par de mĂ©ticuleuses mesures de prĂ©caution contre une infection et provoquera chez un paraphrĂ©nique une plainte ou un soupçon qu'on est en train de l'empoisonner. Ce qui trouve ici un expression si diverse, c'est le dĂ©sir, refoulĂ© dans l'inconscient, d'engrossement, et d'autre part la rĂ©sistance de la personne malade contre celui-ci".

    Lacan reprendra ces fantasmes de grossesse pour en faire un mode d'instauration de la fonction paternelle dans la psychose et la névrose, laissant dans l'ombre, élidée, la question de leur rÎle dans la perversion.


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  • A l’occasion d’un voyage en Italie, j’ai eu l’occasion d’admirer les fresques de la collĂ©giale de San Giminiano, en Toscane. Une de ces fresques m’a bien amusĂ©e et intĂ©ressĂ©e. Elle dĂ©crit la scĂšne du manteau de NoĂ©.

    Selon la parole biblique, NoĂ©, ignorant les effets du jus de la vigne, s’était enivrĂ© et une fois endormi, avait laissĂ© voir tous ses attributs virils Ă  ses trois fils. Sur cette fresque, on y voit donc en clair l’objet de l’interdit Ă  savoir le pauvre petit zizi du pĂšre, avant qu’il ne soit vivement recouvert de son manteau par deux de ses fils respectueux, Sem et Japhet. D’aprĂšs cette fresque on ne peut pas deviner que le troisiĂšme des fils, Cham, s’est, quant Ă  lui, risquĂ© Ă  en avoir le cƓur net et Ă  jeter un petit coup d'Ɠil sur la nuditĂ© du pĂšre. Il a mĂȘme incitĂ© ses frĂšres Ă  braver cet interdit.

    Sans doute ce coup d'Ɠil n’est-il pas loin de lĂ , admiratif, puisque pour cette outrecuidance, Cham sera lourdement puni. NoĂ©, sorti de son ivresse, le maudit et surtout le condamne Ă  devenir l’esclave de ses deux frĂšres. J’ai relu tout ce qu’il en est racontĂ© dans la GenĂšse. Il y est dĂ©crit notamment comment les deux frĂšres, pour recouvrir le corps du pĂšre de son manteau et mettre ainsi fin Ă  cet intolĂ©rable spectacle, lui tournent le dos et marchent donc Ă  reculons pour ne pas avoir Ă  le regarder en face. Avec ce mythe du manteau de NoĂ©, il semble bien que ce soit l’insuffisance de l’organe viril du pĂšre au regard du signifiant phallique que les fils ne doivent constater Ă  aucun prix, pour pouvoir continuer Ă  se soutenir de sa fonction d’exception et trouver ainsi leur statut d’hommes.

    Cette si amusante mise en scĂšne ainsi que toutes les descriptions bibliques de la vie de NoĂ© peuvent servir de points d’appuis pour aborder les trois registres dans lesquels intervient la fonction paternelle, le registre du rĂ©el, de l’imaginaire et du symbolique.




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  • Pour qui s’intĂ©resse Ă  cette question, Il n'est certes pas facile de savoir ce qui peut bien diffĂ©rencier un psychiatre d'un psychologue et d'un psychanalyste car ces trois praticiens ont au moins en commun le fait qu'ils s'occupent tous les trois de la souffrance psychique,.

    Si nous faisons apparaĂźtre ces deux termes de guĂ©rison et de suggestion, ils vont ĂȘtre pour nous deux Ă©lĂ©ments de diffĂ©renciation dĂ©cisifs

    Le psychiatre vous écoutera et vous parlera mais ce sera de surcroßt car c'est un médecin : il vous donnera quelques paroles d'encouragement mais il vous prescrira également des médicaments. C'est avant tout sur eux qu'il compte pour vous guérir.

    Le psychologue ou psychothĂ©rapeute, vous Ă©coutera et vous parlera, c'est en effet par la parole qu'il espĂšre vous guĂ©rir de vos symptĂŽmes. Mais vous serez avec lui en face Ă  face, c'est Ă  dire que vous vous parlerez, de vous Ă  lui et de lui Ă  vous, et peut-ĂȘtre sera-t-il ainsi sollicitĂ© de vous rĂ©pondre quelquefois du tac au tac.

    Le psychanalyste vous Ă©coutera surtout - et par ses interprĂ©tations fort rares - vous permettra de vous guĂ©rir vous-mĂȘme. Vous ĂȘtes allongĂ© sur un divan, et le psychanalyste se trouve derriĂšre vous pour n'avoir Ă  prĂȘter attention qu'Ă  vos paroles et Ă©galement pour se dĂ©rober Ă  votre regard, pour mieux s'effacer devant vous.

    Mais cette premiĂšre approche est loin d'ĂȘtre suffisante et c'est la que ce terme de Suggestion est trĂšs utile puisque tous trois n'en font pas du tout le mĂȘme usage. Ce terme on peut je pense le dĂ©finir comme le fait d'influencer quelqu'un, de lui imposer Ă©ventuellement une image, une pensĂ©e, une conduite, mais si on passe du nom au verbe, on peut choisir soit le verbe suggestionner, qui existe, soit le verbe suggĂ©rer.

    La césure entre ces deux verbes, suggestionner et suggérer, permet d'établir une coupure entre la psychanalyse et les autres formes de thérapies psychiques. Le psychanalyste ne suggestionne pas, il suggÚre, par ses interprétations ; Il « sussure », comme dit Lacan, des signifiants qui ont le pouvoir de guérir la névrose, voire la perversion.

    Ces faits liés à ces deux termes guérison, suggestion, on peut les retrouver dans le texte freudien, ce qui différencie la psychanalyse des autres formes de psychothérapie c'est un double renoncement : tout d'abord, celui concernant le plus court chemin pour arriver à la guérison au profit de l'élucidation des mécanismes en jeu, d'autre part le renoncement à la suggestion ou tout au moins à son utilisation mise à chaque fois en suspens, déboutée par le déchiffrage de ce que traduit, à chaque étape de l'analyse, l'amour de transfert, à savoir une manifestation du désir de l'analysant dans son lien au désir du psychanalyste.

    Par le biais du transfert, dans l'analyse, si la guĂ©rison des symptĂŽmes peut ĂȘtre obtenue c'est en retrouvant leurs sources infantiles : "
 pour dissoudre les symptĂŽmes, il faut remonter Ă  leurs origines, rĂ©veiller le conflit qui leur a donnĂ© naissance et orienter ce conflit vers une autre solution, en mettant en Ɠuvre des facteurs qui Ă  l'Ă©poque oĂč sont nĂ©s les symptĂŽmes n'Ă©taient pas Ă  la disposition du malade".


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  • DĂšs les annĂ©es 1900, au moment oĂč Freud Ă©crit son oeuvre initiale l’InterprĂ©tation des rĂȘves, il analyse dĂ©jĂ  quelques rĂȘves qu’il met sous la rubrique “ RĂȘves de castration”. C’est donc lĂ  qu’il en dĂ©couvre la dimension clinique.

