Afleveringen
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En avril 2020, un article du magazine Forbes affirmait que les pays dirigés par des femmes ont mieux fait face à la première vague de la pandémie. Les compétences des femmes sont généralement plus grandes en matière de santé et d’affaires sociales, puisque ce sont les postes qui leurs sont habituellement fléchés depuis le début de leur carrière politique. Il est aussi logique que les femmes arrivées au sommet des instances de décision, soient particulièrement chevronnées, au bout d’années d’un parcours semé d’embuches dans le milieu politique, où elles ont dû faire deux fois plus leurs preuves et ne rien laisser au hasard.
Cette année a été marquée par l’émergence de grandes figures politiques féminines, toutes nouvelles activistes comme Alexandria Ocasio Cortez, mais aussi des femmes nommées à la tête de grandes institutions et qui ont fait preuve d’une réactivité et d’un pragmatisme inédits, comme Christine Lagarde à la BCE, qui a mis en place un grand plan de soutien aux Etats, ou Ursula von der Leyen, à la Commission européenne, qui a suspendu les règles de discipline budgétaire de l'UE.
Ce sont des signaux forts, de nécessaire ouverture du champ politique aux femmes, et à toutes les catégories sociales peu représentées dans l’espace du pouvoir.
A ce titre, Lauren Lolo cumule les engagements politiques : journaliste, élue à Fosses, elle est aussi fondatrice de la Cité des chances, une association née pour promouvoir l'engagement citoyen des jeunes de banlieues.
La crise du coronavirus n’a pas seulement été une crise sanitaire, écologique et économique. Elle cristallise des années de remise en cause de notre fonctionnement démocratique et de notre modèle politique. Elle éclaire, de façon brutale, l’incapacité de nos dirigeants à répondre aux injustices sociales révélées par la pandémie, précisément parce que la pandémie et ses injustices sont vécues comme le fruit d’une série de mauvaises décisions politiques antérieures.
La crise nous invite donc à repenser le modèle néolibéral que la plupart de nos dirigeants continuent d’incarner : un modèle ultra-concurrentiel, qui organise les rapports de domination entre puissants et vulnérables, entre les êtres vivants, entre les hommes et les femmes. Et si l’accès réel des femmes au pouvoir était la promesse d’un changement radical de notre modèle politique ?
Sandrine Rousseau économiste, universitaire et femme politique, est convaincue que la crise est un point de non-retour pour les femmes, et signe leur nécessaire prise de pouvoir. Sandrine Rousseau est candidate officielle à la primaire écologiste pour l’élection présidentielle de 2022.
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Ecrit et conçu par Mahaut Chaudouët Delmas
Interviews par Mahaut Chaudouet Delmas et Luna Gay Padoan
Réalisation montage mixage musique par Thomas Loupias
Action financée par la Région Ile-de-France
Remerciements :
C’était le dernier épisode du podcast Regarde moi bien, un podcast de la Fondation des femmes.
Je tiens à remercier très fort toutes ces femmes qui nous ont prêté leur voix, nous ont offert leur témoignage, leur analyse, leur combat:
Coline Charpentier, Céline Bessière, et Sibylle Gollac pour parler des femmes confinées, Magali Bragard, toutes les bénévoles de l’association Mamama, et Cécile Duflot pour parler des femmes appauvries, Brigitte Chabert et Zoé Royaux pour parler des femmes violentées Jackie Tadéoni et Maud Simonet pour parler des femmes exploitées, Lila Bouadma, Najat Vallaud Belkacem et Sandra Laugier pour parler des femmes soignantes Marine Périn et Lauren Bastide pour parler des femmes ignorées Laora Paoli Pandolfi et Anne-Cécile Mailfert pour parler des femmes militantes Déborah Loye et Marie-Pierre Rixain pour parler des femmes entrepreneuses Lauren Lolo et Sandrine Rousseau pour parler des femmes engagéesJe voudrais aussi dire merci à la Fondation des femmes, en particulier à sa présidente Anne-Cécile Mailfert et son équipe : Christine Muller, Clémence Garnier Juste, Nina Meriguet, Jessica Ohayon, pour leur confiance et leur soutien.
