Afleveringen
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Il semble que lâOccident et lâExtrĂȘme-Orient, sous des formes diffĂ©rentes, aient vĂ©cu les mĂȘmes Ă©volutions aux mĂȘmes moments. La rĂ©duction de lâĂȘtre humain au dualisme corps/Ăąme ou corps/psychisme ou encore corps/qi procĂšde de la mĂȘme dĂ©marche limitative et rĂ©ductionniste. En dĂ©pit des grands discours spirituels, la grande majoritĂ© des pratiquants et des thĂ©oriciens du taijiquan, sans mĂȘme sans rendre compte, sont enfermĂ©s dans le paradigme dualiste.
Depuis le dĂ©but de ma pratique, je nâai jamais considĂ©rĂ© la forme (les formes) comme une finalitĂ©. Jâai utilisĂ© (et jâutilise) la forme (aspect extĂ©rieur) pour dĂ©couvrir le moule (pattern/forme intĂ©rieure) qui me permet de remonter jusquâĂ lâEsprit.
Ma recherche ne va pas dans le sens de remonter le cours dâune histoire linĂ©aire Ă la recherche dâune forme qui, parce quâelle serait plus ancienne, serait forcĂ©ment plus authentique. Je suis en quĂȘte non de lâoriginal, mais de lâoriginel.
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Ă lâorigine, confucianisme et taoĂŻsme sont des mouvements spontanĂ©s avec un enseignement fluide et vivant communiquĂ© Ă des groupes de tailles restreintes. AprĂšs quelques siĂšcles, lâun et lâautre sâĂ©rigeront en doctrine. Le confucianisme se fige en ritualisme et bureaucratie tandis que le taoĂŻsme se dĂ©lite en superstitions. Le premier succombe Ă un excĂšs de « terre » et le second Ă un excĂšs de « ciel ».
Comme lâhistoire nâest quâun Ă©ternel recommencement, le taijiquan aujourdâhui en Occident est confrontĂ© aux mĂȘmes problĂ©matiques : dâun cĂŽtĂ©, le cadre institutionnel des fĂ©dĂ©rations et de lâautre, la magie du Qi. Dans le premier cadre, les structures limitantes Ă©touffent et provoquent une perte de vie tandis que dans le second, faute dâun minimum de structures, la vie se disperse. On a le choix entre rigiditĂ© ou laxisme. Dans les deux cas, on se coupe de lâesprit. La voie du milieu est la plus Ă©troite, la plus difficile et la moins frĂ©quentĂ©e.
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Zijn er afleveringen die ontbreken?
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Le taoĂŻsme religieux (utopisme dogmatique, superstition, magie horizontale) illustre les risques et Ă©cueils Ă Ă©viter par tout pratiquant ou groupe engagĂ© dans une recherche sincĂšre. La magie horizontale amĂšne Ă dĂ©velopper son pouvoir sur les autres par lâutilisation de trucs et recettes tandis que la magie verticale vise Ă se relier Ă un principe universel transcendant (le Dao par exemple) afin de rĂ©cupĂ©rer son propre pouvoir (que lâon exerce sur soi-mĂȘme).
Comme Confucius, nous assistons nous aussi Ă un dĂ©litement de lâordre politique combinĂ© Ă la disparition dâune certaine conception du monde, le phĂ©nomĂšne atteint maintenant une dimension mondiale. Comme Platon Ă©tait confrontĂ© Ă la dĂ©sintĂ©gration de lâancienne institution quâĂ©tait la citĂ© grecque, nous sommes aujourdâhui confrontĂ©s Ă la dĂ©sintĂ©gration de lâancienne institution que sont nos Ătats. Avons-nous, aurons-nous des philosophes comme Platon, des penseurs comme Confucius ? Serons-nous capables de les entendre, de les comprendre et dâagir dans les directions quâils nous montre(ro)nt ?
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Wang Fuzhi (1619-1692) est considĂ©rĂ© comme lâun des plus Ă©minents philosophes chinois. Pour lui, lâunitĂ© de lâhomme et du monde est rĂ©alisĂ©e dans lâĂ©nergie vitale. Il rĂ©cuse le non manifestĂ© (wu) taoĂŻste afin de rĂ©affirmer la rĂ©alitĂ© Ă©ternelle et indescriptible de lâĂ©nergie universelle (qi). Pour lui, il nây a rien Ă chercher en dehors de lâinteraction du Yin et du Yang qui suffit Ă expliquer entiĂšrement le fonctionnement de lâunivers. Il sâagirait en quelque sorte dâun monisme vitaliste.