    Parmi tous ces rĂȘves, J’en ai retenu deux qui abordent si on peut dire clairement la question. Pour le premier Freud Ă©crit “ Un garçon de trois ans et cinq mois, qui visiblement accepte mal le retour de campagne de son pĂšre, se rĂ©veille un matin perturbĂ© et Ă©nervĂ© et rĂ©pĂšte sans cesse la question ; pourquoi papa a portĂ© sa tĂȘte sur une assiette ?

    Ce premier rĂȘve exprime donc que cette crainte de castration est liĂ©e Ă  une idĂ©e de vengeance du pĂšre par rĂ©torsion. C’est l’enfant qui a d’abord souhaitĂ© castrer son pĂšre.

    Le second rĂȘve que Freud lui a adjoint exprime alors cette angoisse de castration. C’est le rĂȘve d’enfance d’un Ă©tudiant souffrant d’une grave nĂ©vrose obsessionnelle. Il se souvient que dans sa sixiĂšme annĂ©e, il avait souvent rĂȘvĂ© ceci “ Il va chez le coiffeur se faire couper les cheveux. Arrive une grande femme aux traits sĂ©vĂšres, qui approche de lui et lui tranche la tĂȘte. il reconnait cette femme comme Ă©tant sa mĂšre.”

    C’est le moins qu’on puisse dire, ce type de rĂȘves fait dans l’enfance ne doit pas contribuer Ă  favoriser les rapports harmonieux entre les hommes et les femmes une fois devenus adultes.

    La premiĂšre fois que Freud parle, tout au moins d’une façon un peu Ă©laborĂ©e, du complexe de castration masculin, dans les « Trois essais sur la thĂ©orie de la sexualitĂ© », en 1905, ce qu’il appelle complexe de castration c’est la difficultĂ© du petit garçon Ă  accepter que la mĂšre ne soit pas pourvue du mĂȘme organe que le sien. » il note que ce n’est pas le cas de la petite fille « elle ne se refuse pas Ă  accepter et reconnaĂźtre l’existence d’un sexe diffĂ©rent du sien, une fois qu’elle a aperçu l’organe gĂ©nital du garçon ; elle est sujette Ă  l’envie du pĂ©nis qui la porte au dĂ©sir si important plus tard, d’ĂȘtre Ă  son tour un garçon. »

    Quelques annĂ©es plus tard en 1914, dans son texte « Pour introduire le narcissisme »[1], Freud aborde Ă  nouveau cette question du complexe de castration en le ramenant cette fois-ci non plus Ă  la question de la castration de l’Autre mais de la sienne propre, une castration qui met en grand danger son narcissisme.

    Mais en ces mĂȘmes annĂ©es, dans le texte de l’Homme aux loups, dans cette partie qu’il intitule “ Complexe de castration et Ă©rotisme anal” en prenant appui sur la petite parcelle d’hystĂ©rie de l’Homme aux loups, nous pouvons aisĂ©ment trouver un point de jonction entre la façon dont Freud aborde cette question du complexe de castration et ce que Lacan a Ă©laborĂ©, Ă  propos de ce complexe, des trois modes d’instauration de la fonction paternelle, pour le sujet dit normal, le sujet nĂ©vrosĂ©, et le psychotique. LĂ  oĂč on peut effectuer cette articulation c'est en effet autour de la grossesse symbolique de L'homme aux loups que peut s'effectuer cette passerelle de l'un Ă  l'autre.


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  • C’est pour rĂ©habiliter l’hystĂ©rie, lui redonner ses titres de noblesse que j’ai choisi, dans l’un de mes premiers livres, ce terme d’éloge Ă  son sujet. "Eloge de l’hystĂ©rie", et d’ailleurs en mettant, pour une fois, Ă  l’encontre de toutes les idĂ©es reçues, cette hystĂ©rie du cĂŽtĂ© du masculin. Son titre complet Ă©tant "Eloge de l'hystĂ©rie masculine" avec comme sous-titre “sa fonction secrĂšte dans les renaissances de la psychanalyse”

    C’est un renversement qui est trĂšs utile, car, du coup, les analystes qui se sont toujours beaucoup intĂ©ressĂ© aux femmes hystĂ©riques sont mis, Ă  leur tour, sur la sellette, interrogĂ©s sur leur propre hystĂ©rie, sur leurs symptĂŽmes et donc sur leur dĂ©sir inconscient.

    L’hystĂ©rie je la dĂ©finirai donc comme une aptitude humaine fort rĂ©pandue, celle de pouvoir traduire les douleurs psychiques intolĂ©rables en douleurs corporelles.

    C’est Madame CĂ©cilia M., une mystĂ©rieuse hĂ©roĂŻne des Études sur l’hystĂ©rie, qui a donnĂ© Ă  Freud le secret de fabrication du symptĂŽme hystĂ©rique. Elle lui a donc appris que l’hystĂ©rique redonne toujours Ă  des locutions verbales les plus ordinaires, les plus utilisĂ©es, si ce n’est les plus usĂ©es, leur sens premier, leur sens d’origine.

    En voici un florilùge: “ça m’a fait battre le coeur”

    “ J’en ai eu froid dans le dos"

    “J’en ai le souffle coupĂ©â€.

    “J’ai Ă©tĂ© clouĂ©e sur place” - “les bras m’en sont tombĂ©s” - “ j’en ai plein le dos”.

    C’est donc avec toutes ces expressions verbales que l’hystĂ©rique fabrique ses symptĂŽmes corporels : des palpitations, des vomissements, des diarrhĂ©es, des paralysies, des douleurs de dos et bien d’autres choses encore.

    Avec ce que je vous ai dit du symptĂŽme hystĂ©rique on peut donc dĂ©crire comment chaque psychanalyste rĂ©invente, remet la psychanalyse au monde avec ses propres fantasmes de grossesse qui s’expriment toujours par un symptĂŽme hystĂ©rique.

    Je vous donne tout de suite un exemple de ces fantasmes de grossesse, avec celui de l’Homme aux loups, l’un des plus cĂ©lĂšbres cas dĂ©crits par Freud dans les cinq psychanalyses.

    Je ne vais pas bien sûr vous raconter toute son histoire mais juste vous décrire son symptÎme hystérique.

    Son dĂ©sir d’ĂȘtre aimĂ© du pĂšre et d’en recevoir un enfant se manifestait par un symptĂŽme intestinal : Il souffrait d’une constipation opiniĂątre qui ne cĂ©dait que lorsqu’un homme, son valet de chambre, lui administrait un lavement. Lorsqu’il Ă©tait ainsi dĂ©livrĂ© de cet enfant, un enfant un peu particulier, il revenait Ă  la vie, il se sentait renaĂźtre.

    Dans l’analyse, les fantasmes de grossesse de l’analysant et de l'analyste s’expriment avec l’aide du verbe Sauver, sous forme de fantasmes de sauvetage. L’analysant veut ĂȘtre sauvĂ© - guĂ©ri par son analyste. De mĂȘme, l’analyste peut vouloir sauver guĂ©rir son analysant.

