Afleveringen

  • À Madagascar, plus de 90% de la population utilise le charbon de bois comme principale source d'énergie domestique. Pour lutter contre la déforestation, une ONG suisse, ADES, a créé en 2010 un modèle de cuiseur, en métal et argile, plus économe en charbon. Aujourd'hui, ce foyer amélioré a fleuri partout sur le territoire. Mais d'autres produits innovants, comme les cuiseurs solaires, n'ont jamais conquis le cœur des Malgaches.

    De notre correspondante à Antananarivo,

    C'est un joyeux vacarme qui règne dans la salle de production des cuiseurs portatifs ADES. « Ça, c'est le seau métallique pour contenir l'argile des foyers améliorés, expliqueAlain Wasserfallen, le directeur d'ADES. Ces seaux sont produits de façon conique pour pouvoir les empiler, parce qu'il faut les transporter. »

    Ici, tout est fait à la main, de façon mécanique, pour parer aux délestages extrêmement fréquents. L'usine de Tuléar est l'un des trois sites de production du pays et alimente l'essentiel de l'île en « fatapera » amélioré – le nom malgache pour désigner le réchaud.

    Moitié moins de combustible

    Reconnaissables entre mille grâce à leur couleur verte, ils sont vendus partout, même dans les zones les plus reculées. Aussi loin qu'il s'en souvient, Bruel, chauffeur de taxi à Tuléar, a toujours vécu avec ce foyer amélioré chez lui. « Ça nous aide à moins gaspiller de charbon, explique-t-il. Avec le fatapera en fer, on ajoute du combustible à chaque fois qu'on veut cuire quelque chose. Mais avec le fatapera ADES, l'argile garde la chaleur, et donc, pas besoin de mettre de combustible à chaque cuisson. À l'achat, c'est trois ou quatre fois plus cher que le fatapera en fer, mais c'est rentable. »

    Le fatapera ADES est rentable sur la durée parce qu'il nécessite moitié moins de combustible pour fonctionner que le fatapera ordinaire. Et dans une île où les forêts ont diminué de 40% ces 20 dernières années, selon le Global Watch Forest, faire baisser la consommation de charbon est une vraie bataille.

    Réchaud solaire trop lourd

    Mais tous les produits ADES, aussi efficaces soient-ils, n'ont pas obtenu le même succès. À commencer par les cuiseurs solaires, pourtant très adaptés au climat de Madagascar. « Le faible volume des ventes des cuiseurs solaires, par rapport au foyer amélioré à charbon de bois, nous montre que ça ne prendra pas sous la forme actuelle, reconnaît Alain Wasserfallen. Si les parents vont tous les deux travailler aux champs, ils ne vont pas emporter un four solaire ou une parabole solaire, avec eux : c'est lourd ! Donc, il faut se remettre en question. Faire de l'aide au développement, ça ne veut pas simplement dire prendre une idée géniale dans un pays développé et essayer de la faire accepter dans un pays en développement. Il faut pouvoir s'adapter aussi aux habitudes locales, au contexte culturel. »

    Le défi est encore énorme pour offrir une solution adoptable par tous et qui réduise drastiquement la coupe de bois sur le territoire. Aujourd'hui, on estime qu'un ménage malgache consomme 90 kilos de charbon par mois.

  • Au Congo-Brazzaville, les zones agricoles protégées, lancées par le gouvernement en 2021 pour diversifier l'économie, commencent à devenir une réalité. À Bouansa, dans le sud du pays, la zone agricole protégée est consacrée à la culture du maïs. Et la première récolte de l'année 2025 commence.

    Dans la plaine de Bouansa, les paysans de la zone agricole protégée, tous de vert vêtus, observent le travail de la moissonneuse-batteuse sur près de 60 hectares de maïs. La superficie, étendue, a été cédée par l'État congolais aux agriculteurs de la région pour qu'ils y plantent la céréale. L'un d'eux, Alain Roger Mabika, a été désigné président de la zone agricole protégée. Il espère que les rendements progresseront avec les années :

    « Ici, nous n'avons produit que le maïs, rien d'autre que le maïs. Quant à l'estimation, tel que je vois là, on peut dire que par hectare, nous avons au moins trois tonnes. Si nous prenons trois tonnes par hectare, ça veut simplement dire que nous devons donc nous retrouver avec 180 tonnes. Pour nous, c'est une façon d'aider ceux qui font de l'industrialisation. »

    Après la récolte, le maïs est stocké dans un endroit bien protégé. Il sera ensuite vendu aux sociétés brassicoles et aux éleveurs qui en manquent souvent. À ce jour, les importations d'alimentation humaine et animale sont évaluées à 600-700 milliards de francs CFA.

    Les zones agricoles protégées, un soutien pour les locaux

    Près de 300 agriculteurs ont planté du maïs à Bouansa. « Nous produisons beaucoup ici. Nous ne sommes pas des fainéants. Avec la main, nous travaillons. Nous avons vraiment de la bonne production », affirme un cultivateur. « On plante le maïs pour nous soutenir. Ça nous aide et ça nous donne de l'argent », ajoute une cultivatrice.

    Les zones agricoles protégées ont déjà commencé à produire du manioc, des bananes, des tomates et du riz, dans d'autres régions du Congo-Brazzaville. Ce dont le président de la République s'est félicité à Bouansa. « Merci de la façon dont vous avez suivi l'initiative lancée lors de la campagne électorale passée. Il faut qu'au Congo, l'agriculture aille de l'avant ! », a lancé le président Denis Sassou Nguesso.

    À travers les zones agricoles protégées, les autorités espèrent lutter contre le chômage, contre la sous-alimentation et diminuer la facture des importations alimentaires.

    À lire aussiCongo-Brazzaville: des zones agricoles protégées pour assurer l'autosuffisance alimentaire

  • Zijn er afleveringen die ontbreken?

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  • Au Sénégal, les comptes du pays sont dans le rouge après la révélation d’une dette cachée de 7 milliards de dollars laissée par le régime de Macky Sall. Le Trésor public sénégalais a lancé une levée de fonds de 150 milliards de FCFA auprès des populations sur le marché des titres de l’UEMOA fin mars, avec pour objectif trouver des sources de financements pour réaliser l’ambitieux programme du président.

    « Saisissez une opportunité d’investissement sécurisé avec l’État », pouvait-on lire sur les téléphones des clients de la Société générale au Sénégal ces dernières semaines. L’opération en question est une levée de fonds de 150 milliards de FCFA du Trésor sénégalais par appel public à l’épargne. Devant une banque du centre-ville, beaucoup de Dakarois sont séduits par l’idée de prêter de l’argent à l’État. « Si c'est pour aider, il n'y a pas de problème, c'est le patriotisme. Donc, je le ferai volontiers », assure Abdourahmane Sow, standardiste de profession.

    Cette levée de fonds intervient alors que la dette atteint plus de 100% du PIB, 25 points de plus que ce qui avait été avancé par le régime sortant. Pour Charles, chauffeur coursier, cela fait une raison de plus pour investir dans ces bons : « C'est l'ancien régime qui nous a mis dans cette situation. Mais pas le régime actuel. Nous savons tous que le Sénégal traverse des moments difficiles. Et c'est à nous, la population, de pouvoir soutenir ce nouveau pouvoir, pour qu'on aille de l'avant. »

    Les taux d’intérêt vont de 6,40 à 6,95% et les bons sont à 10 000 FCFA l’unité, mais Yela Ba qui travaille dans la logistique ne voit pas l’intérêt pour les particuliers. « Je me dis que peut-être, pour un million de FCFA, le rendu sur trois ans n'est pas vraiment intéressant pour moi, estime-t-il. Maintenant, je me dis que peut-être pour ceux qui ont un gros capital, ça peut les intéresser. Moi, je vais passer mon tour. »

    Trouver des ressources, faire des économies

    L’État sénégalais a souvent recours à ce type d’emprunt, mais la situation est particulièrement tendue aujourd’hui. Après les révélations de la Cour des comptes, la note du Sénégal a été abaissée deux fois par l’agence de notation Moody’s et le programme du FMI suspendu. Il faut donc diversifier les sources de financement. « C'est sûr que l'emprunt extérieur demanderait des taux de plus en plus élevés parce que les bailleurs de fonds, les investisseurs vont prendre en charge effectivement les situations risquées. Donc, en passant par les marchés de l'UEMOA, par les marchés des titres publics, l'État peut bénéficier de ressources longues », analyse Abdou Khadre Dieng, professeur d’économie à l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar.

