Afleveringen

  • Ce jour-là, Mot Binama l'Être Humain va rendre visite à ses parents de l'autre côté de la grande forêt. Arrivé au cœur de la forêt, il entend soudain des gémissements qui viennent de quelque part.

    « Euh !!! Qui va me tirer de ce mauvais pas ? »

    Intrigué, il se dirige vers la source des lamentations et là, il trouve Mvomo le Serpent Boa pris dans un piège que les petits de la forêt équatoriale du Cameroun appellent Egoudi : le tronc est sur le serpent boa, la tête d’un côté, la queue de l’autre.

    Mot Binama l’Être Humain prend pitié, il soulève le tronc et libère Mvomo le Serpent Boa. Une fois hors du piège, Mvomo le Serpent Boa dit à Mot Binama l'Être Humain :

    MVOMO LE SERPENT BOA : « Je ne te témoignerai jamais assez ma gratitude. Tu viens de me sauver la vie. Comme tu as commencé à me sauver la vie, sauve-moi la vie jusqu’au bout ! Ça fait trois jours que je suis coincé sous ce tronc, je n’ai rien mangé et je n’ai plus assez de force pour aller chercher un autre gibier. Le seul gibier à ma portée c’est toi, laisse-toi avaler ! »

    MOT BINAMA L'ÊTRE HUMAIN lui répond : « Ah non hein ! Ah non, c’est hors de question hein ! Tu ne penses tout de même pas que je t’ai sauvé la vie pour que tu prennes la mienne ! »

    MVOMO LE SERPENT BOA lui répond : « Je te comprends. Mais comprends-moi aussi, j'ai faim, moi. À quoi cela t'aura servi de me sauver la vie, si c'est pour me laisser mourir de faim ? Laisse-toi avaler. Pourquoi la nourriture est-elle en train de discuter avec moi ? »

    MOT BINAMA L'ÊTRE HUMAIN lui dit : « Non, non, non, c’est hors de question ! »

    Là-dessus arrive So l’Antilope.

    MOT BINAMA L'ÊTRE HUMAIN voit l’antilope et l’appelle : « So l’Antilope, s’il te plaît, viens nous trancher ce contentieux. »

    SO L’ANTILOPE arrive et dit : « Qu’est-ce qui se passe ? »

    MOT BINAMA L'ÊTRE HUMAIN lui dit : « Voilà, je viens de sauver Mvomo le Serpent Boa d’une mort certaine. Mais dès qu’il est sorti du piège, il commence à me dire… Wouahhh ! Ca fait trois jours qu’il n’a pas mangé et que moi je devrais lui servir de déjeuner, je ne suis pas d’accord du tout. S’il te plaît So l’Antilope, tranche nous ce contentieux. »

    So l’Antilope regarde Mot Binama l'Être Humain, un prédateur. So l’Antilope regarde Mvomo le Serpent Boa, un autre prédateur.

    SO L’ANTILOPE dit aux deux belligérants : « Je pense que cette situation mérite réflexion. Je vais me concerter avec moi-même, et je reviens vous trancher ce contentieux, ne bougez surtout pas ! »

    So l’Antilope s’en est allée et n’est plus jamais revenue.

    Pour ne pas vous fatiguer plus longtemps les oreilles, sachez que tous les animaux à tour de rôle ont été sollicités par les belligérants. Mais aucun d’entre eux n’a voulu trancher ce contentieux entre ces deux prédateurs.

    Entre temps la journée avance, le soleil lui-même commence à trouver le temps long. Il s’apprête à aller se coucher.

    Mvomo le Serpent Boa est de plus en plus énervé, ça tire vers le quatrième jour de diète.

    MOT BINAMA l'ÊTRE HUMAIN, de son côté, se dit : « Ah ! Je ne vais quand même pas finir mon existence dans le ventre d’un maudit serpent que j’ai sauvé ? »

    C’est juste à ce moment qu'arrive Kounou la Tortue.

    MOT BINAMA l'ÊTRE HUMAIN voit la tortue et l’appelle : « Ah Kounou la Tortue, viens s’il te plaît nous trancher ce contentieux ».

    KOUNOU LA TORTUE arrive et demande à Mot Binama l'Être Humain : « Qu’est-ce qui se passe ? »

    MOT BINAM L'ÊTRE HUMAIN lui dit : « Voilà ! Je viens de sauver Mvomo le Serpent Boa d’une mort certaine. Dès qu’il est sorti du piège, il commence à me dire… Wouahhh ! Ça fait trois jours qu’il n’a pas mangé et que moi je devrais lui servir de déjeuner. Je ne suis pas d’accord du tout et aucun animal dans cette forêt ne veut nous trancher ce contentieux. S’il te plaît, fais quelque chose ! »

    Kounou la Tortue regarde Mot Binama l'Être Humain et se dit que c’est un prédateur. Elle regarde aussi Mvomo le Serpent Boa, un autre prédateur, et elle dit :

    KOUNOU LA TORTUE : « Je pense que cette situation mérite une profonde réflexion. Je vous suggère de faire une reconstitution. »

    C’est donc ce jour-là que Kounou la Tortue a inventé cette technique policière et judiciaire qu’on nomme ‘’reconstitution’’. Il s’agit simplement de remettre les choses en place comme elles s’y trouvaient avant que la situation ne devienne carabinée.

    MVOMO LE SERPENT BOA accepte de se remettre dans le piège, il dit : « Aucun souci, si ça peut me permettre de manger, je fais ce que tu me demandes ! »

    KOUNOU LA TORTUE s’adresse à Mot Binama l'Être Humain : « Accepterais-tu de soulever le tronc afin que Mvomo le Serpent Boa puisse s’y glisser pour la reconstitution des faits ? »

    MOT BINAMA L’ETRE HUMAIN lui répond : « Si ça peut me sauver la vie, il n’y a aucun souci ! »

    Alors Mot Binama l’être humain soulève le tronc.

    Mvomo le Serpent Boa se glisse sous le tronc.

    Et là, KOUNOU LA TORTUE dit à Mot Binama l'Être Humain : « Lâche le tronc !»

    Mot Binama l'Être Humain lâche le tronc. Le tronc tombe sur Mvomo le Serpent Boa, la tête d’un côté, la queue de l’autre.

    Alors, KOUNOU LA TORTUE s’adresse à Mot Binama l'Être Humain et lui dit : « Mon ami, comme tu es si généreux... Je suppose que tu vas encore le libérer. Mais, attends que je sois très très loin d’ici, avant de faire tes bêtises ».

    Nos ancêtres Béti ont tiré de ce conte un proverbe qui dit : Un bienfait n’est pas toujours payé en retour.

    L’Afrique en conte est une série créée par l'ONG Des Livres Pour Tous - Côte d'Ivoire et le collectif Making Waves, en partenariat avec RFI. Ce projet a reçu le soutien du dispositif « Accès Culture » de l’Institut français de Paris et de l’Agence française de développement (AFD), du programme « ACP-UE Culture pour l’Afrique de l’Ouest - Awa » de l'Institut français et du Centre culturel Kôrè, du dispositif « Agir » du Département de Seine-Saint-Denis et de la Région Île-de-France.

  • Rapace d’une rapidité et d’une précision de chasse hors pair, KIMANGLO l’Épervier se nourrit d’insectes, de souris et d’oiseaux.

    Un jour, Dieu lui fait la grâce d’avoir un petit. KIMANGLO l’Épervier le nomme BAKANTI, ce qui veut dire : « celui qui écoute les conseils qu’on lui donne ». KIMANGLO l’Épervier lui explique la chasse et les dangers qu’elle comporte. La maman Épervier encourage son fils à privilégier les poussins ou toute autre espèce comestible pouvant entrer dans ses serres. Cependant, elle lui conseille d’être prudent avec certaines espèces telles que la famille de BEKINMIN, la cane.

    Vigoureux, mais inexpérimenté, le jeune épervier BAKANTI interprète ce dernier conseil comme un défi à relever.

    Il est comme ces gens qui pensent qu’on leur dit « ne fais pas ceci » parce qu’on les sous-estime ? Vous voyez ?

    A son premier jour de chasse, malgré les mises en garde de sa mère, BAKANTI prend pour cible un caneton. Il fond sur lui, l’attrape entre ses serres et s’envole avec sa proie. Une fois rentré chez lui, il fait l’admiration de toute la famille, sauf de sa mère KIMANGLO. S’apercevant qu’elle est mécontente, BAKANTI s’approche d’elle, inquiet:

    BAKANTI : « Maman, que se passe-t-il ? On dirait que tu n’es pas heureuse de mon exploit ! »

    KIMANGLO L’EPERVIER : « Bakanti quand je te parle, tu n’écoutes pas. Je m’inquiète du risque que tu as pris. D’ailleurs dis-moi comment a réagi la mère de ta victime ? »

    BAKANTI : « Maman, elle a juste tourné la tête pour me regarder puis elle est partie avec ses autres enfant sans dire un mot. Je me suis dit qu’elle n’aimait celui-ci. »

    KIMANGLO L’EPERVIER : « Mon fils, une mère qui n’aime pas ses enfants, ça n’existe pas. Je suis sûr qu’elle est partie préparer sa vengeance. Écoute ta mère, fais très attention au choix de tes victimes. »

    Tout en écoutant d’une oreille les conseils de sa mère, BAKANTI rêve à l’admiration qu’il susciterait dans son clan s’il renouvelait son exploit.

    Vous voyez ces enfants qui font semblant d’écouter les conseils qu’on leur donne, mais qui n’en font qu’à leur tête ?

    De nouveau donc, BAKANTI prend pour cible un caneton. Mais cette fois, il tombe sur une cousine BEKINMIN qui ne se laisse pas faire. Si tu vas dans une communauté et que tu n’as pas vu le caractère des habitants le premier jour, tu le verras sans nul doute le deuxième. La cane poursuit BAKANTI jusqu’à lui arracher sa prise et le jeune épervier rentre chez lui bredouille et confus.

    Maman épervier se rend compte que son fils n’a pas suivi ses conseils. Elle le prend dans ses ailes et le console.

    KIMANGLO L’EPERVIER : « Mon fils, c’est par expérience que je te disais de te méfier de cette famille. Désormais, il faudra faire très attention au choix de tes cibles. »

    A sa troisième tentative, BAKANTI prend pour cible un poussin qu’il arrache à l’affection de sa mère. Affolée, celle-ci se met à hurler, proférant toutes sortes de malédictions à l’endroit du ravisseur. Mais le jeune épervier continue son vol et retrouve son clan, son butin entre ses serres.

    Une fois rentré chez lui, sa mère KIMANGLO lui demande :

    KIMANGLO L’EPERVIER : « Quelle a été la réaction de la mère poule ? »

    BAKANTI : « Elle a hurlé, m’a injurié, et m’a maudit. »

    KIMANGLO L’EPERVIER : « Bien, c’est bien, mon fils. Ceux qui maudissent et hurlent se vident de leur colère, tandis que ceux qui ne disent rien sont à craindre, leurs réactions sont imprévisibles. »

    Vous comprenez maintenant pourquoi dans nos villages, les éperviers préfèrent prendre les poussins plutôt que les canetons.

    L’Afrique en conte est une série créée par l'ONG Des Livres Pour Tous - Côte d'Ivoire et le collectif Making Waves, en partenariat avec RFI. Ce projet a reçu le soutien du dispositif « Accès Culture » de l’Institut français de Paris et de l’Agence française de développement (AFD), du programme « ACP-UE Culture pour l’Afrique de l’Ouest - Awa » de l'Institut français et du Centre culturel Kôrè, du dispositif « Agir » du Département de Seine-Saint-Denis et de la Région Île-de-France.

  • Zijn er afleveringen die ontbreken?

    Klik hier om de feed te vernieuwen.

  • Avez-vous déjà entendu parler de l’histoire de la Mangouste et du Crabe ?

    La Mangouste et le Crabe sont deux grands amis qui vivaient en parfaite harmonie.

    Pour renforcer leur amitié, ils avaient décidé de signer un pacte selon lequel aucun des deux ne devait faire de mal à l’autre.

    Ainsi, la Mangouste qui est un animal très rusé, n’osait jamais tendre de piège à son ami le Crabe, et le Crabe non plus, avec ses pinces, n’avait jamais osé faire du mal à sa belle amie. Tel était le pacte qu’ils avaient scellé.

    Mais un samedi matin, alors que la Mangouste allait faire son sport matinal, elle eut la surprise d’entendre un groupe de personnes en train de parler du Crabe dont ils ne tarissaient pas d’éloges ! Ils parlaient à pêle-mêle de la splendide démarche du Crabe et de ses belles et puissantes pinces.

    La jalousie de la Mangouste monta en elle comme une vague. Elle décida alors de rompre le pacte de non-agression et élabora un plan.

    Une fois son plan mis en place, la Mangouste alla frapper à la porte de son ami le Crabe, l’invitant à manger un bon plat qu’elle avait pris le soin elle-même de cuisiner.

    La Mangouste : « Crabe, Crabe, mon ami ! »

    Le Crabe : « Bonjour ma chère Mangouste. Pourquoi es-tu si heureuse ? Tu as une surprise pour moi ? »

    La Mangouste : « C’est que je t’ai préparé un festin, une bonne soupe de pêcheur très épicée comme tu aimes. J’ai hâte que tu y goûtes. Allez viens, dépêche-toi… »

    Sans perdre un instant, le Crabe enfila son short et le voici parti avec la Mangouste.