Dai Zhen (1724-1777) est issu de lâĂ©lite intellectuelle qui se dĂ©veloppe dans le milieu des riches marchands du Jingnan. Ce gĂ©nie rigoureux et curieux reprĂ©sente une parfaite illustration du nouvel esprit critique qui se dĂ©veloppe en Chine Ă cette Ă©poque. Sa devise est de « ne rechercher le vrai que dans les faits rĂ©els ». Il est sans aucun doute le digne homologue de ses contemporains europĂ©ens, les EncyclopĂ©distes.
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Ă partir du 11Ăšme siĂšcle, les nĂ©oconfucĂ©ens mirent Ă©galement lâaccent sur la vocation de lâhomme Ă sâunir avec le cosmos, prĂ©occupation premiĂšre des taoĂŻstes depuis toujours, mais avec une coloration plus humaniste, caractĂ©ristique de la tradition confucĂ©enne : il sâagit alors dâaccomplir en soi ce qui est spĂ©cifiquement humain tout en participant Ă lâĆuvre crĂ©atrice du Ciel et de la Terre. Isabelle Robinet prĂ©cise que lâune des vertus cardinales du nĂ©oconfucianisme est la connaissance zhi qui nâest pas seulement une connaissance cognitive, mais aussi une expĂ©rience existentielle intĂ©grĂ©e, et qui porte Ă la fois sur le sens des choses de lâunivers afin de sây conformer, et sur soi-mĂȘme pour trouver sa nature propre, car lâun et lâautre ne font quâun. (...) Cette connaissance est indissociable de sa mise en acte, sans quoi elle nâest pas : « Savoir est le dĂ©but de lâaction, agir en est le parachĂšvement » dit le nĂ©oconfucĂ©en Wang Yangming (1472-1529).
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Plus quâun homme ou un penseur, Confucius reprĂ©sente un vĂ©ritable phĂ©nomĂšne culturel. Plus quâune Ă©cole de pensĂ©e, le confucianisme se confond avec le destin de la civilisation chinoise depuis plus de 2.500 ans.
Anne Cheng dĂ©gage trois pĂŽles essentiels dans son enseignement : lâapprendre, le sens de lâhumain et lâesprit rituel. Pour MaĂźtre Kong, apprendre est Ă la fois une dĂ©marche intellectuelle et une expĂ©rience de vie. Il nây a pas de sĂ©paration entre thĂ©orie et pratique. LâĂ©ducation, selon Confucius, ne saurait ĂȘtre purement livresque, la connaissance consiste davantage dans le dĂ©veloppement dâune aptitude que dans lâacquisition dâun contenu intellectuel. Apprendre, câest finalement apprendre Ă ĂȘtre humain, car notre humanitĂ© nâest pas un donnĂ©, elle se construit et se tisse dans nos rapports avec les autres.
Les deux principaux hĂ©ritiers de Confucius ont formĂ© un corps de doctrine appelĂ© confucianisme qui, sous les Han, fut choisi comme philosophie dâĂtat. Le systĂšme dâexamen basĂ© sur le corpus confucĂ©en resta en vigueur jusquâĂ la fin de lâEmpire en 1911.
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à la fin du 4e siÚcle apparaßt un nouveau taoïsme dans lequel les pratiques physiologiques se trouvent transposées sur le plan spirituel, notamment avec le courant du Shangqing (La Haute Pureté).
Lâalchimie intĂ©rieure (neidan) ne cherche pas Ă fabriquer un produit, elle est avant tout une mĂ©thode dâordonnancement et de façonnement du monde et de soi-mĂȘme entraĂźnant une comprĂ©hension au sens dâintĂ©gration existentielle et intellectuelle.
Sous les dynasties Ming et Qing (1368-1911), câest le dĂ©clin ⊠Il faudra attendre la politique de libĂ©ralisation lancĂ©e par Deng Xiaoping en 1979 pour que le taoĂŻsme puisse commencer Ă tenter, non sans mal, de revivifier ses anciennes traditions.