    Pour Elimane Haby Kane, du think tank Legs Africa, un emprunt obligataire ou même la négociation d’un nouveau prêt avec le FMI ne sont pas les stratégies les plus soutenables pour redonner des moyens à l’État. Des économies pourraient sans doute être faites « sur des lignes qui existaient déjà sur des types d'investissements qui n'étaient pas très efficients » pour l'État et ainsi lui permettre de « souffler un peu ». L’opération a été un succès. Une semaine avant la fin, plus de 400 milliards de FCFA avaient été collectés et la levée de fonds clôturée. La première phase du programme du président Bassirou Diomaye Faye pour la période 2025-2029 a été chiffrée à 18 000 milliards de FCFA, soit plus de 28 millions d’euros.

  • La zone de libre-échange continentale africaine, la Zlecaf, est-elle en mesure d’atténuer l’impact des taxes Trump sur les marchandises africaines ? Le commerce intra-africain a rebondi de 8 % l'an dernier pour atteindre 208 milliards de dollars, mais les pays du continent ne commercent entre eux qu’à hauteur de 15 % de leurs échanges. Ils gagneraient pourtant, selon les experts, à accélérer la mise en œuvre de cette zone de libre-échange continentale, entrée en vigueur il y a plus de quatre ans.

    La zone de libre-échange continentale africaine, la Zlecaf, est encore loin d'être un marché de substitution pour les produits africains surtaxés par les États-Unis. Sur la cinquantaine de pays africains signataires de l'accord de libre-échange continental, seuls huit l'ont réellement mis en œuvre, et sur une poignée de produits qui seront à terme débarrassés de taxes.

    « Vous avez le Cameroun qui a commencé à lancer une cargaison de thé, observe Benjamin Allahamné Minda, chercheur en droit international à l'université Lyon 3. Vous avez le Kenya avec des piles. Vous avez le Rwanda avec le café instantané. Vous avez le Ghana, l'Afrique du Sud avec quelques produits manufacturés. Ils ne sont pas encore nombreux. Cette volonté, elle, est toujours conditionnée à la capacité des pays à se spécialiser sur des chaînes de valeur utiles pour les autres pays africains. Je pense qu'on peut se dire qu’à l'horizon 2030-2040, cela peut commencer à fonctionner. »

    Aluminium du Cameroun en Algérie

    Les obstacles, en particulier l'insuffisance des infrastructures, ne doivent pourtant pas empêcher de tirer profit de la Zlecaf dès aujourd'hui, juge Honoré Mondomobé, enseignant à l'université de Douala. « On ne va pas attendre que toutes les routes en Afrique soient asphaltées, que tous les pays aient le meilleur système de communication pour que la zone de libre-échange se mette en place. À chaque étape, il faut en profiter, encourage-t-il. Actuellement, le Cameroun exporte des lingots d'aluminium vers l'Algérie, avec un taux de douane qui va s'annuler au bout de dix ans. Pourquoi voudriez-vous que les pays exportent vers les États-Unis ? La zone de libre-échange continentale est plus importante aujourd'hui que jamais ! », plaide-t-il.

    Moins recourir aux services américains

    La zone de libre-échange inter-africaine pourrait aussi, selon cet expert, être un outil d'indépendance vis-à-vis des États-Unis, qui achètent finalement moins de marchandises à l'Afrique (100 millions de dollars), qu'ils ne lui vendent présentement de services.

    « Il s’agit de services bancaires, de services d'ingénierie, dans le secteur pétrolier ou le secteur minier, précise Honoré Mondomobé. Si les Africains décident de ne plus leur importer de services, c'est une perte de plus de 125 milliards de dollars pour les États-Unis. D'où la nécessité de mettre en place le protocole numéro 2 de la zone de libre-échange continentale, qui permettrait aux Africains d'échanger les services intra-africains sans contingentement. »

    Une autonomie atteignable en cinq ans, selon le chercheur camerounais. L’Afrique pourrait aussi en parallèle faire davantage appel aux services indiens ou européens.

    À lire aussiAzali Assoumani: «Si on a raté l’unité politique, on ne doit pas rater l’unité économique et sociale de l’Afrique»

  • En avril, la Guinée et les pays de la Communauté Économique et Monétaire de l'Afrique Centrale (CEMAC) ont introduit de nouvelles coupures et pièces de monnaie de la Banque des États de l'Afrique Centrale (BEAC). Ces changements visent à répondre à la pénurie d'espèces et à améliorer la durabilité, mais suscitent des inquiétudes quant à leur impact économique dans ces régions.

    En ce mois d'avril, les consommateurs de plusieurs pays africains découvrent de nouvelles espèces en circulation. La Banque Centrale de la République de Guinée (BCRG) a introduit un nouveau billet de 20 000 francs guinéens, décrit comme plus fiable et moderne. Cette initiative répond principalement à la prolifération de faux billets de cette coupure.

    Un nouveau billet pour contrer la fraude

    Safayiou Diallo, économiste guinéen, exprime ses préoccupations face à cette transition. Il souligne que la coexistence de deux types de billets de 20 000 francs sur les marchés pourrait engendrer des malentendus, notamment dans le secteur informel. « Compte tenu du fait qu'on a un secteur informel qui est très développé, beaucoup de personnes risquent d'interpréter comme quoi ces nouvelles coupures sont celles qui seront utilisées désormais dans les transactions et que les anciennes risquent de ne pas trop passer. Moi, c'est quelque chose qui m'inquiète en tant que tel », déclare-t-il.

    La BCRG précise que ce nouveau billet n'a pas pour objectif d'injecter plus d'argent dans l'économie, mais simplement de remplacer les billets usés et trafiqués. Cependant, Safayiou Diallo met en garde contre les risques de dévaluation et d'inflation. « Ce qui soutient la valeur d'une monnaie, c'est la production. Lorsque la production ne suit pas, la monnaie est mise de trop, au risque d'avoir des conséquences inflationnistes. Et tout le monde sait que l'inflation a des conséquences néfastes, notamment la perte du pouvoir d'achat », explique-t-il.

    Pièces de la BEAC : un risque d'inflation

    Parallèlement, la Banque des États de l'Afrique Centrale (BEAC) a lancé une nouvelle gamme de pièces pour répondre à la pénurie d'espèces. Neuf nouvelles pièces, allant de 1 à 500 francs CFA, ont été mises en circulation dans les six pays membres de la CEMAC, avec l'introduction notable d'une pièce de 200 francs CFA.

    Alphonse Ndongo, analyste économique à Brazzaville, voit dans cette nouveauté un risque d'inflation mécanique. « C'est une bonne chose, mais seulement le revers est que cette pièce de monnaie va créer ce qu'on appelle une inflation mécanique », affirme-t-il. Il anticipe que les commerçants pourraient arrondir les prix des petites marchandises à 200 francs CFA, augmentant ainsi les coûts pour les consommateurs. « Les prix de certaines petites marchandises qui sont compris entre 150 francs CFA et 195, il y a forcément la possibilité pour certains commerçants de faire passer ces prix tout simplement à 200 francs CFA. Pour moi, cette nouveauté risque de déboucher sur des plaintes inflationnistes », ajoute-t-il.

    De plus, les nouvelles pièces, fabriquées avec un alliage différent, n'auront pas la même valeur que les anciennes, ce qui devrait réduire leur exportation vers l'Asie où elles sont prisées pour la fabrication de bijoux.

    À lire aussiAfrique centrale: la BEAC met en circulation une nouvelle gamme de pièces de monnaie

  • Premier producteur mondial de noix de cajou avec 1,2 million de tonnes en 2024, la Côte d’Ivoire transforme 30 % de sa récolte et veut porter ce pourcentage à 50 % d'ici à 2030. Des stratégies sont mises en œuvre pour atteindre cet objectif, mais le défi est de taille, face à la concurrence des acheteurs asiatiques, au manque de main-d’œuvre qualifiée et aux difficultés d’accès au financement.