    Une fois chez elle, celle-ci sortit une grosse marmite de nourriture et dit au Crabe :

    La Mangouste : « C’est jour de fête aujourd’hui. Allez vas-y, lave-toi les mains, et profite, mange mon ami. »

    Rusée, la Mangouste plonge en premier la patte dans la marmite bouillante, comme pour montrer l’exemple, et ressort avec de gros morceaux de poisson.

    Le Crabe suit son exemple et y plonge sa pince. Mais celle-ci devient immédiatement toute rouge.

    Sans dévier de son projet, la Mangouste prend une deuxième ration de poisson et incite le Crabe à l’imiter.

    La Mangouste : « allez, allez, vas-y, vas-y, c’est ton tour ! »

    Le Crabe naïf plongea sa seconde pince dans le liquide brûlant. Elle devient cramoisie, à l’égal de la première.

    C’est alors que la Mangouste, d’un mouvement violent, se jette sur la pince cuite du Crabe et la croque.

    Le Crabe comprend enfin qu’il est en danger, il cherche à s’enfuir, mais la Mangouste le rattrape, le jette entièrement dans la soupe et le dévore.

    Très heureuse du méchant tour qu’elle vient de jouer, la Mangouste sort de sa cabane et se frappe la poitrine, en disant :

    La Mangouste : « Où sont passées les belles pinces du crabe désormais ? Dans mon ventre, haha haha ! C’est moi la plus rusée de tous les animaux ! »

    C’est depuis ce jour que le crabe est d’une méfiance maladive. Lorsqu’il est hors de son trou, à peine sent-il la présence d’autrui qu’il court rapidement se cacher, il ne fait même plus confiance à sa propre ombre.

    L’Afrique en conte est une série créée par l'ONG Des Livres Pour Tous - Côte d'Ivoire et le collectif Making Waves, en partenariat avec RFI. Ce projet a reçu le soutien du dispositif « Accès Culture » de l’Institut français de Paris et de l’Agence française de développement (AFD), du programme « ACP-UE Culture pour l’Afrique de l’Ouest - Awa » de l'Institut français et du Centre culturel Kôrè, du dispositif « Agir » du Département de Seine-Saint-Denis et de la Région Île-de-France.

  • Dans un village vivaient Ijapa la Tortue et Adjà le Chien. Ces deux amis étaient les seuls animaux qui cohabitaient avec les hommes, les femmes et les enfants.

    Un jour, alors qu’ils se baladaient, ils croisèrent Yawa, la femme la plus âgée du village. Elle portait sur son dos un fagot de bois très lourd et avait du mal à marcher. Adjà, le Chien, la salua :

    ADJA LE CHIEN : « Bonjour grand-mère ! »

    YAWA : « Bonjour mon enfant !»

    Pris de pitié, Adjà le Chien proposa à son amie Ijapa la Tortue d’aider la vieille dame à porter son fagot jusqu’à chez elle. Ijapa lui répondit :

    IJAPA LA TORTUE : « Est-ce que tu m’as bien regardée ? Tu m’imagines, moi Ijapa, jolie comme je suis, en train de porter sur mon dos un gros fagot pour raccompagner une vieille femme aussi lente. Non, je ne peux pas perdre mon temps ! Je suis désolée. »

    Puis, elle donna dos au Chien.

    Choqué par la réaction de son amie, le chien répliqua :

    ADJA LE CHIEN : « Ijapa, tu t’entends parler ? » et chuchotant à l’oreille d’Ijapa : « Tu sais bien que la tradition nous demande d’être respectueux envers les personnes âgées. »

    Mais Ijapa la Tortue poursuivit sa route, laissant derrière elle Yawa, la vieille femme, et son ami Adjà le Chien, à qui elle lança en s’éloignant :

    IJAPA LA TORTUE : « Vas-y, je ne t’arrête pas, va l’aider Monsieur le porte bagage. Moi j’ai mieux à faire. »

    C’est ainsi qu’Adjà le Chien aida seul la vielle femme à porter son fagot.

    La vieille dame fut touchée du comportement du Chien :

    YAWA : « Merci beaucoup mon enfant.

    Après avoir déposé le fagot Adjà le Chien lui demanda :

    ADJA LE CHIEN : « Maman, est-ce que je peux faire autre chose pour vous ? »

    YAWA : « Mon enfant, tu as assez fait. Je voudrais te récompenser, viens avec moi. »

    Elle fit entrer Adjà le Chien chez elle.

    YAWA : « Voici trois tambours : un grand, un moyen et un petit. Choisis celui qui te plaît le plus et apporte-le-moi. »

    Adjà le Chien s’exécuta. Il opta pour le petit tambour qu’il remit à Yawa.

    Elle aima le fait qu’il ait choisi le plus petit tambour, puis l’encouragea à rester humble toute sa vie. Elle ajouta :

    YAWA : « À chaque fois, je dis bien à chaque fois que tu auras faim, bats simplement le tambour. Ce sera comme un signe que tu m’enverras et, automatiquement, la nourriture apparaîtra. »

    Adjà Le Chien s’inclina, la remercia plusieurs fois et rentra paisiblement chez lui.

    Un jour arriva, où la nourriture vint à manquer. Alors que les provisions des villageois s’étaient épuisées, Adjà le Chien, lui, ne manquait de rien. Il suivait scrupuleusement les indications de la vieille Yawa et mangeait chaque jour à sa faim.

    Ijapa la Tortue et Adjà le Chien ne se fréquentaient plus. Jusqu’au jour où la rumeur se répandit dans le village qu’Adjà le Chien avait reçu un cadeau de la part d’une vieille femme qui lui permettait de ne plus souffrir de la faim. Ijapa la Tortue décida d’aller vérifier l’information par elle-même.

    IJAPA LA TORTUE : « Bonjour mon très cher ami Adjà ! »

    ADJA LE CHIEN : « Bonjour Ijapa, que me vaut l’honneur de ta visite ? »

    IJAPA : « J’ai faim et j’ai entendu dire que tu avais de la nourriture. Au nom de notre amitié, Adjà, pourrais-tu m’en donner un peu ? »

    Adjà le Chien qui était bon, expliqua à la tortue comment il avait reçu ce présent.

    Il tapa plusieurs fois sur le tambour et de la nourriture apparut en abondance.

    Tout en mangeant, la tortue dit au chien :

    IJAPA LA TORTUE : « Mais mon ami, pourquoi tu as choisi le plus petit tambour ? Il fallait prendre le plus grand pour que tous les villageois puissent en profiter ! »

    Mais en son for intérieur, Ijapa la Tortue tenait un autre discours :

    IJAPA LA TORTUE (pour elle-même) : « Prendre le plus petit tambour, kpô ! Moi Ijapa, j’aurais choisi le plus grand afin d’ouvrir un restaurant et de vendre cette nourriture à tous les villageois. »

    Ijapa la Tortue décida alors de se rendre chez la vieille dame pour lui voler le grand tambour. Elle se croyait maline, oubliant que seule la vieille dame pouvait donner à chaque tambour son pouvoir magique. Une fois chez elle, Ijapa la Tortue ferma ses portes, ses fenêtres, aligna ses assiettes, et commença à battre le tambour.

    Malheureusement pour elle, ce tambour-ci renfermait un mauvais génie qui la frappa, la frappa, et la frappa encore. Elle appela à l’aide mais personne ne vint à son secours.

    Il ne lui resta plus qu’à s’enfuir, le dos meurtri par les coups qu’elle avait reçus.

    La légende raconte que les nombreuses blessures formèrent en guérissant la carapace que nous lui connaissons aujourd’hui. Les séquelles des fractures la condamnèrent pour toujours à se déplacer à l’allure d’une très vieille femme.

    L’Afrique en conte est une série créée par l'ONG Des Livres Pour Tous - Côte d'Ivoire et le collectif Making Waves, en partenariat avec RFI. Ce projet a reçu le soutien du dispositif « Accès Culture » de l’Institut français de Paris et de l’Agence française de développement (AFD), du programme « ACP-UE Culture pour l’Afrique de l’Ouest - Awa » de l'Institut français et du Centre culturel Kôrè, du dispositif « Agir » du Département de Seine-Saint-Denis et de la Région Île-de-France.

  • Chez nous, il y a un adage qui dit que l’on récolte toujours ce qu’on a semé.

    L’histoire que je vais vous raconter, est une histoire qui m’a été racontée par mon père, qui lui, l’a reçue de mon grand-père, qui à son tour l’a reçue du père, du père, du père, du père de son grand-père.

    Autrefois, dans un village, vivaient Zemsitaba, Noubila, Rahitaba, trois jeunes paresseux. Ils étaient toujours ensemble, vagabondant dans le village.

    Un jour, le plus âgé nommé Zemsitaba dit aux deux autres :

    ZEMSITABA : « Les amis, dans quelques années, nous allons vieillir, et nous devons planifier notre avenir en cherchant un travail qui nous permettra de gagner rapidement notre argent. »

    Chacun d’eux devait réfléchir pour trouver ce métier. Etant donné leur nature, ils choisirent le vol. Aussitôt dit, aussitôt fait, ils se lancèrent dans le vol du sorgho rouge et du mil qui servent à la production du tchapalo, une boisson enivrante à base de ces céréales.

    Zemsitaba leur conseilla tout d’abord de consulter le plus grand marabout de la région pour qu’il leur donne une potion magique. Cette potion devait les rendre invisibles à chaque fois qu’ils commettraient leur forfait. En l’appliquant ils entonnaient ce chant :

    ZNR sur la tête

    ZNR sur le ventre

    ZNR sur les pieds.

    Ainsi fut fait ! Ils détenaient leur potion magique et à chaque fois qu’ils aller voler, ils l’appliquaient sur leur corps en répétant leur formule magique.

    Le premier jour, ils se rendirent dans l’un des villages, à l’heure où les villageois étaient déjà dans leurs champs.

    Les trois amis se mirent à répéter leur formule.

    ZNR sur la tête

    ZNR sur le ventre

    ZNR sur les pieds.

    Ils réussirent leur premier coup en emportant une centaine de sacs bien pleins qu’ils vendirent en trois jours. Pendant deux bonnes années, les trois amis prospérèrent.

    Puis, un beau jour, ils décidèrent de viser plus haut en volant des bœufs. Ils se rendirent donc la nuit dans une ferme où il y avait plusieurs bœufs dans un enclos. Comme le dit l’adage, « mille jours pour le voleur mais un seul jour pour le propriétaire ».

    Nos trois voleurs très sûrs de leur coup, ne prirent même pas la peine de s’enduire de leur potion magique. Arrivés sur les lieux, Zemsitaba demanda à la plus jeune, c’est-à-dire à Rahitaba, de tâter les bœufs. Lorsque celle-ci passa sa main par le trou de la clôture, le propriétaire, grand marabout devant l’éternel, fit disparaître sa main. La malheureuse retira son bras, sans crier son étonnement puis le cacha sous son habit en disant à Zemsitaba et Noubila :

    RAHITABA : « Ah oui ! Le bœuf que j’ai touché est bien gras. Passez votre main par vous-mêmes et constatez. »

    Ce fut le tour de Noubila. Grande fut sa surprise quand il vit sa main disparaître. Il appela Zemsitaba en disant :

    NOUBILA : « Mon ami, ce qu’il a dit est vrai, ce bœuf est bien gras, mets ta main tu verras. »

    Zemsitaba, enthousiasmé par les paroles de ses amis, fit la même chose. Puis, constatant la disparition de sa main :

    ZEMSITABA : « Vous êtes méchants, vous ne pouviez pas me dire que c’était le bœuf d’un marabout ? »

    Se moquant de lui, Rahitaba et Noubila lui répondirent :

    RAHITABA : « Ah ! C’est la règle pourtant, tu as dit qu’on devait partager à part égales tout ce que nous aurions. »

    NOUBILA : « C’est pourquoi on a voulu partager avec toi le fruit de notre travail. Maintenant, on est tous au même niveau. »

    Depuis ce jour Zemsitaba, Rahitaba et Noubila ont décidé d’arrêter le vol.

    Dans la vie, il est bon de travailler de façon honnête pour gagner son pain, car nous récoltons toujours ce que nous semons !

    L’Afrique en conte est une série créée par l'ONG Des Livres Pour Tous - Côte d'Ivoire et le collectif Making Waves, en partenariat avec RFI. Ce projet a reçu le soutien du dispositif « Accès Culture » de l’Institut français de Paris et de l’Agence française de développement (AFD), du programme « ACP-UE Culture pour l’Afrique de l’Ouest - Awa » de l'Institut français et du Centre culturel Kôrè, du dispositif « Agir » du Département de Seine-Saint-Denis et de la Région Île-de-France.

  • On dit que la traîtrise, la cupidité et la malhonnêteté sont de très mauvais amis et je l’ai compris à travers une histoire.

    Il y a longtemps, très longtemps, dans un petit village appelé Sankaraniso, situé au bord de la rivière Sankarani.

    Un jour, une terrible sécheresse frappa ce village du Sahel. Les cours d’eaux sont secs. Les bêtes meurent, les greniers vides et les villageois désemparés.

    N’ayant plus de quoi vivre, les villageois étaient très inquiets. Sans l’eau, sans cette source de vie précieuse, il n’y a de vie nulle part sur Terre. Les chants, les incantations, les faiseurs de pluie n’y pouvaient rien. Le ciel refusait de pleurer sur Sankaraniso. Mais comme on dit chez moi : au bout de la patience, il y avait toujours la récompense.