    C’est lĂ  que la situation peut devenir fort pĂ©rilleuse car pour l’inconscient, quand un homme sauve une femme, il lui donne un enfant. De mĂȘme, quand une femme sauve un enfant de la noyade, comme la fille de Pharaon avait sauvĂ© MoĂŻse, elle le met au monde. Elle est sa mĂšre.

    C’est donc important que l’analyste soit un peu au clair quant Ă  ses propres fantasmes de sauvetage et qu’il sache donc oĂč il en est de son dĂ©sir de guĂ©rir ses analysants.

    Ce livre Eloge de l'hystérie masculine; sa fonction secrÚte dans les renaissances de la psychanalyse est paru chez L'harmattan en janvier 2020.

    J'ai créé, il y a maintenant longtemps, dans les années 2000, un des premiers sites de psychanalyse. Je l'ai appelé " Le goût de la psychanalyse".

    ( https://www.le-gout-de-la-psychanalyse.fr/ )
    Musique : Sincerity par Glowing Palace


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  • Bienvenue sur ce site de podcast Une psychanalyse Ă  fleur d'inconscient. Aujourd'hui je voudrais vous parler des Ă©meutes urbaines survenues il y a quelques mois avec ces hordes de jeunes dĂ©chaĂźnĂ©s semant le chaos et la destruction autour d’eux et qui sont venues reposer d’une façon aiguĂ« sinon urgente ces questions de la dĂ©linquance. Une approche analytique de ces questions ne pourrait bien sĂ»r qu’ĂȘtre bĂ©nĂ©fique, ne serait-ce que pour proposer quelques pistes de travail en vue d’y apporter des solutions.
    On pourrait partir de ce fait premier : On peut considĂ©rer Ă  juste titre que la famille est en quelque sorte la petite cellule Ă©lĂ©mentaire de la sociĂ©tĂ©. C’est en son sein en tout cas que l’enfant est censĂ© apprendre les modes de fonctionnement de la vie en sociĂ©tĂ© et donc ses lois.

    Des analystes se sont dĂ©jĂ  prĂ©occupĂ©s de ces questions si difficiles Ă  rĂ©soudre de la dĂ©linquance, l’un des premiers et l’un des plus attachants est incontestablement August Aichhorn avec son livre Jeunes en souffrance. Il avait abordĂ© ces sujets au temps de Freud. Mais dans les annĂ©es 1950 une autre analyste mettait l’accent sur cette structure familiale, qui se trouve ĂȘtre la cause et la source de ces comportements asociaux dans son ouvrage au titre explicite “ La dĂ©linquance juvĂ©nile”. Elle s’appelle Kate Friedlander. Selon elle, les raisons de ces comportements asociaux seraient Ă  mettre en relation avec les premiers liens pulsionnels de l’enfant Ă  sa mĂšre au moment du sevrage et de l’apprentissage de la propretĂ©. Elle souligne en effet que “Les facteurs primaires responsables d’un comportement asocial se dĂ©couvrent dans la relation de l’enfant avec sa mĂšre et plus tard avec son pĂšre et dans d’autres facteurs affectifs qui durant les premiĂšres annĂ©es de la vie constituent l’ambiance familiale ».

    ReconnaĂźtre ces faits, cette source premiĂšre de la dĂ©linquance se trouvant au sein de la famille est peut-ĂȘtre dĂ©jĂ  un premier pas. Il me semble que c’est pour la premiĂšre fois que cette source essentielle est Ă©voquĂ©e par les responsables politiques de ce pays. Ils font en effet nommĂ©ment appel Ă  la responsabilitĂ© des parents.

    Au cours de ces mĂȘmes annĂ©es 1950 quand Lacan Ă©tait encore psychiatre mais quand mĂȘme dĂ©jĂ  psychanalyste, il avait indiquĂ© que les questions de dĂ©linquance et de criminalitĂ© Ă©tait liĂ© pour lui Ă  la façon dont la famille de ces sujets se trouvait ĂȘtre non seulement isolĂ©e dans le contexte social qui l’entoure et surtout qu’elle Ă©tait rĂ©duite au couple parental et aux enfants, avec donc trĂšs peu d’identifications possibles valorisantes et nombreuses Ă  des adultes dont a besoin tout sujet pour trouver sa place dans la sociĂ©tĂ©. Dans l’ approche de la dĂ©linquance qu’en fait Kate Friedlander, on peut trouver une raison d’espĂ©rer, elle se trouve, comme souvent, au niveau de l’école. L’enfant aprĂšs celui de la famille devra s’adapter Ă  un autre groupe, le groupe scolaire. Elle aussi le prĂ©parera Ă  sa future vie en sociĂ©tĂ©. C’est peut-ĂȘtre lĂ  que l’on pourrait agir de façon prĂ©ventive, en mobilisant pour cette cause, une armĂ©e d’ouvriers, une armĂ©e de psychothĂ©rapeutes, prĂȘts Ă  intervenir auprĂšs des enfants mais aussi des parents.


    J'ai créé, il y a maintenant longtemps, dans les années 2000, un des premiers sites de psychanalyse. Je l'ai appelé " Le goût de la psychanalyse".

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  • Dans le journal d’une analyse, celle de l’Homme aux rats, dĂšs les premiĂšres sĂ©ances, Freud raconte comment son analysant Ă©tait poursuivi par l’idĂ©e qu'il Ă©tait un grand criminel. Quand cela lui arrivait, il allait chercher l’aide de l’un de ses amis qui avait le pouvoir de le libĂ©rer de son obsession .

    A ce propos, cet Ă©tĂ©, j’ai lu un livre que j’ai beaucoup aimĂ© qui s’appelle « le criminel et ses juges ». Ce livre Ă©crit par des psychanalystes de la gĂ©nĂ©ration de Freud aborde la question du crime et de sa punition par la justice dans une approche analytique en fonction des dĂ©sirs de meurtre inconscients de tout un chacun, y compris bien sĂ»r des juges.

    Ce livre qui a Ă©tĂ© Ă©crit en 1928, par Alexander et Staub. Les auteurs partent tous les deux de la mĂ©tapsychologie de la nĂ©vrose, pour Ă©clairer analytiquement ce qu’il en est des actes criminels.

    Ils dĂ©montrent que la nĂ©vrose est donc l’épanouissement, dans le domaine psychique, des tendances asociales de l’homme cultivĂ©. Elle est dans son contenu psychologique et dans sa structure, une fidĂšle rĂ©pĂ©tition de la justice pĂ©nale de l’histoire primitive [...] Le crime originel sous la forme de l’inceste et du parricide et mĂȘme la forme de la peine primordiale, la castration.

    Ce qui n’est pas rĂ©solu dans cette approche analytique de la question de la criminalitĂ©, c’est le fait que le nĂ©vrosĂ©, selon la formule chrĂ©tienne de la confession, a pĂ©chĂ© en pensĂ©e, tandis que le criminel a pĂ©chĂ© en action.