    De notre correspondant à Abidjan,

    Dans l’usine Cilagri Cajou, à Vridy, en Côte d'Ivoire, les machines tournent à plein régime. Ici, la noix de cajou arrive brute avant d’être décortiquée, pelée, triée et conditionnée. En 2024, l’usine a produit 17 000 tonnes d’amandes de cajou. Mais derrière cette performance, un défi persistant subsiste : le coût de production. « Le secteur de la noix de cajou a connu des turbulences en 2022 qui ont fait que le coût de production ne permettait pas de faire face au coût des amandes sur le marché, regrette Cynthia Namoutié, directrice générale de l’usine. Donc une restructuration des équipements pour permettre de réduire le coût de production était le seul moyen de continuer à survivre. »

    Modernisation et formation

    Mais moderniser les outils ne suffit pas. Il faut aussi former les travailleurs pour piloter ces machines. « On a une main-d’œuvre disponible, mais elle manque encore de compétences, reconnaît-elle. Il y a un vrai besoin de formation pour que nos employés puissent piloter ces machines sans qu’on ait recours à des expatriés. »

    Autre enjeu de taille : les usines ivoiriennes sont en concurrence avec leurs puissantes rivales d’Asie du Sud, prêts à acheter la noix brute à des prix élevés. Malgré ces défis, la transformation locale progresse. L’an dernier, le pays a exporté pas moins de 72 000 tonnes d’amandes et compte une quarantaine d’usines actives.

    Pâte et lait de cajou

    La transformation ne s’arrête pas aux amandes brutes. Un nouveau marché émerge : les produits dérivés. « On a la transformation des noix qui donne des amandes de cajou blanches qui sont réutilisés par les acteurs de la deuxième transformation qui vont maintenant produire des pâtes de cajou, du lait de cajou, détaille Marcel Ouattara, secrétaire exécutif du groupement des industriels du cajou en Côte d’Ivoire. On peut même en faire de la farine. Aujourd’hui, on espère qu’on aura un changement dans les habitudes de consommation qui va permettre de pouvoir distribuer tous ces produits dérivés localement. »

    Exonérations fiscales

    Pour accélérer la transformation, le gouvernement multiplie les incitations. Cette année, il va donner la priorité aux transformateurs locaux pour l’approvisionnement en noix brutes. « La faveur sera donnée aux transformateurs locaux de disposer de la noix de cajou, a annoncé le ministre de l’Agriculture Kobenan Kouassi Adjoumani. C’est après que nous allons ouvrir la possibilité d’acheter des noix de cajou en vue de l’exportation dans les autres pays. »

    Autre coup de pouce : l’exonération des taxes sur les amandes transformées localement et les équipements importés. Avec ces mesures, la Côte d’Ivoire espère franchir un cap : ne plus être seulement le premier producteur mondial, mais aussi un acteur clé de la transformation du cajou.

    À lire aussiAu Sénégal, la transformation de la noix de cajou en difficulté

  • À deux jours de la présidentielle du 12 avril, huit candidats, dont le chef de la transition, Brice Clotaire Oligui Nguema, sont en lice pour un septennat à la tête du pays. Son principal adversaire, Alain-Claude Bilie-By-Nze, n’hésite pas à l'attaquer sur les sujets de gestion financière et de dette en particulier, ce qui lui vaut une réponse musclée.

    Depuis qu'il est en campagne pour le poste de président du Gabon, Alain-Claude Bilie-By-Nze lâche ses coups contre la transition, qu'il accuse de gestion financière dispendieuse et mensongère. Encore en début de semaine sur la chaîne Africa 24, il a affirmé : « Les pouvoirs publics actuels ne donnent pas la vérité. Il y a de la dette cachée, il y a de la dette intérieure non comptabilisée, de la dette extérieure vis-à-vis notamment de fonds vautour, non comptabilisée. Il y a des dettes contractées pour acquérir des parts dans des entreprises dont personne ne connait le niveau exact de l'actionnariat. » Et d'ajouter : « Il faut voir clair dans cette question d'endettement. La dette gabonaise a aussi un problème, c'est qu'on s'endette pour financer le fonctionnement. »

    Alain-Claude Bilie-By-Nze parle de 8 500 milliards de francs CFA de dettes quand, selon les chiffres du gouvernement, elle vient de descendre en dessous des 7 000 milliards de francs CFA. Selon le Fonds monétaire international (FMI), le niveau d'endettement est de 67% du PIB. Plutôt de 54%, disent les autorités qui refusent d'y inclure des arriérés comme les retraites et les soldes des fonctionnaires. Ces attaques, de la part du dernier Premier ministre d'Ali Bongo, lui valent des réponses musclées des soutiens de la transition.

    « Ceux qui se plaignent aujourd'hui ont habitué les Gabonais à des postures fallacieuses, arrogantes. Quand on a un bilan comme le leur, comme lorsque nous arrivons en septembre 2023 avec le président Oligui Nguema, et qu'il y a des échéances de dettes qui ne sont pas remboursées… Le Gabon était au ban de la communauté internationale parce qu'il ne tenait plus ses engagements internationaux », répond la ministre de la Communication, Laurence Ndong, et porte-parole du candidat Oligui Nguema. « La première chose qui a été faite a été de rembourser ces échéances de dette. On a trouvé un pays endetté à 7 500 milliards, une dette creuse pour laquelle on a vu aucune infrastructure [réalisée, NDLR]. Donc, aujourd'hui, le Gabon tient ses engagements en matière de dette. Tous nos bailleurs ont été remboursés », met-elle en avant.

    Depuis le 1ᵉʳ septembre 2023, le remboursement de la dette a absorbé 45,6% des ressources de l'État. Le Gabon a notamment réglé la Banque mondiale, malgré un retard très médiatisé. Une source au fait du dossier se dit « bien moins alarmiste qu'il y a 18 mois ». « Les grands bailleurs viendront et ils ne vont rien nous imposer », a déclaré à la télévision Brice Clotaire Oligui Nguema. Les agences de notation demeurent toutefois perplexes : l'agence Fitch a baissé sa note en janvier, inquiète particulièrement de fortes dépenses budgétaires et sociales. Elle anticipe un retour du FMI dans le pays d'ici à la fin de l'année.

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  • La France fait face à une pénurie de main d'œuvre dans un certain nombre de secteurs. Selon France Travail, l'établissement public en charge des questions de l'emploi dans le pays, les secteurs les plus en tension sont la restauration, l'agriculture, ainsi que ceux de la propreté et du soin à la personne. En 2024, six entreprises sur dix déclaraient anticiper des problèmes au recrutement. En France, 600 000 étrangers ont le statut de réfugiés et sont en droit de travailler légalement. Pourtant, ce public peine à trouver des emplois.

    Mado, de République démocratique du Congo (RDC), a obtenu son statut de réfugié il y a trois ans. Elle a fait une formation de commis de cuisine, secteur en tension. Pourtant, elle dit peiner à trouver un emploi. « C'est difficile. J'ai postulé en ligne, mais il n'y a pas de réponse », affirme Mado, qui explique avoir envoyé plusieurs dizaines de CV. « S'il y a une réponse, on me dit ''il n'y a pas de place Madame''. Je ne sais pas si c'est parce que suis Congolaise qu'ils ne veulent pas me donner de travail », désespère la quadragénaire, qui n'hésite pas à égrainer ses qualités : « Je suis motivée, je suis dynamique. Je respecte les temps. Je sais faire le travail de cuisine, préparation, je sais travailler à l'accueil… »

    À l'occasion d'un salon dédié à la recherche d'emploi pour les réfugiés, Mariam, jeune femme venue de Côte d'Ivoire, maman d'un enfant de cinq ans, sillonne les stands des hôteliers. « Jusqu'à présent, je n'ai pas encore eu de premier emploi, et là, je ne sais pas comment faire pour trouver », se désole-t-elle. À l'image de Mado, elle se questionne sur la raison de ces difficultés : « Je vais dans les ateliers, je vais dans les événements, toujours pas. Je ne sais pas si c'est parce que j'ai un enfant qu'on ne me prend pas. Je ne sais pas. »

    Malgré un profil qui semble intéresser les employeurs, la question de l'expérience bloque le processus. « J'ai travaillé quand j'étais dans mon pays. Mais ici, je n'ai jamais travaillé, donc on me demande mon expérience. Je ne sais pas, je dis ce que j'ai fait dans mon pays et que je n'ai pas d'expérience en France, détaille Mariam. S'ils me demandent une expérience que je n'ai pas... Il faut me donner un boulot, comme ça, j'aurais de l'expérience ! »

    Lourdeurs administratives, et filtres discriminants ?