Les cultes populaires envers les Immortels abondaient sous les Han. Dans le courant du 2e siĂšcle aprĂšs J.â C. apparaĂźt une forme de taoĂŻsme collectif (politico-religieux) bien diffĂ©rente de celle des petits groupes indĂ©pendants que lâon avait connus jusquâalors. Ces mouvements messianiques et utopistes connurent un grand succĂšs.
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Le principe ultime est spontanĂ©, il est par lui-mĂȘme. La libertĂ© et lâautonomie consistent Ă Ă©pouser complĂštement le grand mouvement naturel de lâunivers : câest lĂ la Voie vĂ©ritable. Cette thĂšse se dĂ©veloppe donc en opposition aux structures culturelles telles quâelles sont reprĂ©sentĂ©es par le confucianisme naissant.
Lorsque la notion de taoĂŻsme se cristallise vers le 2e siĂšcle av. J.-C., lâopposition idĂ©ologique du naturel et du culturel avait dĂ©jĂ revĂȘtu diverses formes : rĂ©action contre lâenvahissement de lâadministration centrale, option pour lâindividualisme contre lâassujettissement aux normes officielles et Ă leurs systĂšmes de valeurs. Cette polarisation, tout en conduisant aussi bien Ă lâĂ©vasion mystique quâĂ la rĂ©volte populaire, donnera au taoĂŻsme sa qualitĂ© dâĂ©ternel alternatif et contribuera Ă faire de lui une doctrine de la libertĂ© profondĂ©ment originale.
Les pratiques vivifiantes auxquelles sâadonnaient les taoĂŻstes sont mentionnĂ©es de maniĂšre allusive dans le Daode jing. Le Zhuangzi en fournit des indications bien plus nettes. Lâunion avec le Dao se rĂ©alise par lâextase.
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Fonctionnant par champs et totalitĂ©, la pensĂ©e chinoise embrasse et englobe. Elle apprĂ©hende, non par secteurs isolĂ©s, mais par ensembles. La pensĂ©e chinoise privilĂ©gie le mode gĂ©nĂ©ratif au mode causal, elle nâest pas de lâordre de lâĂȘtre, mais du processus.
La Chine est souvent prĂ©sentĂ©e comme un autre monde. Sa culture, sa langue, sa pensĂ©e apparaissent alors comme lâantithĂšse, la contre-Ă©preuve de leurs homologues occidentaux. Ces images frappent, interpellent, plaisent, sĂ©duisent.
Jâai moi aussi rencontrĂ© lâailleurs en Chine. Jâai bien sĂ»r, comme tout Occidental, Ă©tĂ© confrontĂ© Ă sa logique tout autre. Mon intellect ne pouvait quâĂȘtre enthousiaste de cette vision Orient-Occident en Yin/Yang. Pourtant, sans ĂȘtre tout Ă fait fausse, cette conception ne me semblait pas tout Ă fait juste : quelque chose sonnait faux.
Je prĂ©sente plusieurs interprĂ©tations et câest Ă chacun de se questionner, de rĂ©flĂ©chir, de croiser et de choisir ⊠de penser autrement pour tenter de comprendre.
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Dans ma pratique du taijiquan, en utilisant mon esprit analytique, jâai assez vite distinguĂ© ce que je comprenais bien, ce que je comprenais mal et ce que je ne comprenais pas.
AprĂšs cette premiĂšre opĂ©ration de mise en Ă©vidence des difficultĂ©s, jâai toujours utilisĂ© mon intuition et mon imagination pour voyager au cĆur du taijiquan. AprĂšs une analyse minutieuse des Ă©lĂ©ments formels dâune forme, je navigue dans lâimaginal, je me laisse porter par mes visions Ă la recherche de la trame sous-jacente.
Il me faut ensuite me reconnecter Ă mon Ăąme (ce qui anime la vie intĂ©rieure) occidentale et laisser mes visions et sensations se transformer subtilement en ce qui peut ĂȘtre ressaisi et compris par la sensibilitĂ© occidentale.
Je nâhĂ©site pas Ă prendre certaines libertĂ©s si câest pour mieux faire comprendre Lâesprit du taijiquan. Jâessaie de faire goĂ»ter la quintessence en utilisant tous les outils et Ă©clairages de la culture occidentale de ce dĂ©but de troisiĂšme millĂ©naire.