    En 1950, Dans son texte “ Fonctions de la psychanalyse en criminologie”, Lacan a pris appui sur cet ouvrage d’Alexander et Staub, pour expliquer les mĂ©canismes mĂȘme du crime, par une Ă©nigmatique formule qui mĂ©riterait un long dĂ©veloppement. Il exprimerait ce crime une “dĂ©hiscence dans le champ social du groupe familial”. Or si on a recours au dictionnaire, pour apprĂ©cier le poids de cette dĂ©hiscence du groupe familial dans le champ social, on constate que c’est un terme de botanique. C’est la fonction de certains organes vĂ©gĂ©taux qui s'ouvrent sans se dĂ©chirer Ă  certaines Ă©poques pour libĂ©rer leur contenu : fruit, graine, pollen ou spore.

    La mĂ©taphore mĂ©rite d’ĂȘtre retenue car elle marque ainsi le point d’origine de la criminalitĂ© et des actes dĂ©lictueux qui font bien irruption au sein de la sociĂ©tĂ© mais naissent au cƓur de la famille.

    Lacan dans cet article de 1950, utilise encore pour expliquer ces mĂ©canismes, un terme psychiatrique qui peut ĂȘtre fort Ă©quivoque, celui d’oedipisme.

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  • Aujourd'hui je voudrais vous parler de ces hommes hystĂ©riques qui ont pourtant toujours Ă©tĂ© prĂ©sents Ă  tous les grands moments, les moments dĂ©cisifs de l’invention freudienne et notamment Ă  son dĂ©but. Ils Ă©taient lĂ  bien sĂ»r Ă  ce grand moment inaugural oĂč Freud revient de Paris avec son prĂ©cieux butin, tout ce qu’il a appris de Charcot, aprĂšs avoir assistĂ© Ă  ses entretiens du mardi Ă  la SalpĂȘtriĂšre. Nous sommes en 1886 et Freud prĂ©sente Ă  ses confrĂšres viennois, son premier cas d’hystĂ©rie masculine. sa confĂ©rence n'obtient pas le succĂšs escomptĂ© et Freud en garde de l’amertume.

    Ils sont encore lĂ  ces prolĂ©taires, ouvriers du bĂątiment, chauffeurs de locomotives ou conducteurs de tramway, pour franchir avec Freud cette Ă©tape dĂ©cisive, au fondement mĂȘme de la psychanalyse, lorsque Freud Ă©tend le

    concept de traumatisme de la nĂ©vrose traumatique Ă  toutes les formes d’hystĂ©rie mais aussi bien Ă  toutes les formes de nĂ©vrose.

    Ils sont encore lĂ , ces hommes hystĂ©riques, tellement fĂ©minisĂ©s, pour franchir une troisiĂšme Ă©tape, en 1908/1909, lorsque Freud loge Ă  la mĂȘme enseigne, les hommes et les femmes, sous le drapeau flamboyant de l'hystĂ©rie, dans son texte majeur, si Ă©clairant quant Ă  cette structure “ Les fantasmes hystĂ©riques et leur rapport Ă  la bisexualitĂ©.

    Mais ce n’est qu’en 1928, avec son texte “DostoĂŻevski et le parricide”, qu’il donne ainsi ses titres de gloire Ă  l’hystĂ©rie masculine. Elle est en effet liĂ©e Ă  la question du dĂ©sir de meurtre du pĂšre qui est au coeur de l’Oedipe mais aussi au fondement de la civilisation.

    Encore un pas de plus, et ces hommes hystériques aident alors Freud à déchiffrer comment cette haine pour le pÚre, dans le cas de la névrose obsessionnelle, trouve elle aussi refuge dans le noyau hystérique de cette

    névrose, dans son soubassement hystérique.

    Mais l’importance de cette hystĂ©rie masculine peut Ă©galement ĂȘtre retrouvĂ©e lorsque, dans l'enseignement de Lacan, au cours de son sĂ©minaire "Les structures freudiennes des psychoses" il a rĂ©ussi Ă  formuler ce qu’il en Ă©tait de la structure de la psychose par rapport Ă  la nĂ©vrose, avec ce terme qu’il a avancĂ© celui de forclusion du Nom-du pĂšre.

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  • Bienvenue sur ce site de podcasts “une psychanalyse Ă  fleur d’inconscient”. Aujourd’hui je voudrais vous parler des trois sources du rĂȘves avec parmi celles-ci une qui est particuliĂšrement intĂ©ressante, celle des rĂȘves qui surviennent en cours d’analyse et que Freud appelle rĂȘves autobiographiques et qui rĂ©vĂšlent de fait la source de la nĂ©vrose, l’évĂ©nement traumatique autour duquel elle s’est organisĂ©.

    Mais Freud dĂ©crit tout d’abord comme premiĂšre source du rĂȘve celle du dĂ©sir de dormir. C’est en quelque sorte un dĂ©sir qui Ă©mane du Moi. Il cite comme exemple de rĂȘve, celui de cet Ă©tudiant en mĂ©decine qui pour ne pas avoir Ă  se rĂ©veiller et Ă  se lever, avait rĂȘvĂ© qu’il Ă©tait dĂ©jĂ  Ă  l'hĂŽpital mais dans un lit de malade pour pouvoir y dormir tranquille.

    Mais ce dĂ©sir de dormir peut entrer en conflit avec le dĂ©sir inconscient qui demande Ă  s’exprimer, les vigiles donnent aussitĂŽt l'alarme et le rĂȘve devient rĂȘve d'angoisse ou cauchemar. Il trouble Ă  ce moment-lĂ  le sommeil, il provoque le rĂ©veil.

    Ces "rĂȘves Ă  dĂ©plaisir" qui semblent faire obstacle au principe de plaisir restent quand mĂȘme sous sa domination, au titre de sentiment de culpabilitĂ© ou de punition pour un dĂ©sir interdit.

    Cependant en 1920, dans son "Au-delĂ  du principe de plaisir", il dĂ©crit une autre catĂ©gorie de rĂȘve qui fait non pas objection mais "exception Ă  la thĂ©orie du rĂȘve comme accomplissement de dĂ©sir", ce sont d'une part les rĂȘves de l'hystĂ©rie traumatique point de dĂ©part, ne l'oublions pas, de la dĂ©couverte freudienne, d'autre part les rĂȘves effectuĂ©s au cours d'une psychanalyse.

    Ces rĂȘves, souvent fait en dĂ©but d’analyse, mĂ©ritent en effet d'ĂȘtre considĂ©rĂ©s en tant que tels car ils tĂ©moignent de ce que Lacan appelait la chanson de geste de la nĂ©vrose et dĂ©signent en quelque sorte, quels seront les buts Ă  atteindre et les Ă©tapes qui seront Ă  franchir au cours de cette analyse, ils en tracent en quelque sorte le chemin. Il peuvent ĂȘtre utiles Ă  l’analyste, si ce n’est dans ce qu’on appelle, peut-ĂȘtre de façon prĂ©somptueuse, la “ conduite de la cure” mais il peut au moins lui donner quelques repĂšres quant Ă  la structure de la nĂ©vrose, qu’elle soit phobique, hystĂ©rique ou obsessionnelle de l’analysant.