    Comme beaucoup, elle fait également face aux lourdeurs administratives. Elle a obtenu son statut de réfugié et dispose d'un récépissé faisant foi. Mais pas encore le document définitif, ce qui rend réticents certains employeurs. « C'est très long et France Travail n'arrête pas de me mettre la pression. Quand j'explique, eux, ils ne comprennent rien, mais ils veulent me mettre la pression », témoigne-t-elle.

    Des difficultés à trouver un emploi pour les personnes peu qualifiées, mais aussi chez celles ayant des diplômes supérieurs. Les équivalences de diplômes ne sont pas toujours reconnues. Mamadou est de Guinée, diplômé dans le milieu bancaire. « On peut postuler, mais souvent, il n'y a pas d'entretien derrière », fait-il savoir. Car en plus des problématiques de diplômes, celle de l'automatisation des processus de sélection pose également problème.

    « Le plus compliqué, c'est comment trouver un entretien, comment passer les filtres. Aujourd'hui, comme beaucoup de recrutements sont automatisés, si on n'envoie pas le bon format de CV, le système informatique refuse automatiquement, alors qu'on a tout à fait les qualifications », regrette-t-il. Une situation qui pousse un grand nombre de réfugiés à accepter un emploi sous leur niveau de qualification. Une étude de l'Institut français des relations internationales estime qu'il leur faut en moyenne dix ans pour retrouver un travail à la hauteur de leur diplôme.

    À lire aussiFrance: un salon de l'emploi pour les réfugiés

  • À l'heure du protectionnisme économique, de nombreux gouvernements africains privilégient le contenu local : transformer sur place les matières premières d'un bout à l'autre de la chaîne de valeur. C'est le cas du Bénin, premier producteur de coton sur le continent qui a bâti une vaste zone industrielle, la zone industrielle de Glo-Djigbé ()GDIZ. On y fabrique notamment du textile, en partant du coton brut jusqu'au produit fini.

    Au cœur de la zone économique spéciale de Glo-Djigbé, à une quarantaine de kilomètres au nord-ouest de Cotonou, la capitale du Bénin, les machines à coudre tournent à plein régime. Dans cet atelier moderne et bien éclairé, des centaines de jeunes hommes et de jeunes femmes sont formés aux métiers du textile. « Passionnée de couture », Claudia Phoebe Kiki, qui habite à Glo-Djigbé, explique avoir réussi un test de recrutement pour vérifier la qualité de sa vue, la rapidité de ses mains. Elle travaille sur la ligne avec laquelle sont fabriqués les polos Lacoste, au niveau des épaules. Elle se dit « heureuse » de pratiquer ce travail à la chaîne.

    Kiabi au Bénin plutôt qu'en Chine ?

    Une véritable course de relais pour fabriquer chemises, t-shirts ou toutes sortes de vêtements commandés par de grandes marques internationales comme Kiabi, The Childrens Place ou encore Gemo. « Nous recevons les commandes des bailleurs en fonction des documents qu'ils nous présentent, explique Adankpo Debora Christa, chargée de marketing et merchandising. Nous suivons à la lettre ce qu'ils nous demandent : le tissu, les boutons, le fil. Il y a un département dans lequel nous faisons les échantillons qui sont envoyés au bailleur afin qu'il puisse valider ce que nous avons fait avant qu'il passe commande. Ici, chaque couture, chaque étiquette est vérifiée. Est-ce que c'est bien placé ? Est-ce que les fils ne sont pas sautés ? Est-ce que le vêtement est propre ? S'il y a une erreur, il y a des flèches pour montrer l'endroit où il y a le défaut. » À l'entrée de chaque ligne de production, un panneau indique les résultats de performance. « Kiabi, ils avaient l'habitude de commander en Chine et autres, mais maintenant, ils commandent chez nous », raconte fièrement la jeune femme.

    Firdaous Moussa, 26 ans et originaire de Cotonou, travaille, elle aussi, au département marketing en tant qu'assistante. Titulaire d'une licence en commerce international, elle a été informée par une « connaissance » du projet de la GDIZ. « Chaque jour, c'est toujours plus impressionnant de venir ici et de voir ce qui se passe. Et le fait de se dire que c'est dans mon pays que ça se passe, cela me pousse à me donner encore plus », témoigne-t-elle.

    En amont de la confection, on trouve plusieurs ateliers dans ce parc textile qui tisse sa toile d'année en année : teinture, tricotage et filature. Dans un autre bâtiment géré par la société Bénin Textile, le département de spinning chargé de transformer la fibre de coton brut en fils. « À chaque niveau, dès la réception du coton passé par l'égraineur, une équipe prélève des échantillons pour vérifier la couleur, la qualité du coton », explique Valère Houndete, superviseur de production embauché depuis deux ans. Et d'expliquer : « ​​​​​​​À chaque étape, nous vérifions si les attentes sont satisfaites avant de continuer la transformation. »

    Objectif : exporter en Europe et aux États-Unis

    Produire du textile 100% made in Bénin, c'est l'objectif du premier producteur continental de coton, mais dont seulement 12% des stocks sont transformés sur place. La GDIZ serait capable de transformer 40 000 tonnes de fibres de coton par an. Yemi Ahouanmenou, directeur général adjoint de Bénin Textile SA, annonce que l'idée est de développer des produits de linge de maison, draps et serviettes, pour couvrir les marchés européens et américains : « Nos concurrents principaux sont au Bangladesh, au Pakistan, en Inde. Le fait de pouvoir traiter la matière première ici au Bénin nous permet de créer de l'emploi. »

    Le dirigeant affirme que 3 000 jeunes sont déjà formés et qu'à terme, lorsque deux autres unités seront opérationnelles, ce seront plus de 15 000 personnes qui seront employées. Mais en termes de coûts de production, comment lutter à armes égales avec les géants asiatiques ? « En termes de coût, nous sommes à peu près à égalité avec nos concurrents asiatiques dans une marge de 5 à 10%, estime Yemi Ahouanmenou. Mais notre gros avantage est le gain de temps lors du transport maritime jusqu'au marché final. La position géographique du Bénin (10 à 15 jours de délai pour l'Europe) nous offre une position stratégique » pour atteindre les marchés occidentaux, assure-t-il.

    Reste le nouveau contexte commercial compliqué par les augmentations de droits de douane décidées par Donald Trump. La GDIZ a commencé à exporter des vêtements vers les États-Unis dès 2023 pour la marque The Children Place. Fin 2024, ce sont des articles de la marque U.S. POLO ASSN qui ont commencé à être écoulés dans le monde. La GDIZ, née d'un partenariat public privé entre l'État béninois et la société Ariise IIP – qui développe des zones économiques spéciales dans plusieurs pays africains – cherche plus que jamais à attirer de nouveaux investisseurs.

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  • Le coton africain est une source de devises et d'emplois pour le continent, avec 20 millions de producteurs et plus de 20 000 productrices. Vingt ans après la création de l'Association des producteurs de coton africains (Aproca), il est temps d’évaluer le chemin parcouru. Les producteurs de coton l'admettent volontiers, il faut changer de stratégie face aux difficultés pour accroître la production.