    Un jour, un voyageur arrive dans le village. Il était fatigué et il avait soif. Et comme veut la tradition, on lui sert de l’eau mais tenez-vous bien, le dernier verre d’eau qui restait dans le village. Touché par la générosité des villageois, le voyageur leur confie un secret.

    LE VOYAGEUR : « Merci, vous avez partagé ce que vous avez de plus précieux avec moi. Je n’ai rien à vous donner, mais avant de partir, j’ai un secret à vous confier.

    Connaissez-vous Bamako, le marigot du caïman ? »

    TRAORE : « Bamako ? »

    MAÏGA : « Le marigot du caïman ?

    KEITA : « On ne connait pas, c’est où ? »

    LE VOYAGEUR : « C’est très loin, très loin. Là-bas, tout est possible. L’or coule à flot. Si vous voulez être riche, partez à Bamako »

    Après concertation, palabres des anciens et offrandes aux divinités, les jeunes Traoré, Maïga et Keita sont désignés par les villageois.

    Les jeunes demandent la route pour partir, ce que le village leur accorde volontiers.

    Ils marchent des heures, ils marchent un jour, ils marchent deux jours, ils marchent trois jours. Et à la nuit du septième jour, ils arrivent enfin aux encablures d’un grand marigot.

    Traoré est devant et les deux autres derrière.

    De l’autre côté de la rive, une lueur s’étire.

    TRAORE : « Attendez mes amis, qu’est-ce que c’est là-bas ? »

    MAÏGA : « Au lieu de rester ici à parler, allons voir ensemble… »

    Les trois jeunes gens se dirigent vers le point qui brille. Arrivés au niveau de la rive, un énorme caïman se met devant eux.

    Traoré se jette sans réfléchir dans l’eau pour faire diversion. Le caïman le poursuit.

    Maïga et Keita en profitent pour traverser et aller de l’autre côté du marigot.

    Et comme le voyageur leur avait dit, ils découvrent des sacs remplis d’or.

    MAIGA : « C’est merveilleux, nous sommes riches. Nous allons partager l’eau une fois que nous serons arrivés au village ».

    Les trois amis, les bras chargés de sacs d’or, prennent le chemin du retour.

    Traoré reste silencieux face aux paroles de Maïga. Pourquoi partager ? Il avait pris plus de risques que les autres. Le bon sens voulait selon lui qu’il reçoive la plus grande part. Mais Maïga et Keita n’étaient pas de cet avis. Traoré n’a rien fait, il s’est laissé distraire par une course poursuite avec le caïman. Pourquoi partager à part égale avec lui ? Ah, l’argent a toujours été la faiblesse des Hommes...

    KEITA : « Ma chère, franchement, je ne veux pas partager avec Traoré. »

    MAIGA : « Moi non plus. Il n’a rien fait. C’est nous seuls qui avons pris des risques. »

    KEITA : « T’inquiète, on va régler ça ! »

    Après réflexion, ils décident de frapper Traoré au prochain point de repos et de partager le contenu du sac en deux.

    De son côté, Traoré murit également son plan à l’égard de ses deux compagnons.

    TRAORE : « Keita et Maïga sont en train de murmurer depuis tout à l’heure. Ils ressemblent trop à des enfants, ils sont immatures et je sais bien qu’ils ne seront pas prendre soin de ce trésor. Il faut que je me débarrasse d’eux, comme ça je pourrai garder ça pour moi et pour ma famille !»

    Arrivé au prochain point de repos, Traoré décide d’aller chercher à manger pour le reste du groupe. Il en profite pour empoisonner la nourriture.

    À son retour, Keita et Maïga se jettent sur lui et le frappent à mort.

    Satisfaits de leur forfait, ils décident de manger la nourriture apportée par Traoré avant de reprendre le chemin.

    Mais à peine avaient ils avalé quelques bouchées qu’ils commencèrent à se plaindre de douleurs abdominales. Quelques heures plus tard, ils étaient morts, laissant là tous les sacs d’or, fruits de leurs efforts collectifs.

    Je vous l’avais dit : la traitrise, la cupidité et la malhonnêteté sont vraiment de très mauvais amis.

    Cette histoire a servi de leçon aux descendants des Traoré, des Maïga et des Keita qui ont tissé une alliance et ont décidé d’être loyaux les uns envers les autres, et de ne plus se faire de coups bas.

    L’Afrique en conte est une série créée par l'ONG Des Livres Pour Tous - Côte d'Ivoire et le collectif Making Waves, en partenariat avec RFI. Ce projet a reçu le soutien du dispositif « Accès Culture » de l’Institut français de Paris et de l’Agence française de développement (AFD), du programme « ACP-UE Culture pour l’Afrique de l’Ouest - Awa » de l'Institut français et du Centre culturel Kôrè, du dispositif « Agir » du Département de Seine-Saint-Denis et de la Région Île-de-France.

  • Il y avait autrefois un grand rocher à la barbe très longue qui se trouvait dans la brousse au pied d’une haute montagne, non loin d’un village.

    Un jour que l’araignée était allée couper des nervures de palme, elle aperçut ce rocher et s’écria :

    L’ARAIGNÉE : « Mais qu’est-ce que c’est que cette pierre barbue ? »

    LE ROCHER : Hé, je ne suis pas une pierre barbue ! Je me nomme le rocher à la très longue barbe.

    L’ARAIGNÉE : « Le rocher à la très longue barbe ? »

    À peine l’araignée avait-elle prononcé cette phrase qu’elle fut projetée violemment au sol. Elle ne put se relever qu’après s’être longtemps débattue et avoir démêlé ses pattes.

    Mais, comme elle était très intelligente, l’araignée vit dans cette aventure un moyen de nourrir sa famille : lorsque sa provision de viande viendrait à s’épuiser, elle demanderait à un animal de l’accompagner en brousse pour chercher des nervures de palme. Elle s’arrangerait pour passer près de ce rocher, son accompagnateur ne manquerait pas de prononcer la phrase qu’il ne faut pas prononcer et alors il tomberait, il se débattrait, mourrait et, elle, l’araignée, elle pourrait s’emparer de son cadavre et nourrir les siens.

    Pendant longtemps, cette ruse fonctionna à merveille.

    Un jour, ce fut le tour du singe d’accompagner l’araignée dans la brousse sous prétexte de chercher des nervures de palmes. Alors qu’ils arrivaient à proximité du rocher, l’araignée dit au singe.

    L’ARAIGNÉE : « Mon ami, passons de ce côté-ci. Regarde, il y a beaucoup de nervures là-bas. »

    Le singe avança avec méfiance car il connaissait le caractère fourbe de l’araignée. Quand ils arrivèrent devant le rocher, l’araignée fit mine de s’étonner.

    L’ARAIGNÉE : « Mais c’est quoi ça, là ? »

    LE SINGE malicieusement : « On dirait une termitière »

    L’ARAIGNÉE : « Tu es sûr ? Regarde bien »

    LE SINGE : « Un tas de sable ? »

    L’ARAIGNÉE : « Non, je pensais que les singes étaient plus intelligents que ça ! »

    LE SINGE : « Ah, c’est une colline, une très grande colline. »

    L’ARAIGNÉE : « Non »

    LE SINGE : « Attend, attend, c’est une fourmilière géante moustachue. Regarde bien, c’est ça ! »

    L’ARAIGNÉE : « N’importe quoi ! Tu ne vois pas que c’est un rocher ? »

    LE SINGE : Humm… Tu crois ? »

    L’ARAIGNÉE : « Ben oui, c’est le rocher à la… »

    LE SINGE : « A la la, le rocher à la la, c’est ça ? »

    L’ARAIGNÉE : « Le rocher à la très… »

    LE SINGE : « Humm, le rocher à la tresse ! »

    L’ARAIGNÉE : « Tu es bête ou quoi ? Tu ne vois pas que c’est le rocher à la très longue barbe ! »

    Aussitôt, l’araignée fut projetée au sol. Mais, cette fois, elle n’eut pas le temps de démêler ses pattes et de se relever, le singe se jeta sur elle et vengea tous ceux qui étaient passés avant lui.

    Comme on dit chez moi, on trouve toujours plus rusé que soi.

    Interprètes : Koami Vignon, Reine Azi, Yacouba Karamoko, Charles Kohoury.

    Musique : Ange Bouely, Boussou Roland, Souleymane Diabaté, Daniel Opoh et Jean Sempé Ake Olloé.

    L’Afrique en conte est une série créée par l'ONG Des Livres Pour Tous - Côte d'Ivoire et le collectif Making Waves, en partenariat avec RFI. Ce projet a reçu le soutien du dispositif « Accès Culture » de l’Institut français de Paris et de l’Agence française de développement (AFD), du programme « ACP-UE Culture pour l’Afrique de l’Ouest - Awa » de l'Institut français et du Centre culturel Kôrè, du dispositif « Agir » du Département de Seine-Saint-Denis et de la Région Île-de-France.

  • Sur la route du village, il y avait un monsieur qui aimait se jouer des transporteurs.

    La nuit, à chaque fois qu’il arrivait à la gare routière et qu’un car de 22 places n’était pas rempli, il disait au chauffeur et à son apprenti :

    L’HOMME : « Eh apprenti, partons sans attendre, je payerai les places restantes ! »

    Une fois arrivé à l’angle de sa rue, il descendait et demandait à l’apprenti de le suivre pour récupérer son argent. Quelques minutes plus tard, le chauffeur et l’ensemble des passagers voyaient réapparaître l’apprenti tout essoufflé et criant :

    L’APPRENTI, bégayant : « C’est un fantôme, patron ! Patron, c’est un fantôme. »

    En effet, une fois descendu du véhicule, notre individu entraînait l’apprenti jusqu’à la porte du cimetière dans lequel il faisait mine d’entrer.

    L’HOMME : « Me voici arrivé chez moi !

    Chaque fois, l’apprenti prenait ses jambes à son cou.

    L’APPRENTI : « C’est un revenant ! Patron, c’est un revenant ! »

    Tous les transporteurs de la région avaient eu affaire à ce farceur.

    Mais, comme on le dit toujours « à malin, malin et demi ».

    Un jour, il tomba sur un transporteur qui s’était fait déjà prendre. Ce transporteur décida de lui donner une leçon. Il conduisit le monsieur jusqu’à son fameux carrefour.

    Les choses ne se déroulaient pas comme prévu pour notre farceur, mais il décida de faire comme il en avait l’habitude.

    Une fois arrivé devant le cimetière, il dit : « Me voici arrivé chez moi. »

    Mais le chauffeur répondit : « Très bien, je te suis… »

    Notre farceur voyant que sa ruse risquait d’être découverte pénétra dans le cimetière la peur au ventre, suivi à deux ou trois mètres par le chauffeur. C’est alors que lui vint une idée : « Et si je frappais à la porte d’un caveau peut-être que le chauffeur croirait mon histoire et me laisserait en paix. »

    Le voilà qui se dirige vers un grand caveau et frappe à la porte.

    L’HOMME : KôkôKô, tonton ouvre la porte, je suis arrivé !

    À peine avait-il fini de parler qu’on entendit :

    LE FOU : « Hé, c’est qui ? »

    Un fou par le plus grand des hasards avait élu domicile dans ce caveau pour y passer la nuit.

    Il n’en fallu pas d’avantage pour mettre notre farceur en fuite, le chauffeur du car sur ses talons.

    La légende dit qu’à la fin de cette débandade, l’un de ces deux individus est mort.

    Lequel est-ce selon vous ?

    Interprètes : Flopy Mendosa, Hugue-Edouard Kouakou, Yacouba Karamoko, Charles Kohoury, Vincent de Paul Kouamé.

    Musique : Ange Bouely, Boussou Roland, Souleymane Diabaté, Daniel Opoh et Jean Sempé Ake Olloé.

    L’Afrique en conte est une série créée par l'ONG Des Livres Pour Tous - Côte d'Ivoire et le collectif Making Waves, en partenariat avec RFI. Ce projet a reçu le soutien du dispositif « Accès Culture » de l’Institut français de Paris et de l’Agence française de développement (AFD), du programme « ACP-UE Culture pour l’Afrique de l’Ouest - Awa » de l'Institut français et du Centre culturel Kôrè, du dispositif « Agir » du Département de Seine-Saint-Denis et de la Région Île-de-France.

  • Dans un petit village de la forêt équatoriale africaine, KAL et NDOM sont nés jumeaux. Une fille et un garçon. Pour leur initiation, ils doivent aller puiser l’eau dans une source mystérieuse située au cœur même de la forêt sacrée.

    Pour atteindre cette source merveilleuse, il y a deux chemins. Il s’agit d’emprunter soit le chemin battu, soit de se frayer son propre chemin.

    Arrivés à la croisée des chemins, malgré́ les recommandations de leur mère, NDOM le frère fait le choix d’emprunter le chemin battu.

    KAL sa sœur, fait le choix, elle, d’écouter sa maman, et de se frayer son propre chemin.

    Les jumeaux comme dans une sorte de défi, se donnent rendez-vous à la croisée des chemins. Péniblement, lentement, mais sûrement, KAL la sœur arrive à la source, puise l’eau nécessaire et revient au lieu de rendez-vous.

    Au lieu de rendez-vous, point de frère. KAL a un mauvais pressentiment. Alors elle dépose sa calebasse d’eau, et revient en catimini à la maison. Elle prend un couteau, un sachet de sel, et un sachet de piment. Elle cache le tout sous ses vêtements et se glisse dans la forêt sacrée. Arrivée à la croisée des chemins, elle emprunte le chemin battu mais c’est une voie sans issue.