Je tiens également à remercier toutes les bénévoles de la Fondation des femmes pour les heures de scriptage qu’elles ont fourni : Carole Pirotais, Claire Bianzina, Laurene Henry, Katia Samrani, Gaelle Orefici, Emmanuelle Mayanda-Bomba, Marie-Enora Martin, Valentine Ulgu Servant, Isabelle Roth.
Merci à Anton Strepourjinski, Virgile Tron, Chloé Sdez, Alix Delmas et Ruben Cohen pour leur précieuse écoute.
Merci enfin à Thomas Loupias et Luna Gay Padoan, sans qui ce projet n’aurait pas vu le jour.
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Aujourd’hui encore, les femmes créatrices d’entreprise se voient refuser un crédit près de deux fois plus souvent que les hommes. Un trait renforcé pendant la crise, puisque l’accès aux aides de l’Etat s’est révélé plus compliqué pour les entrepreneures femmes, pourtant majoritairement à la tête de plus petites structures donc plus fragiles.
Des phénomènes conjoncturels et structurels qui témoignent de la difficulté pour les femmes d’asseoir leur crédibilité en tant que sujets économiques à part entière.
Déborah Loye est directrice générale de SISTA. SISTA est un collectif créé par des femmes entrepreneures et investisseures, qui vise justement à réduire l’écart de financement entre les hommes et les femmes. Le collectif de femmes Sista cherche notamment à imposer la mixité dans un secteur économique très particulier et très masculin, le numérique.
Les start-ups ne sont que le maillon le plus moderne d’une chaîne économique toute entière caractérisée par la stagnation des inégalités entre femmes et hommes. On compte en général encore 25% d’inégalités de revenus entre les sexes pendant la vie active, et 42% au moment de la retraite. 30% des femmes travaillent encore à temps partiel, majoritairement subi.
Elles se voient plus souvent exclues des niveaux hiérarchiques les plus élevés, valorisants, qualifiés et rémunérés des entreprises (c’est le fameux “plafond de verre”). Lorsqu’elles y accèdent en effet, ce sont souvent dans des secteurs moins stratégiques ou des fonctions support comme l’administratif et la communication (c’est là la “paroi de verre”).
En bref, les inégalités poursuivent toutes les femmes sur le marché du travail : qu’elles soient éloignées de l’emploi, précaires dans l’emploi, ou cadres.
Marie-Pierre Rixain, députée En Marche et présidente de la Délégation aux droits des femmes de l’Assemblée, nous alerte sur ces inégalités économiques de long terme que la crise perpétue voire renforce. Ces conséquences de la crise ne sont pas palliées par la puissance publique, puisque le plan de relance de l’Etat, qui finance l’économie d’avenir, s’organise pour soutenir des secteurs où les femmes sont de fait très minoritaires.
> En savoir plus avec le rapport de la Fondation des Femmes sur l'impact du Covid-19 sur le travail des femmes et sur le plan de relance de l'Etat
En ce sens, Marie Pierre Rixain a déposé une proposition de loi visant à « accélérer l’égalité économique et professionnelle » entre les femmes et les hommes. Ce texte cherche notamment à lutter contre les biais de genre dans les choix de carrière.
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Zijn er afleveringen die ontbreken?
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En vidant l’espace public, le premier confinement a réduit au silence les mouvements sociaux. Plus de gilets jaunes dans les rues, plus de manifestations à Hong-Kong, plus de chants de révolte à Beyrouth, plus de collages féminicides. La distanciation physique ne s’est pourtant pas accompagnée tout à fait d’une distanciation sociale : elle a renforcé le besoin de contacts et resserré les liens entre activistes, qui ont trouvé de nouvelles façon d’agir.
Dans plusieurs villes de Pologne par exemple, des militantes féministes ont défilé avec des banderoles, à pied, à vélo ou en voiture, ont manifesté dans les files d’attentes de supermarché, pour défendre les droits des femmes. Des militantes de toute l’Europe les ont soutenues depuis leur domicile à travers le hashtag #ProtestAtHome.
En France, en Corse plus précisément, Laura Paoli Pandolfi a fait partie de ces jeunes militantes féministes de l’ère MeToo, très active sur les réseaux sociaux. En juin 2020, Laura a fait fleurir le hashtag #iwas, sur le modèle de #metoo, en créant le compte #IWasCorsica, qui a commencé à relayer les témoignages d’agressions sexuelles sur les réseaux sociaux, des faits auxquels les femmes ont été confrontées, accompagnés de leur âge.