    De notre correspondant à Lomé,

    L'Afrique produit trois millions de tonnes de coton par an, cela dans des conditions encore rudimentaires. Les producteurs ne maîtrisent pas les prix sur le marché, déplore le président de l'Association des producteurs africains de coton (Aproca), le Togolais Koussouwè Kourouféi :

    « Nous, les producteurs de coton africains, on est preneur du prix à l'international. Les grands producteurs, ce sont eux qui fixent les prix, et l'Afrique minoritaire est obligée d'accepter les prix qu'ils proposent. Malgré la qualité de notre coton, récolté à la main, on est obligé d'accepter. »

    Surface en baisse au Togo

    S'ajoutent à cette situation les insectes ravageurs qui attaquent les champs et les effets du changement climatique qui réduisent considérablement les surfaces cultivables. « La pluviométrie est contre nous au moment des semis, explique Padibalaki Péguédou, coordonnateur de la Fédération nationale des producteurs de coton au Togo. Quand les moments des semis commencent, la pluie est en manque. Or, le producteur est enclin à l'adaptation. Et donc, on a une diminution considérable des superficies. »

    L'année dernière, par exemple, les prévisions de 75 000 hectares ont été revues à la baisse à cause de la pluviométrie au Togo. Et selon le coordonnateur, il n'est pas certain que la barre des 65 000 hectares soit atteinte cette année. Une réalité qui touche les 15 pays producteurs d'or blanc.

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    Aller vers l'irrigation ?

    Il faut donc changer de stratégie, selon le président de l'Aproca. « Le changement climatique joue sur la production et nous pensons que pour remédier à ce phénomène de changement climatique, il nous faut aller vers l'irrigation et produire le coton à contre-saison », préconise Koussouwè Kourouféi

    Malgré les réformes et les appuis de partenaires, le chemin reste encore long pour améliorer les conditions de travail et accroître la production. L'Aproca va commémorer ses 20 ans de collaboration par un plaidoyer à Garoua, au Cameroun, fin avril. Les membres décideront d'un nouveau plan stratégique pour les années à venir.

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  • En Tunisie, après l’entrée en vigueur d’une loi réglementant davantage l’usage des chèques début février, leur usage a considérablement chuté. Moins 94 % selon les chiffres de la Banque Centrale alors qu’ils représentaient 53 % des échanges en 2024. Cette nouvelle loi a de fait un impact sur l’économie. Les chèques étaient, pour la plupart des commerçants, entrepreneurs et particuliers, un moyen de garantie et non de paiement, pour faire face à un manque de trésorerie ou de liquidité récurrent.

    Hedi Sefi, 57 ans, entrepreneur en bâtiment, supervise son chantier en banlieue de Tunis. Beaucoup de ses autres chantiers sont à l’arrêt à cause de la nouvelle loi sur les chèques entrée en vigueur en Tunisie début février. « J’avais vraiment l’habitude de travailler avec l’ancien système, car ni les propriétaires de la maison que je construis, ni moi, ni mes fournisseurs n’avions assez de liquidité pour tout payer d’un coup, explique-t-il. Donc, c’était un système de confiance où chacun donnait des chèques comme garantie ou caution et cela nous permettait d’avancer dans le chantier. Mais là avec le nouveau système, il faut de l’espèce tout de suite sinon ce n’est pas possible et du coup ça impacte tout le monde. »

    Avec la nouvelle loi, Hedi peut encore demander un chéquier, mais il sera plafonné selon sa solvabilité, avec des chèques ayant une date d’expiration et un QR code pour assurer leur traçabilité. « J’ai fait une demande à ma banque, et ça n’a pas abouti, tout simplement parce que je n’ai pas assez d’argent sur mon compte, comme la majorité des Tunisiens », constate-t-il, résigné.

    Pour les victimes de ces sanctions comme Abdelkrim, la nouvelle loi est un soulagement. « Vous ne pouvez pas savoir à quel point je suis content de cette loi, parce qu’avant, vous aviez des gens qui traitaient leur carnet de chèques comme un moyen de crédit et qui les distribuaient partout pour payer, sans avoir l’argent derrière quand le chèque était encaissé », détaille ce menuisier dans l’aluminium qui parle en connaissance de cause. « J’en ai fait partie, je suis d’ailleurs interdit de chéquier depuis des années et ça m’a bien gâché la vie », regrette-t-il.

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    « Est-ce qu’on a trouvé un financement qui donne la sécurité au créancier et au débiteur ? »

    Ce nouveau système a été instauré pour lutter contre le phénomène des chèques sans provision, puni de lourdes peines de prison, mais très répandu en Tunisie. La Fédération des artisans et des petites et moyennes entreprises défend aussi la loi, car beaucoup d’entrepreneurs ont fait faillite à cause de chèques sans provision. « Là, j’ai devant moi tous les chèques qui me sont revenus impayés. En tout, j’ai plus de 100 000 dinars qui ne m’ont pas été payés, vous vous rendez compte de ce que ça fait à une entreprise ? », interroge Mohsen Bourchada, trésorier de l’association et également directeur d’une entreprise de cosmétiques.

    Pour Louai Chebbi, de l’ONG Alert qui traite de corruption et de problèmes économiques, même si la nouvelle loi vient pallier un vrai problème, les Tunisiens manquent d’alternative actuellement pour remplacer l’ancien système. « Le problème du chèque n’était pas un problème de moyen de paiement, mais un problème de financement, estime-t-il. Est-ce qu’on a trouvé un financement moderne, est-ce qu’on a trouvé un financement qui donne la sécurité au créancier et au débiteur ? Non, aujourd’hui, il n’y a pas de solution moderne qui puisse faciliter les échanges des Tunisiens entre eux dans l’économie. » Beaucoup de Tunisiens ont encore du mal à s'adapter au nouveau processus. Le taux d’adhésion à la nouvelle plateforme Tunichèque n’a pas dépassé pour le moment les 4,7 % parmi les comptes éligibles.

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  • Près de 25 millions de deux roues motorisés circulent en Afrique dont 30 000 motos électriques. Un marché à 90 % entre les mains d’un acteur : Spiro. L’entreprise s’est développée à partir du Togo et du Bénin et elle vend désormais au Kenya, en Ouganda, au Rwanda et au Nigeria.

    Les deux dernières années ont été consacrées à améliorer les modèles de motos électriques et leur prix, explique Kaushik Burman, le PDG de Spiro. « Si vous voulez réussir dans ce domaine, vous devez vraiment proposer des produits abordables et des produits robustes, parce qu'en Afrique, les terrains sont très difficiles. Le Rwanda a des pentes raides, de 18 degrés. L'Ouganda a des routes cahoteuses. Il faut donc des motos de très grande qualité, mais à un prix abordable, moins cher qu'une moto à essence. Aujourd'hui, nous y sommes parvenus », assure-t-il.

    600 stations d’échange de batteries

    Dans ce modèle économique, le client n’achète que la moto. La batterie, Spiro l'échange dès qu'elle est à plat et l'entreprise est donc devenue un fournisseur d'énergie. « Nous avons dépassé les 17,5 millions d'échanges de batteries aujourd'hui. Cela montre à quel point nous avons progressé au cours des 20 derniers mois, se félicite Kaushik Burman. Nous avons environ 600 stations d'échange de batteries actives. »

    Ce maillage met fin à l'anxiété sur l’autonomie de la moto électrique, pour un coût inférieur au carburant d'une moto thermique, reconnaît Yao Amedokpo. Mais selon ce spécialiste des mobilités urbaines et électriques à l’École des ponts et chaussées (ENPC), la maintenance est encore un problème. « Quand vous prenez l'exemple de Lomé, il n'y a qu'un seul centre de maintenance de motos qui se situe en périphérie de la ville et quand les conducteurs de motos ont des pannes en ville, parfois, il faut appeler ce centre-là pour chercher un moyen de transporter la moto et aller jusqu'au centre, et comme c'est le seul centre, il y a un temps d'immobilisation qui est assez long », explique-t-il.

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    Améliorer la maintenance

    Autre réserve du chercheur, le modèle industriel crée encore peu d'emplois en Afrique. « Pour l'instant, je n'y vois pas beaucoup de valeur ajoutée. Ce sont toujours des motos en caisse qui arrivent et qui sont assemblés par les concessionnaires à Lomé ou à Cotonou. On ne voit pas vraiment comment cela pourrait dynamiser le tissu industriel », affirme le spécialiste.

    Créer plus d'emplois

    Spiro attend des incitations publiques pour fabriquer davantage en Afrique. L'entreprise assemble déjà des pièces plus sophistiquées au Kenya, comme les moteurs et les contrôleurs des motos. Elle compte implanter dans les mois prochains des usines au Nigeria, au Rwanda et en Ouganda. Pour doper encore ses ventes, elle a choisi Davido comme ambassadeur et le partenariat avec l'artiste pourrait se renforcer.