    KAL se retrouve nez à nez avec EMOMORO, un énorme monstre à forme humaine. Un géant mutant, plus grand que les géants les plus imposants de la forêt. Un être humain entre les doigts de sa main, serait à l’échelle d’une crevette entre les doigts d’une main humaine.

    Et EMOMORO raffole de la chair humaine, au moins autant que moi-même qui vous raconte cette histoire, je raffole de la chair des crevettes.

    KAL la sœur se met à trembler de frayeur.

    Alors EMOMORO lui demande : « D’où̀ viens-tu ? Où vas-tu ? »

    KAL : « Je suis à la recherche de mon frère. L’aurais-tu vu ?

    EMOMORO : « Tu dis quoi ? Je n’entends rien. Je suis un peu dur d’oreilles. Pour que je t’entende bien, accepterais-tu de venir te poser sur la paume ma main ? Ainsi, je pourrais te rapprocher de mon oreille pour mieux t’entendre.

    Alors KAL monte sur l’immense paume de la main d’EMOMORO.

    Tout un coup, prestement, le monstre porte sa main à l’abime qui lui tient lieu de gueule, et avale la pauvre KAL, comme il avait déjà avalé son frère... ANGOROOOMMM !

    KAL se retrouve dans le ventre du monstre. KAL retrouve son frère dans le ventre EMOMORO au milieu d’une foule monstrueuse d’autres égarés.

    Alors, KAL sort son couteau, et commence à taillader les boyaux du monstre soutenu par un chant vindicatif « JE COUPE, JE COUPE, JE METS DU SEL, JE METS DU PIMENT, JE COUPE, JE COUPE, JE METS DU PIMENT ... »

    EMOMORO hurle de douleur. Le monstre s’écroule raide mort.

    KAL la sœur ouvre le ventre du monstre et libère les humains de l’emprise de la bête.

    Comme quoi : dans la vie, il faut souvent se méfier des chemins battus.

    Auteur et interprète : Binda Ngazolo.

    Musique : Ange Bouely, Boussou Roland, Souleymane Diabaté, Daniel Opoh et Jean Sempé Ake Olloé.

    L’Afrique en conte est une série créée par l'ONG Des Livres Pour Tous - Côte d'Ivoire et le collectif Making Waves, en partenariat avec RFI. Ce projet a reçu le soutien du dispositif « Accès Culture » de l’Institut français de Paris et de l’Agence française de développement (AFD), du programme « ACP-UE Culture pour l’Afrique de l’Ouest - Awa » de l'Institut français et du Centre culturel Kôrè, du dispositif « Agir » du Département de Seine-Saint-Denis et de la Région Île-de-France.

  • Savez-vous qu’autrefois, le lion n’était pas le roi des animaux ? Du moins, il ne l’était pas au départ. C’était Dankélé, un grand buffle noir de la savane, qui régnait sur le peuple des bêtes.

    Dankélé était un tyran qui gouvernait sans foi ni loi. Si tu avais raison, tu avais peur. Si tu n’avais pas raison, tu avais raison d’avoir peur de lui.

    À cette époque-là, il n’y avait qu’une seule rivière où tous les animaux venaient boire. Mais personne n’avait le droit d’y boire avant Dankélé. Dankélé ne se contentait pas seulement de se désaltérer, il se baignait dans la rivière, s’y roulait et y faisait tous ses besoins. C’est seulement après son passage que les autres animaux pouvaient boire à leur tour, une fois que l’eau était souillée.

    C’était injuste, mais c’était comme ça. Il fallait le supporter.

    Un jour où il faisait très chaud, la lionne était venue faire boire son lionceau qui mourait de soif. Sans attendre le roi, elle lui donna un peu d’eau et en but elle-même un tout petit peu.

    Arriva le roi Dankélé accompagné de membres de sa cour, de griots et de griottes, de conseillers et de conseillères qui chantaient ses louanges :

    GRIOTS : « Longue vie au roi, vive le roi, longue vie au roi. »

    Quand il fut au bord de la rivière, Dankélé vit qu’on avait osé boire avant lui. Il se tourna vers ses sujets et, les menaçant de son regard, hurla sa colère. Et sa colère fit trembler tout le monde.

    DANKÉLÉ : « Qui ? Qui a donc osé boire avant moi, le roi ? Si vous ne me désignez pas le coupable, alors vous l’êtes tous ! »

    Les animaux, terrifiés, se regardèrent. Tout le monde avait vu la lionne donner à boire à son petit. Mais qui, qui oserait la dénoncer à cette brute de roi ?

    La hyène le fit :

    LA HYÈNE : « Moi, je ne vais pas payer pour une faute que je n’ai pas commise. Majesté, c’est la lionne qui a bu avant vous. Voilà, je l’ai dit. »

    Aussitôt, le roi Dankélé bondit sur la lionne et l’écrasa sous ses sabots furieux.

    Le lionceau, lui, n’était pas mort, il s’était sauvé à toutes pattes et était allé se cacher.

    Il attendit l’heure de sa vengeance. Il attendit, attendit, attendit… jusqu’à ce qu’il soit devenu grand.

    Quand il fut devenu un lion grand et fort dont le rugissement retentissait à travers toute la savane, il sortit enfin de sa cachette.

    Il alla voir le roi Dankélé et lui dit :

    LE LION : « Buffle, où est partie ma mère ? »

    Le buffle, intimidé par la force que dégageait le jeune lion, bafouilla :

    DANKÉLÉ : « Heu… ta… ta… ta mère ? La lionne ? »

    UNE CONSEILLERE lui souffla à l’oreille : « Majesté, il s’agit de la lionne que vous avez tuée il y a de cela quelques années parce qu’elle avait osé boire avant vous. »

    DANKÉLÉ : « Ah oui, c’est vrai » dit le buffle en se tournant vers le lion. « C’est la loi, ce n’est pas moi. La loi, c’est la loi. Ta mère a osé boire avant moi, alors la loi a été appliquée. La loi, c’est la loi, la loi ce n’est pas moi. »

    Le lion répondit :

    LE LION : « Une loi qui ne s’applique qu’au plus faible est une loi injuste. »

    Et le lion se jeta sur le buffle, le terrassa, le mis en pièce et libéra le peuple du tyran Dankélé.

    Le peuple ravi s’écria : « Longue vie au roi, le roi lion, longue vie au roi, le roi lion »

    C’est depuis ce jour que le lion est devenu le roi des animaux. Contrairement au buffle, et malgré sa force, il s’efforce d’être plus juste et plus droit envers les plus faibles.

    Interprètes : Koami Vignon, Yacouba Karamoko, Reine Azi, Charles Kohoury, Hugue-Edouard Kouakou

    Musique : Ange Bouely, Boussou Roland, Souleymane Diabaté, Daniel Opoh et Jean Sempé Ake Olloé.

    L’Afrique en conte est une série créée par l'ONG Des Livres Pour Tous - Côte d'Ivoire et le collectif Making Waves, en partenariat avec RFI. Ce projet a reçu le soutien du dispositif « Accès Culture » de l’Institut français de Paris et de l’Agence française de développement (AFD), du programme « ACP-UE Culture pour l’Afrique de l’Ouest - Awa » de l'Institut français et du Centre culturel Kôrè, du dispositif « Agir » du Département de Seine-Saint-Denis et de la Région Île-de-France.

  • Il y a très longtemps, quatre frères qui n’avaient pour seule ambition que d’être riches, décidèrent d’aller ensemble dans le village interdit de Tinkougri.

    Il était tellement interdit que le simple fait de prononcer son nom conduisait automatiquement à la mort. La légende raconte aussi que dans ce village sacré des ancêtres, les cailloux des chemins étaient en or, et que les fétiches y avaient le pouvoir de rendre n’importe qui aussi riche qu’un roi. Entre l’interdit et les richesses à venir, le choix de nos quatre frères était fait. Ils se donnèrent du courage et s’entraînèrent à ne prononcer sous aucun prétexte le nom de Tinkougri.

    FRÈRE 1 : « Où on va là, on ne prononce pas ce que tu sais »

    FRÈRE 2 : « Ah, je sais. Ça fait combien de fois que tu m’as dit ça, je sais. Il faut dire ça à l’autre qui dit tout ! »

    FRÈRE 3 : « J’ai compris. »

    FRÈRE 1 : « Tu as compris quoi ? »

    FRÈRE 3 : « Tu dis de ne pas dire, non ? »

    FRÈRE 1 : « On ne doit pas dire quoi ? »

    FRÈRE 3 : « Mais toi grand frère quand même, on ne dit pas ce qu’on ne peut pas dire. »

    Nos quatre frères prennent la route. Ils marchent, ils marchent, ils marchent, ils marchent…

    Et au bout de trois longs jours de marche, le quatrième frère sous l’effet de la fatigue, oubliant l’interdit, dit à ses frères :

    FRÈRE 4 : « Mais les gars, leur TINKOUGRI est loin, dêh !!! ».

    Et aussitôt, il tombe raide mort.

    C’est tout en pleurs et impuissants devant la dépouille de leur petit frère, que les trois autres se promirent d’offrir à leur cadet des funérailles grandioses une fois devenus riches.

    Et à nouveau, ils prennent la route. Ils marchent, ils marchent, ils marchent, ils marchent…

    Fatigué et nostalgique de son petit frère, le troisième frère dit soudain :

    FRÈRE 3 : « C’est notre petit frère qui avait raison, TINKOUGRI est vraiment trop loin ! »

    Immédiatement, il s’écroule, et meurt à son tour.

    En pleurs, les deux survivants reprennent la route. Ils marchent, ils marchent, ils marchent, ils marchent…

    Au bout de trois longs jours de marche, ils arrivent à TINKOUGRI.

    Avant même d’être au centre du village, ils ont déjà rempli six sacs d’or.

    Pris d’une joie immense, le deuxième frère dit alors :

    FRÈRE 2 : « Wouais grand-frère, TINKOUGRI est vraiment merveilleux, regarde tout ce qu’on a ramassé ! »

    Mais à peine l’a-t-il dit qu’il tombe à son tour.

    Furieux, le premier des frères dit :

    FRÈRE 1 : « On peut être bête comme ça ? On te dit qu’on ne doit pas dire TINKOUGRI, et tu le dis! Voilà maintenant, tu es mort. »

    Et sur ces mots, ce dernier tombe lui aussi, raide mort.

    Lequel des quatre frères méritait selon vous les richesses de TINKOUGRI ?

    Interprètes : Flopy Mendosa, Vincent de Paul Kouamé, Hugue-Édouard Kouakou, Charles Kohoury, Yacouba Karamoko.

    Musique : Ange Bouely, Boussou Roland, Souleymane Diabaté, Daniel Opoh et Jean Sempé Ake Olloé.

    L’Afrique en conte est une série créée par l'ONG Des Livres Pour Tous - Côte d'Ivoire et le collectif Making Waves, en partenariat avec RFI. Ce projet a reçu le soutien du dispositif « Accès Culture » de l’Institut français de Paris et de l’Agence française de développement (AFD), du programme « ACP-UE Culture pour l’Afrique de l’Ouest - Awa » de l'Institut français et du Centre culturel Kôrè, du dispositif « Agir » du Département de Seine-Saint-Denis et de la Région Île-de-France.

  • Il y a longtemps, dans un petit village niché au cœur de la forêt, vivait un pic nommé Bobokôkô. C’était un oiseau d’une grande beauté́ avec un plumage coloré, un bec aiguisé, une voix mélodieuse. On raconte qu’il avait aussi de grands défauts : il était vantard, menteur, paresseux et tout le peuple de la forêt – les animaux à poils et les animaux à plumes - savait qu’il ne tenait jamais ses promesses.

    Pour couronner le tout, notre ami était porté sur la boisson, il était tout le temps au maquis, ce qui attristait beaucoup sa maman.

    Un jour, cette dernière tomba gravement malade. On l’emmena chez tous les guérisseurs, tous les marabouts, tous les féticheurs de tous les horizons, mais leur conclusion fut la même : maman pic ne verrait sans doute pas les prochaines pluies.

    Maman pic était très appréciée dans la forêt, aussi tous les animaux proposèrent leur aide pour l’organisation des funérailles. Mais Bobokôkô refusa catégoriquement :

    Non, non, non, tout est déjà prévu. Votre aide ne sera pas nécessaire je m’occupe de tout. C’est moi Bobokôkô, vous l’avez oublié ?

    Il disait qu’il en allait de son honneur d’offrir à sa mère des adieux dignes d’une reine et qu’il allait lui-même, à la force de son bec, creuser son tombeau dans le tronc d’un arbre. Les animaux de la forêt n’insistèrent pas : qui refuserait une occasion de faire des économies ? Mais tous attendaient de voir comment Bobokôkô allait s’y prendre.

    Pendant ce temps, l’état de maman pic se détériorait de jour en jour, elle devait se préparer à rejoindre le royaume des ancêtres. Il était temps de commencer à préparer les funérailles, mais on ne voyait toujours rien venir. Ni les danseurs, ni les musiciens annoncés, ni les pleureuses, ni le célèbre griot à la voix capable d’apaiser les douleurs d’une rage de dents. La commande de la tenue funéraire n’avait même pas été passée et bien sûr Bobokôkô n’avait pas commencé́ à creuser la tombe de sa pauvre mère.