> En savoir plus sur le mouvement #IWasCorsica et les victimes de violences sexuelles qui sortent du silence en Corse
La crise a obligé le militantisme à se réinventer dans ses formes à travers les réseaux sociaux. Elle a aussi poussé le militantisme à se réinventer dans sa structure, puisqu’elle rendu possible l’engagement de femmes et d’hommes, en crise de sens, qui cherchent à s’impliquer davantage dans des causes en particulier féministes. Enfin, elle a favorisé le renouvellement des sujets des luttes elles-mêmes, la crise ayant mis en exergue les failles et les inégalités de notre système social.
C’est le cas pour la Fondation des Femmes elle-même, qui a organisé toute sa campagne du 8 mars autour de la place des femmes pendant le covid, en première ligne dans la mobilisation contre la Covid-19, et contre les effets de la crise pour les associations de terrain qui ont redoublé d’efforts pour aider au mieux les femmes victimes de violences et leurs enfants, et les femmes précarisées.
Située au coeur de Paris dans une ancienne école publique, la Fondation a ouvert un espace qui héberge une quinzaine d’associations féministes, qui se rassemblent en rez-de-chaussée, quand elles descendent de leurs bureaux, dans le grand café Mona, qui attend sa réouverture pour devenir le lieu où s’inventeront les futures actions militantes.
Anne Cécile Mailfert, qui a créé la Fondation des Femmes en 2016, nous offre son témoignage sur la particularité de cette période pour le militantisme, pour sa Fondation, mais aussi sur ce que ça veut dire que s’engager, et d’où ça vient.
> En savoir plus sur Regarde Moi Bien, l'action menée par la Fondation des Femmes à l'occasion du 8 mars 2021
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EPISODE 6 : IGNOREES
Alors que les femmes représentent 52 % de la population française, elles n’étaient que 41 % à parler à la radio et à la télévision pendant la crise (selon une étude du CSA)
Alors qu’elles composent habituellement 38 % de la parole en tant qu’expertes, elles ne sont plus que 20 % depuis un an.
Quand il s’est agi de faire témoigner des médecins, les médias audiovisuels tendaient largement le micro à des hommes (73 %), bien que la médecine généraliste et spécialiste soit exercée à 46 % par des femmes.
Lorsqu’elles sont effectivement entendues, les femmes étaient surreprésentées parmi les témoins pour parler de la façon dont ils vivaient la crise sanitaire, le confinement ou l’école à la maison. Un déséquilibre encore plus fort parmi les témoins présentés comme parents, puisque 79 % étaient des femmes contre seulement 21 % d’hommes.
> En savoir plus avec l'étude sur les médias en temps de crise du Haut Conseil à l'Egalité
Marine Périn est porte-parole de Prenons la Une, une association qui réunit presque 300 femmes journalistes pour militer sur deux fronts: à la fois l’égalité entre les femmes et les hommes dans le monde des médias, et la juste représentation des femmes dans les médias.
Quand on regarde de plus près la question de la présence des femmes dans les médias, dans le débat public, on se rend compte que ce n’est pas un simple manque de réflexe ou d’automatisme, une question d’évolution des mentalités et d’inconscient collectif. Cela participe d’un rapport de domination qui s’exerce dans la répartition de la parole et du pouvoir.
Virginie Despentes définit « les puissants » comme « ceux qui entendent confisquer la narration et imposer leurs décisions ». Alors que les femmes ont été présentes sur tous les fronts, elles sont restées, tout au long de la crise, les grandes absentes de la réflexion et de l’action politique. Comme si la crise, en même temps qu’elle révélait leur rôle, les maintenait au bord de la discussion.
Aux hommes d’analyser et de proposer les solutions à apporter à cette crise : quatre hommes en une du Parisien nous racontent « le monde d’après ». Figarovox nous propose de « penser la crise » avec 8 hommes pour une femme. L’Opinion avec quarante entrepreneurs de la Tech française… dont pas une seule femme.
Lauren Bastide, journaliste et militante revient sur ce manque de crédit donné aux femmes en général, y compris sur les sujets qui les concernent en premier lieu. Les médias ne sont jamais que le sismographe de ce qui se passe dans le reste de la société. Dans son ouvrage Présentes, essai sur la place des femmes dans la ville, les médias et la politique, Lauren Bastide élargit la réflexion à la place des femmes dans l’espace public en général.