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  • En RDC, les transporteurs congolais ont désormais le droit de transporter 50 % des marchandises à l’importation et à l’exportation. La décision prise à la fin du mois de février par le ministère congolais des Transports pourrait avoir un impact positif, en particulier pour la région du Katanga où l’activité minière est intense. Pour les transporteurs congolais, le défi est grand : ils ne représentent aujourd’hui que 3 % de la flotte en activité dans le pays et font face à un coût de péage routier supérieur à celui de leurs collègues d’Afrique australe.

    En République démocratique du Congo, près de 300 véhicules par jour traversent la frontière avec la Zambie. Plus de 95 % de ce trafic est assuré par des sociétés étrangères. « L’une des raisons est le coût élevé pour les transporteurs routiers congolais, déplore un transporteur congolais, qui a requis l’anonymat. À titre d’exemple, au niveau de la Zambie, nous payons 1 000 dollars de coût supplémentaire que tous les autres transporteurs. Ce qui fait que nous ne sommes plus concurrentiels. »

    Les mines ont leur société de transport à l’étranger

    En effet, depuis 2021, la Zambie applique la réciprocité, car du côté congolais, les frais de péage routier sur le tronçon Kasumbalesa – Kolwezi sont de 900 dollars alors que dans les pays de la SADC, ils sont fixés à 10 dollars pour 100 km. « Sur le corridor sud qui part de Kolwezi jusqu’en Zambie, les transporteurs congolais ne représentent que 3 % parce que les entreprises minières installées au Congo ont leurs propres sociétés de transport en Zambie, en Namibie, en Afrique du Sud et en Tanzanie », souligne de son côté Philippe Seneve, le président du comité des transporteurs congolais au sein du patronat à Kolwezi.

    En vue de stimuler le secteur, les autorités ont récemment signé un arrêté accordant un droit préférentiel aux transporteurs locaux. « Cet arrêté accordant aux transporteurs locaux un droit de préférence à hauteur de 50 % des marchandises va sans nul doute accroître le nombre des transporteurs et travailleurs locaux et impacter positivement l’économie tant nationale que provinciale », espère Jean-Marie Abolia, secrétaire général au ministère des Transports de la République démocratique du Congo.

    Créer 4 000 emplois

    Pour le patronat congolais, grâce à cette mesure, 4 000 emplois seront créés dans la région du Katanga, et un revenu mensuel évalué à 23 millions de dollars généré par ce secteur restera au pays. Mais les défis sont énormes vu le nombre réduit des transporteurs locaux. « Nous devons les accompagner afin d’atteindre une flotte d’au moins 3 500 camions avec un chargement journalier de 110 camions qui représentent effectivement les 50 % », estime Ritha Ilunga, la responsable du comité des transporteurs au sein du patronat à Lubumbashi, qui veut rester optimiste. Entre-temps, les transporteurs locaux attendent du gouvernement congolais une diminution du coût du péage routier ou tout simplement l’exonération de ces frais.

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  • Il manque 13 milliards de dollars pour répondre aux besoins de financements concernant la nutrition, selon les organisateurs du sommet Nutrition for Growth qui s'est tenu à Paris les 27 et 28 mars. Dans le monde, cinq millions d'enfants sont morts en 2021 avant d'avoir atteint l'âge de 5 ans, selon des estimations publiées en 2023. À l'extrême inverse, les maladies liées à l'obésité tueraient près de trois millions de personnes chaque année dans le monde. Dans le contexte de multiplication des conflits, de perturbation des chaînes de production et de distribution, produire plus localement est devenu une priorité pour beaucoup d'États. Des questions largement débattues en fin de semaine dernière lors du sommet Nutrition for Growth.

    Face aux problèmes de sécurité alimentaire, les autorités éthiopiennes ont engagé de grands chantiers pour faire du « made in Éthiopie » et, notamment, transformer localement. « Cette initiative vise à substituer les importations par de la production locale. Mais, comme vous le savez, de nombreux acteurs rencontrent des difficultés financières et ne bénéficient pas du soutien d'autres partenaires privés. C'est là le principal défi », explique Shibru Kelbessa, assistant technique au ministère de l'Industrie éthiopien.

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    Dans certains pays, de grandes entreprises de l'agro-industrie sont présentes. « Elles façonnent nos systèmes alimentaires », met en exergue un ministre ivoirien lors du sommet sur la nutrition à Paris. Avec, dans certains cas, des produits très transformés, très sucrés ou très gras… Pour Augustin Grandgeorge, du Forum de Paris sur la Paix, les entreprises peuvent avoir intérêt à évoluer et y être incitées.

    « Si elles évoluent dans un environnement de marché qui le permet et récompense les bonnes pratiques et punit aussi les mauvaises, elles ont un intérêt économique, a priori, d'être mieux disant sur le marché, souligne-t-il. Elles ont aussi un intérêt du point de vue de leur responsabilité sociale, et cela sous deux aspects : l'image de l'entreprise, mais aussi des raisons financières, parce que les investisseurs s'intéressent de plus en plus à ces questions. »

    Investir de manière stratégique

    Dans le cadre du sommet Nutrition for Growth, « on a discuté de l'intégration des critères nutritionnels pour les investisseurs », explique encore Augustin Grandgeorge. L'idée était de voir « comment est-ce qu'on fait pour que les investisseurs regardent la qualité nutritionnelle des portefeuilles des entreprises dans lesquelles ils investissent pour que ce soit un petit peu un gouvernail pour les investisseurs ».

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    Les États ont aussi un rôle à jouer, mais ils peinent encore à prioriser le secteur de l'agro-alimentaire. L'organisation Nutrition International mise sur le coût de l'inaction et a développé un outil pour le quantifier. « On voulait vraiment être capable d'aider des gouvernements à voir le coût de ne pas investir. L'outil est gratuit sur notre site. On offre également une expertise aux gouvernements pour les accompagner dans ces recherches et les aider à déterminer où leurs investissements, s'ils sont limités, auraient le plus grand impact », détaille Margaux Stastny, vice-présidente des relations extérieures de l'ONG.

    Lever des fonds privés et des fonds propres est de plus en plus nécessaires dans le contexte des aides budgétaires. Le Programme alimentaire mondial a annoncé une baisse de 40% de ses financements pour 2025.

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  • En Tunisie, lors de la fête de l’Aïd, la tradition veut que les parents offrent de nouveaux vêtements aux enfants pour célébrer cette fête religieuse et familiale. Depuis le début de l'année, le prix du textile sur le marché local a augmenté de 9,7% et malgré une prolongation des soldes d’hiver en vue de l’Aïd, beaucoup de Tunisiens ont boudé les grands magasins. La débrouille et la seconde main l'emportent souvent.

    Dans le centre de Tunis, quelques jours avant l’Aïd, Khadija Maleej mère d’une jeune fille de 10 ans, arpente le marché des fripes pour trouver la perle rare, une tenue complète pour son adolescente. « Nous sommes à la fripe de Hay El Hadra à Tunis qui est connue pour être bien achalandée, décrit-elle, vous voyez, il y a pleins d’étals de vêtements. Moi je viens pour acheter les vêtements de l’Aïd pour ma fille, mais aussi des tapis, descentes de lit, du linge de maison et je viens ici car les prix sont beaucoup moins élevés »

    Les fripes, une alternative indispensable

    Avec un salaire moyen, son budget est d’environ 200 dinars pour sa fille, soit 60 euros, mais cette somme couvre à peine le prix d’un vêtement neuf dans les grands magasins. « Surtout avec l’augmentation actuelle, moi ça m’arrange vraiment de venir ici aussi pour trouver des marques, poursuit Khadija Maleej, j’ai fait un tour dans les grandes surfaces, 200 dinars, ça couvre à peine le prix d’un pantalon alors qu’à la fripe, je peux prendre plusieurs pièces pour le même prix ».

    Et la recherche s’annonce fructueuse pour elle et sa fille. Elles ont trouvé un sac, ne reste plus que la tenue. « Moi, je viens aussi pour lui trouver de nouveaux vêtements pour l’école car les fripes saisissent l'occasion de la période de l’Aïd pour sortir aussi un nouvel arrivage en fonction de la saison ».