    Il ne semblait pas s’en soucier et continuait à s’enivrer dans les maquis, et à faroter au rythme endiablé du zouglou.

    Enivré, Bobokôkô chante :

    Ce sera du jamais vu oh.

    Funérailles de maman oh ce sera du vu oyé.

    Vous qui avez faim, vous les affamés, venez manger ce sera du jamais vu dèh. Servez à boire, je vous invite aux funérailles, on va boire, on va manger à notre faim. Venez, vous êtes tous invités. Sapez-vous et venez.

    Pour la circonstance j’assure tout.

    Je vais t’honorer mère, je vais t’honorer, servez, servez je m’occupe de tout !

    C’est alors que tomba la terrible nouvelle : maman pic n’était plus.

    Bobokôkô pleure et se lamente :

    Maman, mama pourquoi

    Le soleil s’est couché

    Bobokôkô se rendit au maquis pour noyer son chagrin dans le vin de palme. En bon paresseux, il ne se rendait pas compte que le temps pressait et il continuait à dire à qui voulait l’entendre que les funérailles de sa mère allaient être somptueuses.

    Une nuit passa, puis une deuxième, une troisième, sans que rien ne soit fait. Le corps de la pauvre maman pic commençait à attirer les mouches. Cette fois, Bobokôkô ne pouvait plus remettre au lendemain. Il se mit sur-le-champ à creuser la tombe. Mais l’entreprise n’était pas facile. La forêt résonna bientôt des coups de bec qu’il donnait contre le tronc de l’arbre incessamment, mais sans aucun résultat. Au bout d’une semaine, le bec de Bobokôkô était tout enflé́ et le corps de maman pic était dans un état de décomposition avancée.

    Les oiseaux de la forêt, scandalisés que mama pic n’ait toujours pas de sépulture (et incommodés par l’odeur), allèrent trouver leur roi Kôlié, l’aigle, pour lui demander d’intervenir. Il ordonna que la terre soit retournée sur-le-champ, et mama pic put enfin rejoindre sa dernière demeure.

    Pour échapper à la honte, Bobokôkô s’enfuit dans la forêt en jurant qu’un jour le corps de sa mère retournerait à la place qu’il avait prévu pour lui.

    C’est pourquoi depuis ce jour, on peut entendre le pic frapper le tronc de son bec afin d’y creuser la tombe de sa maman.

    Mon conte est fini.

    Crédits :

    Pourquoi le pic frappe son bec contre le tronc de l'arbre

    Interprété par Koami Vignon et Charles Kohoury.

    Chant : Valérie Gobey

    Musique : Jean Sempé Ake Olloé.

    Recherche des contes et adaptations : Flore Kra, Valérie Gobey, Eugène Konan et Elvis Tanoh.

    Production déléguée : Sonia Arruda Touré, Romain Masson

    Assistant de production : Romain Chmiela, Eugène Konan,

    Assistant à la réalisation : Elvis Tanoh.

    Réalisation : Laure Egoroff et Tidiane Thiang.

    Remerciements à Thomas Weill, Yanick Zagba, Sony Music Africa, Stéphane Dogbo, et les équipes de RFI.

    Avec le soutien du programme "Accès Culture" de l'Agence française de développement et l'Institut français.

    Une production Making Waves et Des Livres Pour tous - Côte d'Ivoire.

  • Savez-vous pourquoi le lièvre a toujours les oreilles dressées ?
    Vous voulez savoir ? alors dressez vos oreilles, et écoutez mon histoire.

    Il était une fois un Lion, Roi de la forêt, et sa fille Nana. Ils vivaient en bonne amitié́ avec tous les autres animaux.

    Nana, la fille du Roi Lion était belle, très belle, très séduisante oui, d’une beauté spéciale : une véritable Princesse. Elle était tellement belle que tous ceux qui la voyaient pour la première fois se frottaient les yeux pour s’assurer qu’ils ne rêvaient pas.

    Un jour, Nana la belle, éprouva le besoin de se marier.

    Alors, elle alla voir son père pour lui annoncer sa décision. Le Roi fut surpris : « Ah bon ? Tu es sûre ? »

    Mais comme il ne pouvait rien refuser à sa fille, il se mit à réfléchir au moyen de lui choisir un époux. Il envoya son porte-parole pour convier tous les animaux de la forêt à un grand rassemblement qui aurait lieu dans sept jours.

    Nana, la belle, la séduisante, la ravissante savait que l’heureux élu serait choisi dans l’assemblée, mais elle ignorait encore de quelle manière. Pendant ce temps dans la forêt, tous les animaux à poils, à plumes, à écailles s’interrogeaient : quelle pouvait être la cause de cette grande réunion, si urgente pour le Roi ? Mais leurs questions restèrent sans réponses.

    Le grand jour arriva !

    Tous les animaux étaient réunis sur la grande place du village et attendaient avec impatience que le Roi prenne la parole. Celui-ci de façon majestueuse se leva et dit :

    « Si je vous ai réunis ici, c’est pour vous annoncer une très bonne nouvelle. Je donnerai ma fille en mariage à l’animal qui se montrera le plus rusé, le plus brave à la course organisée ce jour-ci. »

    Les animaux s’interpellent, dans le brouhaha on entend :

    - « Quoi, une course ? non, mais ce n’est pas possible ! » (…) « Hé, je ne cours pas » (…) « je veux courir seul » (…) « Mais vous êtes venus faire quoi ici ? » (…) Hé mais tu veux rester célibataire, toi ? »

    Le Roi ajouta :

    « Celui qui perdra cette course, je le ferai tuer, préparer et je le mangerai. »

    A ces mots, tous les animaux s’enfuirent, à l’exception du lièvre et de la tortue qui acceptèrent de s’affronter.

    A ces courageux concurrents, le Roi annonça alors que le gagnant recevrait la main de sa fille, la belle et ravissante Nana.

    Persuadé que la victoire lui était acquise, le lièvre organisa une grande fête à laquelle il convia tous les autres animaux. Ils mangèrent, burent, dansèrent, oh oui c’était la plus grande fête qu’on ait connue à cette époque dans la forêt !

    La tortue :

    « Nana, deviendra mon épouse demain. Je serai l’animal et l’époux le plus heureux de toute la terre » répétait-il à qui voulait l’entendre jusqu’à ce que les invités, enivrés, allèrent se coucher.

    De son côté, la tortue s’inquiétait : comment allait-elle faire pour gagner cette épreuve ? Sachant qu’elle n’était pas rapide, surtout en comparaison du lièvre. Elle se mit à réfléchir avec son ami le singe : ils élaborèrent un plan. Sachant que le lièvre était un incorrigible gourmand, le singe aida la tortue à disposer trente carottes tout au long de la piste de course.

    Le lendemain matin, jour de la compétition, la tortue et le lièvre se présentèrent.

    Au top départ, le lièvre se mit à courir à vive allure et distança la tortue. Celle-ci avançait à son rythme.

    Arrivé au point où se trouvait la première carotte, le lièvre s’arrêta net. Compte tenu de son avance, il pouvait bien s’accorder une petite pause avant de poursuivre. Pendant qu’il grignotait, la tortue le rattrapa.

    Surpris, le lièvre reprit sa course pour dépasser sa concurrente, avant de s’arrêter de nouveau à la carotte suivante.

    Chant :

    « Le lièvre court, s’arrête. La tortue le rattrape et il repart.

    Le lièvre court, s’arrête. La tortue le rattrape et il repart. »

    Cette scène se répéta jusqu’à la dix-septième carotte où, rassasié, le lièvre s’endormit.

    Tout doucement, la Tortue arriva à sa hauteur, le dépassa et, tandis que le lièvre sommeillait encore, la Tortue franchit la ligne d’arrivée sous les applaudissements et les cris de joie de tous les autres animaux.

    Euphoriques, les animaux chantent et commentent :

    « Félicitations, chère Tortue, j’ai vraiment aimé la manière dont tu courrais ! »

    « Et tu ne t’es pas laissée faire (…) tu mettais un pas assuré après l’autre »

    « Vive la Tortue ! »

    « Bravo, vraiment bravo ! »

    « Vive les mariés ! »

    Le Roi et sa fille Nana, stupéfaits que la tortue ait remporté cette course face à un concurrent si avantagé par la nature, demandèrent aux animaux présents de réveiller le lièvre.

    Trois d’entre eux le prirent par les oreilles pour le soulever. Le lièvre fut si surpris et si honteux de sa défaite que ses oreilles ne redescendirent plus. Voilà pourquoi, depuis ce jour, elles sont restées dressées sur sa tête. Le lièvre quitta le village en détalant, on vit les bouts de ses oreilles disparaître dans la broussaille, et il ne revint plus.

    Le Roi donna sa fille Nana en mariage à la Tortue. Les deux époux vécurent heureux et eurent trois enfants.

    On dit que celui qui n’a pas encore traversé la rive ne doit jamais se moquer de celui qui se noie. Comme quoi, il ne faut jamais tenir la victoire pour acquise, et sous-estimer son adversaire.

    Crédits :

    Le Roi lion et sa fille

    Interprété par Rebecca Kompaoré avec les voix de Charles Kouhoury, Reine Leticia Azi, Vincent Kouamé, Jean-Marc Kouasi Kouadio.

    Musique : Jean Sempé Ake Olloé.

    Recherche des contes et adaptations : Flore Kra, Valérie Gobey, Eugène Konan et Elvis Tanoh.

    Production déléguée : Sonia Arruda Touré, Romain Masson

    Assistant de production : Romain Chmiela, Eugène Konan,

    Assistant à la réalisation : Elvis Tanoh.

    Réalisation : Laure Egoroff et Tidiane Thiang.

    Remerciements à Thomas Weill, Yanick Zagba, Sony Music Africa, Stéphane Dogbo, et les équipes de RFI.

    Avec le soutien du programme "Accès Culture" de l'Agence française de développement et l'Institut français.

    Une production Making Waves et Des Livres Pour tous - Côte d'Ivoire.

  • Ce jour-là, de la savane à la forêt équatoriale africaine, il fait chaud, très chaud.

    Zoa l‘éléphant a soif. Alors Il se dirige vers un point d’eau à proximité. Il s’apprête à y plonger sa trompe quand soudain, son œil droit s'éjecte de l’orbite et plonge dans l’eau.

    Pris de panique, il plonge rapidement sa trompe pour récupérer son œil. Se faisant, il remue l'eau tant et si bien que toute la vase qu’il y avait au fond remonte à la surface.

    L'eau devient trouble et l'œil introuvable.

    Il s’apprête à descendre avec ses deux grosses pattes dans l’eau quand soudain Ononònò, le petit oiseau, perché sur la branche d'un arbre juste à côté, lui dit :

    « Oh Eléphant, ne fais surtout pas ça !

    L’éléphant se fâche :

    « Quoi, qui es-tu pour me suggérer quoi que ce soit quand je perds mon œil ? »

    Fou de colère l’éléphant terrasse l’arbre où était perché le petit oiseau, mais le petit oiseau n’avait pas attendu et il s’était envolé pour aller se percher sur un arbre beaucoup plus loin.

    Ainsi de suite, l’oiseau dans les airs, l'éléphant par terre, tellement en colère, qu'il ne se rend pas compte, qu'il n'a aucune chance d'atteindre l'oiseau, là-haut.

    Il finit par dévaster toute une partie de la forêt avant de s'écrouler finalement d'épuisement.

    C'est le moment que choisit Ononònò le petit oiseau pour lui dire :

    « Oh éléphant ! Je suis navré d'avoir provoqué une telle colère. Je voulais juste te suggérer de ne pas descendre avec tes deux grosses pattes dans l’eau trouble au risque d’écraser ton œil ».

    L’éléphant, tout penaud, lui répond :

    « Oh, je n’avais pas compris »

    Entre temps le calme est revenu. Tous les deux se dirigent vers le point d’eau.

    L’eau est devenue claire car toute la vase est redescendue au fond. L’éléphant voit clairement son œil et délicatement il le récupère avec sa trompe et le plante dans l'orbite.

    C’est exactement la même chose qui arrive quand un humain se laisse conduire par la colère. Son esprit devient trouble et la raison... introuvable.

    Crédits :

    La colère de Zoa l'éléphant

    Un conte de Binda Ngazolo.

    Musique : Jean Sempé Ake Olloé.

    Recherche des contes et adaptations : Flore Kra, Valérie Gobey, Eugène Konan et Elvis Tanoh.

    Production déléguée : Sonia Arruda Touré, Romain Masson

    Assistant de production : Romain Chmiela, Eugène Konan,

    Assistant à la réalisation : Elvis Tanoh.

    Réalisation : Laure Egoroff et Tidiane Thiang.

    Remerciements à Thomas Weill, Yanick Zagba, Sony Music Africa, Stéphane Dogbo, et les équipes de RFI.

    Avec le soutien du programme "Accès Culture" de l'Agence française de développement et l'Institut français.

    Une production Making Waves et Des Livres Pour tous - Côte d'Ivoire.

  • Il était une fois, un tisserand nommé Akendeya. Il avait une renommée pas possible mais depuis quelques temps, ses affaires ne marchaient plus car ses concurrents des grandes usines vendaient dix fois moins cher que lui.

    Ses pagnes lui restaient sur les bras et il n’arrivait plus à rien, même pour manger, si bien qu’il s’était endetté. Dans la forêt, seuls la termite, le coq, la panthère et le chasseur n’étaient pas encore ses créanciers. Akendeya était rusé, très malin, très astucieux, enfin bref, qui avait plus d’un tour dans son sac. Il décida donc d’élaborer un plan. S’il échouait, sa famille et lui n’auraient plus qu’à mourir de faim.