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EPISODE 5 : SOIGNANTES
Les métiers du soin, requalifiés d’« essentiels » sont souvent, sinon toujours, les plus précaires, les plus dévalorisés socialement, les plus absents des priorités des politiques publiques.
Ils sont aussi, non sans logique, les plus féminisés : ce sont des infirmières (87%) et aides-soignantes (91%), mais aussi des aides à domicile, les aides ménagères, les agentes d’entretien (73%), les travailleuses sociales et les enseignantes. Tous ces métiers sont, de façon plus ou moins délibérée, dits « de femmes » : il s’agit d’éduquer, soigner, assister, nettoyer, panser, écouter, servir… : des compétences présumées naturelles, ataviques et évidentes chez les femmes.
Des compétences, qui, de ce fait, justifieraient le manque de considération sociale et économique qu’on leur adosse, même à l’heure où une pandémie mondiale crie leur absolue nécessité.
Pourtant, l’hôpital reste un lieu de « misogynie systémique », selon Anna Boctor et Lamia Kerdjana - dans une tribune du Monde - deux médecins soutenues par plus de 300 professionnelles de santé.
On apprend dans ce même texte qu’une femme médecin sur trois serait victime de discrimination liée à sa grossesse : les femmes médecins en congé maternité ne sont pas remplacées, 6 % d’entre elles ne prennent pas ou écourtent leur congé à cause de la pression, 15 % des femmes médecins ont été victimes de situation de harcèlement ou d’humiliation sexuelles en milieu hospitalier.
Autant de femmes susceptibles de se détourner de l’exercice hospitalier selon Lila Bouadma, réanimatrice à l’hôpital Bichat à Paris. La professeure Bouadma nous offre un témoignage sur ce mauvais traitement des soignantes, aggravé depuis un an.
La crise de la Covid-19 a révélé non pas seulement la vulnérabilité des métiers féminisés du soin, mais la vulnérabilité de l’ensemble de la société, y compris des plus favorisés, dans les dépendances quotidiennes aux services des autres et notamment des femmes soignantes.
En cela, la crise ouvre nécessairement une réflexion sur les métiers du “care” - du “prendre soin”.
Le "care" est défini par la philosophe américaine Joan Tronto comme « une espèce d’activité qui comprend tout ce que nous faisons pour maintenir en état, pour préserver et pour réparer notre monde en sorte que nous puissions y vivre aussi bien que possible »
Sandra Laugier et Najat Vallaud Belkacem ont publié un livre l’été dernier, qui s’intitule La société des vulnérables, leçons féministes d’une criseaux éditions Gallimard. Les autrices mettent précisément en perspective les enjeux quasi anthropologiques soulevés derrière le traitement qu’une société réserve à ses soignantes, et comment cette prise de conscience peut nous aider à réorganiser les activités humaines en prise avec « ce qui compte ».
La revalorisation sociale, économique, statutaire des métiers du soin participe d’une politique globale qui cherche à répondre à la fois à la fragilité de ces professions, à l’heure même où celles-ci sont les plus sensés ; mais cela répond aussi à la fragilité d’une société qui souffre de sa difficulté à se soigner, une société qui vieillit, une société malade de ses modes d’alimentation, de consommation et de son environnement, dans laquelle les soignantes ont vocation à composer les fonctions les plus essentielles pour des décennies.
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EPISODE 4 : EXPLOITEES
Le 25 mars 2020, le New York Times titrait, à propos de la Grande-Bretagne, que le pays avait levé une « armée de bénévoles » pour combattre le coronavirus. Il faisait référence aux plus de 750 000 personnes qui s’étaient mobilisées suite à l’appel lancé par le gouvernement britannique pour soutenir le système de santé.
En France, deux jours avant, le premier Ministre Édouard Philippe avait lui aussi appelé les Français.es à un « effort de solidarité nationale » et demandait la création d’une réserve civique qui comptait déjà 250 000 personnes quelques jours plus tard.
A y voir de plus près, tous ces bénévoles ont été en grande majorité des femmes. On observe aussi que certains secteurs d’aide sont devenus de véritables industries de production, d’effort de guerre, de travail à la chaîne, sans justement… qu’il soit payé.