    « Vous pouvez trouver du luxe ici »

    Pour ceux qui ne veulent pas passer trop de temps à chercher, les dépôts vente pullulent à Tunis ces dernières années.َ À Babytroc, l’un des premiers à ouvrir il y a dix ans, la fondatrice Olfa Barkelli gère une grande affluence avant l’Aïd : « Au début, ça m’a surpris de voir que les gens achetaient de la seconde main parce qu’on est habitués à ce que les gens achètent du neuf, mais en fait d’année en année, je voyais que les gens affluaient pour ça. C’est notre mois de travail, voilà ».

    La clientèle est aussi à la recherche de marques étrangères ou importées, souvent introuvables en boutique. « Vous pouvez trouver du luxe ici. On peut trouver du Dior et du Dolce Gabbana, ici. On peut trouver ça à petits prix ».

    Si cette année, le début du mois a été difficile avec la nouvelle loi sur les chèques qui ne permet plus de faire crédit, la boutique ne désemplit pas à la veille de l'Aïd

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  • En Afrique du Sud, la ville du Cap abrite le plus grand constructeur de bateaux du pays, Robertson and Caine, premier fabricant de catamarans de croisière de l’hémisphère sud. Depuis quelques années, l’entreprise appartient au groupe PPF, une société internationale d’investissement basée en République tchèque. L’ambition est de continuer à exporter dans le monde entier, tout en restant basé au Cap — qui offre de nombreux avantages.

    De notre envoyé spécial de retour du Cap,

    C’est une succession de gigantesques hangars. Les outils résonnent et l’air sent la peinture. « Une fois que la forme du bateau est dessinée, on la façonne ici », explique Stuart Forrest, ingénieur en chef. Face à nous, un moule immense, si grand qu’il faut monter plusieurs marches pour voir l’intérieur. « Ensuite, il faut retirer le moule et sortir cette grande pièce principale pour passer aux étapes suivantes. »

    Une ville dans la ville

    Après 34 ans d’activité, Robertson and Cain fêtera bientôt la sortie de son 3000ᵉ bateau. Il est là, quelque part, au milieu de la quinzaine de catamarans alignés les uns derrière les autres. Nous sommes dans le hangar d’assemblage du produit phare de Robertson and Caine : le Leopard 53 PC. « La ligne de production évolue, on ajuste les procédures de construction pour trouver l’enchaînement le plus efficace. Avec un séquençage. » « Ici, on intègre le moteur, complète Nassief qui supervise l’étape 3. On installe les sièges, la moquette et on s’occupe du plafond aussi. »

    L’entreprise est attachée au fait main, avec un travail collectif qui rassemble plus de 2 000 personnes. Ici, c'est comme une ville dans la ville, avec de grandes allées et du monde partout. Il faut trois mois pour construire ces gigantesques catamarans à moteur, d’une valeur de plus d’un million d’euros. « Là, nous sommes presque au bout de la chaîne, reprend Stuart Forrest, qui nous fait visiter une des cabines. Ici, vous avez la chambre. Ce bateau va quitter l’usine la semaine prochaine. Ensuite, on fera tous les tests de vérification au port. Et il sera prêt à être affrété vers un autre pays. »

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    Continuer d’exporter malgré le protectionnisme américain

    La production est exportée à 99 %, principalement vers les États-Unis et vers l’Europe. Au Cap, il y a une excellente articulation de l’industrie maritime, avec de nombreux fournisseurs, pour les moteurs par exemple, se félicite Theo Loock, qui a pris les rênes de l’entreprise en 2021. « C’est un port stratégique pour importer les produits dont nous manquons et exporter ceux que nous fabriquons. Nous avons aussi la chance d’avoir une municipalité qui nous soutient en favorisant de bonnes infrastructures, ajoute-t-il. Et puis, parce que nous sommes au bord de la mer, la population se passionne pour les bateaux et veut se former dans ce domaine. Ce sont tous ces éléments qui nous permettent de fabriquer nos bateaux au Cap. »

    Depuis le retour de Donald Trump et de sa politique protectionniste aux États-Unis, Robertson and Caine agit activement pour encourager les accords commerciaux entre les deux pays et faire en sorte que les exportations ne faiblissent pas.

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  • C’est dans la capitale du manganèse, à Moanda, dans l’est du Gabon, que l’on forme depuis la rentrée 2016 les mécaniciens et les ingénieurs du secteur minier. L’École des mines et de la métallurgie, créée via un partenariat entre l’État, des personnalités locales et le géant français Eramet, n’entend pas se contenter d’être le centre de formation de la Comilog, la filiale d’Eramet qui exploite le manganèse de Moanda. L’E3MG veut s’imposer comme la référence en Afrique centrale.

    De notre envoyé spécial de retour de Moanda,

    Le campus est vaste et vert, les chambres et l’amphithéâtre quasi neufs. « Il faut former des cadres issus de nos écoles, prompts à accompagner l’exploitation de matières premières, souligne Sylvain Patrick Makoumachana, le directeur des études de l’E3MG. À mon époque, on faisait deux ans à l’USTM, l’Université des sciences et techniques de Masuku. Et ensuite, il fallait aller faire la licence, la maîtrise et tout le reste, notamment en France. Beaucoup sont allés aussi au Canada. On n’avait pas vraiment d’instrument pour ça. »

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    Des langues à la métallurgie

    Les cours sont assurés par quatre enseignants à temps plein et par des vacataires qui interviennent à distance. On y travaille aussi bien les langues que la métallurgie, pour des étudiants, de futurs ingénieurs et mécaniciens qualifiés, mais aussi pour des cadres déjà actifs. « Concrètement, au niveau de la mine-métallurgie, on en apprend beaucoup plus sur la minéralogie, l’étude géologique, explique Glenn, qui s’est réorienté vers le manganèse lors de son passage à l’E3MG, après être passé par le secteur aurifère. « Donc, avec les différents plateaux que nous avons, on a travaillé beaucoup plus le cas du manganèse et de l’or. On a parlé un peu d’autres matières, mais moi, particulièrement, je me suis appesanti sur la partie minéralogique, dont le process. Et on a aussi fait un peu de métallurgie. »

    Les partenariats s’étendent

    Vice-major de la promotion, Glenn a été embauché, comme le major de la promotion et comme la moitié de la trentaine de diplômés annuels, par la Comilog, le géant local qui parraine l’école et en est l’actionnaire principal. Mais l’École des mines n’est pas que la pépinière de l’entreprise. « Elle a un lien singulier, à 40-50 %, à Comilog, reconnaît Sylvain Patrick Makoumachana. Mais nous avons aussi Nouvelle Gabon Mining, la Société équatoriale des mines… Nous avons plein de partenaires comme ça. Bientôt, on va avoir les sucreries, les brasseries parce que, à cause de nos métiers, de leur formation, nos étudiants se font accueillir partout ailleurs. »

    Chaque année, quelques étudiants étrangers viennent à Moanda se former. Ils travaillent au renforcement du réseau international de l’école. Des partenariats sont tissés avec des écoles en France, en Tunisie, au Maroc, en Côte d’Ivoire, ou au Niger. L’E3MG ambitionne de devenir la référence du secteur en Afrique centrale.

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  • Dans le Haut-Ogooué, dans l'est du Gabon, les principaux gisements de manganèse, à Moanda, appartiennent à la Comilog, la filiale d'Eramet, numéro un mondial du secteur. L'entreprise tente de s'adapter en développant des politiques sociales et environnementales, en particulier pour la sauvegarde des ressources en eau.