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Lorsque le calligraphe possĂšde en lui toutes les ressources du rĂ©pertoire, son Ă©criture coule de source. Lorsquâil se rĂ©vĂšle tout entier dans son Ă©criture, celle-ci dĂ©gage un extraordinaire rayonnement.
Il abandonne toute soumission pour ne plus suivre que son propre mouvement. Il sâaventure au-delĂ de toute perfection apprise pour aller dans ce qui semble ĂȘtre une imperfection. Lâimpertinence remplace lâapplication, les Ă©carts et impairs rĂ©sultent dâune crĂ©ation permanente et non plus dâune maladresse ou dâune inattention.
Dans mon cheminement, je nâai pas provoquĂ© les Ă©vĂ©nements, les choses se sont faites dâelles-mĂȘmes. Elles se sont, Ă un moment donnĂ©, imposĂ©es avec une Ă©vidence incontournable.
Lâeffet de mode, lâambiance syncrĂ©tiste, la marchandisation et le pouvoir castrateur de certaines personnes et/ou associations ne reprĂ©sentent certes pas le contexte le plus propice, ni pour le dĂ©veloppement et la maturation des diffĂ©rentes phases de lâapprentissage, ni pour lâĂ©mergence dâĂȘtres authentiques capables de (se) crĂ©er.
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Lâacquisition de la technique en taijiquan et en calligraphie rĂ©pond aux mĂȘmes exigences : la progressivitĂ© de la mĂ©thode, la difficultĂ© de coordonner le tout et les parties, lâorientation dans lâespace, la rĂ©fĂ©rence au modĂšle choisi, la nĂ©cessitĂ© de la pratique rĂ©guliĂšre, la recherche et lâexpĂ©rimentation des diffĂ©rents paramĂštres du mouvement, le maintien dâune attention vigilante en toutes circonstances. Dans ces deux disciplines, la maĂźtrise de la technique remplit lâĂ©lĂšve dâune joie intense. Il rĂ©alise quâil a acquis non pas un simple savoir-faire, mais un pouvoir nouveau quâil apprendra Ă utiliser dans lâĂ©tape suivante.
LâĂ©tude des oeuvres/formes de diffĂ©rents styles reprĂ©sente une suite dâimprĂ©gnations qui fĂ©condent peu Ă peu la substance du pratiquant. En se conformant aux formes qui lâinforment, il se transforme. En sâoubliant et en se perdant, il se trouve. Le vieil homme (lâaspect extĂ©rieur, superficiel) meurt et lâhomme nouveau (lâĂȘtre profond) naĂźt.
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Les similitudes entre la posture du corps du calligraphe et celle du pratiquant de tai chi chuan sont interpellantes : quoi de plus normal lorsque les fondements (la tradition chinoise et ses classiques), les exigences techniques (geste naturel, libĂ©rĂ© et vivant pour mieux occuper lâespace) et les finalitĂ©s (obtention du gong fu, câest-Ă -dire connaissance et maĂźtrise de soi au travers de la connaissance et de la maĂźtrise de lâart) sont identiques.
Le calligraphe doit avoir la possibilitĂ© de partir Ă nâimporte quel moment dans nâimporte quelle direction et donner Ă lâĂ©lĂ©ment quâil trace nâimporte quel calibre, nâimporte quelle modulation : sa libertĂ© de mouvement doit ĂȘtre maximale. De lĂ dĂ©coulent la façon dâutiliser le corps et les rĂšgles du positionnement. Les mouvements qui dĂ©placent le pinceau dans lâespace Ă©manent du tronc en passant par lâĂ©paule. Afin de donner au torse un socle large et solide, les jambes sont Ă©cartĂ©es et les pieds plantĂ©s de part et dâautre de lâaxe central.
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Certains Ă©lĂšves Ă©prouvant des difficultĂ©s dans lâapprentissage du tai chi chuan disent spontanĂ©ment : « câest du chinois ». Cela peut ĂȘtre compris et interprĂ©tĂ© Ă deux niveaux. Tout dâabord, ils se rendent compte de la distance qui sĂ©pare lâOrient de lâOccident : deux conceptions du monde, deux visions de lâĂȘtre humain fondamentalement diffĂ©rentes.