    Un matin très tôt, Akendeya se rend chez la termite et lui parle en ces termes :

    Akendeya : « Ma chère et belle termite, j’ai parcouru toute la forêt et tous ses habitants ré́pè̀tent en choeur qu’il n’y a pas plus gentille que toi. Je viens vérifier par moi-même la véracité d’un tel témoignage. S’il est bien vrai que tu n’as pas d’égal en matière de gentillesse, prête-moi quelques morceaux d’ignames que je te paierai le premier mercredi du mois prochain. Viens me voir à̀ 10 heures précises. Attention, si tu es en retard, ma dette sera annulé́e.

    La termite ne peut résister à une telle flatterie, et la précision de la date et l’heure du remboursement lui inspirent confiance : elle donne donc douze grands sacs d’ignames à Akendeya.

    Akendeya : « Merci mon amie ! »

    La famille d’Akendeya a tellement faim qu’en seulement une heure quarante-sept secondes, les enfants ont fini les douze grands sacs d’ignames. A peine ont-ils fini de manger qu’ils ont encore faim. Leurs estomacs fredonnent des chansons que seule la faim peut traduire (Chanson des glou-glous-gla-gla-glou).

    Akendeya met le cap sur la résidence du coq, à qui il tient ces propos :

    Akendeya : « Ô toi, travailleur infatigable ! Toujours en train de fouiller, repérer, ramasser ! Je comprends pourquoi les animaux de la forêt répètent unanimement que rien ne manque dans ton grenier. Si tel est le cas, tu vas me donner quelque chose à manger pour ma famille. Je te paierai le premier mercredi du mois prochain. Viens me voir à 10 heures 05 précises mais attention, si tu es en retard, ma dette sera annulée.»

    Le coq, pris au dépourvu, ne sait que répondre. Il accepte de donner des sacs de riz et de maïs tout en réglant sa montre pour ne pas rater le jour et l’heure du remboursement.

    Au domicile d’Akendeya, les provisions de riz et de maïs sont englouties en trente minutes, Leurs estomacs reprennent la chanson que seule la faim peut traduire (Chanson des glou-glous-gla-gla-glou).

    Akendeya décida alors d’aller voir la panthère pour lui demander de quoi nourrir les siens.

    Akendeya : « Je te rembourserai le premier mercredi du mois prochain à 10h10 précises mais attention, après cette heure, la dette sera annulée. »

    La panthère considére cette précision comme un gage de confiance et elle lui donne des morceaux de viande séchée pour sa famille.

    Les enfants d’Akendeya, en seulement vingt secondes ont vidé le plateau de viande séchée. Dès qu’ils ont fini le dernier morceau, leurs estomacs reprennent la chanson (Chanson des glou-glous-gla-gla-glou)

    Sa dernière carte est le chasseur. Mais où trouver un monsieur qui bouge sans arrêt dans la forêt ? Akendeya part à sa recherche. Après quelques jours de marche, il finit par le rencontrer et lui fait part de sa situation.

    Akendeya : « Oh courageux chasseur, homme au grand cœur, s’il te plaît donne-moi un gibier. Je te rembourserai le mercredi du mois prochain à 10h15 précises mais attention hein si tu es en retard ma dette sera annulée ».

    La promesse de remboursement et la précision de l’heure rassurent le chasseur. Il lui remet du gibier séché en grande quantité.

    Les jours passent, les heures avancent, les minutes s’enchaînent, les secondes défilent et le premier mercredi du mois suivant, à 9 heures 59, « bing », la termite se présente au domicile d’Akendeya pour réclamer son dû.

    La termite : « Bonjour mon frère Akendeya »

    Akendeya : « Bonjour la belle termite. Comment tu vas ?

    La termite : " Bien, merci."

    Akendeya : « Un peu d’eau ? »

    La termite : « Non, merci ! »

    Akendeya : « Et la famille ? »

    La termite : « Ca va ! »

    Akendeya : « Les enfants ? »

    La termite : « Hé La termite, donne-moi ce que tu me dois, je vais rentrer. »

    Akendeya : " Oh mais pourquoi tu te fais du souci ? C’est juste que c’est ma femme qui a gardé l’argent et comme elle est allée au marigot, il faut l’attendre. Dans cinq minutes, elle sera là. Allez, viens t’asseoir ! » .

    Akendeya savait que le coq et la termite étaient des ennemis jurés. Dans l’attente de sa femme, c’est le coq qui arrive à 10h05 précises. Une fois dans la maison d’Akendeya, sans même saluer, le coq se jette sur la termite et l’avale. Akendeya dit alors au coq :

    " Joli coq, tu vois la termite que je t’ai réservée n’est qu’un geste de reconnaissance pour le service rendu, mais je n’ai pas oublié ce que je te dois. C’est ma femme qui a gardé l’argent et comme elle est allée au marigot, tu vas l’attendre. Dans cinq minutes, elle sera là."

    Le coq n’a pas le temps de fuir lorsque, à 10h10 précises, la panthère se présente, lui rompt le cou et le mange. Akendeya rassure la panthère.

    Akendeya : « Ce coq n’est qu’un modeste amuse-gueule. Bien sûr, votre remboursement va arriver dès que ma femme rentrera du marigot, dans cinq minutes, tout au plus ».

    Pendant l’attente de sa femme, Akendeya dit à la panthère :

    Akendeya : « J’ai souvent vu le chasseur rôder dans le quartier. Il vaut mieux, pour votre ̀sécurité, que vous vous cachiez dans les buissons ».

    A peine a-t-il fini de mettre la panthère à l’abri que le chasseur fait son apparition, à 10h15 précises, pour réclamer son argent. Akendeya engage une causerie et demande au chasseur : « Est-ce que vous maîtrisez la technique de chasse dite du ‘’feu sur le buisson’’ ? »

    Le chasseur répond par l’affirmative. Akendeya lui suggère alors de l’essayer sur un des buissons voisins car il a vu une panthère rôder dans le voisinage.

    Le chasseur accepte de se prêter au jeu : il vise le buisson indiqué par Akendeya (coup de feu). Il tue la panthère. Akendeya lui dit alors : « C’est grâce à moi que tu as gagné cette panthère, plus question de te rembourser quoi que ce soit, nous sommes quittes ! »

    Le chasseur, furieux qu’on puisse se débarrasser d’une dette aussi facilement, emporte la panthère en jurant de ne plus jamais venir en aide à Akendeya.

    C’est ainsi qu’Akendeya, ayant perdu la confiance de tous, sombre dans la famine, se desséche jusqu’à devenir ce tout petit être aux longues pattes qui passe ses jours et ses nuits à tisser sa toile.

    Crédits :

    La ruse d'Akendeya l'araignée,

    Interprété Flopy Mendosa et Vincent Kouamé.

    Musique : Jean Sempé Ake Olloé.

    Recherche des contes et adaptations : Flore Kra, Valérie Gobey, Eugène Konan et Elvis Tanoh.

    Production déléguée : Sonia Arruda Touré, Romain Masson

    Assistant de production : Romain Chmiela, Eugène Konan,

    Assistant à la réalisation : Elvis Tanoh.

    Réalisation : Laure Egoroff et Tidiane Thiang.

    Remerciements à Thomas Weill, Yanick Zagba, Sony Music Africa, Stéphane Dogbo, et les équipes de RFI.

    Avec le soutien du programme "Accès Culture" de l'Agence française de développement et l'Institut français.

    Une production Making Waves et Des Livres Pour tous - Côte d'Ivoire.

  • Dans le village situé derrière la colline vivait un Marabout, occultiste. Il était versé dans l’art de procurer le bonheur à ses clients. Monsieur Crapaud, qui s’estimait défavorisé par le sort, décida de recourir à ses bons offices.

    Une nuit, bien avant les premières lueurs de l’aube, il sua sur le chemin. Exténué, il arriva enfin devant la maison du Marabout. Il frappa à sa porte. Un Coq y montait la garde. C’était lui qui était chargé de recevoir les visiteurs, de les introduire ou de les éconduire s’il le jugeait bon.

    « Bonjour, mon Prince ! dit le Crapaud au Coq qui portait fièrement sur la tête un turban de chair dentelée, du rouge le plus écarlate. Rien qu’à voir votre turban, on sait que vous êtes un prince de la gent des Gallinacés. J’ai mis de bien longues heures à franchir un monticule de terre édifié sur ma route par je ne sais qui afin de m’empêcher de venir jusqu’ici ».

    - « Qui êtes-vous ? » demanda le Coq.

    - « Je suis Monsieur Crapaud. Je désire voir le Marabout pour lui expliquer mon cas et lui demander d’intervenir en ma faveur auprès de Papa Bon Dieu ».

    - « Et de quelle race êtes-vous ? »

    - « Je suis de la race des Derrières-Affaissés ».

    - « Êtes-vous venimeux ? »

    - « Non, non, mon Prince ».

    - « Attendez, je vais voir si le Marabout est levé. »

    Le Coq entra chez le Marabout. Celui-ci était réveillé depuis longtemps. Après avoir fait sa prière matinale, il égrenait son chapelet.

    - « Bonjour, Marabout ! » dit le Coq.

    - « Bonjour Muezzin ponctuel, dit le Marabout. As-tu passé une bonne nuit ? »

    - « Oui Marabout. Par la grâce de Dieu et de son Prophète, j’ai dormi jusqu’à l’aube. Oh, Saint Marabout, êtes-vous prêt à recevoir un consultant ? »

    - « Qui est-ce ? »

    - « C’est Monsieur Crapaud, de la race des Derrières-Affaissés ».

    - « A quoi ressemble-t-il ? »

    - « C’est un bonhomme lourd et trapu, aux quatre membres extrêmement courts. »

    - « Et quelle est sa profession ?

    - « Je crois que sa profession consiste à manger ceux qui vous piquent, vous dévorent et vous importunent, vous autres bipèdes. »

    - « Ah ! ... Eh bien, un ennemi et l’ami d’un ennemi est également un ennemi, mais l’ennemi d’un ennemi est un ami. Si ce que tu dis est vrai, Monsieur Crapaud ne peut être qu’un ami. Fais-le donc entrer. »

    Le Coq sortit et dit au Crapaud :

    - « Le Marabout vous attend. Mais laissez-moi vous donner un conseil. C’est un agent d’Allawalam ; il ne faut donc en aucun cas dire du mal devant lui de l’Empereur des cieux et de la terre.»

    Monsieur Crapaud entra dans la case. Il fit une grande révérence au Marabout en soulevant d’abord son buste sur ses deux pattes de devant, puis en le laissant rapidement retomber à terre.

    - « Monsieur Crapaud, dit le Marabout, soyez le bienvenu ! Prenez place sur ce siège, et dites-moi ce qui me vaut l’honneur de votre visite. »

    Le Crapaud sauta sur le siège indiqué, s’y installa confortablement et expliqua :

    - « Saint Marabout, j’ai ouï dire qu’Allawalam et vous-même étiez de grands amis, qu’il écoutait les doléances lui parvenant par votre entremise et qu’il les satisfaisait immédiatement. Je suis donc venu vous exposer mon affaire. L’autre jour, alors que je traversais sur la route, survint Grand Cheval. Il avait l’air pressé. Au lieu de m’enjamber, il préféra me piétiner. ‘‘Ça te massera le dos et t’apprendra à te dépêcher !’’ Deux jours après l’incident, voilà que Grand Frère Cheval fut atteint d’un mal au pied caractérisé par une sécrétion fétide. Il alla voir ma tante Grenouille. Celle-ci, après avoir consulté ses douze cauris divinatoires, lui dit : tu es atteint de la maladie du Crapaud. Et je ne vois que mon neveu le Crapaud pour donner pareille maladie à ceux dont il souhaite la mort...

    Or Saint Marabout, ma tante a inventé de toutes pièces ce pouvoir magique qu’elle m’attribue dans la seule intention de se venger de moi depuis que j’ai refusé la main de sa fille Mademoiselle Grenouillette. Je ne veux plus supporter cette situation. Je suis venu vous voir, Saint Marabout, pour vous demander de me donner un gri-gri qui non seulement me fera aimer par tout le monde, mais me fera gagner de l’argent, ce qui me vaudra le respect de tous. »

    Le Marabout prit sa tablette de bois. Il trempa sa plume de roseau dans une encre faite d’un mélange d’eau, de poudre de charbon et de gomme arabique. Il écrivit en nombres cabalistiques le nom de Monsieur Crapaud. Il examina attentivement le résultat obtenu et lui expliqua :

    -« Monsieur Crapaud, vous avez sur votre thème numérologique deux fois 1, deux fois 3, une fois 4, une fois 7 et une fois 9. Vous êtes donc un brillant 28. Je m’en vais confectionner pour vous le meilleur des gris-gris. Vous serez aimé et respecté par tout le monde, y compris par votre tante et vous gagnerez autant d’argent que vous voudrez. »

    Sur ces entrefaites, une Cigogne à sac entra sans se faire annoncer. Dès qu’il la vit, le Crapaud fit un bond et alla se cacher derrière le canari d’eau du Marabout. De là, il l’interpella tout doucement :

    - « Eh Marabout ! Avez-vous déjà ‘‘fermé’’ le carré ? »

    - « Non, fit le Marabout, je suis tout juste en train de le commencer. »

    - « Alors, arrêtez, arrêtez toutes affaires cessantes ! Il faut le changer en carré de protection. Nous autres crapauds sommes le mets favori des cigognes à sac, elles ont déjà exterminé nombre de nos frères dans le marais. Pour l’heure, ce n’est pas de gagner de l’argent et d’être aimé que j’ai besoin, mais plutôt d’être sûr de n’être ni croqué ni avalé par votre visiteuse. »

    On ne cherche à gagner que lorsqu’on n’est pas sur le point d’être‘‘gagné’’ soi-même !

