Afleveringen
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Le chamanisme est une pratique spirituelle ancestrale où le chaman sert d'intermédiaire entre le monde visible et invisible. La technique chamanique fondamentale repose sur la capacité du chaman à voyager entre trois niveaux cosmiques - le Ciel, la Terre et les Enfers - reliés par un axe central. Ces voyages s'effectuent en état d'extase, permettant au chaman d'incorporer les forces de la nature sans pour autant être possédé par elles.
En Chine ancienne, cette pratique a fortement influencé le taoïsme, comme en témoignent les nombreux récits de "vols magiques" dans l'histoire légendaire chinoise. Les chamans utilisent également des techniques comme la danse rituelle pour atteindre des états de conscience modifiés. L'imitation des animaux joue un rôle crucial, permettant d'accéder à une dimension supérieure de la vie et d'atteindre une communion avec les rythmes cosmiques.
Agir dans les mondes visible et invisible, imiter les animaux, se synchroniser avec les rythmes cosmiques, danser rituellement pour atteindre des états de conscience amplifiés représentent des caractéristiques essentielles du taijiquan.
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Cet épisode explore la relation complexe entre mythe et raison, montrant que ces deux modes de pensée, loin d'être simplement opposés, ont toujours coexisté dans l'histoire humaine. Nos ancêtres combinaient déjà une pensée empirique et rationnelle avec une dimension mythologique et magique.
L'anthropologie contemporaine a réhabilité cette dualité, reconnaissant que ces deux modes de pensée peuvent fonctionner de manière complémentaire sans se dégrader mutuellement. Cette coexistence s'est manifestée dans diverses civilisations.
Ce n'est qu'après Newton que l'Occident a opéré une séparation radicale entre mythe et raison. Pourtant, même dans notre monde moderne, les mythes persistent et s'entremêlent avec la rationalité dans notre vie quotidienne.
Le taijiquan illustre remarquablement comment ces deux modes de pensée peuvent s'articuler de façon harmonieuse, suggérant qu'il serait néfaste de rejeter l'un ou l'autre. La compréhension véritable nécessite une pensée complexe capable d'intégrer ces deux dimensions, distinctes, mais interdépendantes, à l'image du yin et du yang.
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Zijn er afleveringen die ontbreken?
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Contrairement à la vision moderne qui le considère comme une affabulation, le mythe représente en réalité une forme sophistiquée de langage symbolique porteuse de vérités fondamentales. Il transcende le simple récit pour devenir un modèle exemplaire universel qui peut être réactualisé.
Le mythe combine histoire humaine et mémoire du monde. Sa véritable fonction est d'aider à la transformation et à la prise de conscience de l'être, offrant des solutions aux questionnements existentiels. En permettant à chacun de se reconnaître dans ses personnages-symboles, il guide l'individu de l'ignorance vers la connaissance, dévoilant ainsi les mystères fondamentaux de l'existence.
Entrer dans la légende de Zhang San Feng et dans le mythe de la création du taijiquan sur le mont Wudang, c’est devenir le Guerrier Véritable et entrer dans la Montagne. L’objectif n’est pas de vénérer Zhang San Feng et de commémorer l’événement de la création du taijiquan, mais de suivre le modèle exemplaire de Zhang San Feng et de réactualiser l’événement, c’est-à-dire de recréer le taijiquan.
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La forme du taiji est d’une certaine façon un déploiement par les images et dans le domaine des images. En Chine, le xiang a une longue histoire, il est à la fois figure, image et symbole. Le xiang permet de saisir la configuration des formes originelles de l’être. Toute l’alchimie intérieure (neidan), se rattachant directement à la tradition du Livre des mutations (Yijing) relève du domaine des images (xiang).
Aussi bien en taijiquan, qu’en alchimie, les xiang sont les médiateurs. Utilisées comme des motifs, les images permettent de relier plusieurs niveaux de sens aussi bien en profondeur qu’en extension. Capables de s’organiser en configurations mobiles et/ou d’assumer des fonctions diverses, les images permettent d’actionner des entités, de les charger de différents niveaux d’existence et de signification.
En taijiquan, les images sont l’âme du mouvement. Elles animent celui-ci de l’intérieur en lui donnant consistance, vie et signifiance. L’image permet à la fois de saisir l’«anatomie » et la « physiologie » du mouvement.
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Les artistes, inventeurs, créateurs ainsi que les initiés voyageant dans les zones profondes de leur être ramènent dans leur conscient une ample moisson d’images-symboles. Le rôle des techniques initiatiques est d’apprendre à accomplir ces « voyages » qui remontent aux sources et de revenir dans le monde, avec une moisson d’images-symboles. L’imagination est cette capacité de capter, de former et d’imiter des images.