    Pour l’analysant, mĂȘme si, en ce premier temps de l’analyse, il n’est pas Ă  mĂȘme de dĂ©chiffrer ce rĂȘve, dans l’aprĂšs-coup, il pourra dĂ©couvrir, que tout Ă©tait dĂ©jĂ  lĂ  dans ce rĂȘve, Ă©crit avec les lettres de son destin, et notamment les lettres de son nom propre, tracĂ©es Ă  partir de son histoire familiale.

    J'ai créé, il y a maintenant longtemps, dans les années 2000, un des
    premiers sites de psychanalyse. Je l'ai appelé " Le goût de la psychanalyse". Vous pouvez y retrouver la plupart de ces textes développés. ( https://www.le-gout-de-la psychanalyse.fr/ )

    Liliane Fainsilber

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  • Aujourd’hui, Ă  propos du souvenir d'enfance de Goethe si amusant, celui oĂč il raconte comment il avait envoyĂ© par la fenĂȘtre toute une sĂ©rie d'ustensiles de cuisine, d'assiettes et de pots sous l’oeil admiratif de leurs voisins, souvenir d'enfance qu’il raconte dans “Fiction et vĂ©ritĂ©", je me pose la question de savoir quelle place l’oeuvre littĂ©raire de Goethe a eu dans sa vie, tout comme l’oeuvre analytique de Freud dans la sienne ?

    Le texte de Freud qui a pour titre “ Un souvenir d’enfance dans Fiction et VĂ©ritĂ© de Goethe ” peut nous en donner la dimension.

    Freud prend tout d'abord ce rĂ©cit de Goethe comme un exemple de ce qu'est en fait un souvenir-Ă©cran, " cette chose conservĂ©e dans la mĂ©moire" qui est "l'Ă©lĂ©ment le plus significatif de toute cette partie de vie de l'enfance, ou bien qui l'est devenu aprĂšs-coup, "sous l'effet d'expĂ©riences ultĂ©rieures". Puis, Ă  partir de ce souvenir d’enfance, il gĂ©nĂ©ralise donc cette fonction du souvenir-Ă©cran. Il Ă©crit : “On considĂšre en rĂšgle gĂ©nĂ©rale que c'est le souvenir que l'analysĂ© met en avant, qu'il raconte en premier, par lequel il introduit la confession de sa vie, qui s'avĂšre ĂȘtre le plus important, celui qui recĂšle donc les clĂ©s des tiroirs secrets de sa vie psychique”. Mais ce qui a surtout retenu mon attention dans ce texte de Freud qu'il consacre Ă  ce souvenir d'enfance de Goethe, c'est la conclusion inattendue qu'il en tire :

    Le jeune Goethe, Ă©crit Freud, tĂ©moignait ainsi en racontant ce souvenir de ceci : "J'ai Ă©tĂ© un enfant chanceux; le destin m'a maintenu en vie bien que je fusse donnĂ© pour mort quand je vins au monde. Mais il a Ă©liminĂ© mon frĂšre, de sorte que je n'ai pas eu Ă  partager avec lui l'amour de ma mĂšre"... Or je l'ai exprimĂ© dans un autre endroit, quand on a Ă©tĂ© le favori incontestĂ© de sa mĂšre, on en garde pour la vie ce sentiment conquĂ©rant, cette assurance du succĂšs... Et une remarque du genre : ma force s'enracine dans ma relation Ă  ma mĂšre, aurait pu ĂȘtre mise Ă  juste titre par Goethe en exergue Ă  sa biographie."

    Question : n'aurait-elle pas pu ĂȘtre Ă©galement mise en exergue dans la biographie de l'inventeur de la psychanalyse ?




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  • Les sĂ©ances dites courtes de Lacan suscitent encore de nos jours de vives polĂ©miques d’autant plus qu’elles sont mises en exercice par d’autres analystes, aussi la question mĂ©rite-t-elle d’ĂȘtre posĂ©e Ă  la lumiĂšre de ce que lui-mĂȘme a pu en dire et en Ă©crire.

    En 1953, dans son grand texte des Ecrits « Fonction et champ de la parole et du langage en psychanalyse » il avait abordĂ© ce sujet en Ă©crivant « Nous voulons 
 toucher un autre aspect particuliĂšrement brĂ»lant dans l’actualitĂ©, la fonction du temps dans la technique. Nous voulons parler du temps de la sĂ©ance.

    Pour lui, il indique que c’est un Ă©lĂ©ment qui appartient manifestement Ă  la rĂ©alitĂ©, puisqu’il reprĂ©sente notre temps de travail, et sous cet angle, il tombe sous le coup d’une rĂ©glementation professionnelle qui peut ĂȘtre tenue pour prĂ©valente »

    Mais il soulĂšve alors un autre aspect beaucoup plus important, les incidences du temps de la sĂ©ance tout d’abord par rapport Ă  l’analyste puis par rapport Ă  l’analysant.

    Concernant le temps de la sĂ©ance par rapport Ă  l’analyste et par rapport au groupe analytique il Ă©voque “le caractĂšre scrupuleux, pour ne pas dire obsessionnel, que prend pour certains sinon pour la plupart, l’observation d’un standard dont les variations historiques et gĂ©ographiques ne semblent au reste inquiĂ©ter personne, est bien le signe de l’existence d’un problĂšme qu’on est d’autant moins disposĂ© Ă  aborder qu’on sent qu’il entraĂźnerait fort loin dans la mise en question de l’analyste ».

    Bien au-delĂ  donc de ces questions institutionnelles, cette question du temps des sĂ©ances est liĂ©e Ă  la question de la part de l’analyste dans le travail de l’analyse, ce en quoi il va pouvoir favoriser, provoquer, l’émergence, le surgissement de la vĂ©ritĂ©.

    Il parle donc du temps de la sĂ©ance par rapport Ă  ce que raconte l’analysant. Il Ă©crit :

    « Pour le sujet en analyse, d’autre part, on n’en saurait mĂ©connaĂźtre l’importance. L’inconscient, profĂšre-t-on, sur un ton d’autant plus entendu qu’on est moins capable de justifier ce qu’on veut dire, l’inconscient, dit-on, demande du temps pour se rĂ©vĂ©ler [...] Mais nous demandons quelle est sa mesure ? Est-ce celle de l’univers de la prĂ©cision
 ? Peut-ĂȘtre en prendrons-nous quelque meilleure idĂ©e en comparant le temps de la crĂ©ation d’un objet symbolique et le moment d’inattention oĂč nous le laissons choir ?