    Crédits :

    Le crapaud, le marabout et la cigogne à sac, extrait de "Petit bodiel et autres contes de la savane"de Ahmadou Hampâté Bâ.

    Interprété par Binda Ngazolo, Vincent Kouamé et Jean-Marc Kouasi Kouadio.

    Musique : Jean Sempé Ake Olloé.

    Recherche des contes et adaptations : Flore Kra, Valérie Gobey, Eugène Konan et Elvis Tanoh.

    Production déléguée : Sonia Arruda Touré, Romain Masson

    Assistant de production : Romain Chmiela, Eugène Konan,

    Assistant à la réalisation : Elvis Tanoh.

    Réalisation : Laure Egoroff et Tidiane Thiang.

    Remerciements à Thomas Weill, Yanick Zagba, Sony Music Africa, Stéphane Dogbo, et les équipes de RFI.

    Avec le soutien du programme "Accès Culture" de l'Agence française de développement et l'Institut français.

    Une production Making Waves et Des Livres Pour tous - Côte d'Ivoire.

  • On dit chez nous : L’arbre tombe toujours du côté où il est incliné. Et ce proverbe-là, je l’ai compris à travers une histoire, l’histoire de Gboklokofi, la hyène.

    Gboklokofi la hyène et Gbammlo le lièvre étaient des amis inséparables. Ils s’aimaient. Ils s’aimaient de cet amour que les hommes avaient perdu mais que les animaux avaient toujours conservé. Cet amour qui fait qu’on se dit tout, en tous temps et en tous lieux. Leur pacte d’amitié avait été scellé pendant les cérémonies initiatiques. Et à cause de ce pacte, les deux amis avaient beau se disputer, ils finissaient toujours par s’entendre.

    Une année, la sécheresse s’était abattue sur la savane et, avec elle, la famine. Par la cupidité des hommes qui déforestent, détruisent au nom du progrès, le ciel n'arrosait plus aussi abondamment les sols et la terre mère ne nourrissait plus ses enfants.

    Gboklokofi la hyène : Gbammlo !

    Gbammlo le lièvre : Yé !

    Gboklokofi la hyène : Gbammlo !

    Gbammlo le lièvre : Yé !

    Gboklokofi la hyène : Je t’ai appelé combien de fois ?

    Gbammlo le lièvre : Deux fois, Gboklokofi !

    Gboklokofi la hyène : Mon cher ami, le monde n’a pas changé mais les hommes ont changé.

    Gbammlo le lièvre : Parole de sage, Gboklokofi !

    Gboklokofi la hyène : Ils brûlent, détruisent, sans se soucier de notre survie.

    Gbammlo le lièvre : Nous avons vécu, mais nous n'avons jamais connu pareille année de sécheresse. Si ça continue, nous allons mourir.

    Gboklokofi la hyène : Humm Gbammlo !

    Gbammlo le lièvre : Yé !

    Gboklokofi la hyène : Que dit l’intelligence, alors ?

    L’intelligence voudrait que quand les greniers sont vides, on se rende aux champs. Mais, il y a plus de champs. Alors, les deux amis décident de partir à la recherche de nourriture. Ils marchent, ils marchent des heures, ils marchent des jours, ils marchent des nuits. Ils parcourent des kilomètres, bravant le froid de l’harmattan durant la nuit et la brûlure du soleil durant le jour, mais ils ne trouvent rien. La sécheresse a gagné tout le territoire, aucun point d’eau n’est en vue. La faim et la soif les tenaillent, mais l’instinct de survie les pousse à poursuivre leur chemin. Il leur faut coûte que coûte trouver quelque chose à se mettre sous la dent.

    Gboklokofi la hyène : Gbammlo !

    Gbammlo le lièvre : Yé !

    Gboklokofi la h̀yène : Est-ce que tu as faim ?

    Gbammlo le lièvre : Si je te dis non, je te mens. Si je te dis oui, je perdrais ton estime parce qu’on a tous les deux faim et je serais le premier à le dire.

    Après plusieurs jours de marche, ils découvrent un gros cadavre de buffle intact, sans la moindre égratignure, aucun animal n’était encore passé par là. A la vue de cet immense cadeau du ciel, les deux amis oublient la fatigue, la faim et la soif. Ils se mettent à chanter et à danser avant de se régaler de quelques morceaux de viande fraîche.

    Chant

    Une fois rassasiés, ils se demandent ce qu’ils vont faire du reste. Gbammlo le lièvre propose de mettre quelques morceaux de viande dans leurs sacoches et de laisser le reste du cadavre pour les suivants.

    Gbammlo le lièvre : Eh, mon amie Gboklokofi, les esprits nous ont offert de quoi nous rassasier et en garder un peu. Je propose qu’on laisse le reste pour ceux qui viendraient à passer ici après nous.

    Cette proposition n’est pas du goût de Gboklokofi.

    Gboklokofi la hyène : Non, non, non, je ne suis pas d’accord Gbammlo, si les esprits nous ont fait don de cette nourriture, c’est pour qu’on en profite, pas pour le laisser à d’autres !

    Gbammlo le lièvre : Mais attends, ne nous a-t-on pas appris que s’attarder autour d’un plat est le propre des gourmands, et que la gourmandise est un vice ?

    Gboklokofi la hyène : Gbammlo, ouvre bien tes grandes oreilles, seul un imbécile laisserait autant de viande et prendrait le risque de mourir de faim quelques jours après.

    Tandis que Gbammlo, le lièvre, remplit sa petite sacoche, son amie Gboklokofi s’obstine à chercher une solution lui permettant d’emporter la totalité du cadavre de buffle.

    Gbammlo le lièvre : Mon ami, ce n’est pas ce que les anciens nous ont enseigné, mais fais ce qui te semble bon. De mon côté, je retourne au village. Si l’ombre d’un doute passe sur ton esprit, renonce à ton projet et viens avec moi.

    Mais Gboklokofi décide de ne pas suivre son ami. Resté seul, ​elle​ fait un trou dans la peau du buffle et y enfonce sa tête jusqu’au cou. Cette technique devrait lui permettre de tirer la charge jusqu’à chez lui. Ravi de sa trouvaille, il se met en route.

    Il marche péniblement, le buffle est si lourd que Gboklokofi transpire à grosses gouttes. A mesure qu’il avance, le vent sec de l’harmattan et les rayons ardents du soleil séchent la peau du buffle autour de son cou, mais Gboklokofi, emporté par l’envie de posséder à lui seul toute cette viande, ne prête pas attention à l’étau qui se resserre.

    Lorsqu’il prend enfin conscience du danger qu’il court, la peau du buffle a durci à un tel point que sa tête reste prise au piège. Il se débat, se débat, se torture, mais en vain.

    Chant

    Gbammlo le lièvre pleura à chaudes larmes en apprenant la nouvelle. Lorsqu’on lui demanda de quoi son ami était mort, il tristement : « c’est la gourmandise et l’égoïsme qui l’ont tué ».

    Chant

    L’arbre tombe toujours du côté où il est incliné.

    Crédits :

    Gboklokofi, la hyène

    Interprété par Rebecca Kompaoré, Charles Kohoury et Vincent Kouamé.

    Musique : Jean Sempé Ake Olloé.

    Recherche des contes et adaptations : Flore Kra, Valérie Gobey, Eugène Konan et Elvis Tanoh.

    Production déléguée : Sonia Arruda Touré, Romain Masson

    Assistant de production : Romain Chmiela, Eugène Konan,

    Assistant à la réalisation : Elvis Tanoh.

    Réalisation : Laure Egoroff et Tidiane Thiang.

    Remerciements à Thomas Weill, Yanick Zagba, Sony Music Africa, Stéphane Dogbo, et les équipes de RFI.

    Avec le soutien du programme "Accès Culture" de l'Agence française de développement et l'Institut français.

    Une production Making Waves et Des Livres Pour tous - Côte d'Ivoire

  • Gnamien Kli le bon dieu avait trois enfants : Kpin l’aînée, Sèssè l​a​ cade​tt​e​, et Kanhan la benjamine. Ces trois filles là vivaient en parfaite harmonie. ​Elles​ ​prenaient leurs trois repas par jour, que leur père leur faisait parvenir par l’intermédiaire de son émissaire. Quand l’heure de manger arrivait, les trois filles se mettaient à chanter en chœur et, lorsque leurs voix mélodieuses parvenaient à leur père, celui-ci leur envoyait de quoi se nourrir.

    Et tout le monde se régalait, et tout le monde était content́.

    Les trois filles réservaient toujours une portion du copieux repas à leur amie commune, Idjirwa la fourmi.

    Voilà qu’un jour, en l’absence de Kpin et de Sèssè, Idjirwa la fourmi s’approcha de Kanhan la benjamine et lui tint ces propos : « Toi, Kanhan, sais-tu que c’est ta voix aigüe qui touche le cœur de Gnamienkpli votre père ? Je t’assure que sans toi, votre ensemble ne serait pas si mélodieux.»

    Ces propos flatteurs firent naître chez la benjamine un sentiment d’orgueil. Elle venait ainsi de réaliser l’importance qu’elle avait dans le chœur qui leur permettait d’obtenir leurs trois repas quotidiens.

    Un autre jour, Idjirwa la fourmi se rendit auprès de Sèssè l​a​ cadet​te​ et lui dit : « Tu sais, au football, le numéro 10 est le meneur de jeu. Je comprends maintenant pourquoi ce sont les numéros 10 qui remportent le plus souvent le ballon d’or. Dans le chœur des enfants de Gnamienkpli, s’il faut attribuer le numéro 10 à quelqu’un, je te le donne sans réfléchir à toi, la voix medium. »

    - Sèssè : Ah vraiment ?

    A ces mots, Sèssè ne se sentit plus de joie, elle était fière de savoir que la beauté du chœur dépendait d’elle, uniquement d’elle.

    Le jour suivant, Idjirwa la fourmi alla trouver Kpin, l’aînée, et lui dit : « Toi, la voix basse qui assures et qui rassures, tu es pleinement dans ton rôle d’aîné, les autres voix peuvent se reposer sur toi, sans toi elles se perdraient dans l’air et vous seriez déjà mortes de faim. »

    - « Ah Idjirwa, tu me flattes ! » répondit Kpin.

    Elle venait de réaliser l’importance capitale de la basse dans le chœur.

    Dès lors, chacune des trois filles de Gnamienkpli était convaincue d’être indispensable au trio. Cela leur donna des ailes. Aux heures des repas, chacune faisait son petit numéro, ivre d’orgueil et de caprice. Désormais, chacune traînait des pieds et se faisait désirer au moment de se réunir. Parfois, c’était sous la fausse médiation de la fourmi que le chœur parvenait à s’assembler. Lassée des caprices de ses jeunes soeurs, Kpin décida de se retirer pour chanter seule. Sèssè et Kanhan firent de même, chacune partit de son côté. Mais durant les trois jours au cours desquels elles chantèrent en solo, les filles du bon dieu ne rencontrèrent que l’indifférence de leur père. En conséquence, aucune nourriture ne leur parvint durant trois jours.

    Le soir du troisième jour, affamées, elles se décidèrent enfin à se parler. Elles se rendirent compte que leur discorde venait des commérages de Idjirwa la fourmi. Pour en avoir le cœur net, elles décidèrent de réunir à nouveau leurs voix. Après les trois couplets habituels, voici que l’émissaire de Gnamienkpli se présente les bras chargés de victuailles. Des fruits et des légumes juteux et savoureux, des grandes portions de foutou banane, de placali, accompagnés de sauce graine, sauce gouagouassou, sauce arachide, de grands plateaux de poissons bra​i​ssés, de poulets piqués, accompagnés de frites d’igname, de frites de patate, de frites de plantin, et cætera, et cætera, et cætera.

    Chant-chœur

    Tout le monde était content

    Chant-chœur

    Les filles résolurent alors de se débarrasser de la fourmi.

    Ce rejet eut pour conséquence de plonger la fourmi dans la faim, au point d’être presque coupée en deux. Depuis, elle est contrainte de travailler en équipe avec ses congénères pour assurer sa survie. Les hommes et les femmes, quant à eux, ont perdu toute confiance en la fourmi, c’est pourquoi dès qu’ils sentent sa présence sur son corps, ils s’en débarrassent aussitôt.

    Mon conte est fini.

    Crédits

    Les trois filles de Gnamien Kli le bon dieu

    Interprété par Koami Vignon et Vincent Kouamé. Chant : Rebecca Kompaoré, Valérie Gobey et Flore Kra.

    Musique : Jean Sempé Ake Olloé.

    Recherche des contes et adaptations : Flore Kra, Valérie Gobey, Eugène Konan et Elvis Tanoh.

    Production déléguée : Sonia Arruda Touré, Romain Masson

    Assistant de production : Romain Chmiela, Eugène Konan,

    Assistant à la réalisation : Elvis Tanoh.

    Réalisation : Laure Egoroff et Tidiane Thiang.