C’est le cas notamment des couturières, qui ont confectionné des masques pendant des mois sans être rémunérées. Comme “une machine qui s’emballe”, elles qui voulaient aider ont fini par devoir équiper une population entière, et par remplacer pendant des mois un Etat incapable de produire des masques.
Jackie Tadéoni, costumière, a dénoncé dès les premiers temps cette exploitation larvée à grande échelle des milliers de couturières qui se cachaient derrière les millions de masques. Elle a monté le collectif Bas les masques pour se battre contre l’invisibilité de leur travail et porter les revendications des couturières.
--> Retrouvez leur pétition ici
Derrière la grandiloquence de la parole politique, la crise a donc banalisé l’exploitation du travail gratuit de certaines femmes. Les couturières ne sont pas un cas isolé : elles forment en fait un exemple très éloquent de l’évolution du marché du travail aujourd’hui. Maud Simonet, sociologue du travail gratuit qui a suivi de près le combat des couturières, y voit justement le reflet de la guerre des valeurs qui se joue autour du travail, et qui s’installe, imperceptiblement.
--> Pour en savoir plus sur le travail de Maud Simonet
Retrouvez un article dans l'Humanité : « Le travail gratuit est souvent assigné aux femmes », explique Maud Simonet, directrice de recherches CNRS
Ou encore dans le magazine Axelle : Maud Simonet : “Les solutions qu’on nous propose aujourd’hui sont des formes de travail gratuit”
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EPISODE 3 : VIOLENTÉES
Chaque année en France, près de 220 000 femmes sont victimes de violences physiques ou sexuelles commises par leur ancien ou actuel partenaire. En moyenne, 150 en meurent chaque année. 16% de femmes subissent des viols et des tentatives de viols ; 94 000 femmes sont effectivement violées chaque année.
Les restrictions de mouvement liées au confinement ont entraîné une hausse accablante des violences domestiques : les interventions des forces de l’ordre au domicile pour violences conjugales ont augmenté de plus de 30% au premier confinement, les signalements de plus de 40%.
Alors que le tabou se lève sur les violences intrafamiliales, avec #MeTooInceste notamment, on s’interroge sur le regain de violence physique, sexuelle, et psychique qu’a pu engendrer le retour forcé à la sphère domestique en temps de Covid.
Pour mieux comprendre ces phénomènes, et pour connaître des modalités d’accueil des femmes victimes de violence en France, nous sommes allées à la rencontre de Brigitte Chabert, directrice générale de l’association Du côté des femmes et présidente de l'Union Régionale Solidarité Femmes Ile-de-France.
Depuis un an, l’accueil des femmes victimes de violence a été bousculé, malmené, ou parfois au contraire mieux pris en charge du fait d’une plus grande conscience de l’urgence des situations.
Pour autant, le chemin des femmes victimes de violence ne s’arrête pas là. La justice peut être un véritable “parcours de la combattante”.
Zoë Royaux, avocate pénaliste et porte-parole de la Fondation des femmes, explique les enjeux et lacunes de la couverture judiciaire et juridique autour des violences sexuelles.
--> Enquête Cadre de vie et sécurité : chaque année entre 2011 et 2017, 235.000 personnes âgées de 18 à 76 ans sont victimes de violences sexuelles.
Le taux de classements sans suite en matière de violences sexuelles est de plus de 60%. La durée moyenne de procédures d’instructions en matière de violences sexuelles est de 29 mois. (Données Infostat Justice)
Selon l’observatoire national des violences faites aux femmes, il y a 220.000 femmes victimes de violences conjugales et moins d’1 sur 5 porte plainte. Il y a eu 146 féminicides en 2019.
Selon l’observatoire de la délinquance et des réponses pénales, 78% des personnes qui se déclarent victimes de violences sexuelles ne se déplacent pas au commissariat ou en gendarmerie pour dénoncer les faits.
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Episode 2 : Appauvries
Selon un récent rapport des Nations unies, la crise du Covid-19 devrait augmenter considérablement le taux de pauvreté des femmes. D’ici l’an prochain, 47 millions de femmes supplémentaires sombreraient dans l’extrême pauvreté. Selon ce même rapport, il faudra sans doute attendre 2030 pour revenir aux niveaux d’avant la pandémie.