    Je me pose quand mĂȘme cette question: est-il donnĂ© Ă  tout analyste de pratiquer ces sĂ©ances courtes et en tout cas de les pratiquer de façon systĂ©matique. Il faut quelquefois un peu de temps Ă  l’analyste pour pouvoir briser ce discours de l’analysant et lui permettre d’accoucher de cette parole.


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  • Aujourd'hui je voudrais vous parler d'une gente dame, cĂ©lĂ©brĂ©e par Rabelais, qui prenait grand soin des attributs virils de son mari alors qu'il s'apprĂȘtait Ă  partir en escarmouche.

    Certes depuis mai 68, la libĂ©ration des mƓurs et la dĂ©couverte de moyens de contraception efficaces ont modifiĂ© les rapports entre les hommes et les femmes, tout au moins dans nos pays, mais les ont-ils pour autant simplifiĂ©s et surtout amĂ©liorĂ©s ?

    Aussi l'Ă©vocation de l'Ă©thique rabelaisienne qui place le souverain Bien au niveau des braies et des braguettes peut-elle ĂȘtre, dans notre approche, de quelques secours pour redonner son poids et ses pouvoirs de sĂ©duction non pas Ă  l'organe masculin en tant que tel, mais Ă  son symbole, celui qui Ă©tait cĂ©lĂ©brĂ© au temps des divins mystĂšres, sous la forme d'un phallus Ă©rigĂ©, ce phallus sous l'Ă©gide duquel, les femmes et les hommes se trouvent ainsi rangĂ©s, d'un cĂŽtĂ© ou de l'autre. Ce phallus en devient ainsi un objet d'intĂ©rĂȘt commun.

    En témoigne cette gente dame rabelaisienne, l'épouse du dit seigneur de Melville, qui voyant son mari tout armé partir en guerre avec son Roi, se préoccupait fort de ses parties intimes mal protégées selon elle et lui enjoignit de les couvrir d'un lourd casque de combat.

    Rabelais accompagne la morale de l'histoire, de ces vers :

    « Celle qui vit son mari tout armé.

    Fors la braguette, aller à l’escarmouche,

    Lui dit : « Ami, de peur qu’on ne vous touche,

    Armez cela, qui est le plus aimé. »

    Quoi ! tel conseil doit-il ĂȘtre blĂąmĂ© ?

    Je dis que non, car sa peur la plus grande

    De perdre était, le voyant animé,

    Le bon morceau dont elle était friande. »

    Aussi avec cette supplique de la dame nous pouvons relire par exemple l'approche freudienne de la féminité selon laquelle il faudrait qu'une femme réussisse à étendre son amour de l'organe au porteur de celui-ci.

    Ce rĂ©cit de Rabelais m'a aussi fait penser Ă  un fragment d'une des plus tardives interventions de Lacan, Ă  GenĂšve, qui avait pour titre le symptĂŽme oĂč il y Ă©voquait ce qu'il en est de la prĂ©dominance phallique dont se plaignent beaucoup les fĂ©ministes pour y souligner que, selon lui, ce sont les femmes qui y trouvent les plus grands avantages.

    « Moi, je serais assez portĂ© Ă  croire, affirmait-il, que, contrairement Ă  ce qui choque beaucoup de monde, c’est plutĂŽt les femmes qui ont inventĂ© le langage. D’ailleurs, la GenĂšse le laisse entendre. Avec le serpent, elles parlent – c’est-Ă -dire avec le phallus . Quoique ce soit l’un de mes rĂȘves, on peut tout de mĂȘme se poser la question – comment est-ce qu’une femme a inventĂ© ça ? On peut dire qu’elle y a intĂ©rĂȘt. Contrairement Ă  ce qu’on croit, le phallocentrisme est la meilleure garantie de la femme. Il ne s’agit que de ça ». La Vierge Marie avec son pied sur la tĂȘte du serpent, cela veut dire qu’elle s’en soutient ».

    C'est merveilleux je trouve que Lacan évoque à propos de ce phallocentrisme définie comme la meilleure garantie de la femme, toutes les représentations de la Vierge foulant au pied le serpent.

    On peut en effet considérer qu'en le foulant ainsi au pied, comme le Petit-Hans avec sa girafe chiffonnée, elle en fait un signifiant.

    Dans cette anecdote racontée par Rabelais, outre l'importance de cette question du phallus, nous pouvons aussi retrouver avec ce bon morceau dont elle était friande, par ce glissement de l'objet viril à l'objet oral, cet objet primordial, le sein. La friandise, la gourmandise décrivent ces plaisirs de la bouche. Ainsi est évoqué ce que Lacan, dans son algÚbre, a nommé l'objet petit a.

    J'ai emprunté ce récit au Tiers livre des faits et dits du bon Pantagruel dans le chapitre « Comment la braguette est la piÚce principale de l'armure pour les hommes de guerre. C'est en effet un chapitre plein d'enseignement, comme j'ai essayé de le démontrer.

  • Bienvenue sur ce site de podcast, une psychanalyse Ă  fleur d'inconscient. Aujourd'hui, je voudrais vous parler de l'un des destins de la pulsion, celui de la sublimation. Elle peut ĂȘtre considĂ©rĂ©e, Ă  la suite de Lacan, comme un travail de symbolisation de la perte, une cĂ©lĂ©bration de l'objet perdu.

    Freud, malgré la définition qu'il en a donné, « une satisfaction de la pulsion sans refoulement », n'a pas tout à fait réussi, malgré son étude de Léonard de Vinci, à tracer la métapsychologie de cette sublimation.

    Lacan, lui a franchi un pas de plus dans cette approche mais en repartant justement de l'un des plus anciens textes de Freud, son « Esquisse d'une psychologie scientifique » dans laquelle il décrit les premiers liens du petit nourrisson à sa mÚre.

    Freud y décrit comment le bébé découvre la présence de cette Autre préhistorique, la mÚre, en tant qu'elle est capable d'apporter satisfaction à ses besoins, lorsqu'il l'alerte par ses cris. Par son intermédiaire il fait tout d'abord l'expérience de la satisfaction, lorsque elle lui donne le sein, mais tout aussi bien l'épreuve de la souffrance. En effet elle n'obéit pas toujours au doigt et à l'oeil, elle vaque à ses occupations et ne répond pas toujours à son attente. C'est cette grande Autre archaïque qui est célébrée par tous ses troubadours, poÚtes, peintres, musiciens mais aussi psychanalystes.

    Cette Autre préhistorique, cette premiÚre étrangÚre, point d'origine de l'inconscient, se divise, selon Freud, en deux parties. L'une entre dans le champ des représentations inconscientes, au
    titre de traces mnésiques ou mnémoniques de l'objet, comme souvenirs de l'objet ; L'autre partie va rester définitivement étrangÚre, inassimilable. C'est ce que Lacan isolera sous ce terme de Das Ding, La chose. C'est avec ce nouveau concept pris dans le texte de Freud
    qu'il dĂ©crit alors ces mĂ©canismes mis en jeu lors de cette Ɠuvre de sublimation.