Ils mesurent ainsi la difficultĂ© de pĂ©nĂ©trer dans un systĂšme Ă©laborĂ© sur dâautres bases. En outre, lâexpression « câest du chinois » comparerait les difficultĂ©s rencontrĂ©es dans lâapprentissage des gestes du tai chi chuan Ă celles rencontrĂ©es dans lâĂ©tude de la langue chinoise. Cette mĂ©taphore spontanĂ©e et rĂ©currente est non seulement trĂšs rĂ©vĂ©latrice, mais aussi trĂšs instructive.
Afin dâexpliquer mon approche mĂ©thodologique et pĂ©dagogique, jâai souvent comparĂ© lâĂ©tude et la pratique du tai chi chuan Ă lâĂ©tude et Ă la pratique dâune langue, et ce sur trois plans :
âą La structuration et lâarticulation des matiĂšres ;
âą Les Ă©tapes dans la progression ;
âą La question de la traduction et de lâinterprĂ©tation.
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La structure de ma pensĂ©e et de ma personnalitĂ© ainsi que les alĂ©as de la vie mâont toujours amenĂ© Ă ĂȘtre dans lâentre-deux : entre lâOrient et lâOccident, entre tradition et modernitĂ©, entre pratique corporelle et philosophie. Câest cette pratique de lâentre-deux qui mâa amenĂ© Ă lâĂ©laboration de la mĂ©thode tai chi.
La mĂ©thode est ce qui apprend Ă apprendre, son objectif est dâaider Ă penser par soi-mĂȘme pour mieux rĂ©pondre aux dĂ©fis de la complexitĂ© de la vie. La mĂ©thode, mĂȘme si elle comprend des mĂ©thodologies, ne se rĂ©duit pas Ă des recettes techniques. Si certains segments sont programmĂ©s, une large place est rĂ©servĂ©e Ă la dĂ©couverte, Ă la stratĂ©gie et Ă la crĂ©ativitĂ©. La mĂ©thode, comme son Ă©tymologie grecque lâindique, est une voie.
La mĂ©thode tai chi plutĂŽt que dâutiliser des modĂšles particuliers et contingents propres Ă une culture se focalise davantage sur les zones de concordances : lâaxe, le centre, la sphĂšre, la spirale, la triade matiĂšre/souffle/esprit.
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Beaucoup dâenseignants restent assez flous sur leur propre formation, titres et parcours tandis que dâautres se cachent derriĂšre ceux-ci.
Quel est le parcours de lâenseignant ? Qui est-il ? A-t-il quelque chose Ă transmettre ? PossĂšde-t-il les aptitudes et les moyens de transmettre ? A-t-il la volontĂ© de le faire ? Quâest-ce qui anime sa dĂ©marche ? Pourquoi transmet-il ? Quelle est la mission quâil sâest donnĂ©e ? Vend-il des enchaĂźnements de tai chi chuan ? Les vend-il dans un emballage exotique ? Culturel ? ⊠ou aide-t-il des ĂȘtres humains Ă se tenir debout et Ă se mettre en marche (au sens propre comme au sens figurĂ©) ? Lâenseignant explique-t-il les principes posturaux ? Veille-t-il aux alignements corporels, particuliĂšrement au niveau des genoux ? PrivilĂ©gier des postures trop basses peut avoir des consĂ©quences au niveau des articulations. Les diffĂ©rentes facettes de lâart sont-elles transmises ? On peut dĂ©buter par la pratique de santĂ© et puis progressivement ĂȘtre intĂ©ressĂ© par les mains collantes ou par la dimension initiatique. -
Quâest-ce que le tai chi chuan ? : Une gymnastique douce, une mĂ©thode de santĂ©, une mĂ©ditation en mouvement, un art martial? Une pratique effectuĂ©e avec un regard critique amĂšnera rapidement dâautres questions :
Est-ce rĂ©ellement si doux ? En effet, si lâon demande de dĂ©tendre lâextĂ©rieur, le dĂ©veloppement de la force interne nĂ©cessite de maintenir et dâunifier la structure par le tonus des muscles profonds. Les effets du tai chi chuan se limitent-ils au niveau prĂ©ventif ou dĂ©bordent-ils parfois dans le domaine curatif ? Le tai chi chuan pratiquĂ© en tant que mĂ©ditation amĂšne-t-il lâĂ©veil ou lâendormissement ? La pratique martiale se rĂ©duit-t-elle Ă lâefficacitĂ© extĂ©rieure ? Ou bien lâefficacitĂ© extĂ©rieure reflĂšte-t-elle une pratique intĂ©rieure ?Si nous considĂ©rons comme le philosophe Alain quâune idĂ©e est fausse Ă partir du moment oĂč lâon sâen contente, nous devons donc admettre que le questionnement est inhĂ©rent au cheminement.