L’aspect mécanique de la posture et du mouvement sont essentiels, nous y consacrons d’ailleurs une attention toute particulière. C’est une condition nécessaire, mais non suffisante. Se contenter de l’aspect technique revient à réduire le taijiquan à une simple gymnastique. L’aspect ésotérique de la pratique réellement traditionnelle commence une fois la technique intégrée, la technique n’est pas une fin(alité), elle est un moyen et un début, le début d’un long voyage au cœur du taijiquan, un long périple au cœur de soi. Tout cela passe par une multitude de questions et d’interrogations.
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Un symbole est une figure qui réunit deux réalités, nous pourrions tout aussi bien dire deux pans du réel, deux mondes : le monde de la matière et celui de l’esprit, celui de la Terre et celui du Ciel.
La fonction du symbole est de conduire à une harmonisation de toutes les forces virtuelles et dynamiques que l’être humain porte en lui. Le symbole, outil qui permet de capter la réalité, facilite les processus de découverte, de compréhension et de création. Le travail sur (et avec) le symbole est donc une voie d’accomplissement et d’unification de l’être.
Un même symbole peut avoir plusieurs significations, parfois même contradictoires. Son ambivalence lui fait gagner en profondeur ce qu’il perd en précision. Sa multivalence est une expression de l’unité dans la diversité. Entrer dans le monde du symbole, c’est quitter un « monde fermé » pour entrer dans un « monde ouvert ». Ce passage n’est pas exempt de dangers.
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Il semble que l’Occident et l’Extrême-Orient, sous des formes différentes, aient vécu les mêmes évolutions aux mêmes moments. La réduction de l’être humain au dualisme corps/âme ou corps/psychisme ou encore corps/qi procède de la même démarche limitative et réductionniste. En dépit des grands discours spirituels, la grande majorité des pratiquants et des théoriciens du taijiquan, sans même sans rendre compte, sont enfermés dans le paradigme dualiste.
Depuis le début de ma pratique, je n’ai jamais considéré la forme (les formes) comme une finalité. J’ai utilisé (et j’utilise) la forme (aspect extérieur) pour découvrir le moule (pattern/forme intérieure) qui me permet de remonter jusqu’à l’Esprit.
Ma recherche ne va pas dans le sens de remonter le cours d’une histoire linéaire à la recherche d’une forme qui, parce qu’elle serait plus ancienne, serait forcément plus authentique. Je suis en quête non de l’original, mais de l’originel.
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À l’origine, confucianisme et taoïsme sont des mouvements spontanés avec un enseignement fluide et vivant communiqué à des groupes de tailles restreintes. Après quelques siècles, l’un et l’autre s’érigeront en doctrine. Le confucianisme se fige en ritualisme et bureaucratie tandis que le taoïsme se délite en superstitions. Le premier succombe à un excès de « terre » et le second à un excès de « ciel ».
Comme l’histoire n’est qu’un éternel recommencement, le taijiquan aujourd’hui en Occident est confronté aux mêmes problématiques : d’un côté, le cadre institutionnel des fédérations et de l’autre, la magie du Qi. Dans le premier cadre, les structures limitantes étouffent et provoquent une perte de vie tandis que dans le second, faute d’un minimum de structures, la vie se disperse. On a le choix entre rigidité ou laxisme. Dans les deux cas, on se coupe de l’esprit. La voie du milieu est la plus étroite, la plus difficile et la moins fréquentée.
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Le taoïsme religieux (utopisme dogmatique, superstition, magie horizontale) illustre les risques et écueils à éviter par tout pratiquant ou groupe engagé dans une recherche sincère. La magie horizontale amène à développer son pouvoir sur les autres par l’utilisation de trucs et recettes tandis que la magie verticale vise à se relier à un principe universel transcendant (le Dao par exemple) afin de récupérer son propre pouvoir (que l’on exerce sur soi-même).
Comme Confucius, nous assistons nous aussi à un délitement de l’ordre politique combiné à la disparition d’une certaine conception du monde, le phénomène atteint maintenant une dimension mondiale. Comme Platon était confronté à la désintégration de l’ancienne institution qu’était la cité grecque, nous sommes aujourd’hui confrontés à la désintégration de l’ancienne institution que sont nos États. Avons-nous, aurons-nous des philosophes comme Platon, des penseurs comme Confucius ? Serons-nous capables de les entendre, de les comprendre et d’agir dans les directions qu’ils nous montre(ro)nt ?