    Das Ding, c'est cet objet qui Ă©chappe Ă  toute symbolisation, Ă  tout jugement qu'il soit d'attribution ou d'existence. Autour de cet objet par contre, s'organisent donc toutes les reprĂ©sentations inconscientes soumises au principe de plaisir, ce que Lacan appelle la ronde des signifiants. Ainsi cernĂ© par du symbolique, s'instaure au cƓur du sujet un point de rĂ©el, qui n'est autre que celui de l'objet perdu de la thĂ©orie freudienne et que Lacan appelle la Chose. C'est justement Autour de cette Chose, que pourront ĂȘtre cultivĂ©es les fleurs les plus dĂ©licates et les plus belles de la civilisation.

    Par rapport Ă  ce concept de Das Ding, de La Chose, Lacan dĂ©finit donc la sublimation comme Ă©tant le fait d'Ă©lever un objet Ă  la dignitĂ© de la Chose. Il en devient le signifiant. Pour qu'il puisse ainsi reprĂ©senter la Chose, cet objet crĂ©Ă© par la sublimation doit toujours ĂȘtre construit autour d'un vide Ă©voquant l'absence de l'objet. Les poĂšmes des troubadours cĂ©lĂšbrent la dame inhumaine Ă  jamais inaccessible. De mĂȘme, les premiers vases, les premiĂšres poteries, traces d'anciennes civilisations, les peintures rupestres d'Altamira, mĂȘme les pommes
    de CĂ©zanne exaltent l'absence de cet objet perdu, instaurent sa nostalgie.

    La sublimation du psychanalyste autour de ce mĂȘme objet ne pourrait-elle pas mettre Ă  nu la fonction de toutes les formes de sublimation, en constituer une sorte de paradigme en spĂ©cifiant les rapports singuliers de chaque psychanalyste Ă  la Chose analytique et notamment en explicitant comment il a, autour de cet objet, Ă  rĂ©inventer la psychanalyse Ă 
    partir mĂȘme de ses symptĂŽmes. Ce dont pourrait tĂ©moigner ce changement d'orthographe, du « symptĂŽme » au « sinthome », proposĂ© par Lacan ?

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  • Bienvenue sur ce site de podcasts “ une psychanalyse Ă  fleur d’inconscient”. Aujourd’hui en cette pĂ©riode de vacances, j’ai choisi de vous parler de parfums, des bonnes ou des mauvaises odeurs qui nous ravissent ou nous incommodent.

    Juliette, Juliette Nouredine, une chanteuse qui compose le plus souvent Ă  la fois les textes et les musiques de ses chansons, a cĂ©lĂ©brĂ© dans l’une d’elles, des parfums, traces de la prĂ©sence d’une femme aimĂ©e ou peut-ĂȘtre de l’homme aimĂ©, on ne sait. Mais ce serait plutĂŽt des parfums de femme qui sont ainsi Ă©voquĂ©s.

    «Je veux garder pour en mourir

    Ce que vous avez oublié

    Sur les décombres de nos désirs

    Votre parfum sur l’oreiller.

    Laissez-moi deviner ces subtiles odeurs

    Et promener mon nez

    Parfait inquisiteur

    Il y a des fleurs en vous

    Que je ne connais pas

    Et que gardent jaloux

    Les replis de mes draps »

    On peut mourir d’amour et Juliette, cĂ©lĂ©brant les secrĂštes fragrances de son objet d’amour, nous en apporte la preuve, tout au moins en chanson. Mais il est un autre mot, dans le registre de ces odeurs qui est, lui aussi, un peu tombĂ© en dĂ©suĂ©tude, et qui, au contraire des fragrances, est de l’ordre des mauvaises odeurs, c’est celui de « pestilence ». C’est un mot que Lacan avait utilisĂ© Ă  propos de l’analyste. Il avait en effet trouvĂ© cette trĂšs jolie mĂ©taphore selon laquelle « l’analyste est un feu follet ». «Un feu follet, affirme-t-il, n’éclaire rien, il sort mĂȘme ordinairement de quelque pestilence ».

    Lacan effectue ainsi un bien curieux rapprochement. Est-ce pour indiquer qu’avec les signifiants de ces pulsions partielles qui ont jalonnĂ©es son enfance, avec ces pestilences pulsionnelles, l’analyste trouve le chemin de son dĂ©sir, un dĂ©sir « averti » concernant « l’humaine condition »?

    Pour ma part, je me suis souvent posĂ© cette question, Ă  propos de ces bonnes et mauvaises odeurs. Pourquoi Freud et Lacan, dans la mĂȘme veine, n’ont-ils pas Ă©rigĂ© ces effluves odorantes ou nausĂ©abondes au titre d’objet petit a, au mĂȘme titre que le sein, les selles, la voix et le regard puisque Freud indiquait que les reprĂ©sentations de ces zones sexuelles abandonnĂ©es, ces signifiants de la pulsion, pour l’interprĂ©ter en termes de logique du signifiant, “dĂ©gagent maintenant la mĂȘme puanteur” que le souvenir infantile Ă©voquĂ©.


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  • Bienvenue sur ce site de podcasts Une psychanalyse Ă  fleur d’inconscient. Aujourd’hui je vous poserai bien cette question : Le dĂ©sir de devenir psychanalyste n’est-il pas du mĂȘme ordre que le dĂ©sir qu’expriment les enfants de devenir aviateur, conducteur de train ou camionneur, instituteur ou brocanteur ? Les analystes n’en parlent pas souvent parce que c’est de l’ordre
    de l’intime, mais quand surgissent des rĂȘves en cours d’analyse oĂč pour la premiĂšre fois le timide dĂ©sir d’exercer ce mĂ©tier s’exprime de façon plus ou moins voilĂ©e on s’aperçoit alors Ă 
    quel point un tel dĂ©sir a de profondes racines inconscientes. Ce sont celles-ci, une fois analysĂ©es, interprĂ©tĂ©es, qui permettent alors Ă  chacun de savoir, selon la jolie formule de Lacan, de savoir s’il veut ce qu’il dĂ©sire.