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Pour moult dâOccidentaux pratiquant le tai chi chuan, la comprĂ©hension reprĂ©sente une Ă©tape indispensable entre le savoir (domaine de la matiĂšre) et la connaissance (domaine de lâesprit). Beaucoup de nos contemporains rĂȘvant Ă une spiritualitĂ© facile sont sĂ©duits par un taoĂŻsme superficiel. Au nom dâune harmonie avec la nature, ils confondent souplesse et mollesse, libertĂ© et laxisme.
La quasi-totalitĂ© des auteurs dĂ©veloppe largement lâinfluence du taoĂŻsme dans lâĂ©laboration du tai chi chuan et personne ne mentionne les apports du confucianisme. Je suis de plus en plus convaincu que cet art du geste, dans les premiĂšres annĂ©es de sa pratique, dĂ©veloppe principalement des qualitĂ©s confucĂ©ennes : lâapprentissage, le sens de lâhumain et lâesprit rituel.
Nombre de pratiquants nâont dâailleurs jamais vraiment accĂšs Ă la dimension taoĂŻste : ils en sont toujours Ă lâapprentissage des techniques, Ă dĂ©velopper leur Ă©thique et Ă pratiquer des formes, câest-Ă -dire des rituels.
Lorsque la technique maßtrisée est dépassée et transcendée, alors nous expérimentons la spontanéité et la liberté propres au taoïsme.
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Comprendre, câest Ă la fois contenir en soi, englober, inclure, incorporer mais, aussi percevoir le sens de, dĂ©chiffrer, traduire, interprĂ©ter. Câest dâabord accepter et puis creuser en faisant appel aussi bien Ă lâanalyse quâĂ lâintuition. Faire comprendre, câest montrer et dĂ©montrer.
Incorporer : quâest-ce que le taijiquan, sinon un travail dâintĂ©gration, dâincorporation ? Lâobjectif est dâincarner dans sa chair et dans son sang le principe de la coĂŻncidence des contraires, de faire vivre et de donner corps et forme Ă notre pensĂ©e.
Traduire, interprĂ©ter : la vĂ©ritable comprĂ©hension ne peut se limiter au simple fait de (re)copier. Il faut ĂȘtre capable de sâoublier pour copier les modĂšles et puis dâoublier les modĂšles pour se retrouver. Il faut ĂȘtre capable dâoublier son formatage culturel pour traduire et puis ĂȘtre capable de se le rĂ©approprier pour interprĂ©ter. Sans traduction, ni interprĂ©tation, le taijiquan se rĂ©duit Ă une caricature. Il nâest quâun article de plus dans le grand rayon des nouvelles recettes de bien-ĂȘtre.
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Les 109 épisodes précédents proposent de se familiariser avec les différentes facettes du tai chi chuan et des arts internes. Ils mettent l'accent sur la maniÚre dont ces pratiques peuvent nous aider à mieux gérer les multiples crises et défis en ouvrant d'autres possibles.
Les prochains épisodes proposent d'approfondir le taijiquan. Ils nous invitent à aller plus loin. Ils suivent la trame d'un de mes ouvrages publiés en 2010 : Comprendre le taijiquan. Les différentes thématiques de ce livre seront reprises, expliquées, complétées.
Depuis ma plus tendre enfance, je me suis toujours interrogĂ© sur le mode de fonctionnement des choses. Lors de mes sĂ©jours en ExtrĂȘme-Orient, je me suis immergĂ© dans cette culture autre. Enseigner Ă des Occidentaux les arts traditionnels Ă©tudiĂ©s lĂ -bas demande un travail dâintĂ©gration et de rĂ©interprĂ©tation.
Cela mâa permis dâĂ©laborer diverses stratĂ©gies dâapprentissage, de vĂ©rifier leur efficience dans des contextes trĂšs diffĂ©rents et de mettre en Ă©vidence certaines clĂ©s facilitant lâaccĂšs Ă une comprĂ©hension vĂ©ritable.
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