Plusieurs éléments défavorables aux femmes se conjuguent : le renforcement de la part du travail domestique non rémunéré dans l’organisation de leur journée depuis un an, qui a fait l’objet de l’épisode premier du podcast, rend plus incertain le retour des femmes au travail.
Aussi, le risque de perdre leur emploi est quasiment 2 fois plus important pour les femmes que pour les hommes du fait de la surreprésentation des femmes dans certains secteurs dont l’activité recule le plus, et dans le secteur informel, payé au noir, et resté à l’ombre des dispositifs de soutien public.
Pourtant, on n’en parle pas, ou peu, aussi parce que la pauvreté des femmes a ceci de particulier qu’elle est invisible et silencieuse, elle se développe à l’ombre des grands plans de sauvegarde de l’Etat.
Nous sommes allées à la rencontre de cette réalité discrète, des femmes qui manquent de tout, déjà précaires devenues grandes précaires, des femmes qui “s’en sortaient” et ne s’en sortent plus. L’association MaMaMa, en plein coeur de la plaine Saint Denis, est née pendant le confinement pour venir en aide à ces femmes, en distribuant des colis solidaires d'urgence pour les mères isolées et leurs enfants.
Ce qui est inquiétant, c’est que ce type d’association soit née précisément parce que l’Etat n’a pas pris la mesure de cette précarité. En effet, les différents plans de relance n’ont pas pris en compte les inégalités entre femmes et hommes, et risquent de les aggraver durablement. Les plans de sauvetage nationaux ont concerné en priorité les secteurs à majorité masculine de l’automobile ou de l'aéronautique, que la pandémie a pourtant rendus en partie obsolètes. Ainsi, sur les 35 milliards d’euros des plans de relance sectoriels de juin 2020, seulement 7 milliards sont dédiés à des emplois occupés par des femmes. Le dernier rapport de la Fondation des Femmes conclut : “Alors que les secteurs féminisés sont les plus touchés, la relance les oublie.”
Lire aussi : le dernier numéro de Courrier international sur le sujet
C’est aussi ce que nous explique Cécile Duflot, directrice générale d’Oxfam France, association qui lutte contre les inégalités pour mettre fin à la pauvreté et aux injustices mondiales.
Découvrez le rapport d’Oxfam sur le sujet
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Episode 1 : Confinées
Pendant le premier confinement de mars 2020, 83 % des femmes vivant avec enfants leur ont consacré plus de 4h par jour, contre 57 % des hommes. Parmi les personnes en emploi, les mères ont deux fois plus souvent que les pères renoncé à travailler pour garder leurs enfants (21 % contre 12 %), au risque de perdre leur emploi. Plus grave encore : parmi les personnes en emploi n’ayant pas bénéficié de l’autorisation spéciale d’absence pour garde d’enfant, 80 % des femmes passaient plus de 4h quotidiennes avec les enfants (contre 52 % des hommes) et 45 % assuraient une double journée (contre 29 % des hommes).
Il faut ajouter à cela le renforcement des inégalités liées aux tâches ménagères, qui explosent plus encore la journée de travail des femmes. Selon l’enquête de Harris Interactive, “les femmes déclarent passer en moyenne 2 heures et 34 minutes par jour [à se consacrer aux tâches ménagères” (26% d’entre elles estimant y consacrer plus de 3 heures), contre 2 heures 10 pour les hommes (plus de 3 heures : 17%). La répartition inégale du temps passé pour les tâches ménagères entre les femmes et les hommes, régulièrement documentée, tend donc à se confirmer en période de confinement.”
Ces chiffres viennent renforcer des déséquilibres existants : en 2011, l’Insee avait estimé que le travail domestique gratuit représentait 33 % du PIB français. Cuisine, ménage, courses, soin aux enfants... L’Institut évaluait ainsi à 636 milliards le montant de ces travaux domestiques réalisés à 64 % par des femmes.
Ce rebasculement du fardeau domestique sur les femmes, l’explosion de la charge mentale et du travail gratuit qu’il sous-tend est lourd de conséquences. Pour mieux comprendre celles-ci, nous sommes allées à la rencontre de Coline Charpentier, fondatrice du collectif T’as pensé à.