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Wang Fuzhi (1619-1692) est considéré comme l’un des plus éminents philosophes chinois. Pour lui, l’unité de l’homme et du monde est réalisée dans l’énergie vitale. Il récuse le non manifesté (wu) taoïste afin de réaffirmer la réalité éternelle et indescriptible de l’énergie universelle (qi). Pour lui, il n’y a rien à chercher en dehors de l’interaction du Yin et du Yang qui suffit à expliquer entièrement le fonctionnement de l’univers. Il s’agirait en quelque sorte d’un monisme vitaliste.
Dai Zhen (1724-1777) est issu de l’élite intellectuelle qui se développe dans le milieu des riches marchands du Jingnan. Ce génie rigoureux et curieux représente une parfaite illustration du nouvel esprit critique qui se développe en Chine à cette époque. Sa devise est de « ne rechercher le vrai que dans les faits réels ». Il est sans aucun doute le digne homologue de ses contemporains européens, les Encyclopédistes.
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À partir du 11ème siècle, les néoconfucéens mirent également l’accent sur la vocation de l’homme à s’unir avec le cosmos, préoccupation première des taoïstes depuis toujours, mais avec une coloration plus humaniste, caractéristique de la tradition confucéenne : il s’agit alors d’accomplir en soi ce qui est spécifiquement humain tout en participant à l’œuvre créatrice du Ciel et de la Terre. Isabelle Robinet précise que l’une des vertus cardinales du néoconfucianisme est la connaissance zhi qui n’est pas seulement une connaissance cognitive, mais aussi une expérience existentielle intégrée, et qui porte à la fois sur le sens des choses de l’univers afin de s’y conformer, et sur soi-même pour trouver sa nature propre, car l’un et l’autre ne font qu’un. (...) Cette connaissance est indissociable de sa mise en acte, sans quoi elle n’est pas : « Savoir est le début de l’action, agir en est le parachèvement » dit le néoconfucéen Wang Yangming (1472-1529).
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Plus qu’un homme ou un penseur, Confucius représente un véritable phénomène culturel. Plus qu’une école de pensée, le confucianisme se confond avec le destin de la civilisation chinoise depuis plus de 2.500 ans.
Anne Cheng dégage trois pôles essentiels dans son enseignement : l’apprendre, le sens de l’humain et l’esprit rituel. Pour Maître Kong, apprendre est à la fois une démarche intellectuelle et une expérience de vie. Il n’y a pas de séparation entre théorie et pratique. L’éducation, selon Confucius, ne saurait être purement livresque, la connaissance consiste davantage dans le développement d’une aptitude que dans l’acquisition d’un contenu intellectuel. Apprendre, c’est finalement apprendre à être humain, car notre humanité n’est pas un donné, elle se construit et se tisse dans nos rapports avec les autres.
Les deux principaux héritiers de Confucius ont formé un corps de doctrine appelé confucianisme qui, sous les Han, fut choisi comme philosophie d’État. Le système d’examen basé sur le corpus confucéen resta en vigueur jusqu’à la fin de l’Empire en 1911.
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À la fin du 4e siècle apparaît un nouveau taoïsme dans lequel les pratiques physiologiques se trouvent transposées sur le plan spirituel, notamment avec le courant du Shangqing (La Haute Pureté).
L’alchimie intérieure (neidan) ne cherche pas à fabriquer un produit, elle est avant tout une méthode d’ordonnancement et de façonnement du monde et de soi-même entraînant une compréhension au sens d’intégration existentielle et intellectuelle.
Sous les dynasties Ming et Qing (1368-1911), c’est le déclin … Il faudra attendre la politique de libéralisation lancée par Deng Xiaoping en 1979 pour que le taoïsme puisse commencer à tenter, non sans mal, de revivifier ses anciennes traditions.
Les cultes populaires envers les Immortels abondaient sous les Han. Dans le courant du 2e siècle après J.– C. apparaît une forme de taoïsme collectif (politico-religieux) bien différente de celle des petits groupes indépendants que l’on avait connus jusqu’alors. Ces mouvements messianiques et utopistes connurent un grand succès.
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Le principe ultime est spontané, il est par lui-même. La liberté et l’autonomie consistent à épouser complètement le grand mouvement naturel de l’univers : c’est là la Voie véritable. Cette thèse se développe donc en opposition aux structures culturelles telles qu’elles sont représentées par le confucianisme naissant.