    L'essentiel est donc d'analyser ce symptĂŽme, puisque s'en est un, celui de souhaiter devenir psychanalyste pour laisser la place Ă  quelque chose d’un autre ordre, ce que Lacan a appelĂ© «
    "dĂ©sir du psychanalyste » qui, au cƓur de l’analyse de celui qu’il a acceptĂ© d’écouter, trouvera, dans la rĂ©pĂ©tition de cette expĂ©rience, sa vĂ©ritable fonction, celle de renouveler, de rĂ©veiller la nĂ©vrose du sujet, d’en faire Ă  proprement parler une nĂ©vrose de transfert, de la rĂ©pĂ©ter puis de la dĂ©nouer justement parce qu’il peut occuper cette fonction du dĂ©sir de
    l’Autre. A la fin du sĂ©minaire de l’acte analytique, pour Ă©voquer ce qui en est de l’expĂ©rience analytique, Lacan reprend le mythe des paroles gelĂ©es de Rabelais. Au cours de leur voyage,
    soudain Pantagruel et ses compagnons virent tomber sur le tillac de leur navire, telle une bourrasque de grĂȘlons, des mots gelĂ©s qui se rĂ©chauffĂšrent progressivement dans leurs mains. Panurge demanda Ă  Pantagruel de lui en donner encore. Il en jeta trois ou quatre
    poignĂ©es et j’y vis, dit-il, des paroles fort piquantes, des paroles sanglantes, dont le pilote disait qu’elles revenaient du lieu oĂč elles avaient Ă©tĂ© prononcĂ©es. Et bien de mĂȘme, les
    paroles gelĂ©es du symptĂŽme, celles de l’analysant viennent se rĂ©chauffer au contact de ce dĂ©sir du psychanalyste. C’est ainsi que toutes ces paroles prononcĂ©es dans l’enfance et notamment celles qui ont entourĂ© sa naissance, reprennent vie et surtout toute leur vivacitĂ©, grĂące au transfert, quand le psychanalyste est ainsi venu rĂ©occuper la place de celui que Lacan appelle “le parent traumatique”.

    Rabelais, Le quart livre, chapitre 56. “Comment, parmi les paroles gelĂ©es, Pantagruel trouva des mots de gueule »



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  • Bienvenue sur ce site de podcasts, « Une psychanalyse Ă  fleur d'inconscient ». Aujourd'hui J'ai choisi en guise d'introduction, un rĂȘve de Freud que je trouve amusant. Il Ă©crit dans L'interprĂ©tation du rĂȘve : « Je me retrouve de nouveau entrain de faire de la chimie au laboratoire de l’universitĂ©. Le conseiller aulique L m'invite Ă  venir quelque part. Il tient dans
    sa main levĂ©e en l’air devant lui une lampe ou quelque autre instrument avec des airs d’intelligence affĂ»tĂ©e ou de perception aiguĂ«, dans une posture caractĂ©ristique, la tĂȘte tendue vers l’avant ».

    Il Ă©voque l' Ă©vĂ©nement de la veille qui a provoquĂ© ce rĂȘve, le fait qu’il avait appris une mauvaise nouvelle, la suppression du lieu oĂč il pouvait jusqu’alors donner ses confĂ©rences. et Cela lui avait fait penser Ă  ses dĂ©buts de jeune mĂ©decin oĂč on lui avait refusĂ© toute aide.

    Dans son interprĂ©tation, Freud dĂ©crit la façon dont ce conseiller aulique porte la lampe ou la loupe et Ă©voque par cette association, la statue d’ArchimĂšde Ă  Syracuse. Or ce monument cĂ©lĂšbre le fait qu'ArchimĂšde avait pu mettre le feu aux voiles de la flotte romaine qui assiĂ©geait la ville de Syracuse Ă  l'aide d'un miroir incendiaire. C'est ce mĂȘme objet que porte le conseiller aulique qui devance Freud. C'est ainsi que Freud met le feu Ă  l'universitĂ©.
    Sobrement Freud interprĂšte ce rĂȘve « Toute personne experte en interprĂ©tation du rĂȘve devinera aisĂ©ment que ni dĂ©sir de vengeance ni prĂ©somption de grandeur ne sont Ă©trangers aux pensĂ©es du rĂȘve.»

    Le vernis de la civilisation est extrĂȘmement fragile, il se craquelle et se fissure dans le moindre de nos gestes et de nos propos. Sous les plus belles rĂ©alisations humaines, dans les domaines de l’art, de la littĂ©rature ou de la politique, rĂ©apparaĂźt sans cesse, sous une forme plus ou moins masquĂ©e, notre inhumanitĂ© Ă  savoir notre dĂ©sir de destruction envers ceux qui nous entourent.

    Si nous nous rĂ©fĂ©rons Ă  ce que nous pouvons apprendre, Ă  propos du moindre de nos rĂȘves ou de nos actes manquĂ©s, nous pouvons dĂ©couvrir que nous nous y dĂ©barrassons allĂšgrement de tous ceux qui peuvent faire obstacle Ă  la rĂ©alisation de nos dĂ©sirs les plus
    chers, ou de tous ceux qui portent atteinte Ă  la haute opinion que nous avons de nous-mĂȘmes, en les envoyant au Diable ou encore « ad patres ». Nous les envoyons ainsi, sans autre forme de procĂšs, rejoindre le monde de nos ancĂȘtres.

    Pour dĂ©crire cette fonciĂšre mĂ©chancetĂ© qui est au cƓur de chacun de nous, Freud, comme souvent, aime bien faire appel non seulement au savoir mais aussi Ă  l’humour des poĂštes.


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  • Aujourd'hui j'ai choisi un titre un brin provocateur. Certes la guĂ©rison de la nĂ©vrose n'est pas censĂ©e ĂȘtre l'effet premier, le but d'une psychanalyse, mais il n'empĂȘche que cette derniĂšre a des effets et des effets bĂ©nĂ©fiques pour le sujet, car sinon comment chaque analysant mais aussi chaque psychanalyste pourrait-il s'engager dans cette entreprise malgrĂ© toutes les embĂ»ches rencontrĂ©es Ă  commencer par le choix d’un psychanalyste, les souffrances rĂ©veillĂ©es, remises Ă  vif, du fait du transfert, et ce qu’il en coĂ»te Ă  chacun des efforts de toute sorte, surtout et y compris les efforts financiers.

    En 1978, au moment de la clÎture du congrÚs de la transmission de la psychanalyse, Lacan avait posé cette question « comment se fait-il, que de par l'opération du signifiant, il y a des gens qui
    guĂ©rissent, qui guĂ©rissent de leur nĂ©vrose, voire de leur perversion, car c’est un fait qu’il y a des gens qui guĂ©rissent » et pour en rendre compte il avait avancĂ© un curieux terme celui de «truquage».

    Si on tourne un peu autour de ce mot, il est pour le moins ambigu. Il peut dĂ©crire le savoir faire du psychanalyste, il connaĂźt le truc, il sait comment s’y prendre. Il Ă©voque donc l’habiletĂ© de l’artisan
    ou l’astuce du bricoleur. Mais si nous passons du mot truquage au verbe truquer, il prend tout d’un coup une tonalitĂ© plus pĂ©jorative. Surgissent Ă  l’horizon une cohorte de truqueurs, de
    faussaires, d’escrocs. Il me semble que les analystes ne doivent pas perdre de vue cette dimension malĂ©fique du truquage. Car ils se tiennent sur cette Ă©troite limite, une crĂȘte entre deux versants, celui de l’habiletĂ© et celui de l’escroquerie. Je reprends ce terme puisqu’il a dĂ©jĂ  Ă©tĂ© utilisĂ© par Lacan.

    Ces deux versants possibles du truquage vont se trouver mis en jeu, mis en scĂšne Ă  propos des fantasmes de guĂ©rison de l’analysant qui existent dans toute analyse, pour peu bien sĂ»r qu’on y prĂȘte attention.



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