Le déséquilibre dans la prise en charge du travail domestique n’a pas que des conséquences au sein du couple. Il organise et reproduit des inégalités économiques et sociales de long terme défavorable aux femmes. C’est ce que nous expliquent les deux chercheuses Sibylle Gollac et Céline Gollac, qui explorent tous les ressorts de la reproduction des inégalités au sein de la famille, dans leur ouvrage Le Genre du Capital
En effet, ce travail contribue de façon indirecte à l’enrichissement des familles à long terme, “ne serait-ce qu’en libérant les hommes d’obligations qui les freineraient dans leur carrière”. Au vu de l’explosion du travail domestique pendant le confinement, si importante qu’elle a conduit les femmes allemandes à présenter leurs factures à leurs maris et aux responsables publics, l’on peut logiquement attendre de cette crise une accumulation capitalistique défavorable aux femmes dans leur majorité encore plus importante qu’elle ne l’était déjà. Cela doit interroger sur la généralisation du télétravail, qui augmente les possibilités de mélange des genres avec le travail domestique, comme vecteur d’inégalités professionnelles. L’INED a d’ailleurs conclu son enquête sur le télétravail en déclarant que “les femmes sont les grandes perdantes du confinement, tant sur le marché du travail que dans la sphère domestique, après cinquante ans d’avancées”.
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REGARDE-MOI BIEN
Le premier podcast de la Fondation des Femmes
Par Mahaut Chaudouët Delmas & Luna Gay-Padoan
La crise du Covid-19 a révélé la vulnérabilité de la condition des femmes et de leurs droits. Alors qu’elles composent l’écrasante majorité des métiers qui assurent la survie quotidienne du pays depuis un an, leurs revendications ont été ignorées et leurs droits reculent. Les restrictions de mouvement liées à la crise sanitaire ont entraîné une hausse accablante des violences faites aux femmes. La précarité économique des femmes explose de façon invisible et silencieuse. En termes de visibilité publique et médiatique, leur parole semble avoir été plus que jamais confisquée. Les rapports internationaux s’en inquiètent : selon ONU Femmes, la pandémie pourrait anéantir 25 ans de progrès en matière d’égalité entre les femmes et les hommes.
Ce podcast cherche à documenter en 9 épisodes ce qui se joue autour des femmes aujourd’hui. Il cherche à déplier et à bien regarder ce que le Covid révèle, cristallise, renforce, des rôles qu’on assigne de façon structurelle aux femmes, qui ont été à la fois les plus actives, les plus exposées, et les plus ignorées, depuis un an. Il cherche à tirer les leçons féministes de cette crise pour dessiner les contours d’un monde économiquement et socialement plus juste.
CHAPITRE 1 : VICTIMES
Episode 1- confinées, avec Coline Charpentier (Collectif T’as pensé à ?) et Sibylle Gollac et Céline Bessière (autrices du Genre du Capital) Episode 2- appauvries, avec Magali Bragard (Association MaMaMa) et Cécile Duflot (Directrice générale d’Oxfam) Épisode 3- violentées, avec Brigitte Chabert (Solidarité Femmes) et Zoë Royaux (avocate pénaliste & porte-parole de la Fondation des femmes)CHAPITRE 2 : HÉROÏNES
Episode 4- exploitées, avec Jackie Tadéoni (porte-parole du collectif Bas les Masques) et Maud Simonet (sociologue du travail gratuit) Épisode 5- soignantes, avec Lila Bouadma (réanimatrice à l'hôpital Bichat à Paris, professeure de médecine) et Najat Vallaud-Belkacem et Sandra Laugier (autrices de la Société des vulnérables) Episode 6- ignorées, avec Marine Perin (porte-parole de Prenons la 1) et Lauren Bastide (autrice de Présentes)CHAPITRE 3 : COMBATTANTES
Episode 7 - militantes, avec Laora Paoli-Pandolfi (porte-parole de #IWasCorsica) et Anne-Cécile Mailfert (présidente de la Fondation des femmes)
Episode 8 - entrepreneuses, avec Déborah Loye (directrice générale de Sista) et Marie-Pierre Rixain (députée LREM)
Episode 9 - engagées, avec Lauren Lolo (élue municipale à Fosses, co-fondatrice de la Cité des Chances) et Sandrine Rousseau (vice présidente de l’Université de Lille, candidate à la primaire d’EELV)Crédits :
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