Lorsque la notion de taoïsme se cristallise vers le 2e siècle av. J.-C., l’opposition idéologique du naturel et du culturel avait déjà revêtu diverses formes : réaction contre l’envahissement de l’administration centrale, option pour l’individualisme contre l’assujettissement aux normes officielles et à leurs systèmes de valeurs. Cette polarisation, tout en conduisant aussi bien à l’évasion mystique qu’à la révolte populaire, donnera au taoïsme sa qualité d’éternel alternatif et contribuera à faire de lui une doctrine de la liberté profondément originale.
Les pratiques vivifiantes auxquelles s’adonnaient les taoïstes sont mentionnées de manière allusive dans le Daode jing. Le Zhuangzi en fournit des indications bien plus nettes. L’union avec le Dao se réalise par l’extase.
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Fonctionnant par champs et totalité, la pensée chinoise embrasse et englobe. Elle appréhende, non par secteurs isolés, mais par ensembles. La pensée chinoise privilégie le mode génératif au mode causal, elle n’est pas de l’ordre de l’être, mais du processus.
La Chine est souvent présentée comme un autre monde. Sa culture, sa langue, sa pensée apparaissent alors comme l’antithèse, la contre-épreuve de leurs homologues occidentaux. Ces images frappent, interpellent, plaisent, séduisent.
J’ai moi aussi rencontré l’ailleurs en Chine. J’ai bien sûr, comme tout Occidental, été confronté à sa logique tout autre. Mon intellect ne pouvait qu’être enthousiaste de cette vision Orient-Occident en Yin/Yang. Pourtant, sans être tout à fait fausse, cette conception ne me semblait pas tout à fait juste : quelque chose sonnait faux.
Je présente plusieurs interprétations et c’est à chacun de se questionner, de réfléchir, de croiser et de choisir … de penser autrement pour tenter de comprendre.
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Dans ma pratique du taijiquan, en utilisant mon esprit analytique, j’ai assez vite distingué ce que je comprenais bien, ce que je comprenais mal et ce que je ne comprenais pas.
Après cette première opération de mise en évidence des difficultés, j’ai toujours utilisé mon intuition et mon imagination pour voyager au cœur du taijiquan. Après une analyse minutieuse des éléments formels d’une forme, je navigue dans l’imaginal, je me laisse porter par mes visions à la recherche de la trame sous-jacente.
Il me faut ensuite me reconnecter à mon âme (ce qui anime la vie intérieure) occidentale et laisser mes visions et sensations se transformer subtilement en ce qui peut être ressaisi et compris par la sensibilité occidentale.
Je n’hésite pas à prendre certaines libertés si c’est pour mieux faire comprendre L’esprit du taijiquan. J’essaie de faire goûter la quintessence en utilisant tous les outils et éclairages de la culture occidentale de ce début de troisième millénaire.
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Lorsque le calligraphe possède en lui toutes les ressources du répertoire, son écriture coule de source. Lorsqu’il se révèle tout entier dans son écriture, celle-ci dégage un extraordinaire rayonnement.
Il abandonne toute soumission pour ne plus suivre que son propre mouvement. Il s’aventure au-delà de toute perfection apprise pour aller dans ce qui semble être une imperfection. L’impertinence remplace l’application, les écarts et impairs résultent d’une création permanente et non plus d’une maladresse ou d’une inattention.
Dans mon cheminement, je n’ai pas provoqué les événements, les choses se sont faites d’elles-mêmes. Elles se sont, à un moment donné, imposées avec une évidence incontournable.
L’effet de mode, l’ambiance syncrétiste, la marchandisation et le pouvoir castrateur de certaines personnes et/ou associations ne représentent certes pas le contexte le plus propice, ni pour le développement et la maturation des différentes phases de l’apprentissage, ni pour l’émergence d’êtres authentiques capables de (se) créer.
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L’acquisition de la technique en taijiquan et en calligraphie répond aux mêmes exigences : la progressivité de la méthode, la difficulté de coordonner le tout et les parties, l’orientation dans l’espace, la référence au modèle choisi, la nécessité de la pratique régulière, la recherche et l’expérimentation des différents paramètres du mouvement, le maintien d’une attention vigilante en toutes circonstances. Dans ces deux disciplines, la maîtrise de la technique remplit l’élève d’une joie intense. Il réalise qu’il a acquis non pas un simple savoir-faire, mais un pouvoir nouveau qu’il apprendra à utiliser dans l’étape suivante.
L’étude des oeuvres/formes de différents styles représente une suite d’imprégnations qui fécondent peu à peu la substance du pratiquant. En se conformant aux formes qui l’informent, il se transforme. En s’oubliant et en se perdant, il se trouve. Le vieil homme (l’aspect extérieur, superficiel) meurt et l’homme nouveau (l’être profond) naît.
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