    L'équipe de l'après-midi entame son cycle et les pelleteuses se mettent en action. Nous surplombons la mine à ciel ouvert d'Ogouma. Ici, le manganèse est facile d'accès, à environ six mètres sous la surface du sol. « On va passer d'abord la couche de pisolithe, puis on va tomber sur le toit du minerai, explique Brice Mabika, chef de département exploitation minière de la Comilog. Après le toit du minerai, on va aller sur la roche mère ou sur les argiles. Ce qui nous intéresse ici, c'est la couche du milieu. Pour arriver à la couche du milieu, il faut d'abord décaisser toute la partie supérieure. Dès qu'on a fini de faire ça, on va passer à la phase d'exploitation. Récupérer la tranche minéralisée, la charger dans des camions et ramener ça vers la laverie. »

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    L'eau recyclée à 92 %

    À la laverie, le minerai est nettoyé et séparé en trois qualités. « Lorsque le minerai arrive de la carrière, où il a été extrait, il passe par la partie concassage, donc on a un extracteur, un tablier métallique, qui met sur le convoyeur, détaille Kelly Ngandjoka, responsable de ce processus. Puis c’est la première étape de débourbage et après, on fait la classification. »

    Le manganèse propre part pour la gare, via des tapis roulants longs de plus de trois kilomètres. L'eau boueuse du lavage se dirige vers un décanteur, mis en service en juin 2023 et qui permet un recyclage efficace. « On boucle l'année 2024 avec une cible initialement prévue à 85 %, et on finit à 92 % de taux de recyclage ici, donc on a fait nettement mieux, se félicite Kelly Ngandjoka. Là, on vise 95 % de recyclage afin de garantir toujours plus l'autonomie de l'usine en eau et prendre de moins en moins d'eau en milieu naturel. »

    Mieux mesurer l'impact

    Le reste remplit des bassins d'évaporation sur lesquels on plantera des arbres. « À la suite d'un certain nombre de combats menés au milieu des années 2000, Comilog a fait beaucoup d'efforts, reconnaît le député de la transition, Jean-Valentin Leyama, originaire de Moanda, et souvent en conflit avec la Comilog. Les déchets du minerai ne sont plus rejetés dans la nature, des protocoles ont été mis en place. Mais compte tenu de la nature du minerai, il y a toujours une pollution résiduelle sur laquelle il faudra certainement mettre en place un observatoire qui examine l'impact sur les populations de façon périodique », souligne le député, qui pointe aussi les limites de la politique sociale de l'entreprise : un nouveau mouvement de grève a eu lieu en mars.

    Autre difficulté pour la Comilog : l'acier et le manganèse dépendent de l'état de la croissance mondiale. Fin 2024, la production a été suspendue pendant trois semaines en raison d'un ralentissement du marché chinois.

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  • Au Gabon, l'entreprise Setrag gère depuis deux décennies le train reliant Owendo, à côté de Libreville, à Franceville, dans l'est du pays. Après des années de sous-investissements dans l'infrastructure, le concessionnaire tente de moderniser la ligne, vitale pour le transport des passagers, mais aussi pour le fret (bois et minerais, en particulier le manganèse de la Comilog, propriétaire de Setrag). Un des axes d'amélioration : la formation et la digitalisation du suivi du trafic.

    De notre envoyé spécial de retour de Libreville,

    Devant leurs ordinateurs, six régulateurs du centre de gestion de la circulation à Owendo suivent en temps réel les mouvements des trains sur les tronçons du transgabonais, en contact avec les conducteurs, aiguilleurs et chefs de gare. « J'ai pris les coordonnées des travaux, explique l’un des régulateurs, Patrick Biogo. Il y a des travaux qui se sont engagés et qui ont dégagé dans sa gare. Donc, là, il me donnait les heures d'engagement et de dégagement des différents mouvements. Je le mets sur le fichier. »

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    Régulation en temps réel

    Le centre de gestion de la circulation fonctionne en continu. Six écrans géants permettent de visualiser l'ensemble des 648 km de la ligne. « Vous avez les 24 gares représentées, montre Darrell Erviti, le chef de division qui supervise le trafic. Le train jaune, ça signifie que le train est supervisé. Il s’agit de contrôler la vitesse du train dans le canton et également la communication entre le régulateur et le conducteur. En temps réel, quand le train évolue, le régulateur a la possibilité de communiquer avec le conducteur, de prendre également la main sur le train. S’il estime qu'il y a une violation d'une règle définie, il peut arrêter le train. »

    Renouvellement des traverses qui pourrissent

    La gestion de la circulation est un axe de modernisation pour la Setrag, alors que la compagnie doit batailler contre de multiples retards liés aux déraillements récurrents des trains de manganèse, trop lourds pour certains tronçons vieillissants. « On se retrouve avec des traverses qui pourrissent, compte tenu de l'effet climatique et de l'environnement un peu agressif du Gabon, explique Abdoulaye Bah, le directeur des investissements de l'entreprise. Ce pourrissement des traverses cumulé au vieillissement du rail, avec un tonnage qui est plutôt entre 27 et 28 tonnes à l'essieu au lieu des 25 tonnes dimensionnantes, occasionnent les incidents constatés depuis 2019. »

    Le « programme de remise à niveau » lancé en 2016 n'a pas suffi à régler les problèmes de fiabilité de la ligne. En février, l'entreprise a conclu un programme de modernisation et de sécurisation de la voie ferrée entre 2025 et 2028. L’Agence française de développement a promis 173 millions d’euros et l’Union européenne 30 millions d’euros. Cet argent doit notamment servir à remplacer 270 km de rails et de traverses. L'État espère transporter dans cinq ans 21 millions de tonnes de fret, contre environ 11 millions actuellement.

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  • Dans les deux régions à majorité anglophone du Cameroun, le Nord-Ouest et le Sud-Ouest, la violence est toujours une réalité, huit ans après le début d'une lutte armée entre groupes séparatistes réclamant l'indépendance d'un Cameroun anglophone et forces gouvernementales de Yaoundé. Il n'y a plus de front à proprement parler mais des zones d'insécurité, où les armes circulent et où les civils sont les premières victimes. Les conséquences sont aussi économiques, sur la vie quotidienne des habitants.

    Par Amélie Tulet et Alphonse Tebeck,

    Sur la route de Buea en partant de Douala, une fois passé le fleuve Moungo, Salim, chauffeur, constate à quel point le paysage a changé : « Avant la crise, juste quand on finissait de traverser les champs d'hévéas, on avait de vastes étendues de plantations de bananes plantain, entretenues et exploitées par la CDC (Cameroon Development Corporation). Mais depuis la crise, les séparatistes ont empêché les travailleurs d'aller aux champs et puis, tout est allé en ruine. C'est triste. »

    Embouteillages et pénurie de logements

    Une fois à Buea, aux heures de pointe, sur l'axe principal qui traverse cette ville du sud-ouest du Cameroun, les conducteurs de taxis ont dû s'habituer aux embouteillages. Avec l'afflux de déplacés, en moins de trois ans, la population a doublé. « Nous trouvons difficile de circuler comme nous le faisions il y a six ou sept ans », se lamente l'un d'eux. « On se trouve confronté à des défis comme la surconsommation d'essence dans les embouteillages, renchérit un autre. C'est vraiment le premier problème : le temps perdu… C'est dur. Il y a du travail, mais ça va trop lentement à cause du monde. La population a augmenté, mais il n'y a pas assez de routes. »

    Une croissance rapide qui se fait sentir aussi dans le quotidien de cet agent immobilier : « Les habitants des zones reculées de Kumba et de Bamenda viennent ici dans la zone verte de Buea. Ça pousse les propriétaires à augmenter les prix. La demande est supérieure à l'offre, ça affecte les plus pauvres. Certains, pour s'en sortir, cotisent et se mettent à cinq dans une seule chambre. »

    Commerce perturbé, taxes des groupes armés

    En journée, Buea est une ville commerçante animée. Le soir, de nombreux bars sont ouverts. Malgré cet apparent retour à la normale, les « ghost town mondays » (les lundis villes mortes), décrétés par les groupes armés, continuent d'être respectés par une partie des habitants, ce qui fait chuter l'activité.

    « Je fais des yaourts et je les vends, mais le lundi, les affaires tournent au ralenti, témoigne une commerçante. Comme c'est journée ville morte, les gens restent chez eux. Ils ne viennent pas au marché. Ça fait baisser mes revenus. Ça affecte mon foyer. Parfois, je n'ai plus d'argent pour le lendemain pour envoyer mon fils à l'école. Vous savez, quand c'est lundi ville morte, chacun pense d'abord à sa survie. Alors, tout le monde reste à l'intérieur. »

    En dehors des agglomérations, sur les axes qu'ils contrôlent, les groupes armés continuent de prélever sur les habitants des taxes : taxes sur les personnes, les marchandises, jusqu'aux corps des défunts qu'il faut enterrer au village.

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