    Remerciements à Thomas Weill, Yanick Zagba, Sony Music Africa, Stéphane Dogbo, et les équipes de RFI.

    Avec le soutien du programme "Accès Culture" de l'Agence française de développement et l'Institut français.

    Une production Making Waves et Des Livres Pour tous - Côte d'Ivoire.

  • L’histoire que je vais vous raconter est celle de Kôyô-kôyô, vaillant et infatigable travailleur, qui aimait la terre. Il la cultivait avec amour et abnégation. Comme la terre n’est pas ingrate, elle lui rendait bien ses efforts.

    À chaque fête de fin des récoltes, Kôyô-kôyô dansait et chantait comme personne, parce que le rendement de ses terres était immense.

    Conteur : Aboué ?

    Groupe : Wéyé !

    Conteur : Mais comme toujours, la réussite fait des jaloux.

    Voix dans le groupe : Ah bon, qui sont les jaloux, conteur ?

    Conteur : Et bien pour connaître les jaloux, il faut savoir pourquoi Kôyô-kôyô était envié.

    Voix dans le groupe : Pourquoi, conteur ?

    Conteur : Pourquoi ? Kôyô-kôyô n’était pas jeune. Il avait environ 75 hivernages, en langage familier 75 ans. Et oui, sous le poids de l’âge, son dos s’était courbé, il arrivait à peine à se redresser. Mais détrompez-vous, ce vieux travaillait avec la vigueur d’un jeune de 20 ans. Il était apprécié de certains villageois, surtout de la gent féminine, qui avait même créé une chanson pour le vieux Kôyô-kôyô.

    Traduction du chant : Je cherche un homme beau, je cherche un homme jeune, je cherche un homme intelligent, mais plus encore un homme comme Kôyô-kôyô.

    Conteur : Dans le village de N’zaa-kaha, la beauté d’un homme se mesurait au rendement de ses terres. Et Kôyô-kôyôétait capable de cultiver une plantation d’arachides de dix hectares.

    Voix dans le groupe : Ce n’est pas possible, conteur ! Jamais ! Aucun homme ne peut faire ça !

    Conteur : Et pourtant si... Mais Kôyô-kôyô avait un secret.

    Voix dans le groupe : Quel était son secret ?

    Conteur : Son secret, c’était sa daba magique !

    Voix dans le groupe : Daba magique ?

    Conteur : Et oui, le vieux Kôyô-kôyô utilisait une daba magique qui était capable de débroussailler une plantation en moins de temps que 100 gaillards réunis. Et oui, même si sa daba magique faisait beaucoup pour lui, le vieux Kôyô-kôyô prenait aussi le temps de parler à ses plantes. Tous les matins, avant le lever du soleil, dès que le coq commençait à chanter en choeur avec les pillons des femmes, Kôyô-kôyô se rendait dans son champ pour souhaiter une belle journée à ses plantes avant de les arroser.

    Voix dans le groupe : En tous cas, Kôyô-kôyô était brave.

    Voix dans le groupe : Mais conteur, c’est sa daba magique qui travaillait, pas lui !

    Conteur : La daba magique de Kôyô-kôyô n’était pas tombée du ciel mes enfants. Pour trouver la réussite, il faut passer par le chemin de la persévérance. Depuis sa jeunesse, il s’était toujours démarqué par sa force de travail. Kôyô-kôyô, dans son grand âge, avait fini par être récompensé. Un jour, des génies étaient venus le voir dans son champ et ils lui avaient remis cette fameuse daba magique, en guise de reconnaissance pour son amour de la terre. La terre aime ceux qui la travaillent. Et les esprits aiment ceux qui travaillent la terre.

    Voix dans le groupe : Et après, conteur ?

    Conteur : Figurez-vous, dans ce même village, vivait un vieil homme paresseux, jaloux et voleur, nommé Kayouhou. Il passait son temps à embellir ses mains, son corps, et à jaser sur tout et rien. Il avait pour habitude de se servir dans le champ des autres. Cette année, il jeta son dévolu sur la plantation du vieux Kôyô-kôyo. Ca lui apprendrait à faire le fier durant la fête des récoltes ! Kayouhou n’était pas un voleur ordinaire. Certes, il était paresseux pour faire les travaux champêtres, mais il s’appliquait beaucoup quand il s’agissait de voler.

    Kayouhou : Mais pourquoi se fatiguer à travailler dans les plantations. Moi Kayouhou, je ne cultive pas, mais je me nourris bien. Toi, le vieux Kôyô-kôyo, continue, continue d’avoir la force de travailler pour que je vive bien. Ah, la belle vie !

    Conteur : Tout comme le vieux Kôyô-kôyô aimait passionnément travailler la terre, Kayouhou lui, aimait passionnément voler ce qui sortait de la terre des autres. Il avait même une chanson spéciale qui l’inspirait dans sa besogne.

    Chant

    Voix dans le groupe : Kayouhou est mauvais, déh ! Tous tes amis travaillent, tu vas voler !

    Conteur : Aaaah ma fille, le lendemain de ce vol, lorsque le vieux Kôyô-kôyo retourna à sa plantation, il constata que ses plants avaient été arrachés. Il se dit que ce devait être l’œuvre d’un animal, il pensa à un gros agouti. Il décida alors de poser un piège pour attraper cette bestiole qui détruisait sa récolte.

    Le jour d’après, au moment même où le vieux Kôyô-kôyô quittait sa plantation d’arachides, Kayouhou le voleur apparut.

    Voix dans le groupe : Il a donc attrapé Kayouhou ?

    Conteur : Kayouhou n’était pas la moitié d’un imbécile, mon fils. Il était aussi rusé que mauvais.

    Il évita le piège qui était dressé devant lui, toujours en bourdonnant sa fameuse chanson.

    Chanson

    Conteur : Lorsque le vieux Kôyô-Kôyô revint à sa plantation pour continuer de cueillir ses arachides, il découvrit de nouveaux dégâts. Il prit le temps de réfléchir et se dit que ce devait être un homme qui lui volait ses arachides. Il décida donc de rentrer chez lui avant le coucher du soleil. Il laissa à sa daba magique le soin de surveiller la plantation et d’attraper le voleur.

    Kayouhou : Ah, mais il est vraiment con ce vieux Kôyô-Kôyô. Il m’a même laissé sa daba, ça va me rendre la cueillette beaucoup plus rapide.

    Conteur : Kayouhou ne savait pas qu’en touchant seulement cette daba, il serait sous son emprise. Le voleur souleva donc la daba magique, et lorsqu’il voulut s’en servir pour creuser le sol, elle se mit à crier :

    Kôyô-kôyô, j’ai attrapé ton kayouhou, je vais le corriger, il ne t’échappera pas !

    Le voleur ne pouvait plus rien faire, il était déjà sous le pouvoir mystique de la daba. Celle-ci se mit alors à le tabasser, à le tabasser encore et encore, au moment où il entonnait précisément sa chanson.

    Voix dans le groupe : Comme dit le proverbe : mille jours pour le voleur et un jour pour le propriétaire.

    Conteur : Eh oui mon fils, Kayouhou avait eu ses mille jours, mais aujourd’hui c’est le jour du grand planteur de N’zaa-kaha.

    La nuit fut longue, elle fut même très longue pour Kayouhou. Sous la menace de la daba, il fut forcé de récolter les arachides et de les mettre en sac. Au lever du soleil, Kôyô-kôyô retrouva son voleur épuisé, allongé dans le champ, la daba magique à côté de lui. Le vieux Kôyô- kôyô demanda à sa daba de se transformer en un grand chariot pour transporter les sacs d’arachides à la ville afin de les vendre. Les villageois étaient étonnés de voir le plus grand paresseux du village pousser le lourd chariot. Kayouhou était en sueur et en pleurs.

    À la fin de la vente, le Vieux Kôyô-kôyô, satisfait de la punition infligée à son voleur, le libéra. Eh oui, on éduque les hommes par l’exemple. Ce dernier rentra chez lui dans la honte.

    Voix dans le groupe : Bien fait pour lui !

    Conteur : Depuis ce jour mes enfants, la paresse et le vol ont disparu du village de N’zaa- kaha. Les villageois laissent toujours leurs champs sans surveillance, car tous les malintentionnés ont désormais peur de tomber nez à nez avec une daba magique.

    Crédits

    Mille jours pour le voleur et un jour pour le propriétaire

    Interprété par Binda Ngazolo avec Reine Leticia Azi, Charles Kohoury, Vincent Kouamé et Jean-Marc Kouasi Kouadio.

    Musique : Jean Sempé Ake Olloé.

    Recherche des contes et adaptations : Flore Kra, Valérie Gobey, Eugène Konan et Elvis Tanoh.

    Production déléguée : Sonia Arruda Touré, Romain Masson

    Assistant de production : Romain Chmiela, Eugène Konan,

    Assistant à la réalisation : Elvis Tanoh.

    Réalisation : Laure Egoroff et Tidiane Thiang.

    Remerciements à Thomas Weill, Yanick Zagba, Sony Music Africa, Stéphane Dogbo, et les équipes de RFI.

    Avec le soutien du programme "Accès Culture" de l'Agence française de développement et l'Institut français.

    Une production Making Waves et Des Livres Pour tous - Côte d'Ivoire.

  • Savez-vous pourquoi le ver de terre n’a pas d’os et vit sous le sol ? Cette histoire vous en donnera les raisons.

    Il y a longtemps, très très longtemps, au temps de la création, c’est le père de ver de terre qui avait été chargé par Dieu de distribuer aux êtres les os qui donneraient à leur corps la forme que nous lui connaissons aujourd’hui.

    Les êtres se présentaient à tour de rôle dans son atelier pour se procurer les os de leur préférence. Les modèles, les tailles, les formes et les qualités étaient au choix du demandeur et le père de ver de terre, par le talent que Dieu lui avait donné, assemblait les os choisis dans les différents corps. Les animaux repartaient chez eux pleinement satisfaits de leur nouveau squelette. Arrivés en rampant, ils se déplaçaient désormais avec beaucoup d’aisance, d’élégance, ils avaient fière allure.

    Certains, comme l’éléphant, le rhinocéros, l’hippopotame, avaient choisi les os les plus gros. La girafe opta pour les plus longs. La tortue, le crabe, et l’escargot mirent l’accent sur leur sécurité en choisissant des os comme couverture. Les poissons et les serpents, privilégiant leur agilité, se déterminèrent pour les os les plus petits.

    Pendant que tous les êtres convergeaient vers la maison de son père, ver de terre, lui était tranquillement couché, persuadé qu’à tout moment, il pourrait trouver des os à sa convenance. Les demandeurs le trouvaient toujours à la même place, se moquant de leur empressement. Quand certains lui disaient de faire son choix pendant qu’il en était temps, il les prenait de haut : « Les os ne sont pas une inquiétude pour moi, je suis le fils du fournisseur ! C’est plutôt moi qui devrais m’inquiéter pour vous. »

    Chaque jour, leur cour était bondée de monde et ver de terre se sentait envahi. « Poussez-vous ! On ne peut plus respirer ici ”. Ces visites répétées le dérangeait, il se moquait des demandeurs. Il avait des propos déplacés : « Eh l’éléphant, pousse tes grosses fesses. Oh toi la girafe, avance avec ton long cou ! » Puis, il s’habitua à ce flot de visiteurs et ne leur prêta plus attention. Il avait mieux à faire que de s’occuper de ces êtres si pressés de se procurer une ossature !

    Les jours passaient et ver de terre ne se rendait pas compte que le nombre de visiteurs diminuait. Deux jours de suite, personne ne se présenta. Mais ce n’est qu’au troisième jour que ver de terre prit conscience que les visites avaient cessé. Il se dit que le moment était venu de choisir ses propres os en toute tranquillité. Mais en pénétrant dans l’atelier de son père, quelle ne fut pas sa surprise de constater qu’il était vide. Non seulement, aucun visiteur n’était en vue, mais son père n’était plus là et tout son matériel avait disparu. « Que se passe-t-il ? Où est mon père ? » dit ver de terre. L’inquiétude et la confusion s’emparèrent de lui. Il eut beau tourner, se retourner, il était seul, tout seul. Alors, une voix se fit entendre : « La mission que j’ai confiée à ton père est terminée. Tous les êtres qui voulaient des os en ont eu. Toi, tu as été négligent et tu vas en subir les conséquences toute ton existence. »

    Confus et honteux, ver de terre décida de s’enfoncer dans le sol pour éviter la moquerie de ses concitoyens.

    Comme on dit chez nous : « Qui remet à demain, trouve malheur en chemin ! ».

    Crédits

    N'Verfouai le ver de terre

    Interprété par Flopy Mendosa avec la voix de Stéphane Dogbo.

    Musique : Jean Sempé Ake Olloé.

    Recherche des contes et adaptations : Flore Kra, Valérie Gobey, Eugène Konan et Elvis Tanoh.

    Production déléguée : Sonia Arruda Touré, Romain Masson

    Assistant de production : Romain Chmiela, Eugène Konan,

    Assistant à la réalisation : Elvis Tanoh.

    Réalisation : Laure Egoroff et Tidiane Thiang.

    Remerciements à Thomas Weill, Yanick Zagba, Sony Music Africa, Stéphane Dogbo, et les équipes de RFI.

    Avec le soutien du programme "Accès Culture" de l'Agence française de développement et l'Institut français.

    Une production Making Waves et Des Livres Pour tous - Côte d'Ivoire.